Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Succession - Procédure
 

Dossier no 120269

M. X...
Séance du 22 août 2012

Décision lue en séance publique le 9 octobre 2012

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 18 janvier 2012, la requête présentée par Mme Y... demeurant dans l’Yonne tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Yonne en date du 24 novembre 2011 rejetant sa demande dirigée contre la décision d’une « commission d’admission à l’aide sociale » en date du 18 janvier 2011 décidant de récupérer, à hauteur de sa part dans la succession de M. X..., la somme de 5 100,06 euros à raison des prestations avancées à M. X... par l’aide sociale pour la prise en charge de ses frais d’accueil au foyer d’accueil « F... » du 22 février au 31 décembre 2001 par les moyens qu’elle n’a pas été avisée de la date de l’audience de la commission départementale et encore moins de la possibilité d’y être entendue ; que l’article L. 134-9 du code de l’action sociale et des familles a été méconnu ; que c’est à tort que la décision de récupération a été transmise à la mairie alors qu’elle aurait dû lui être notifiée personnellement ; que contrairement à ce que prétend la commission départementale elle n’a pas pu valablement exercer un « appel (...) ! » auprès d’elle, ce que démontrent la réception de l’avis de somme à payer émis et rendu exécutoire le 20 mai 2011 par le payeur départemental comme les correspondances ultérieures du service ; qu’il appartient au service de produire sous le contrôle des juridictions d’aide sociale tous éléments probants de nature à établir la réalité et le montant de la créance dont il entend poursuivre la récupération et que l’état informatique produit ne saurait être retenu comme la preuve dont il s’agit d’autant que la circulaire du 16 mai 1969 mentionne que les archives comptables doivent être conservées pendant 3 ans ; que l’administration comme le premier juge ont totalement occulté sa situation de précarité, ses ressources mensuelles étant de 407,92 euros et un certificat de non exigibilité des droits fiscaux ayant été délivré ; que subsidiairement les frais d’obsèques n’ont pas été déduits de l’actif net successoral ; que la composition de la commission n’est pas indiquée dans la notification de la décision signée de la seule présidente ; qu’elle ne peut s’assurer du respect des principes posés par l’article 6-1 CEDH et qu’elle ignore si le quorum requis était ou non atteint ; que le recours présenté à la commission départementale ne doit sa validité qu’à la possibilité qui lui a été offerte de contester la somme auprès du payeur ; que la mention DCD dans la décision de la commission départementale d’aide sociale contrevient au droit de son frère à la dignité et au respect ; qu’un défunt ne saurait d’ailleurs être destinataire d’une décision de justice ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré le 27 mars 2012, le mémoire en défense du président du conseil général de l’Yonne tendant au rejet de la requête par les motifs que le défaut de transmission de la décision de récupération par la mairie et sa réexpédition par le conseil général n’ont pas porté préjudice à l’intéressée qui a pu valablement exercer son « appel » ; qu’il appartient à la DDCSPP d’informer l’appelant de la date de la commission et de l’inviter à y assister, la responsabilité du département ne peut être engagée ; que la date « d’appel » n’a été mise en cause ni par le département ni par la commission départementale ; que le recours sur la succession de son frère n’a pas de conséquence sur la situation précaire de Mme Y... ; qu’en outre le département n’appréhende pas la totalité de la part ; qu’il lui revient environ 17 500 euros ;
    Vu, enregistré le 14 juin 2012, le mémoire en réplique présenté par Mme Y... persistant dans ses précédentes conclusions et tendant en outre à ce que le mémoire en défense soit déclaré irrecevable et à ce que le département de l’Yonne soit condamné à lui verser 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative par les mêmes moyens et les moyens que l’administration ne conteste pas les éléments pertinents qu’elle a fait valoir dans sa requête mais essentiellement l’absence de responsabilité du département en ce qui concerne la convocation à l’audience et les modalités d’exercice du droit d’ « appel » ; que le mémoire en défense ne répond pas aux exigences des articles R. 411-4 du code de justice administrative et doit être considéré comme irrecevable puisque invalide ; qu’il appartient au service de produire sous le contrôle du juge de l’aide sociale tous éléments probants de nature à établir la réalité et le montant de la créance ; que les copies transmises ne démontrent en rien la valeur probatoire des archives conservées ; qu’aucun document permettant de vérifier l’effectivité et la réalité de la prise en charge de M. X... dont la récupération est en litige, ni sa période, ni encore moins le montant des sommes avancées, n’a été produit par le département en vertu de l’article 1315 du code civil ; que la notification par la mairie méconnait l’article 8 CEDH ; que l’administration a violé le principe du secret de la correspondance en ne lui transmettant pas directement sa décision ; que ce fait est réprimé par l’article 432-9 du code pénal ; qu’en conséquence le recours en récupération doit être considéré comme irrecevable ; que la dernière adresse officielle de M. X... n’est pas celle indiquée dans la décision adressée à la mairie d’autant que le président du conseil général ne pouvait ignorer son adresse mentionnée sur son acte de décès ; que la tardiveté de la connaissance de la décision de récupération entache le recours en récupération que l’administration entend exercer ; que la validité de « l’appel » est fondée sur l’application de l’article L. 1617-5, alinéa 2, du code général des collectivités territoriales ; que le recours fondé sur l’article précité exercé dans les deux mois qui lui étaient impartis doit être considéré comme le seul valable ; que dans un courrier du 5 mai 2011 le président du conseil général de l’Yonne fait état de ce qu’il l’informe pour la première fois de la récupération ; que sa possibilité d’appel est « illégale » et en conséquence le recours en récupération doit être considéré comme irrecevable ; que l’ignorance de sa situation de précarité méconnaît l’article L. 114-1 du code de l’action sociale et des familles ; que le président du conseil général a failli à son impartialité dans l’étude du recours sur succession litigieux et qu’en conséquence son recours doit être considéré comme irrecevable ; que l’argument selon lequel le recours sur succession n’a pas de conséquences sur sa situation précaire ne dispense nullement le président du conseil général de l’obligation de prendre en compte sa précarité ; que l’omission de prise en compte des frais d’obsèques implique que le montant de la créance sollicitée ne peut être fondé sur la somme de 5 100,06 euros et qu’en conséquence la demande de récupération sur succession est irrecevable ; que l’article L. 344-5-2 invoqué par l’administration n’existant pas elle ne peut donc valablement exercer son recours sur le fondement de cet article ;
    Vu, enregistré le 27 juin 2012, le mémoire du président du conseil général de l’Yonne persistant dans ses précédentes conclusions et tendant en outre à ce que Mme Y... soit condamnée au « versement d’une indemnité pour recours abusif (art. L. 700 du nouveau code de procédure civile) » par les mêmes motifs et les motifs que selon une circulaire jointe du ministre de la culture et de la communication la durée de conservation des documents comptables détenus par les ordonnateurs est limitée à 10 ans ; que néanmoins le département est toujours en possession des factures mais se réserve le droit de ne pas les communiquer à des tiers, ces factures étant collectives ; que les décisions sont systématiquement notifiées à la mairie du domicile de l’intéressé dont le personnel est tenu au secret professionnel ; que les notifications de décisions de prise en charge sont envoyées à la mairie du domicile de secours du demandeur qui a charge de l’instruction du dossier ; que la décision destinée au bénéficiaire a bien été envoyée à l’adresse personnelle de M. X... foyer F... ; que la prise en compte des frais d’obsèques au montant réel ne change en rien la somme récupérable ; qu’il s’agit bien de l’article L. 344-5, l’article L. 344-5-2 ayant été mentionné par erreur dans la décision de la commission départementale d’aide sociale ;
    Vu enregistré le 16 juillet 2012, le mémoire en duplique présenté par Mme Y... persistant dans ses précédentes conclusions et portant à 4 500 euros le montant de sa demande au titre des frais irrépétibles par les mêmes moyens et les moyens que le mémoire enregistré le 27 juin 2012 ne pouvait être dénommé « mémoire en réplique » ; qu’il méconnait l’article R. 411-1 du code de justice administrative ; qu’il était possible au service de conserver les documents litigieux au-delà du délai de 10 ans prévu par l’instruction dont il se prévaut, à charge pour lui d’assumer les frais de conservation et de stockage ; qu’il ne saurait donc se dispenser d’apporter la preuve qui lui incombe et encore moins se prévaloir de la confidentialité de factures collectives ; qu’elle justifie des prestations obligatoires exposées au titre des frais d’obsèques, lesquels devaient bien être mentionnés pour fixer l’actif net pris en compte ; que le président du conseil général ne saurait désormais fonder valablement son action sur l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles ; que l’article 700 NCPC n’est pas applicable devant une juridiction administrative ; que seul le juge apprécie l’infliction d’une demande pour recours abusif au titre de l’article R. 741-12 CJA ; qu’en vertu de l’article 2224 du code civil dans sa rédaction applicable le délai de prescription est de 5 ans et est expiré s’agissant des frais exposés du 22 février au 31 décembre 2001 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code civil et l’article 26 de la loi 2561 du 17 juin 2008 ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 22 août 2012 Mme THOMAS, rapporteure, Mme Y..., assistée de M. Y..., Mme N..., pour le département de l’Yonne, en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que l’article R. 411-1 du code de justice administrative n’est pas applicable devant la commission centrale d’aide sociale ; que la demande de Mme Y... tendant à ce que soient « invalidés » le mémoire en défense et le mémoire en duplique du président du conseil général de l’Yonne sur le fondement dudit article ne peut donc qu’être écartée ; que la circonstance que le président du conseil général ait dénommé « mémoire en réplique » son mémoire en duplique (et non « mémoire en défense ») demeure sans incidence sur la validité de ce mémoire ;
    Considérant qu’il ne ressort pas du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale que Mme Y... ait été convoquée à l’audience de la commission départementale d’aide sociale de l’Yonne, nonobstant la présence au dossier d’une copie de la convocation en temps utile dont il ne peut être reconnu comme établi qu’elle ait été reçue par l’intéressée et ce d’autant moins que figure une autre copie postérieure à la décision la convoquant à l’audience antérieure... ; que d’ailleurs d’autres actes de la procédure administrative n’ont pas été reçus par la requérante ; qu’en toute hypothèse la décision attaquée telle qu’elle a été notifiée et figure au dossier de la commission centrale d’aide sociale ne comporte pas la mention que la requérante ait été convoquée à l’audience ; qu’il ne ressort pas davantage du dossier que la requérante ait été avisée de la possibilité qu’elle avait de demander à l’être ; qu’ainsi les dispositions de l’article L. 134-9 du code de l’action sociale et des familles ont été méconnues ;
    Considérant en outre que la décision attaquée ne comporte que le nom du président et non celui du rapporteur qui a siégé en sa compagnie ; qu’elle ne comporte pas ainsi le nom des membres et ne permet pas la vérification de ce que les stipulations conventionnelles relatives au procès équitable notamment celles de la CEDH et les principes notamment d’impartialité qui s’imposent à toute juridiction administrative n’ont pas été méconnus par la composition de l’instance de premier jugement ; qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée et d’évoquer la demande ;
    Considérant que l’absence de réception de la décision attaquée à la suite de la notification à la mairie de Chastellux-sur-Cure du fait de l’inaction des services municipaux de telle sorte qu’elle n’a été communiquée à Mme Y... qu’à la suite de sa demande intervenue consécutivement à l’envoi, cette fois ci à son adresse, du quatrième volet du titre de perception rendu exécutoire par le payeur départemental a pour seul effet de ne pas faire courir, avant la justification de la réception de la décision, le délai de recours contre celle-ci et qu’il n’est pas soutenu par le défendeur que de ce point de vue la demande n’était pas recevable ; que, par contre, le retard de notification serait demeuré, en toute hypothèse, en l’état de la jurisprudence à la date où Mme Y... a formulé ce moyen, pour le surplus, sans influence sur la légalité de la décision attaquée ; qu’ainsi et à supposer qu’elle eut entendu et qu’elle entende le faire Mme Y... n’est pas fondée à se prévaloir, pour évoquer l’irrégularité de la décision administrative de récupération - et non la procédure devant la commission d’aide sociale -, du retard de notification dont il s’agit pour demander l’annulation de la décision administrative critiquée ; qu’ainsi, en toute hypothèse, avant comme après la modification de la jurisprudence dont il va être question, ce moyen était et demeure inopérant ;
    Considérant, par contre, que si le président du conseil général de l’Yonne soutient qu’à la suite de la notification d’une précédente décision de la présente juridiction il a fait rectifier les formulaires mentionnant à tort après le 1er janvier 2007 des décisions de récupération prises par une « commission d’admission d’aide sociale » alors qu’elles le seraient en réalité par le président du conseil général, la mention selon laquelle une telle commission est l’auteur de la décision figure non seulement sur les formulaires informatisées mais sur l’ensemble des lettres adressées personnellement à Mme Y... et rédigées de manière spécifiquement adaptée à cet échange ; qu’en cet état il ne peut être tenu comme ressortant du dossier que la décision ait bien été prise par le président du conseil général et non par une « commission d’aide sociale » ;
    Considérant qu’en l’état de la jurisprudence actuelle de la commission centrale d’aide sociale conforme d’ailleurs à la jurisprudence dominante du Conseil d’Etat antérieure à la décision ci-après évoquée du 27 juillet 2012 Mme L..., la décision attaquée devrait être annulée par le juge de plein contentieux objectif de l’aide sociale, dès lors qu’elle n’a pas été prise dans l’exercice d’une compétence liée et qu’il appartenait à ce juge, après avoir annulé la décision à raison de son irrégularité procédurale, de statuer sur les droits de l’assisté consécutivement à cette annulation, et ce quelles que fussent les décisions en cause (admission, révision, répétition, récupération) ; que la commission centrale d’aide sociale considère ne pas excéder la limite de son office en relevant que cette jurisprudence correspondait selon elle à la réalité juridique du plein contentieux de la légalité objective de l’aide sociale (sous réserve de la remise ou de la modération) et aussi et surtout à sa réalité pratique, compte tenu de la fonction « pédagogique » du juge de l’aide sociale en tout cas dans les cas nombreux où il n’existe aucune jurisprudence du juge de cassation dans un domaine où l’exercice des compétences relève de 95 départements qui, compte tenu des modalités de régulation de ces compétences par les services de l’Etat, n’ont, ainsi que le confirment d’ailleurs leurs constantes demandes d’informations à la commission centrale d’aide sociale, d’autres moyens d’être fixés en cas de doute sur les modalités d’édiction de leurs décisions qu’en se référant aux décisions de la commission centrale d’aide sociale (et bien entendu et prioritairement lorsqu’elles existent du Conseil d’Etat) ; que toutefois, dans la décision précitée du 27 juillet 2012, Mme L..., celui-ci a modifié sont acception de l’office du juge du RSA/RMI par une décision transposable sous réserve des spécificités respectives de chacune des matières à l’aide sociale générale dans le cadre de laquelle statue la commission dans la présente instance ; qu’il résulte dorénavant de cette jurisprudence qu’en matière de RSA/RMI il y a lieu de distinguer les décisions de répétition et les autres ; que dans le cas de la répétition (dénommée de manière prêtant à confusion récupération par la loi relative au RSA/RMI mais la « récupération » dont il s’agit est une « répétition » et la « récupération » au sens de l’article L. 132-8 CASF applicable en aide sociale générale n’existe pas) il appartient dorénavant au juge de se borner à annuler la décision attaquée et qu’en conséquence si elle s’y croit encore fondée notamment quant à l’écoulement du délai de prescription (qui est dorénavant de 5 ans et compte tenu des dates variables auxquelles, d’une part l’administration aura entamé son action initiale de récupération sera ou non écoulé, d’autre part le juge aura statué à l’annulation de la décision intervenue sur cette procédure) pourra reprendre sa décision sur le fond sous le contrôle, le cas échéant, du juge imposant ainsi une seconde instance contentieuse là où en réalité les droits auraient pu être fixés dès la première instance ; que, par contre, pour toutes les autres décisions entrant dans les catégories de la nature de celles précitées, il appartient dorénavant au juge de se prononcer exclusivement sur le droit du requérant au RSA/RMI sans le faire sur les « vices propres » de la décision administrative attaquée c’est-à-dire sur sa légalité externe et qu’ainsi les moyens tirés de l’incompétence ou du vice de procédure affectant cette décision sont inopérants et n’ont pas à être examinés par le juge alors même que l’illégalité quant à la compétence ou à la procédure n’aurait pas été insusceptible, comme il en va particulièrement selon la présente juridiction dans la présente instance, d’emporter des conséquences sur le sens de la décision prise et/ou sur la garantie des droits des assistés ou des personnes recherchées par l’administration ;
    Considérant que demeure alors posée et non résolue par la décision Mme L... la question de savoir si en matière de récupération sur le fondement de l’article L. 132-8 dans le cas de prestations d’aide sociale générale l’office du juge doit être celui qu’il exerce en cas de répétition ou en cas d’admission de l’assisté au bénéfice de l’aide ou de révision ou de suspension de celle-ci ; qu’à cet égard la présente formation de jugement, étant rappelé qu’il n’existe pas de « récupération » de la nature de celle en cause dans la présente instance des prestations de RSA/RMI, considère qu’il n’y a pas de raison d’étendre la solution retenue pour les décisions de répétition d’indu aux décisions de récupération alors qu’il n’existe ni en droit, ni en opportunité de motifs déterminant, de le faire ; qu’en usant du droit de récupération, l’administration prend certes vis-à-vis de tiers par rapport à l’assisté une position de la nature de celles qualifiées d’ « agressives » (en ce sens que vis-à-vis de ces tiers c’est l’administration qui prend l’initiative de la récupération) par la rapporteur public dans ses conclusions sous la décision Mme L... ce qui par analogie à la matière fiscale où le juge se borne à annuler l’imposition notamment supplémentaire litigieuse conduirait à laisser à l’administration, si elle est encore dans le délai de prescription, le soin de reprendre sa décision, mais que, par ailleurs, en décidant la récupération l’administration, qui y est d’ailleurs tenue sous réserve de l’usage de ses pouvoirs gracieux de remise ou de modération, se borne à mettre en œuvre non à l’encontre de l’assisté, sous réserve du retour à meilleure fortune, mais de personnes bénéficiant d’une donation, de la succession ou d’un legs de celui-ci, une compétence qui lui appartient légalement et qui est inhérente à la nature même d’avance des prestations d’aide sociale apparue lors de la survenance du fait générateur de la récupération, en l’espèce la connaissance du décès de l’assisté, rendant exigible l’avance dès lors constituée ; que dans cette occurrence il n’existe, selon la présente juridiction, aucune raison ni juridique, ni d’opportunité pour que le juge de plein contentieux de l’aide sociale n’exerce pas comme en matière de refus ou de suppression de l’aide dans le chef de l’assisté les pouvoirs du juge de plein contentieux qui lui incombent en décidant immédiatement sur les droits de l’assisté ou en renvoyant celui-ci devant l’administration pour liquidation après avoir fixé les bases de ceux-ci s’il ne peut les fixer lui-même avec précision, sous réserve des éléments de droit et de fait que le dossier lui permet raisonnablement de prendre en compte voire (ce point demeure à préciser par la jurisprudence) des conclusions et des moyens des parties qui devraient raisonnablement même pour un juge de plein contentieux borner son office en matière de contentieux de l’aide sociale ; qu’il suit de ce qui précède qu’il appartient à la présente formation de jugement statuant dans le cadre de l’évocation dans la présente instance de statuer sur les moyens de Mme Y... et de l’administration en première instance et en appel relatifs à la légalité interne et au bien-fondé de la récupération, alors d’ailleurs qu’en toute hypothèse il ne ressort du dossier aucun moyen de nature à mettre en cause, sur le fond, la récupération autres que ceux évoqués par les parties ; qu’il suit de tout de ce qui précède que la présente juridiction considère que pour l’application de la décision Mme L... il lui appartient dans le cadre de la présente instance de statuer sur les droits de l’administration et de Mme Y... en ce qui concerne la récupération litigieuse ;
    Considérant qu’il appartient à l’administration d’apporter la preuve de la dispense des prestations d’aide sociale dont l’avance est récupérée, mais que dans le cadre de l’administration de cette preuve le juge tient compte des éléments apportés par celui qui en a la charge et par son adversaire pour apprécier si la preuve dont la charge incombe au premier est bien apportée ; qu’en l’espèce l’administration produit les états informatiques correspondant au versement à l’établissement des dépenses d’aide sociale afférentes à la période d’admission de M. X... au foyer F... et figurent au dossier d’aide sociale la demande d’aide sociale formulée par le tuteur, la décision de la COTOREP portant - rétroactivement - sur la période au titre de laquelle la créance est litigieuse, ainsi que les décisions d’admission portant - également pour partie de matière rétroactive - sur la même période ; qu’enfin figure également au dossier une lettre de l’organisme gestionnaire du foyer faisant état de la fin de la prise en charge pour transfert dans une structure appropriée à l’évolution de l’état de santé de M. X... en février 2002 concomitamment à la fin de la période de versement des sommes avancées par l’aide sociale à l’établissement ; que de leur côté Mme Y..., sœur de l’assisté - et d’ailleurs sa mère qui a également bénéficié de la succession mais est exonérée en vertu de l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles de récupération à hauteur de sa part dans ladite succession - se bornent à la constante réitération de ce que les états produits ne sauraient constituer la preuve qui incombe à l’administration et que celle-ci devait conserver d’autres documents comptables lorsqu’elle a pris sa décision de récupération ; que la requérante, non plus d’ailleurs que sa mère, n’ont produit et ne produisent aucun élément précis, alors qu’en principe Mme Y..., comme sa mère, ne devraient pas ignorer la situation de leur frère et fils, tendant à présumer d’une autre résidence que celle au foyer pour la période dite ; que dans ces conditions l’administration apporte la preuve qui lui incombe de l’existence et du quantum de la créance qu’elle entend récupérer ;
    Considérant que les modalités de notification d’une décision administrative sont sans incidence sur les droits de l’assisté et qu’il appartient seulement à Mme Y..., si elle s’y croit fondée, en cas de méconnaissance du secret professionnel, d’intenter telles actions que de droit devant les juridictions compétentes ;
    Considérant que quelle que puisse être l’opportunité de l’usage de la mention « DCD » pour mentionner que le bénéficiaire de l’aide sociale est décédé dans les décisions administratives et juridictionnelles intervenues dans le cours de la procédure de récupération, un tel usage n’est pas de nature par lui-même à méconnaitre le principe de dignité dont la requérante allègue la violation de son fait ;
    Considérant qu’il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale d’inviter le payeur départemental d’Auxerre, auquel il reviendra de tirer les conséquences de la présente décision, à « annuler l’avis de somme à payer titre no 7004 émis le 20 mai 2011 » ;
    Considérant que l’omission à déduire du passif pour déterminer l’actif net successoral le montant des frais d’obsèques demeure en l’espèce sans incidence sur le bien-fondé de la décision attaquée dès lors que la somme récupérée demeure inférieure au montant dudit actif net qui aurait résulté de la déduction dont il s’agit ; que contrairement à ce qui est soutenu l’absence de déduction ne saurait par elle-même rendre irrecevable la demande de récupération ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 2224 du code civil dans sa rédaction applicable postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre le fait lui permettant de l’exercer » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’en cas de recours contre la succession de l’assisté le point de départ de la prescription qu’elles instituent est la date à laquelle la collectivité d’aide sociale a (comme en l’espèce) connu ou aurait dû connaitre le décès de celui-ci ;
    Considérant que, comme le fait valoir Mme Y..., ces dispositions sont bien applicables à la succession de M. X... décédé le 30 juin 2010 ; que toutefois l’administration disposait, s’agissant de la succession d’un assisté décédé le 30 juin 2010 dont elle a eu connaissance par lettre du 2 août 2010, au plus tard le 30 août 2010, d’un délai de 5 ans qui courait de la date à laquelle elle a eu ainsi connaissance du décès pour récupérer l’avance de l’aide sociale portât elle, contrairement à ce que parait soutenir Mme Y... sur la période du 22 février au 31 décembre 2001 dès lors que ladite avance n’a été « consolidée » et n’est devenue exigible qu’à compter du décès de l’assisté et de sa connaissance par l’administration pour récupérer comme elle l’a fait, fut ce par une décision prise par une autorité incompétente le 18 janvier 2011, et qu’il y a lieu pour le juge de plein contentieux de l’aide sociale de se placer lui-même à cette date ; qu’ainsi la récupération est intervenue dans le délai institué par les dispositions mêmes dont se prévaut Mme Y... et celle-ci n’est pas fondée à soutenir comme elle le fait qu’ « en l’absence de disposition fixant un délai pour l’exercice du recours du président du conseil général de l’Yonne la contestation issue du fait que le recours du département pour récupérer sa créance est tardif et doit être écarté puisque sans fondement » ( ?) ;
    Considérant qu’il ressort du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale et n’est pas contesté que Mme Y... a comme seul revenu une pension d’invalidité d’environ 400 euros par mois et que son époux, éligible au statut d’auto-entrepreneur, perçoit environ 200 euros par mois selon l’avis d’imposition versé au dossier ; que l’administration ne saurait utilement refuser de tenir compte de la situation financière modeste, voire très précaire, du ménage en se bornant à faire valoir que la récupération demeure sans incidence sur l’état de précarité dont s’agit alors surtout qu’après récupération de 5 100,06 euros correspondant à sa part dans la succession il restera à Mme Y... environ 17 500 euros ; qu’en effet la question n’est pas de savoir, pour le juge de l’aide sociale statuant sur les conclusions en remise ou modération de la récupération de sommes avancées par l’aide sociale, si la décision de récupération aggrave la situation de précarité de la personne recherchée mais si cette situation justifie - en amont et non en aval... - que soit accordée remise ou modération de la créance compte tenu de son montant, des ressources de l’intéressé et de ses charges, de ses relations avec l’assisté et de sa bonne foi ; qu’en l’espèce il sera fait une équitable appréciation de la situation en ramenant de 5 100,06 euros à 1 500 euros le montant de la récupération à l’encontre de Mme Y... ; que pour le surplus il appartient à celle-ci en tant que de besoin de solliciter un échéancier de paiements auprès du payeur départemental ;
    Considérant qu’il n’appartient pas au juge de l’aide sociale « de faire rectifier en vertu de la loi du 6 janvier 1978 l’adresse du dernier domicile » de M. X... « qui est officiellement dans l’Yonne ;
    Considérant que l’article 700 du nouveau code de procédure civile sur lequel se fonde l’administration pour conclure à la condamnation de Mme Y... à supporter une amende pour recours abusif qui concerne au demeurant non cette amende mais les frais de l’instance non compris dans les dépens est sans application devant les juridictions administratives d’aide sociale ; que d’ailleurs depuis la suppression de l’amende de fol appel il n’y a plus matière à infliction d’amendes pour recours abusifs par ces juridictions ; qu’ainsi les conclusions du président du conseil général de l’Yonne tendant à la condamnation de Mme Y... à « verser une amende pour recours abusif » n’auraient pu en toute hypothèse qu’être écartées ; qu’au demeurant pour la moralité (ou l’ironie...) contentieuse et à titre surabondant il est fait droit dans la présente décision, fut ce partiellement, à l’appel de Mme Y... ;
    Considérant qu’il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce de faire droit aux conclusions de Mme Y... tendant à ce que le département de l’Yonne soit condamné à lui verser 4 500 euros sur le fondement « de l’article L. 761-1 du code de justice administrative » (en réalité article 75-I de la loi du 10 juillet 1991),

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Yonne en date du 24 novembre 2011 est annulée.
    Art. 2.  -  La récupération à laquelle il est procédé à l’encontre de Mme Y... en sa qualité d’héritière de M. X... pour l’application du 1o de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles est limitée à 1 500 euros.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête susvisée de Mme Y... et le surplus des conclusions du président du conseil général de l’Yonne sont rejetés.
    Art. 4.  -  Les dépens constitués par le droit de timbre de 35 euros acquitté par Mme Y... sont mis à la charge du département de l’Yonne.
    Art. 5.  -  La présente décision sera notifiée par les soins du secrétariat de la commission centrale d’aide sociale à Mme Y... et au président du conseil général de l’Yonne.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 22 août 2012, où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, Mme THOMAS, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 9 octobre 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer