Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources autres que salariales - Fausse déclaration
 

Dossier no 111218

Mme X...
Séance du 5 février 2013

Décision lue en séance publique le 14 février 2013

    Vu la requête enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 21 novembre 2011, présentée par le président du conseil général du Rhône, qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o D’annuler la décision du 10 mai 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Rhône, faisant droit à la demande de Mme X..., a accordé à celle-ci une décharge de l’intégralité de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge pour la période du 1er novembre 2005 au 31 janvier 2007, d’un montant de 12 080,51 euros, et annulé la décision du 14 novembre 2008 par laquelle il lui avait, d’une part, notifié cet indu, et, d’autre part, refusé une remise gracieuse ;
    2o De rejeter la demande présentée par Mme X... devant la commission départementale d’aide sociale du Rhône ;
    Le président du conseil général du Rhône soutient qu’il ne pouvait que rejeter la demande de remise de dette de Mme X... dès lors que celle-ci n’avait pas déclaré les loyers qu’elle avait perçus et qu’aucune remise de dette ne peut être accordée en cas de fausse déclaration du bénéficiaire ; que les revenus locatifs nets de Mme X... n’étaient pas déficitaires, qu’ils n’ont jamais été étayés par les justificatifs pourtant réclamés par la commission départementale d’aide sociale et que leurs montants, tels que calculés par Mme X..., sont erronés dès lors que cette dernière a déduit des revenus locatifs bruts des charges qui contribuent directement à la conservation et à l’augmentation de son patrimoine ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2012, présenté pour Mme X... par la SCP V..., qui conclut au rejet de la requête ; elle soutient que la requête du président du conseil général du Rhône est irrecevable faute d’avoir été présentée dans le délai de recours ; qu’elle n’a jamais eu l’intention de dissimuler ses revenus et a toujours fourni les justificatifs qui lui étaient demandés ; que les montants des revenus locatifs nets qu’elle a calculés sont exacts dès lors que toutes les charges qu’elle a déduites de ses revenus locatifs bruts pouvaient l’être ; que le président du conseil général ne saurait avancer, au soutien de son argumentation, aucun élément relatif aux revenus perçus par Mme X... en 2007, dès lors que l’indu en litige porte sur la période du 1er novembre 2005 au 31 janvier 2007 ; que le président du conseil général ne produit aucun justificatif concernant le montant et les modalités de calcul de l’indu mis à la charge de Mme X... et que les différents courriers notifiant des indus sont contradictoires ;
    Vu le mémoire en réplique, enregistré le 31 mai 2012, présenté par le président du conseil général du Rhône, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre qu’il a introduit sa requête dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la commission départementale d’aide sociale ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2012, présenté pour Mme X... par la SCP V..., qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 5 février 2013, M. LABRUNE, rapporteur, Mme X... accompagnée de son conseil, Maître Sonia MECHERI, en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que le président du conseil général du Rhône a reçu notification de la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale du Rhône le 22 septembre 2011 ; que, par suite, sa requête d’appel, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 21 novembre 2011, a été présentée dans le délai de recours en appel, d’une durée de deux mois ; qu’il suit de là que la fin de non recevoir soulevée par Mme X... ne peut qu’être écartée ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que, suite à un contrôle de l’organisme payeur, Mme X... s’est vue notifier un indu d’allocations de revenu minimum d’un montant de 12 080,51 euros, correspondant à la période du 1er novembre 2005 au 31 janvier 2007, au motif qu’elle n’avait pas déclaré les revenus qu’elle avait tirés durant cette période de la location du chalet qu’elle possédait à... ; que, par une décision du 14 novembre 2008, le président du conseil général du Rhône a confirmé cet indu et rejeté la demande de remise gracieuse que lui avait présentée Mme X... ; que cette dernière a contesté cet indu et ce refus de remise devant la commission départementale d’aide sociale du Rhône qui, par la décision dont le président du conseil général du Rhône relève appel, lui a accordé une décharge de l’intégralité de son indu et a annulé la décision du 14 novembre 2008 au motif que l’indu qui avait été mis à sa charge était fondé sur la prise en compte des revenus locatifs bruts qu’elle avait perçus alors qu’il convenait, pour déterminer les revenus à prendre en compte pour la détermination de ses droits au revenu minimum d’insertion, de déduire de ces revenus locatifs bruts les charges qu’elle supportait comme propriétaire ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...), et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) » ;
    Considérant que le président du conseil général du Rhône soutient qu’il ne pouvait que rejeter la demande de remise de dette de Mme X... dès lors que celle-ci n’avait pas déclaré les loyers qu’elle avait perçus et qu’aucune remise de dette ne peut être accordée en cas de fausse déclaration du bénéficiaire ; que, toutefois, la possibilité offerte au président du conseil général de remettre ou de réduire une créance d’allocations de revenu minimum d’insertion en cas de précarité de la situation du débiteur est sans incidence sur le bien-fondé de cette créance ; que le moyen soulevé par le président du conseil général du Rhône est, par suite, sans incidence sur le bien-fondé et le montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à la charge de Mme X... ;
    Considérant que, pour l’application des dispositions précitées du code de l’action sociale et des familles, lorsque l’allocataire est propriétaire d’un bien immobilier pour lequel il perçoit des loyers, les revenus à prendre en compte au titre des ressources effectivement perçues sont constitués du montant des loyers, duquel il convient de déduire les charges supportées par le propriétaire à l’exception de celles qui contribuent directement à la conservation ou à l’augmentation du patrimoine, telles que, le cas échéant, les remboursements du capital de l’emprunt ayant permis son acquisition ;
    Considérant qu’il suit de là que, pour apprécier les revenus de Mme X... à prendre en compte au titre des ressources effectivement perçues par elle du fait de la location du chalet qu’elle possédait, il convient de déduire des recettes locatives perçues les dépenses de chauffage, d’électricité, d’eau, d’assurances, de taxe foncière, de taxe d’habitation et de contribution à l’audiovisuel public exposées durant les périodes de location et, pour certaines d’entre elles, en lieu et place des locataires, ainsi que les frais versés à l’organisme intermédiaire pour l’entretien et la gestion des locations ; qu’en revanche, il ne convient pas de déduire les dépenses exposées pour la construction du chalet, pour la construction d’une terrasse et d’un escalier extérieur, pour l’aménagement d’un chemin d’accès, pour l’achat de nouveaux biens mobiliers installés dans le chalet, tels que, par exemple, un téléviseur, un four, un réfrigérateur, un lave-linge, un aspirateur, un cumulus ou du linge de maison, ou plus largement toute autre dépense contribuant directement à la conservation ou à l’augmentation du patrimoine de Mme X... ;
    Considérant, par suite, qu’il y a lieu d’annuler la décision du 14 novembre 2008 du président du conseil général du Rhône confirmant l’indu, dès lors que, pour déterminer le montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de Mme X..., celui-ci n’a pas déduit des recettes locatives de Mme X... les charges qu’elle avait supportées ; que le président du conseil général n’est donc pas fondé à se plaindre de ce que la commission départementale d’aide sociale du Rhône ait, par l’article 1er de la décision qu’il attaque, annulé cette décision du 14 novembre 2008 ;
    Considérant, en revanche, que le président du conseil général du Rhône est fondé à soutenir que c’est à tort que, par l’article 2 de la décision qu’il attaque, la commission départementale d’aide sociale a déchargé Mme X... de l’intégralité de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge, dès lors que la commission départementale d’aide sociale a, pour ce faire, déduit des recettes locatives de Mme X... des charges qui ne pouvaient l’être ; qu’il y a donc lieu d’annuler l’article 2 de la décision du 10 mai 2011 de la commission départementale d’aide sociale du Rhône ;
    Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de renvoyer Mme X... devant le président du conseil général du Rhône pour que soient recalculés, conformément aux motifs de la présente décision, les revenus à prendre en compte au titre des ressources effectivement perçues par elles durant la période du 1er novembre 2005 au 31 janvier 2007, et que soit, le cas échéant, recalculé le montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion à porter à son débit au titre de cette période ;

Décide

    Art. 1er.  -  L’article 2 de la décision du 10 mai 2011 de la commission départementale d’aide sociale du Rhône est annulé.
    Art. 2.  -  Le surplus des conclusions du président du conseil général du Rhône est rejeté.
    Art. 3.  -  Mme X... est renvoyée devant le président du conseil général du Rhône pour que soient recalculés, conformément aux motifs de la présente décision, les revenus à prendre en compte au titre des ressources effectivement perçues par elles durant la période du 1er novembre 2005 au 31 janvier 2007, et que soit, le cas échéant, recalculé le montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion à porter à son débit au titre de cette période.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 5 février 2013 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 14 février 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer