Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3410
 
  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : ASPH - Allocation compensatrice tierce personne (ACTP) - Efficacité de l’aide
 

Dossier no 100492

M. X...
Séance du 6 octobre 2011

Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011

    Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 17 mai 2010, la requête présentée par M. Y..., demeurant en Charente-Maritime, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Charente-Maritime en date du 2 mars 2010 rejetant sa demande d’annulation de la décision du 6 octobre 2009 du président du conseil général de la Charente-Maritime décidant d’une récupération contre la succession de M. X... par les moyens que son nom figure bien sur la décision du conseil général du 15 juillet 2009 et la demande en récupération aurait dû à tout le moins lui être adressée en même temps qu’au notaire ; qu’il reste héritier responsable de la succession ; que la demande du conseil général a bien été présentée tardivement ; qu’à aucun moment il ne l’a informé de sa possibilité de récupération ; qu’il est d’accord sur le montant attribué à son frère mais qu’il constate que l’aide a été accordée à partir de novembre 2005 alors qu’il était entré dans la famille d’accueil le 5 janvier 2005 ; qu’en toute hypothèse le calcul ne lui a toujours pas été fourni et le créancier ne justifie pas du montant de sa créance ; que si le changement de tutelle n’a pas été signalé au conseil général c’est parce que la famille pensait que le tribunal d’instance de Marennes transmettrait automatiquement cette information ; qu’à aucun moment il n’a invoqué la qualité de tierce personne puisqu’il ne s’est pas occupé des besoins quotidiens de son frère ; que la réponse « tierce personne » apportée à la question « personne ayant assumé la charge effective et constante » n’est pas appropriée ; qu’à partir de 1998 sa mère lui a transmis la tutelle et il s’est occupé de toutes les questions relationnelles, sociales et administratives de la famille ; qu’après le décès de son père en juillet 2004, sa mère et son frère ont été accueillis en famille d’accueil ; qu’il s’y est occupé de son frère avec le même soin que lorsqu’il habitait avec ses parents en assurant, outre les tâches administratives, sociales et relationnelles, les courses de vêtements, menus objets et gâteries pour améliorer son confort ; qu’ainsi un accompagnement affectif a constamment été ménagé ; que la famille d’accueil était tierce personne et la surveillance légale de son intervention confiée à une structure départementale mais que le confort affectif et psychologique correspondant à la charge effective et constante était assuré par le requérant ; que les visites ont été nombreuses ; que si M. X... est demeuré pendant les vacances dans la famille d’accueil plutôt qu’au domicile de son frère, la maison familiale où il avait vécu avant d’être placé, c’est pour éviter le traumatisme psychologique qui serait né d’un retour sur les lieux de sa vie antérieure ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 24 juin 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de la Charente-Maritime tendant au rejet de la requête par les motifs que l’article 70-58 du règlement départemental d’aide sociale de la Charente-Maritime reprend en ce qui concerne le placement familial les dispositions de l’article L. 344-5 ; que si M. Y... a bien entretenu des relations familiales normales auprès de son frère il n’a cependant pas assumé de façon constante la charge de son frère puisque la famille d’accueil était rémunérée pour remplir ces fonctions et qu’un service de placement et de suivi des personnes handicapées payé par la collectivité intervenait régulièrement pour vérifier les bonnes conditions de cet accueil ; que l’assisté a vécu au domicile de ses parents jusqu’au 5 janvier 2005 où il a été placé en famille d’accueil en même temps que sa mère qui s’est d’ailleurs toujours déclarée tierce personne de son fils et a perçu les allocations d’aide sociale alors que la tutelle avait déjà été confiée à M. Y... depuis le 3 août 1998 ; que les bonnes relations entre les deux frères non contestées relèvent uniquement d’une entente normale entre membres d’une même famille et, ne peuvent être qualifiées de charge effective et constante ; qu’il a pris sa décision en temps utiles après la saisine par le notaire ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 octobre 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que le règlement départemental d’aide sociale de la Charente-Maritime étend aux prestations de placement familial spécialisé la dispense de récupération en raison de la charge effective et constante de la personne handicapée prévue à l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier de la commission centrale d’aide sociale que M. X..., unique frère de M. Y..., a vécu au domicile de leurs parents jusqu’à 2005 ; que, toutefois, M. Y... s’il n’a pas assumé alors la charge effective et constante de la personne handicapée était son tuteur depuis 1996 en succédant à leur mère et avait constamment, compte tenu notamment du vieillissement des parents, assumé un suivi relationnel effectif qui s’il ne constitue pas, comme il vient d’être dit, la charge litigieuse n’en peut pas moins être pris en compte pour corroborer la preuve de celle-ci durant la période de 2005 à 2009, année où est décédé l’assisté, où elle est litigieuse ; que durant cette période, après la mort du père en 2004, la mère alors âgée de 91 ans et son fils handicapé ont été accueillis en placement familial spécialisé solution préférée par la famille au placement en établissement ; que l’une comme l’autre forme de placement ne sont pas par elles-mêmes exclusives de la charge effective et constante au sens des dispositions précitées par un membre de la famille ; que si Mme Z... percevait les prestations sociales de son fils dont elle se serait déclarée « tierce personne » cette situation est par elle-même et à elle seule sans incidence sur la qualification litigieuse ; que même si les relations affectives, intenses et constantes n’ont pas manqué d’exister de 2005 à 2008 - décès de Mme Z... - entre la mère et le fils, elles n’étaient pas exclusives non plus par elles mêmes et à elles seules d’une charge effective et constante en réalité de la mère et de son fils handicapé par le fils et frère de ceux-ci ; que, par ailleurs, les prestations dispensées par l’aidant familial et le contrôle de celles-ci pour l’application de la législation sur le placement familial par un service financé par le département ne constituaient pas, contrairement à ce que semblent admettre la commission départementale d’aide sociale et le président du conseil général en défense la charge effective et constante litigieuse, M. Y... paraissant d’ailleurs fondé à faire valoir que par cette argumentation à tout le moins ambigüe le premier juge et l’administration assimilent à tort assistance de tierce personne et charge effective et constante, même si, par ailleurs, il n’est pas exclu que l’aidant familial ait également entretenu des liens affectifs avec la personne handicapée placée, sans que le dossier ne permette d’ailleurs de s’en assurer, étant observé qu’il avait été envisagé en raison de l’insuffisance de la prise en charge de changer le lieu de placement familial avant le décès de M. X... sans que cette intention n’ait abouti ; que dans l’ensemble de ces circonstances il y a lieu seulement de déterminer si les diligences justifiées de M. Y... sont suffisantes pour caractériser au-delà de l’assistance familiale normale un engagement d’une durée et d’une intensité telles qu’il constitue la charge dont il s’agit ;
    Considérant, à cet égard, qu’il ressort des pièces versées au dossier et notamment de l’attestation du service de contrôle du placement familial en date du 17 décembre 2009 que M. Y... rendait des visites régulières à son frère avec une périodicité mensuelle et pour les fêtes de fin d’année et les anniversaires ; que s’il n’est pas contesté que M. X... ne passait pas ses vacances au domicile de M. Y... qui avait depuis 1998 déménagé de Bordeaux où il travaille et où il résidait antérieurement pour habiter à nouveau la maison familiale en Charente-Maritime, il n’est pas contesté davantage que, comme l’expose avec précision M. Y... dans son mémoire en réplique, cette situation procédât d’un parti délibéré de ne pas faire revenir M. X... dans la maison familiale où il avait habité toute sa vie jusqu’à 2005 pour ne pas perturber son équilibre qui aurait été susceptible de l’être s’il s’était retrouvé dans son lieu de vie antérieur ; que, par ailleurs, M. Y... a, durant la période de 2005 à 2009, continué à assumer la tutelle et à s’occuper de l’ensemble des intérêts matériels de son frère ; que dans ces conditions et nonobstant le partage de 2005 à 2008 dans les conditions particulières de l’espèce des liens affectifs avec M. X... entre la mère et le frère de celui-ci, le requérant peut être regardé comme justifiant avoir assumé durant une durée suffisante compte tenu par ailleurs de l’intervention antérieure auprès de son frère même si elle ne constituait pas alors la charge litigieuse et avec une intensité suffisante pour la caractériser au-delà du strict exercice des devoirs familiaux, la charge effective et constante de la personne handicapée au sens des dispositions du règlement départemental d’aide sociale de la Charente-Maritime reprenant celles de l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles dans la situation médico-socio-familiale spécifique d’un placement familial spécialisé de la personne handicapée et, durant l’essentiel de la période de ce placement, du placement concomitant de la mère de celui-ci chez un accueillant familial ; qu’il y a lieu, par suite, de faire droit à la requête,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Charente-Maritime en date du 2 mars 2010, ensemble la décision du président du conseil général de la Charente-Maritime en date du 6 octobre 2009 sont annulées.
    Art. 2.  -  Il n’y a lieu à récupération contre la succession de M. X... à l’encontre de M. Y...
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 octobre 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer