Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2500
 
  RÉPÉTITION DE L’INDU  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Répétition de l’indu - Compétence
 

Dossier no 120163

M. X...
Séance du 22 août 2012

Décision lue en séance publique le 21 septembre 2012

    Vu, enregistrée à la direction départementale de la cohésion sociale de la Sarthe le 15 septembre 2010 et au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 19 janvier 2012, la requête présentée par M. X..., demeurant dans la Sarthe, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Sarthe en date du 4 juin 2010, reçue selon les dires du requérant non infirmés au dossier le 15 juillet 2010, rejetant sa demande dirigée contre la décision de la commission permanente du conseil général de la Sarthe (et non comme l’indique la décision attaquée un « avis défavorable de la commission permanente des recours gracieux »...) laissant à sa charge la somme de 5 758,32 euros au titre d’un indu d’arrérages de la prestation de compensation du handicap pour la période du 1er novembre 2006 au 31 octobre 2008 par les moyens qu’il est représenté par sa sœur qui n’a pas été entendue par la commission au motif qu’une demande d’allocation aux adultes handicapés était en cours d’instruction ; que le dévouement et l’investissement de sa sœur, aidant familial, sont importants ; qu’il a été surpris d’un rappel trois ans après le début du versement de la prestation ; que la notification de celle-ci du 14 novembre 2006 n’était pas assez explicite et qu’il pensait que l’aide lui servait à régler aussi bien les charges d’ordre général que celles afférentes au personnel et aux charges sociales y afférentes ; qu’il ne percevait pas l’allocation aux adultes handicapés à cette époque, soit 169,00Euro depuis juillet 2009 ; qu’un second rappel a suivi celui examiné par la commission départementale d’aide sociale pour la période du 1er mai 2009 au 31 décembre 2010 pour 5 151,11 euros, d’où un rappel global de 10 909,43 euros qu’il ne peut pas rembourser ; qu’il a toujours été de bonne foi et a toujours fourni les justificatifs nécessaires dès le premier jour du versement ; que dans un esprit « citoyen » il se propose de rembourser 20 % de la somme demandée ; qu’il sollicite indulgence et compréhension sur ce dossier malheureux ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré le 9 mars 2012, le mémoire en défense du président du conseil général de la Sarthe tendant au rejet de la requête par les motifs que le contrôle d’effectivité de l’aide a fait apparaitre un trop-perçu de 17 273,32 euros pour la période du 1er novembre 2006 au 31 octobre 2008 et que les textes applicables justifiaient sa répétition ; qu’en application du code général des collectivités territoriales, le principe de libre administration des collectivités territoriales prévaut ; que selon l’article 26 du décret du 29 décembre 1962, il appartient au seul conseil général, ou à l’organe auquel il a délégué cette compétence, de remettre les dettes contractées par un tiers à l’égard du département, notamment celle résultant du paiement indu d’une prestation d’aide sociale ; que le juge de l’aide sociale n’est pas fondé à faire remise gracieuse d’une créance de la collectivité publique de cette nature ; qu’il lui appartient seulement de statuer sur les litiges portant sur le principe et/ou le montant de l’indu répété ; que le principe et le montant de ce dernier ne sont pas contestés par M. X... qui se borne à en demander la remise ; que quelles que puissent être les difficultés de celui-ci, la commission centrale d’aide sociale n’est pas fondée à accorder une remise relevant d’une décision gracieuse du conseil général de la Sarthe ; que le patrimoine financier de M. X... permettait de rembourser une partie de la somme de 5 758,32 euros ;
    Vu, enregistré le 11 avril 2012, le mémoire en réplique de M. X... persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’il a attendu le 27 février 2009 pour un contrôle qui remonte au 1er novembre 2006 alors que les justificatifs ont toujours été envoyés au fur et à mesure ; que la prestation l’aidait à rémunérer les auxiliaires de vie et le complément à régler les charges d’ordre général ; qu’il n’a pas reçu le courrier du conseil général notifiant le nombre d’heures accordées en en précisant le coût ; que lors de la période litigieuse l’aidant familial ne percevait aucun revenu du fait qu’il ignorait à l’époque qu’il pouvait prétendre à une rémunération alors qu’il disposait de la seule notification du 1er novembre 2006 ; que c’est lors du contrôle d’effectivité en février 2009 et à sa demande qu’il a reçu une nouvelle notification précisant le nombre d’heures accordées et le dédommagement de l’aidant familial ; qu’il est vrai qu’antérieurement la prestation était gérée par la DDASS dans le cadre du dispositif prévu par la circulaire du 11 mars 2005 sans qu’ultérieurement il lui soit précisé qu’il bénéficiait de 182 heures de services prestataires et 147 heures d’aidant familial et les taux correspondants ; que sa maladie le paralyse de plus en plus ; que sans l’utilisation avérée de la somme litigieuse, son maintien à domicile n’aurait pas été possible ;
    Vu, enregistré le 4 avril 2012, le mémoire du président du conseil général de la Sarthe persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 22 août 2012 Mme THOMAS, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale qui fait foi jusqu’à preuve contraire mentionne que Mme Y..., sœur de M. X..., a été entendue à l’audience ; que la preuve contraire n’est pas apportée ; que d’ailleurs Mme Y... n’était pas fondée, en droit, à représenter M. X... devant la commission départementale d’aide sociale de la Sarthe mais seulement à l’assister en l’état de la rédaction des textes applicables qui n’ont jamais été adaptés à la situation réelle des usagers des juridictions d’aide sociale, à la différence des textes relevant d’autres départements concernant par exemple les tribunaux du contentieux de l’incapacité, malgré l’attention constamment appelée en vain par la présente formation de jugement sur cette situation ; qu’en cet état, M. X... n’est pas fondé à soutenir que la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Sarthe du 8 juin 2010 est intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière ;
    Considérant que par décision du 27 février 2009 le président du conseil général de la Sarthe a notifié à M. X... un indu de 17 273,32 euros pour la période du 1er novembre 2006 au 31 octobre 2008, notification reçue au plus tard le 18 mars 2009 ; que M. X... a contesté cette décision par lettre de cette date qui comprend à la fois des moyens d’ordre contentieux fondés sur la prescription partielle de la répétition et l’ignorance où il était en l’état des décisions initiales notifiées du nombre d’heures accordées et de leurs taux et une demande gracieuse fondée sur la faiblesse de ses revenus ; que le président du conseil général a considéré qu’il s’agissait exclusivement d’une demande gracieuse et que M. X... ne le conteste pas ; qu’effectivement après avoir énoncé dans sa lettre du 18 mars 2009, adressée au président du conseil général et non à la commission départementale d’aide sociale, des arguments susceptibles de constituer des moyens de nature contentieuse, M. X... indiquait en le soulignant qu’il était « dans l’incapacité de régler cette somme étant donné mes faibles revenus et sollicite votre bienveillance pour annuler cette dette » ; que, nonobstant les ambigüités, largement inévitables pour des personnes juridiquement autodidactes..., de ses correspondances antérieures, il n’a pas contesté devant la commission départementale d’aide sociale en se pourvoyant contre la décision de la commission permanente du conseil général, à laquelle le président du conseil général avait transmis sa lettre du 18 mars 2009 le 11 septembre 2009, le caractère gracieux de sa demande et n’a jamais soutenu avoir entendu en réalité déférer à la commission départementale d’aide sociale sur le plan contentieux dès le 18 mars 2009 la décision de répétition d’indu du 27 février 2009 ; qu’eu égard à cette argumentation et à cette absence de contestation, il y a lieu de considérer que c’est à bon droit que le premier juge a considéré qu’il était exclusivement saisi sur le plan gracieux d’une demande contre la décision de l’instance délibérante et que la commission centrale d’aide sociale considérera qu’il en est de même en appel ;
    Considérant, par ailleurs, que pour la première fois en appel M. X... fait état d’une décision distincte intervenue pour une nouvelle période d’indu contracté du 1er mai 2009 au 31 décembre 2010 ; qu’au vu du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale M. X... n’a jamais contesté soit devant l’administration, soit devant la commission départementale d’aide sociale respectivement sur le plan gracieux ou contentieux la décision distincte pour cette période comme il lui appartenait de le faire ; qu’en l’absence de demande à la commission départementale d’aide sociale il n’est pas loisible à la commission centrale d’aide sociale de statuer pour la première fois en appel sur ladite période du 1er mai 2009 au 31 décembre 2010 mais qu’elle ne peut utilement statuer que sur l’indu de 17 273,32 euros répété le 27 février 2009 et dont la commission permanente du conseil général, confirmée par la commission départementale d’aide sociale, a le 11 septembre 2009 modéré le recouvrement de 11 515,00 euros ;
    Considérant, en premier lieu, que le président du conseil général de la Sarthe ne conteste pas que, comme l’a jugé avec une motivation circonstancier la commission centrale d’aide sociale dans ses décisions 110468 et 110817 du 3 février 2012, le juge de l’aide sociale soit bien compétent pour connaître d’une décision de l’instance collégiale du département certes non expressément visée par l’article L. 134-1 mais intervenant dans le cadre du recouvrement des créances d’aide sociale dont elle ne serait pas détachable ; qu’il y a lieu, dès lors, en l’état de non-infirmation de la jurisprudence de la commission centrale d’aide sociale par le juge de cassation, de confirmer cette solution en ce qui concerne la compétence du juge de l’aide sociale ;
    Considérant, par contre, qu’il y a lieu de rejeter la contestation exprimée par le président du conseil général de la Sarthe qui s’il ne dénie pas la compétence du juge lui dénie tout pouvoir d’appréciation de la décision du conseil général ou de la commission permanente en application du principe de libre administration des collectivités territoriales rappelé dans les articles L. 1111-1 et L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales et de l’article 26 du décret du 29 décembre 1962 qui impliquerait un pouvoir d’appréciation non contrôlé des instances départementales ; que dans les décisions suscitées la commission centrale d’aide sociale a toutefois considéré que le juge de l’aide sociale, juge de plein contentieux, et non, comme en matière par exemple d’allocation personnalisée au logement ou en matière fiscale, juge de l’excès de pouvoir, exerçait un entier contrôle des décisions de refus de remise ou de modération du conseil général ou de la commission permanente ; que, d’ailleurs, il exerce bien un tel contrôle en ce qui concerne la remise ou la modération en matière de récupération alors que le fondement textuel de ses pouvoirs ne lui confère pas davantage expressément une telle capacité d’appréciation ; qu’il serait au demeurant curieux que le même juge de plein contentieux de l’aide sociale n’exerce aucun contrôle sur les décisions gracieuses en matière de répétition dont les éléments humains et sociaux de contexte sont, comme le prouve l’ensemble des dossiers de la prestation de compensation du handicap, déterminants et exerce un entier contrôle en matière de récupération contre des personnes qui ne sont pas, le plus souvent, l’assisté lui-même ; que dans ces conditions la commission centrale d’aide sociale confirmera dans la présente décision sa jurisprudence antérieure également non infirmée en l’état par le juge de cassation selon laquelle non seulement elle est compétente s’agissant même de décisions gracieuses de la sorte mais encore il lui appartient d’exercer un entier contrôle sur l’appréciation portée par l’instance délibérante compétente, observation étant faite qu’en réalité les différences de textes (ou d’absence de textes) pour des appréciations de même nature en matières de RSA/RMI, d’allocation personnalisée au logement, d’aide sociale générale et même fiscale conduisent à des solutions prétoriennes nécessairement constructives alors qu’il appartiendrait au législateur d’encadrer, dans le respect sans doute du principe, de libre administration des collectivités territoriales que n’affecte toutefois pas le contrôle juridictionnel dans son principe les compétences très voisines ainsi exercées de manière plus cohérente ;
    Considérant en premier lieu, que, même compte tenu de la perception à l’heure actuelle de l’allocation aux adultes handicapés pour un montant d’environ 170 euros, les ressources de M. X... autres que celles affectées à la rémunération des personnes assumant son besoin de compensation (prestation de compensation du handicap et majoration pour tierce personne de sa pension sécurité sociale même s’il est vrai que le dossier ne permet pas d’affirmer qu’il affecte effectivement cette dernière majoration aux fins identiques à celles pour lesquelles est accordée la prestation de compensation du handicap auxquelles elle est affectée...) sont de l’ordre de 630 euros par mois insuffisantes à l’acquit de l’ensemble des charges autres que celles afférentes à son besoin de compensation au titre des aides humaines qu’il doit assumer ; que la disposition d’un très modeste capital, légèrement inférieur au montant de l’indu laissé à la charge de l’assisté par la décision attaquée, n’est pas de nature à justifier que ces modestes ressources soient affectées au remboursement de l’indu répété ;
    Considérant en outre, alors même que la présente requête constitue une requête exclusivement gracieuse, qu’il n’est pas interdit à la commission centrale d’aide sociale de tenir compte à titre surabondant des arguments de nature contentieuse en réalité exposés par M. X... ; qu’à cet égard, en premier lieu, il est constant que la période d’indu répété porte, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 245 (8o), 2e alinéa, sur plus de deux ans à compter des versements des arrérages indûment payés en l’absence de toute fraude de l’assisté qui informait régulièrement l’administration de l’utilisation de la prestation, en second lieu que M. X... ne s’était jamais vu notifier une décision initiale (ou un plan de compensation accepté) prévoyant expressément et clairement le nombre d’heures accordées et leur rémunération, même si nul, et notamment un bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap, n’est sensé ignorer la loi et si la décision du 14 novembre 2006 prévoyait malgré tout clairement que « une aide mensuelle de 1 485,32 euros vous est accordée pour des besoins d’aide humaine »... ;
    Considérant, par ailleurs, qu’en appel M. X... limite ses conclusions à une modération de 80 % des sommes réclamées (au titre desquelles, comme il a été dit, il est loisible à la commission centrale d’aide sociale de ne statuer qu’en ce qui concerne celles faisant l’objet de la décision attaquée de la commission permanente) ; que compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, il sera fait une équitable et raisonnable appréciation de la situation de l’assisté, dont il n’est d’ailleurs pas contesté qu’après avoir été mieux informé il respecte dorénavant scrupuleusement les plans de compensation et l’affectation des aides accordées, en faisant droit à ses conclusions et en laissant ainsi à sa charge non pas 5 758,32 euros mais 3 454,60 euros, soit une modération complémentaire de 2 303,72 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  L’indu recouvré à l’encontre de M. X... au titre des arrérages de la prestation de compensation du handicap qui lui a été versée pour la période du 1er novembre 2006 au 31 octobre 2008 est ramené à 3 454,60 euros.
    Art. 2.  -  La décision de la commission permanente du conseil général de la Sarthe du 14 novembre 2006 et la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Sarthe en date du 4 juin 2010 sont réformées en ce qu’elle ont de contraire à l’article 1er ci-dessus.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 22 août 2012, où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, Mme THOMAS, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 21 septembre 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer