Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Donation - Contrat d’assurance-vie - Placement
 

Dossiers no 110790

Mme X...
Séance du 27 avril 2012

Décision lue en séance publique le 16 mai 2012

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 20 juillet 2011, la requête présentée par le président du conseil général de la Haute-Garonne tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision en date du 11 avril 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne a annulé sa décision du 2 septembre 2008 relative à la récupération contre le donataire à l’encontre de Mme Y... et M. Z... à raison des prestations de services ménagers avancées par le département de la Haute-Garonne du 3 juillet 1989 au 31 décembre 1991 à Mme X... pour un montant de 4 811,89 euros par les moyens que la décision attaquée viole les dispositions de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles et la jurisprudence relative aux contrats d’assurance-vie qui sont susceptibles d’être considérés comme des donations ; que le contrat a été souscrit postérieurement à la demande d’aide sociale ; qu’en l’espèce l’examen des circonstances relatives à la souscription du contrat démontre l’intention libérale au sens des critères d’appréciation du Conseil d’Etat compte tenu de l’âge avancé de la stipulante, du montant du capital libéré représentant la quasi-totalité des disponibilités de celle-ci à son décès, de la date de souscription du contrat ; qu’ainsi la décision attaquée est entachée d’une erreur de droit et de fait ; que l’article R. 132-12 a été mal interprété, la commission départementale d’aide sociale s’étant basée sur une décision d’espèce rendue le 4 novembre 2005 par la commission centrale d’aide sociale sans lien possible avec l’affaire en cause relevant au contraire des solutions de plusieurs autres décisions rappelant que le seuil de récupération de 46 000 euros n’est pas opposable en ce qui concerne le recours à l’encontre du donataire ; que l’article R. 132-12 n’est donc pas opposable au recours sur donation ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré le 21 octobre 2011, le mémoire de Mme Y... exposant qu’elle ne s’explique pas le recours présenté et que les donataires pensaient qu’il était établi qu’il n’y avait pas eu d’intention libérale concernant l’assurance-vie de leur mère ; qu’elle serait lourdement pénalisée en cas d’admission du recours dans la mesure où elle servait à celle-ci une pension alimentaire et supportait des frais médicaux et de mutuelle ; que si elle ne l’avait pas aidée elle aurait économisé un montant supérieur à celui qu’elle a reçu ; que le contrat d’assurance-vie permettait à sa mère une gestion raisonnable de sa situation financière exempte de dissimulation ; que le contrat a été souscrit sur le seul conseil d’une employée de banque et qu’ils n’envisageaient pas qu’une mesure de recouvrement sur le petit héritage de leur mère serait diligentée ; que si la somme de 24 080,58 euros était restée en compte courant elle serait moins importante et aucune récupération ne pourrait être exercée sur l’actif net successoral inférieur au plafond de 46 000 euros ; qu’elle ressent comme injuste et insultante la façon dont elle est traitée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 avril 2012, Mme ERDMANN, rapporteure, Mme Sandrine BOTTEAU pour le département de la Haute-Garonne, Mme Y..., en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête quant au délai ;
    Considérant que le moyen tiré de ce que les critères retenus en règle générale par la jurisprudence pour apprécier la requalification du contrat d’assurance-vie-décès en donation indirecte auraient été méconnus en l’espèce est inopérant, dès lors que l’intention libérale est souverainement appréciée par le juge du fond en fonction des critères pertinents dans chaque cas et situation d’espèce et qu’ainsi la jurisprudence invoquée ne préjuge pas de la réponse à la question de savoir si, lorsque le montant est, augmenté des autres liquidités de l’assisté incluses dans l’actif successoral, inférieur au seuil en deçà duquel l’héritier en ligne directe ne saurait si toute autre forme de placement avait été employée être soumis à la récupération, de telles circonstances sont de nature à exclure l’intention libérale du stipulant et en conséquence à ne pas permettre la requalification du contrat d’assurance-vie-décès en donation indirecte ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que l’âge avancé de la stipulante et l’importance du montant des primes versées par rapport à celui des autres placements de l’assistée sont, lorsque la situation particulière ci-dessus évoquée n’est pas avérée, de nature à eux seuls à justifier la requalification litigieuse pour l’application du 2o de l’article L. 132-8 ne peut qu’être écarté, abstraction faite du motif surabondant des premiers juges relevant que « l’indu est fondé » ;
    Considérant que, comme l’a d’ailleurs jugé la commission centrale d’aide sociale dans sa décision du 28 juillet 2005 dont la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne a entendu reprendre la solution, si le montant des sommes faisant l’objet du contrat requalifié avait été affecté sur un placement autre qu’un contrat d’assurance-vie-décès aucune récupération contre la succession n’aurait été possible dès lors que l’ensemble de l’actif net successoral serait demeuré inférieur au seuil de 46 000 euros au-delà duquel seulement la récupération contre la succession est possible en application de l’article R. 132-12 pour les prestations à domicile de l’espèce et que par contre, comme l’a relevé le premier juge, l’affectation du montant dont s’agit à un contrat d’assurance-vie-décès avait pour effet de permettre à l’administration de faire usage du 2o de l’article L. 132-8 qui, à la différence du 1o, ne comporte pas de seuil d’appréhension dans la limite du capital promis et perçu par le bénéficiaire de second rang des prestations avancées par l’aide sociale ; qu’en se prévalant de ce que la stipulante avait prévu l’affectation litigieuse plutôt qu’un autre mode de placement, alors que, compte tenu de leur qualité d’héritiers en ligne directe, ils n’auraient pas davantage été soumis si l’ensemble des sommes était apparu à l’actif de la succession à des droits de succession, les requérants apportaient des éléments de nature à infirmer les éléments de preuve avancés par l’administration qui a la charge de la preuve de ce que les conditions de requalification sont réunies et qu’ainsi en jugeant que l’administration n’établissait pas l’intention libérale de la stipulante en se prévalant uniquement, dans les circonstances particulières de l’espèce, de son âge et du montant de la prime versée, les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de l’espèce d’où ils ont tiré sans erreur de droit la conséquence que la preuve qui incombait à l’administration n’était pas apportée ; qu’il suit de là que le président du conseil général de la Haute-Garonne n’est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d’erreurs de droit et de fait et que sa requête doit être, en conséquence, rejetée,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du président du conseil général de la Haute-Garonne est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 avril 2012 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 16 mai 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer