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  Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Récupération sur succession - Hypothèque
 

Dossier no 100947

Mme X...
Séance du 6 octobre 2011

Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011

    Vu la décision en date du 26 février 2010 par laquelle le Conseil d’Etat, après avoir annulé la décision du 16 avril 2008 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a annulé la décision du 13 octobre 2006 de la commission départementale d’aide sociale de Paris rejetant la demande de M. X... tendant à la décharge de la récupération sur la succession de Mme X..., son épouse, d’une créance de l’aide sociale de 26 075,84 euros, a renvoyé l’affaire devant la commission centrale d’aide sociale, ensemble les pièces du dossier retransmis par le Conseil d’Etat ;
    Vu la décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 13 octobre 2006 ;
    Vu la décision du Bureau d’aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Paris accordant l’aide juridictionnelle à M. X... du 20 octobre 2010 ;
    Vu, enregistré le 10 novembre 2010, le mémoire du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général tendant au rejet de la requête de M. X... par les motifs que le Conseil d’Etat a relevé qu’en s’appuyant sur des dispositions inapplicables au jour du décès de l’intéressée la commission centrale d’aide sociale avait entaché sa décision d’une erreur de droit ; que dès lors il y a lieu de reconnaitre que les dispositions de l’article L. 344-5-1 issues de la loi du 11 février 2005 modifiées par celles du 21 juillet 2009 sont sans application ; de constater que quand bien même elles auraient été en vigueur lors du décès de l’assistée, Mme X... ne remplissait pas la condition d’âge prévue au premier et au second alinéa de l’article L. 344-5-1 ; que l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles en vigueur à la date du décès de Mme X... doivent donc trouver application ; que l’intégralité des frais d’hébergement avancés pour celle-ci par le département de Paris doit être récupérée ;
    Vu, enregistré le 22 décembre 2010, le nouveau mémoire, dit mémoire « complétif » présenté pour M. X..., par Maître Valéry VELASCO, avocat, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision en date du 13 octobre 2006 de la commission départementale d’aide sociale de Paris, juger qu’il n’y a lieu à récupération sur la succession de Mme X..., enjoindre au département de Paris de radier l’hypothèque légale prise sur le bien immobilier sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement, condamner le département de Paris à verser à M. X... 6 000 euros au titre de dommages et intérêts et 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, condamner le département de Paris à verser directement à Maître VELASCO la somme de 2 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
    M. X... soutient que Mme X... avait été reconnue handicapée préalablement à toute aide sociale de prise en charge du département de Paris depuis le mois de mars 1988 où elle a bénéficié de la carte d’invalidité au taux de 80 % valable à compter du 1er mars 1988 ; que cet état d’invalidité a également été reconnu sur le plan médical et par différentes décisions administratives ultérieures dont celle prise par la DRASS d’Ile-de-France le 8 mars 1996 ; que c’est le département de Paris lui-même qui a délivré la carte d’invalidité ; qu’en application de l’article L. 241-4 il n’y a donc lieu à récupération ; que la créance n’est ni liquide compte tenu de ce qui précède, ni certaine, l’état de frais établi par les services comptables n’ayant jamais été fourni et étant à l’heure actuelle impossible de savoir sur quelles prestations porte la créance revendiquée ; que la commission centrale d’aide sociale avait expressément affirmé dans sa décision du 16 avril 2008 que le département de Paris ne justifiait pas de sa créance ; que la créance n’est pas exigible dès lors que la succession n’est toujours pas clôturée s’agissant d’une succession internationale complexe et les héritiers n’étant toujours pas en mesure de produire un état difficilement réalisable en présence d’engagements pris par le bénéficiaire à l’étranger nécessitant des opérations de recherches et d’identification difficiles en vue de clôturer la succession ; qu’ainsi la créance revendiquée ne saurait à ce jour être valablement récupérée sur la succession de Mme X... dont l’actif net n’est pas encore définitivement arrêté ; que le département de Paris a, en tout état de cause, commis d’importantes erreurs de nature à engager sa responsabilité et à ouvrir droit à réparation, s’agissant de la non-production d’états de frais qui entraine la perte d’une chance pour le bénéficiaire d’une prise en charge par sa mutuelle, de l’annonce erronée et prématurée du décès de Mme X..., des investigations fiscale et hypothécaire ainsi que des mesures de recouvrement forcé par la trésorerie ; que la commission d’admission avait refusé de reporter la récupération en tout ou partie au décès du conjoint survivant alors que le requérant est âgé aujourd’hui de 89 ans au motif que la succession n’avait pas été transmise au département alors qu’aucun texte ne fait obligation aux héritiers de transmettre les informations demandées ; qu’à ces divers titres le requérant a subi un préjudice évalué à 3 000 euros en ce qui concerne l’annonce prématurée du décès de Mme X... et à la même somme en ce qui concerne les procédures d’investigations et de recouvrement forcé ; qu’ayant été contraint de recourir aux services d’un avocat pour le défendre à l’âge de 89 ans contre des procédures totalement abusives il sollicite 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 octobre 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, Maître Valéry VELASCO et à titre d’information M. X..., en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les dispositions de l’article L. 344-5-1, 2e alinéa du code de l’action sociale et des familles issues de l’article 18 de la loi du 11 février 2005 ne sont pas applicables, comme l’a jugé le Conseil d’Etat dans sa décision du 26 février 2010, à la situation de Mme X..., décédée antérieurement à leur entrée en vigueur, la législation applicable étant celle en vigueur à la date du fait générateur de la récupération ;
    Considérant que Mme X... a été admise sous l’empire de la législation antérieurement applicable dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées, dont, pour l’application des dispositions de la législation d’aide sociale applicables à la prise en charge des frais d’hébergement et d’entretien dans ces structures, font partie les unités de soins de longue durée comme d’ailleurs les EHPAD gérés dans le cadre de budgets annexes par les établissements hospitaliers ; qu’elle l’a été pour la première fois après 65 ans ; que la circonstance qu’elle fut alors titulaire de la carte d’invalidité et avait pu bénéficier de l’allocation compensatrice pour tierce personne accordée, quant à elle, alors sans condition d’âge est sans incidence sur cette admission à l’aide aux personnes âgées à l’hébergement dans les conditions de droit commun et non à l’aide à l’hébergement aux personnes handicapées ; que les moyens tirés de ce que les dispositions du code de l’action sociale et des familles relatives aux personnes handicapées, notamment celles de l’article 43-1, 1er alinéa de la loi du 30 juin 1975 aujourd’hui codifiées à l’article L. 241-4 du code de l’action sociale et des familles interdisent la récupération ne sont dès lors ni opérants, ni, en tout état de cause d’ailleurs, fondés ;
    Considérant que, par voie de conséquence, le moyen tiré par les motifs sur lesquels il vient d’être statué de ce que la créance du département de Paris ne serait pas « liquide » ne peut qu’être écarté ; que, par ailleurs, et contrairement à ce que soutient encore le requérant, il est suffisamment établi que Mme X... était admise dans des établissements pour personnes âgées de la nature susprécisée, non au titre de la législation relative à la prise en charge des soins, mais au titre de celle relative à la prise en charge par l’aide sociale des frais d’hébergement et d’entretien et qu’ainsi aucune incertitude ne pèse sur « la nature des prestations sujettes à récupération » ; que si, il est vrai, s’agissant du montant des prestations avancées, les éléments fournis par le département de Paris sont succincts, le requérant ne fournit quant à lui aucun élément de nature à en présumer de manière quelque peu plausible l’inexactitude, de telle sorte qu’il y ait lieu de demander au département de les préciser davantage, dans une argumentation où il mêle constamment le doute non fondé sur la nature des prestations accordées et la contestation formulée sur le mode de la simple allégation de leur montant ; qu’en cet état la créance récupérée apparait suffisamment certaine ;
    Considérant qu’il résulte de l’attestation notariale N..., fournie par le requérant que « (le) dossier (de la succession de Mme X...) n’a pu être finalisé et ce compte tenu des différents conflits existants entre les héritiers » (et non comme M. X... l’affirme en raison du fait seul que Mme X... étant décédée à l’étranger la détermination de l’actif net successoral serait particulièrement complexe) ; que, toutefois, le requérant ne fournit aucun élément de nature à permettre de présumer que compte tenu de la valeur du bien immobilier constituant en l’état l’actif de la succession celle-ci puisse à l’issue des opérations de liquidation faire apparaitre un actif net inférieur au montant (26 075,84 euros) des prestations avancées par l’aide sociale qu’entend récupérer le département de Paris ; que, par ailleurs, le bien immobilier dont s’agit est toujours occupé par M. X... actuellement âgé de 89 ans dont les revenus sont modestes et dont le patrimoine, abstraction faite de l’appartement conjugal qu’il a continué à occuper après le décès de son épouse n’apparait pas d’une grande importance en l’état des éléments versés au dossier ; qu’il y a lieu, dans l’ensemble de ces circonstances de reporter la récupération au décès de M. X... ou à la date antérieure à laquelle il viendrait à quitter l’appartement de Paris énième ; qu’il appartiendra alors aux héritiers de Mme X... de justifier auprès de l’administration d’éléments conduisant à la détermination d’un actif net successoral inférieur au montant de l’avance dont la récupération est recherchée et, dans la négative, alors même que compte tenu des dissensions des héritiers ledit actif n’aurait pas encore été déterminé pour la perception des droits d’enregistrement au titre de la législation fiscale, il appartiendra à l’administration de mettre à exécution la décision de récupération par les voies de droit dont elle dispose en l’état ;
    Considérant, enfin, que les conclusions et moyens tirés de ce que le département de Paris a engagé sa responsabilité à raison de divers agissements ayant causé à M. X... divers préjudices échappent à la compétence du juge de l’aide sociale ;
    Considérant qu’en conséquence de ce qui précède les conclusions de M. X... tendant à ce qu’il soit enjoint au département de Paris de lever l’hypothèque prise sur le bien immobilier à Paris énième ne peuvent qu’être écartées ;
    Considérant que M. X... qui succombe dans ses conclusions principales et bénéficie seulement d’une mesure gracieuse de tempérament de la mise en œuvre de la récupération ne peut être regardé comme partie gagnante dans la présente instance et qu’ainsi, alors d’ailleurs qu’il bénéficie de l’aide juridictionnelle, ses conclusions tendant à la condamnation du département de Paris à lui verser 1 500 euros sur le fondement de l’article « L. 761-1 du CJA » (sic) ne peuvent être accueillies, non plus, pour les mêmes motifs, et en toute hypothèse que celles de Maître Valéry VELASCO tendant à l’application de l’article 37-I de la loi du 10 juillet 1991,

Décide

    Art. 1er.  -  Dans la limite de l’actif net successoral qui sera alors déterminé ou dont il appartiendra aux héritiers de fournir les éléments à l’administration, la récupération à l’encontre de Mme X... confirmée par la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 13 octobre 2006 est reportée au décès de M. X... ou à sa libération antérieure de l’appartement qu’il occupe à Paris énième.
    Art. 2.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 13 octobre 2006 est réformée en ce qu’elle a de contraire à l’article 1er.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête de M. X... et les conclusions de Maître Valéry VELASCO tendant à l’application de l’article 37-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 octobre 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer