Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Placement - Prise en charge - Date d’effet
 

Dossier no 110703

Mme X...
Séance du 1er juin 2012

Décision lue en séance publique le 4 juin 2012

    Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 11 avril 2011, l’appel par lequel l’association tutélaire A..., représentant Mme X..., hébergée à la maison de retraite « R... » de la Haute-Garonne, demande à la juridiction de céans d’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées-Atlantiques en date du 1er mars 2011 confirmant celle du 16 octobre 2009 du président du conseil général de ce département concernant la fixation de la date de la prise en charge des frais d’entretien et d’hébergement de l’intéressée au 1er septembre 2009 et non au 1er janvier 2009 par les moyens que la curatrice a déposé la demande d’aide sociale le 20 avril 2009 au centre communal d’action sociale, et que, « sachant que le délai de rétroactivité peut atteindre trois mois », l’assistée est fondée à bénéficier de l’aide sociale à compter du 1er janvier 2009 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré, comme ci-dessus, le 1er septembre 2011, le mémoire en défense par lequel le président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de l’appel aux motifs, d’une part, que la demande d’aide sociale déposée le 25 mai 2010 fixait elle-même au 1er septembre 2009 le point de départ de la prise en charge des frais d’entretien et d’hébergement de Mme X..., déduction faite de sa participation et de celle de ses obligés alimentaires, fixée à 122 euros, d’autre part, que l’appel est « inopérant » dès lors qu’il est dirigé contre une décision rendue à la suite d’une saisine des premiers juges ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er juin 2012 M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées-Atlantiques a jugé, s’agissant du fond de la demande dont elle était saisie, d’abord (dans un considérant inopérant au vu de l’argumentation de l’administration et de l’objet du litige) que « le principe premier de l’aide sociale est une aide de la collectivité qui n’intervient que si le demandeur se trouve dans l’impossibilité de subvenir lui-même à ses besoins vitaux après avoir épuisé notamment les voies traditionnelles de la solidarité familiale », et a rappelé ensuite qu’à la décision de sursis à statuer du 16 octobre 2009 a succédé une décision d’admission du 11 février 2010 (« derrière ce sursis une prise en charge a été accordée » !...) et « qu’également la date d’effet retenue soit le 1er septembre 2009 est celle indiquée sur la demande d’aide sociale » sans répondre à l’argumentation de la demande selon laquelle « le dossier était parvenu au CCAS en avril 2009 » ; qu’elle a « en outre », sans davantage répondre à l’argumentation de la demande selon laquelle elle contestait « le refus du Conseil général de statuer sur la demande d’aide sociale et de sursoir à statuer » (lire manifestement « sa décision de sursoir à statuer »), « alors que la jurisprudence « oblige le Conseil général à prendre une décision en la matière », considéré qu’ « au surplus une décision de sursis n’est pas susceptible de recours » ; qu’en appel, la requérante ne conteste pas la motivation adoptée « au surplus » en ce qui concerne la recevabilité de la demande, ni ne soutient que la décision attaquée est entachée de défaut de réponse à conclusions ou moyens ; que toutefois, dès lors que la recevabilité de la demande n’a été évoquée par le premier juge qu’ « au surplus », alors qu’il y avait lieu de statuer sur celle-ci préalablement à la motivation de la décision sur le fond, il peut être considéré que ce juge a entendu fonder sa décision de rejet au titre du mal fondé de la demande et accessoirement seulement au titre de sa recevabilité ; que dans ces circonstances procédant des modalités habituelles de formulation des écritures des acteurs des dossiers soumis à la commission centrale d’aide sociale il n’y a pas lieu d’opposer à la requête la fin de non-recevoir tirée de ce qu’elle ne conteste pas l’irrecevabilité opposée par les premiers juges ;
    Sur la recevabilité de la demande à la commission départementale d’aide sociale ;
    Considérant que si aucune disposition ne fixe une date butoir à l’administration pour statuer sur une demande d’aide sociale, aucune disposition ne prévoit davantage l’intervention d’une décision de sursis à statuer ; qu’en l’espèce la décision - ainsi superfétatoire - du président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques du 16 octobre 2009 de sursis à statuer comportait non seulement la mention qu’elle était motivée par la nécessité de pourvoir auprès de deux débiteurs d’aliments domiciliés aux Etats-Unis aux enquêtes nécessaires sur leurs capacités contributives, mais encore celle selon laquelle la demande d’aide sociale aurait comporté une demande de date d’effet au 1er septembre 2009, alors que la requérante soutient avoir fixé dans sa demande d’aide sociale cette date de prise d’effet au 1er janvier 2009 ; que la requérante avait ainsi intérêt à contester dès la notification de la décision dite cette décision sur la question en tout état de cause seule litigieuse relative à la date d’effet ; que la décision d’admission du 11 février 2010 se borne à confirmer ladite date d’effet ; que d’ailleurs (même si bien entendu ce « d’ailleurs » n’est pas juridiquement de nature à fonder à soi seul la solution de la présente décision) la décision du 16 octobre 2009, dont l’administration soutient devant le juge qu’elle ne fait pas grief (ainsi du moins est-il permis d’interpréter sa formulation selon laquelle « le sursis à statuer ne vaut pas décision d’admission ou non à l’aide sociale et que donc l’appel » [sic] « est inopérant ») indique qu’elle est susceptible de recours dans les deux mois devant la commission départementale d’aide sociale ; qu’enfin si l’administration soutient « qu’en tout état de cause [la] notification aux intéressés » du sursis à statuer « a permis de les faire répondre » ce dernier motif n’est pas compréhensible pour la commission centrale d’aide sociale qui ne sait pas en conséquence y répondre ; qu’ainsi, en tout état de cause, en ce qui concerne la fixation par la décision attaquée de la date d’effet de la demande d’aide sociale, la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées-Atlantiques a considéré « en outre » ( ?)... à tort « qu’au surplus une décision de sursis à statuer n’est pas susceptible de recours » ;
    Sur la date d’effet de l’admission à l’aide sociale de Mme X... ;     Considérant que l’association tutélaire requérante dont les services sont situés en Haute-Garonne entend, en produisant une copie de sa lettre du 20 avril 2009 au centre communal d’action sociale des Pyrénées-Atlantiques, soutenir que la demande a bien été adressée dès le 20 avril 2009 audit centre et lui est en conséquence parvenue avant fin avril ; qu’elle en déduit qu’ainsi elle était fondée à demander que l’admission à l’aide sociale rétroagisse à la date d’entrée dans l’établissement dès lors que, sous le contrôle du juge de l’aide sociale, le président du conseil général peut en vertu de l’article R. 131-2 2e alinéa du code de l’action sociale et des familles faire rétroagir sa décision de deux mois prolongeables d’une nouvelle période de deux mois, soit quatre mois au total ; que ce faisant elle n’apporte pas la preuve dont la charge initiale lui incombe de ce que la lettre du 20 avril 2009 dont elle se prévaut adressée par pli non recommandé soit bien parvenue au Centre communal d’action sociale avant le 1er mai 2009 ; que toutefois, dans les circonstances de l’espèce et au regard de la pièce dont se prévaut, comme il va être dit, l’administration, la copie produite qui laisse à croire plausiblement (sauf à imputer au tuteur la production d’une pièce fausse... ce qui n’est pas allégué par le défendeur...) que Mme X... étant entrée en EHPAD, ainsi qu’il n’est pas contesté le 1er janvier 2009, le tuteur, professionnel du droit social..., a entendu permettre par l’expédition d’une lettre dans le délai de quatre mois courant de l’entrée dans l’établissement que la décision d’admission rétroagisse à ladite date, peut être regardée comme constituant un commencement de la preuve qui incombe à la requérante ; que, de son côté, l’administration se prévaut de l’imprimé de « demande d’aide sociale » rempli « dans les Pyrénées-Atlantiques le 22 mai 2009 » pour soutenir que les dispositions du 2e alinéa de l’article R. 131-8 ne sauraient s’appliquer compte tenu de ladite date du 22 mai 2009 et qu’ainsi la requérante n’est pas fondée à en solliciter l’application ; que toutefois, bien que faisant partie du dossier administratif, la pièce dont se prévaut le président du conseil général n’a pas, alors que les demandeurs d’aide sociale peuvent formuler leurs demandes sur papier libre à la condition que soit rempli, le cas échéant ultérieurement, l’imprimé administratif de demande, valeur probante ; que d’une part, elle est établie « dans les Pyrénées-Atlantiques » le 22 mai 2009 alors qu’il est fort peu vraisemblable que les agents du service tutélaire sis en Haute-Garonne se soient déplacés pour déposer la demande et ne l’aient pas adressée, comme ils le soutiennent par la copie dont ils se prévalent, par voie postale ; que d’autre part, à côté de la mention « dans les Pyrénées-Atlantiques le 22 mai 2009 » ne figure pas la signature figurant sur la lettre de demande, dont la copie est produite, mais une autre signature sous le cachet « centre communal d’action sociale des Pyrénées-Atlantiques » et qu’ainsi il apparait que selon toute vraisemblance l’imprimé de demande d’aide sociale a été rempli par un agent dudit centre ; qu’en outre - et surtout ! - l’imprimé fait état d’une demande « déposée le 1er janvier 2009 » au regard d’une date d’effet qui serait selon ladite demande « le 1er septembre 2009 » ; qu’on ne voit pas comment un tuteur professionnel pourrait, alors que sa protégée est admise dans un établissement médico-social le 1er janvier 2009, non seulement déposer une demande le 22 mai 2009, mais encore la formuler à compter du 1er septembre 2009 et non d’une date courant dans la période suivant immédiatement la date prétendue de la demande ; qu’aucune autre pièce du dossier ne corrobore l’hypothèse d’une date d’effet mentionnée par le tuteur au 1er septembre 2009 ; que dans ces conditions non seulement l’imprimé « demande d’aide sociale » dont se prévaut le président du conseil général ne vaut pas infirmation du commencement de preuve constitué dans les circonstances de l’espèce par la production de la copie, même sans date certaine, de la lettre du 20 avril 2009, mais encore, si la commission centrale d’aide sociale n’a pas dénaturé les pièces dont elle a pris connaissance du dossier qui lui est soumis, ledit imprimé corrobore davantage qu’il n’infirme le commencement dont se prévaut la requérante ; que dans ces conditions celle-ci peut être regardée, dans les circonstances de l’espèce, comme administrant la preuve dont elle a la charge de ce qu’aucune demande d’aide sociale n’a été déposée par elle le 22 mai 2009 sollicitant une date d’effet au 1er septembre 2009 mais qu’au contraire l’imprimé du 22 mai 2009 en faisant état d’une demande « déposée le 1er janvier 2009 » (c’est-à-dire selon toute plausibilité en réalité d’une admission dans l’établissement le 1er janvier 2009...) constitue un élément corroboratif de la pièce dont elle se prévaut avec valeur de commencement de preuve ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il doit être admis dans les circonstances particulières de l’espèce, eu égard aux lacunes et aux contradictions des pièces du dossier, que Mme X... a bien demandé avant le 1er mai 2009 l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement en EHPAD ; qu’ainsi le président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques pouvait sous le contrôle du juge décider d’une rétroactivité de la demande d’aide sociale de quatre mois à compter de l’admission le 1er janvier 2009 ;
    Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction et qu’il n’est d’ailleurs même pas allégué par le président du conseil général que des circonstances particulières à l’espèce justifiaient que l’administration, qui décide de la date d’effet rétroactive de l’admission dans la limite de deux mois éventuellement renouvelables pour une même durée sous le contrôle du juge de plein contentieux de l’aide sociale, aurait disposé d’éléments justifiant qu’il ne soit pas fait usage de la possibilité de prise d’effet rétroactive à la date de l’admission prévue par le 2e alinéa de l’article R. 131-2 précité et que dans ces conditions il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requête en statuant, compte tenu de la motivation de la décision attaquée qui n’oppose une irrecevabilité que « en outre » après avoir statué au fond (... !) dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées-Atlantiques en date du 1er mars 2011 est annulée.
    Art. 2.  -  La décision du président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques en date du 16 octobre 2009 est annulée en tant qu’elle statue sur la date d’effet mentionnée dans la demande d’aide sociale de Mme X....
    Art. 3.  -  Mme X... est admise à l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement et d’entretien à l’EHPAD de la Haute-Garonne à compter du 1er janvier 2009.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er juin 2012, où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 juin 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer