Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Répétition de l’indu - Fausse déclaration
 

Dossier no 090648

M. X...
Séance du 11 octobre 2011

Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011

    Vu la requête, enregistrée le 25 février 2009 au secrétariat de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Dordogne, présentée par M. X..., qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o D’annuler la décision du 20 novembre 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 17 mars 2008 par laquelle la caisse d’allocations familiales de ce département, agissant par délégation du président du conseil général, d’une part, lui a notifié la fin de ses droits au revenu minimum d’insertion et, d’autre part, a mis à son débit un indu de 20 014,57 euros au titre des montants perçus entre le 1er novembre 2003 et le 31 janvier 2008 ;
    2o D’annuler la décision du 17 mars 2008 ;
    Le requérant soutient que la décision de la commission départementale d’aide sociale n’est pas motivée ; qu’il ne dispose d’aucun revenu d’activité professionnelle ; que, s’il est bien propriétaire des immeubles, ceux-ci ne génèrent aucun revenu ; qu’il est en charge de sa mère malade ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2009 au secrétariat de la direction départemental des affaires sanitaires et sociales de la Dordogne, présenté par le président du conseil général de la Dordogne, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la décision est motivée en fait et en droit ; que le patrimoine détenu par l’intéressé fait obstacle au versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que l’allocataire n’a jamais déclaré ces différents éléments, méconnaissant ainsi les dispositions de l’article R. 262-44 du code de l’action sociale et des familles ; que son comportement est constitutif d’une fraude, et non d’une simple omission déclarative ;
    Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 août 2009 au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, présenté pour M. X... par Maître Marjorie RODRIGUEZ, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ; il soutient que la décision du 17 mars 2008 repose sur des faits matériellement inexacts, le local professionnel et son domicile dont il est propriétaire depuis respectivement 1995 et 2001 ayant été acquis aux prix de 101 000 francs et 200 000 francs, et non pour des montants identiques exprimés en euros ; qu’à l’exception de quelques loyers d’un montant total de 3 050 euros, il n’a tiré aucun revenu du bail commercial conclu sur le premier de ces biens ; qu’un autre immeuble, acquis pour 3 050 euros en 2005, est en état de ruine et ne génère aucun revenu ; que si les comptes bancaires qu’il possède affichent un solde créditeur de 40 455,98 euros au 15 mai 2006, les sommes qui y sont placées étant bloquées à hauteur de 33 000 euros ; que s’il perçoit de sa mère un loyer mensuel de 310 euros, les mensualités de son prêt s’élèvent à 380 euros ; que l’entretien de sa mère, malade, fait obstacle à ce qu’il recherche un emploi ; que le droit d’entrée de 18 293,88 euros perçu lors de la mise en location du local commercial était prévu au contrat ; qu’il a vendu son matériel professionnel, non pour 27 440 euros, mais pour 9 146,95 euros, somme qui n’a au demeurant jamais été réglée ; qu’il n’a jamais tenté de dissimuler frauduleusement ses revenus ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 2 septembre 2009, présenté par le président du conseil général de la Dordogne, qui reprend ses précédentes conclusions et les mêmes moyens ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 11 octobre 2011, M. LESSI, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant d’une part, qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction alors applicable : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2 (...) a droit, dans les conditions prévues à la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-10 du même code : « L’ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation (...) » ; que l’article R. 262-3 de ce code dispose que : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent, sous les réserves et selon les modalités figurant à la présente sous-section, l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article R. 262-1, et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux. » ; qu’aux termes de l’article R. 132-1 du même code, auquel renvoie l’article R. 262-5 : « Pour l’appréciation des ressources des postulants prévue à l’article L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à l’exclusion de ceux constituant l’habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s’il s’agit d’immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s’il s’agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ; que l’article R. 262-44 du même code dispose que : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ;
    Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article L. 262-41 de ce code : « Tout paiement indu d’allocations (...) est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette (...) » ; que, s’il est établi que le bénéficiaire a procédé à des déclarations inexactes ou mensongères, et qu’il n’est en outre pas possible, faute de connaître le montant exact des ressources des personnes composant le foyer, de déterminer s’il pouvait ou non bénéficier de cette allocation pour la période en cause, l’autorité administrative est en droit, sous réserve des délais de prescription, de procéder à la répétition de l’ensemble des sommes qui ont été versées à l’intéressé ;
    Considérant que la décision du 17 mars 2008, de la caisse d’allocations familiales de la Dordogne, agissant par délégation du président du conseil général, doit être regardée comme ayant, d’une part, mis fin, pour l’avenir, au droit de M. X... au bénéfice du droit au revenu minimum d’insertion et, d’autre part, mis à sa charge un indu de 20 014,57 euros au titre des montants d’allocations perçus de novembre 2003 à janvier 2008 ; que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne a rejeté sa demande d’annulation de cette décision ;
        -  Sur la régularité de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne :
    Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., la commission départementale d’aide sociale a suffisamment motivé sa décision ;
        -  Sur le bien-fondé de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne :
    Considérant que la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne a rejeté l’ensemble des conclusions de la demande de M. X... au seul motif que l’intéressé n’aurait pas fait connaître à l’organisme payeur, comme le prévoit pourtant l’article R. 262-44 du code de l’action sociale et des familles, certains éléments de son patrimoine de nature à générer des ressources et, notamment plusieurs biens immobiliers ainsi que des capitaux placés sur des comptes bancaires qu’il détenait ;
    Considérant toutefois qu’il résulte des dispositions citées ci-dessus, que la seule méconnaissance des obligations déclaratives résultant de l’article R. 262-44 du code susvisé ne saurait, à elle seule, justifier légalement qu’il soit mis fin au bénéfice du droit au revenu minimum d’insertion, ni qu’il soit procédé à la répétition des montants d’allocations versés pendant la période en cause ; qu’il suit de là que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale s’est fondée sur ce motif, et que sa décision doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu pour la commission centrale d’aide sociale, saisie dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les droits de M. X... au revenu minimum d’insertion, ainsi que le bien-fondé de l’indu porté à son débit ;
        -  S’agissant des droits de M. X... au revenu minimum d’insertion :
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, que M. X... possède sur ses différents comptes bancaires des capitaux d’un montant dépassant les 30 000 euros, dont il doit être réputé, par application des dispositions de l’article R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles, percevoir un revenu annuel correspondant à 3 % de cette somme, soit au moins 225 euros sur le trimestre de référence, sans que cette évaluation puisse être affectée par la circonstance qu’une partie de ces fonds serait indisponible ; que, de même, le bien qu’il a acquis en 2005 est réputé lui procurer un revenu annuel égal à la moitié de la valeur locative de 442 euros, soit 55,25 euros par trimestre ; qu’il en va au demeurant de même s’agissant du bien d’une valeur locative cadastrale de 3 572 euros, supposé générer un revenu trimestriel de 446 euros ; que, par ailleurs, en l’état des éléments versés au dossier et non contestés, sur ce point, par l’intéressé, celui-ci percevait régulièrement un loyer d’un montant mensuel de 310 euros ; qu’au regard de ces seuls éléments, M. X... ne remplissait alors plus les conditions ouvrant droit au revenu minimum d’insertion ; que, par suite, la caisse d’allocations familiales de la Dordogne, agissant par délégation du président du conseil général de ce département, pouvait, sans porter sur sa situation une appréciation erronée, mettre fin à ses droits pour l’avenir ;
        -  S’agissant du bien-fondé de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à la charge de M. X... :
    Considérant, d’une part, qu’il est constant que M. X... n’a pas porté à la connaissance de l’organisme payeur, au titre de la période compris entre le 1er novembre 2003 et le 31 janvier 2008, les éléments de patrimoine qu’il possédait ;
    Considérant, d’autre part, que si certains éléments, tels que le produit de la vente des véhicules appartenant à l’intéressé, ne doivent pas être regardés comme des revenus mais comme des composantes du patrimoine de l’intéressé, et ont été à tort pris en compte par le président du conseil général, et si d’autres ressources perçues par l’allocataire au cours de cette période sont, soit connues et susceptibles d’être prises en compte au titre des trimestres auxquelles elles se rattachent - telle la perception du droit d’entrée afférent au bail commercial conclu avec M. Z... ou les loyers épisodiquement versés par celui-ci -, soit déterminables fictivement par application des dispositions de l’article R. 132-1 précité - tels les revenus locatifs que les biens immobiliers détenus par l’intéressé sont réputés produire -, il résulte de l’instruction que M. X... n’a pas fourni, malgré des demandes en ce sens, les pièces nécessaires à la reconstitution de son patrimoine, en particulier de l’état de l’ensemble de ses comptes, sur la période concernée ; qu’eu égard en outre au caractère lacunaire des éléments dont elle disposait quant à ses revenus, c’est par une exacte application des dispositions précitées que la caisse d’allocations familiales, agissant par délégation du président du conseil général, a décidé de procéder à la répétition de l’ensemble des sommes versées ;
    Considérant enfin que, M. X... ayant systématiquement souscrit de fausses déclarations sur la période concernée, la caisse d’allocations familiales de la Dordogne, agissant par délégation du président du conseil général, pouvait légalement lever la prescription biennale ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, que M. X... n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne a rejeté sa demande,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne en date du 20 novembre 2008 est annulée.
    Art. 2.  -  La requête de M. X... est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 11 octobre 2011 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LESSI, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer