Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Indu - Établissement - Séjour
 

Dossier no 120459

M. X...
Séance du 22 novembre 2012

Décision lue en séance publique le 30 novembre 2012

    Vu, enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 14 mai 2012, la requête du préfet de l’Ariège tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale fixer dans le département de Tarn-et-Garonne le domicile de secours de M. X... pour la prise en charge de ses frais d’hébergement et d’entretien au foyer d’accueil médicalisé dans le Cantal par l’aide sociale par les moyens qu’après son divorce en 2005 M. X... n’a pas quitté le département de Tarn-et-Garonne étant détenu à la maison d’arrêt lors de son divorce le 14 septembre 2005 et ayant été incarcéré de 2004 septembre 2008 ; qu’il a eu un « accident » le 4 novembre 2008 alors qu’il était chauffeur routier et qu’il a alors été accueilli à l’hôpital de la Haute-Garonne ; que de 2009 à 2011 il a été hospitalisé régulièrement à cet hôpital et au centre hospitalier de Tarn-et-Garonne jusqu’au 28 septembre 2011, date de son admission au foyer d’accueil médicalisé F... dans le Cantal ; qu’aucun justificatif ne démontre qu’il ait été sans domicile fixe en Ariège ; que les prestations aux personnes handicapées accordées par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées attestent de la gravité de son « accident » et de son état de santé, ce qui parait incompatible avec « une longue période d’errance » ou « un long parcours de SDF » ;
    Vu, enregistrées les 8 et 22 juin 2012, les productions complémentaires du préfet de l’Ariège ;
    Vu, enregistré le 3 juillet 2012, le mémoire en défense du président du conseil général de Tarn-et-Garonne tendant au rejet de la requête par les motifs que dès 2005 M. X... n’occupait plus le domicile conjugal ; qu’il a quitté volontairement le Tarn-et-Garonne et est domicilié de façon constante en Haute-Garonne ; qu’après une absence volontaire ininterrompue de plus de trois mois du département, il a perdu son domicile de secours dans le Tarn-et-Garonne ; qu’il doit être considéré comme sans domicile stable rattaché au département de la Haute-Garonne et que l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit la compétence financière de l’État ; qu’il est de jurisprudence constante qu’à défaut de domicile de secours les dépenses incombent au département où réside l’intéressé au moment de la demande d’admission à l’aide sociale, soit la Haute-Garonne ;
    Vu, enregistré le 9 août 2012, le mémoire en réplique du préfet de l’Ariège persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et le moyen que le domicile de secours est acquis avant l’entrée non seulement dans une structure sanitaire, mais aussi dans un établissement pénitentiaire ; qu’entre 2004 et 2011, M. X... était hébergé soit en milieu carcéral, soit en centre hospitalier et a conservé son domicile de secours dans le Tarn-et-Garonne ; que la situation de handicap place l’intéressé dans une situation de totale dépendance excluant toute liberté de choix du lieu de séjour et que la gravité de l’état des santé rend inévitable ce départ du domicile de secours et qu’alors le délai de trois mois ne commence à courir que du jour où ces circonstances n’existent plus ; qu’une adresse administrative ne saurait constituer une preuve d’une résidence habituelle et notoire ; qu’ainsi les domiciliations aux sièges du centre communal d’action sociale de Toulouse ou de l’association tutélaire de la Haute-Garonne ne sont pas de nature à retirer le domicile de secours dans le département de Tarn-et-Garonne ; qu’au travers du parcours chaotique de M. X..., il n’a jamais acquis un nouveau domicile de secours par une présence ininterrompue supérieure à trois mois ;
    Vu, enregistré le 24 septembre 2012, le mémoire du président du conseil général de Tarn-et-Garonne persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs qu’il n’est pas exact de soutenir que M. X... n’a jamais quitté les deux types d’établissement pénitentiaire et hospitalier ; que l’on constate des ruptures de séjours, mais qu’aucune adresse personnelle dans le département de Tarn-et-Garonne entre 2004 et 2011 n’a permis l’acquisition d’un domicile de secours par l’intéressé ; que le jugement de divorce de 2005 attribue la jouissance du domicile de Tarn-et-Garonne à son épouse, ce qui lui interdit d’y revenir ; que le départ de M. X... de Tarn-et-Garonne n’était pas motivé par une hospitalisation mais que ce sont les conséquences physiques de son accident en 2008 qui l’ont amené à être hospitalisé à plusieurs reprises ; que la jurisprudence du Conseil d’État établit que les circonstances excluant toute liberté de choix du lieu de séjour ne sauraient résulter de la seule situation de dépendance physique ou psychique de l’intéressé ; que la loi DALO du 5 mars 2007 a réformé la procédure d’élection de domicile afin de faciliter l’accès aux droits des personnes sans domicile stable et qu’est qualifié personne sans domicile stable toute personne qui ne dispose pas d’une adresse personnelle lui permettant d’y recevoir et d’y consulter son courrier de façon constante ; que tel est bien le cas de l’espèce ; que la nouvelle législation précise que si la personne est sans domicile stable elle doit procéder à une élection de domicile si elle veut bénéficier des prestations d’aide sociale légale, ce que M. X... a été contraint de faire en Haute-Garonne en l’absence d’une adresse personnelle ; que l’article L. 264-8 du code de l’action sociale et des familles précise que les organismes habilités doivent s’assurer que la personne est bien sans domicile stable avant de répondre favorablement à sa demande, ce qu’a bien dû faire le CCAS de la Haute-Garonne ; que la jurisprudence du Conseil d’État à laquelle se réfère celle de la commission centrale d’aide sociale doit être appliquée ; que cette application est confirmée par la circulaire de la DGAS du 14 mars 2005 ;
    Vu, enregistré le 17 octobre 2012, le mémoire du préfet de l’Ariège persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que le dernier domicile de secours connu est bien le domicile conjugal de M. X... en Tarn-et-Garonne ; que celui-ci est incarcéré en 2004 jusqu’en septembre 2008 puis à compter du 4 novembre 2008, suite à un accident, il est hospitalisé jusqu’en 2011 sans période d’interruption supérieure à trois mois ; que M. X..., né en 1972, a connu un parcours stable jusqu’en 2008, année de son accident ; que les nombreuses hospitalisations consécutives à celui-ci ne peuvent être assimilées à de l’instabilité ; que le fait de procéder à une élection de domicile afin de bénéficier des prestations d’aide sociale ne démontre en rien une longue période d’errance et ne permet pas d’affirmer que M. X... ait été sans domicile fixe ; qu’ainsi aucun élément ne vient confirmer la perte de domicile de M. X... en Tarn-et-Garonne ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles, notamment l’article L. 134-2 ;
    Vu la décision du Conseil constitutionnel no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 22 novembre 2012 Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique,
    Considérant qu’en admettant que M. X... n’ait pas perdu, lorsqu’il a été incarcéré en 2004 jusqu’à sa sortie de prison en 2008, le domicile de secours qu’il avait acquis en Tarn-et-Garonne pour l’application du dernier alinéa de l’article L. 122-3 du code de l’action sociale et des familles, il demeure qu’après 2008 il ne ressort pas du dossier, d’une part, que M. X... ne se soit pas absenté hors séjours en établissements sanitaires et sociaux plus de trois mois du département de Tarn-et-Garonne et n’y ait pas ainsi perdu le domicile de secours qu’il avait antérieurement acquis, d’autre part, qu’après sa sortie de prison il ne se soit pas trouvé en situation d’errance jusqu’au dépôt de la demande d’aide sociale pour l’admission au foyer d’accueil médicalisé F... dans le Cantal dont la prise en charge des frais d’hébergement et d’entretien est litigieuse ; que la circonstance que les instances en charge des décisions concernant les personnes handicapées lui aient accordé, dès avant son orientation vers ce foyer, l’allocation aux adultes handicapés et la prestation de compensation du handicap n’est pas de nature à soi seule à exclure que même dans cet état il se soit trouvé hors les périodes d’admission en établissements sanitaires et sociaux en situation d’errance ; que les adresses en Haute-Garonne établies par le dossier correspondent à la permanence d’accueil d’un centre hospitalier ou à un centre communal d’action sociale et ne constituent pas des éléments de nature à présumer de l’acquisition d’une résidence dans ce département ; qu’il suit de là, qu’il y a lieu d’admettre en l’état de ceux qu’il fournit que le préfet de l’Ariège, qui ayant dénié la compétence de l’État pour saisir le président du conseil général de Tarn-et-Garonne sur le fondement du II de l’article R. 131-8 du code de l’action sociale et des familles, puis, après retour du dossier par ce dernier, la commission centrale d’aide sociale, a la charge de la preuve de ce que M. X... avait conservé hors séjours en établissements un domicile de secours en Tarn-et-Garonne où il résidait avec son épouse jusqu’à son incarcération en 2004, n’apporte pas d’éléments de nature à présumer d’une telle situation et de ce que M. X... n’étant pas, après sa sortie de prison et dans l’intervalle de ses admissions dans des établissements non acquisitifs de domicile de secours, en situation d’errance, il ne puisse être considéré comme une « personne pour laquelle aucun domicile fixe ne peut être déterminé » ; qu’en conséquence sont applicables les dispositions de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles et que la requête du préfet de l’Ariège ne peut qu’être rejetée ;

Décide

    Art. 1er.  -  Pour la prise en charge des frais de placement au foyer d’accueil médicalisé de Saint-Girons de M. X... par l’aide sociale, il est fait application de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles.
    Art. 2.  -  La requête du préfet de l’Ariège est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 22 novembre 2012 où siégeaient M. LEVY, président, Mme THOMAS, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 30 novembre 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer