Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Récupération sur succession - Assurance-vie - Modération - Compétence
 

Dossier no 120268

Mme X...
Séance du 7 janvier 2013

Décision lue en séance publique le 14 janvier 2013

    Vu le recours formé 2 août 2011 par M. le président du conseil général du Rhône tendant à l’annulation de la décision, en date 14 juin 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Rhône a limité à 5 000 euros la récupération à l’encontre du bénéficiaire du contrat d’assurance vie requalifié en donation, de la créance d’aide sociale accordée à Mme X..., du 1er mai 2004 au 10 février 2008, date de son décès pour un montant total s’élevant à 21 347,41 euros ;
    Le requérant soutient d’une part que le recours en récupération est fondé en droit et d’autre part que la limitation de la récupération accordée par la commission départementale d’aide sociale est trop importante compte tenu des sommes restant au profit du bénéficiaire du contrat d’assurance vie après récupération. Il sollicite dès lors le maintien de la décision de récupération prononcée par le président du conseil général du Rhône susmentionnée ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu la loi du 20 juillet 2001 ;
    Vu le décret no 2001-1085 du 20 novembre 2001 ;
    Vu le décret du 17 décembre 1990 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 25 septembre 2012 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 7 janvier 2013 Tanguy NGAFAOUNAIN-TABISSI, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant d’une part, qu’aux termes des dispositions de l’article 132-8 du code action sociale famille : « Des recours sont exercés par l’administration (...) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande. » ; qu’aux termes de l’article R. 132-11 dudit code : « Ces recours sont exercés dans la limite du montant des prestations alloués au bénéficiaire de l’aide sociale » ;
    Considérant d’autre part, qu’aux termes de l’article 894 du code civil : « La donation entre vif est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donateur qui l’accepte » ; qu’un contrat d’assurance-vie soumis aux dispositions des articles L. 132-1 et suivants du code des assurances, par lequel il est stipulé qu’un capital ou une rente sera versée au souscripteur en cas de vie à l’échéance prévue par le contrat, et à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés en cas de décès du souscripteur avant cette date, n’a pas en lui-même le caractère d’une donation au sens de l’article 894 du code civil ;
    Considérant toutefois que l’administration et les juridictions de l’aide sociale sont en droit de rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier l’engagement d’une action en récupération, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse, d’une éventuelle question préjudicielle devant les juridictions de l’ordre judiciaire ; qu’à ce titre, un contrat d’assurance vie peut être requalifié en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce contrat a été souscrit, il révèle pour l’essentiel, une intention libérale de la part du souscripteur et après que ce dernier ait donné son acceptation ; que l’intention libérale doit être regardée comme étant établie lorsque le souscripteur du contrat, eu égard à son espérance de vie et à l’importance des primes versées par rapport à son patrimoine, s’y dépouille au profit du bénéficiaire de manière à la fois actuelle et non aléatoire en raison de la naissance d’un droit de créance sur l’assureur ; que, dans ce cas, l’acceptation du bénéficiaire, alors même qu’elle n’interviendrait qu’au moment du versement de la prestation assurée après le décès du souscripteur, a pour effet de permettre à l’administration de le regarder comme un donataire, pour l’application des dispositions relatives à la récupération des créances d’aide sociale ;
    Considérant qu’il ressort de l’étude du dossier que Mme X... a bénéficié de la prestation sociale à l’aide à l’hébergement en maison de retraite du 1er août 2004 au 10 février 2008 date de son décès pour un montant s’élevant à 21 347,41 euros ; qu’elle avait souscrit le 24 janvier 1997, soit sept ans avant la demande d’aide sociale, un contrat d’assurance-vie d’un capital de 30 489,80 euros dont son fils était le bénéficiaire ; que compte tenu de son âge au moment de la souscription du contrat, 84 ans, et de l’ampleur de la somme mobilisée, 30 489,80 euros, au regard de son patrimoine, 32 889,58 euros, c’est à bon droit que le président du conseil général a requalifié le contrat d’assurance-vie en donation indirecte ; que la récupération à l’encontre du donataire s’effectue au premier euro ;
    Considérant que la commission départementale d’aide sociale a limité le montant de la récupération de la créance d’aide sociale à l’encontre du donataire à 5 000 euros en tenant compte de la situation personnelle du donataire ; que le président du conseil général considère que cette limitation n’est pas justifiée compte tenu des sommes restant au profit du bénéficiaire du contrat d’assurance vie après récupération ; que le bénéficiaire soutient avoir affecté l’ensemble des fonds au remboursement de dettes professionnelles et à l’acquisition de matériel pour son activité commerciale et agricole ; que s’il est vrai que comme le soutient le requérant la situation financière du donataire est sans incidence juridique sur la légalité du recours en récupération exercé par le département, il n’en demeure pas moins qu’il appartient à la juridiction d’aide sociale d’accorder remise ou modération de la créance en fonction des circonstances de fait existantes à la date de la décision ; que c’est à bon droit que la commission départementale d’aide sociale a plafonné le montant de la récupération de la créance à 5 000 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  Le recours formé par le président du conseil général du Rhône est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 7 janvier 2013 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, M. CENTLIVRE, assesseur, M. NGAFAOUNAIN-TABISSI, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 14 janvier 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer