Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Récupération sur succession - Hébergement - Instruction - Compétence
 

Dossier no 120226

Mme X...
Séance du 17 mai 2013

Décision lue en séance publique le 31 mai 2013

    Vu, enregistré à la direction départementale de la cohésion sociale des Côtes-d’Armor le 16 décembre 2011, l’appel par lequel Mme Y..., demeurant dans le Morbihan, demande à la commission centrale d’aide sociale, en sa qualité d’héritière, d’annuler la décision du 14 octobre 2011 de la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor ayant confirmé celle du président du conseil général de ce département du 27 octobre 2010 d’exercer un recours sur la succession de Mme X..., sa sœur, aux fins de récupération des sommes versées en faveur de cette dernière au titre de l’aide sociale pour couvrir, à concurrence de 34 753,60 euros, ses frais d’hébergement et d’entretien à la maison de retraite (Morbihan) du 1er juillet 2005 au 22 janvier 2009, date de son décès, et ce par les moyens que l’appelante aurait assumé la charge effective et constante de la défunte, qui était gravement handicapée depuis 1974, et bénéficierait par suite de l’exemption de ce recours en application de l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles, issu de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 6 février 2012, le mémoire en défense du président du conseil général des Côtes-d’Armor tendant au rejet des conclusions de l’appel susvisé par les motifs que :
    1o Les dispositions de l’article 18 de la loi du 11 février 2005, reprises à l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles, seraient entrées en vigueur seulement à la suite de la publication du décret no 2009-206 du 21 février 2009 fixant le taux d’incapacité à prendre en compte, soit 80 % au moins, comme l’aurait jugé la cour d’appel de Rennes, le 22 juin 2010 ;
    2o Mme Y..., à défaut de vivre avec elle, ne pouvait être regardée comme ayant assumé la charge effective et constante de sa sœur handicapée, Mme X... ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 17 mai 2013 M. GOUSSOT, rapporteur, M. Y... et Mme Y..., pour Mme X..., en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que par lettre du 27 octobre 2010, faisant suite à de nombreux échanges de correspondances antérieurs, le président du conseil général des Côtes-d’Armor a indiqué à Mme Y... qu’il considérait, contrairement à ce qu’elle soutenait dans une lettre du 8 octobre 2010, que « le régime d’aide sociale seul applicable à » Mme X... admise à l’EHPAD E... était « celui des personnes âgées, la COTOREP ayant reconnu sa dépendance au titre de l’âge à 74 ans » et indiquait que « le département est en droit de récupérer l’avance consentie, soit 34 753,60 euros sur l’actif net de la succession » ; que, nonobstant l’instruction par correspondances successives du dossier par le service, celui n’avait pas et n’a toujours pas obtenu du notaire instrumentaire de la succession de Mme X... le montant de l’actif net successoral ; qu’ainsi, la lettre du 27 octobre 2010 attaquée par la demande de Mme devant la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor ne constituait pas une décision de récupération ; que, devant les premiers juges, l’administration confirmait dans son mémoire en défense que « malgré notre intervention écrite auprès du notaire chargé de la succession, ce dernier n’a toujours pas porté à notre connaissance le montant de l’actif net permettant de déterminer si le département est en droit de récupérer les sommes avancées au titre de l’aide sociale à l’hébergement ; ainsi, à ce jour, aucune décision de récupération n’a été décidée par le président du conseil général » ; que, dans son mémoire en défense devant la commission centrale d’aide sociale, elle confirme la persistance de cette situation en ajoutant qu’ainsi l’absence de connaissance du montant de l’actif net successoral ne permet pas « de déterminer si le département est en droit de récupérer les sommes avancées au titre de l’aide sociale à l’hébergement » ; qu’en conséquence, elle confirme à nouveau qu’« à ce jour, aucune décision de récupération n’a été décidée par le président du conseil général » et confirme en conséquence cette fois-ci en appel explicitement ce qu’elle faisait déjà valoir implicitement devant les premiers juges à savoir que « la requérante attaque une décision qui n’a pas été prise par le représentant du département » ; qu’elle conclut dorénavant expressément à titre principal que la demande formulée devant la commission départementale d’aide sociale était irrecevable ;
    Considérant que l’instruction contradictoire avec Mme Y... du dossier de récupération contre la succession de Mme X... n’a pas, en l’état, donné lieu à une décision de récupération du président du conseil général des Côtes-d’Armor ; qu’ainsi, alors même que devant le premier juge « le département (...) demand(ait) la confirmation du régime d’aide sociale retenu, en l’occurrence celui applicable aux personnes âgées et donc du bien-fondé de l’action en récupération au premier euro bien que la décision n’ait pas été prise », il n’appartenait pas au premier juge de confirmer une décision qui n’avait pas été prise, l’ensemble des correspondances échangées avec Mme Y... par le service ne s’analysant que comme des éléments d’instruction et d’information réciproques de la situation du dossier susceptibles d’être pris en compte lors de l’intervention non encore intervenue du fait de la carence du notaire en charge de la succession à fournir au service les éléments nécessaires relatifs à l’actif net successoral ; que la fin de non-recevoir dorénavant invoquée en appel par l’administration est d’ordre public et que celle-ci est, dès lors, fondée à la soulever pour la première fois en appel, ce qu’aurait d’ailleurs pu faire d’office la commission centrale d’aide sociale ; qu’il appartiendra seulement à Mme Y... de déférer la décision à intervenir à la commission départementale d’aide sociale en reprenant - et dans la mesure du possible en la formulant de manière plus ordonnée - l’argumentation qu’elle a formulée dans les présentes instances devant la commission départementale d’aide sociale, puis en appel ; qu’ainsi, elle n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor et à solliciter « le rejet de la requête du conseil général » quant à la récupération des sommes réclamées ;
    Sur les conclusions aux fins de restitution du trop-perçu de ressources de Mme X... affectées à la prise en charge de ses frais d’hébergement et d’entretien à l’EHPAD E..., sans qu’il soit besoin de statuer sur leur recevabilité ;
    Considérant, en premier lieu, que les conclusions fondées sur des erreurs matérielles quant aux ressources de Mme X... affectées à la prise en charge des frais dont il s’agit indépendamment du montant de ses revenus devant être laissé à sa disposition sont dans cette mesure nouvelles en appel et comme telles irrecevables ;
    Considérant, par ailleurs, que si Mme Y... persiste en appel à demander « la restitution du trop-perçu par le conseil général (72,00 euros/mois (...) étaient laissés au lieu de 209 euros/mois) », soit la restitution de la différence entre le montant du minimum de ressources laissé aux personnes âgées qui a été appliqué en l’espèce et celui laissé aux personnes handicapées dans la situation du 2e alinéa de l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles et/ou de l’article 18 VI de la loi du 11 février 2005, il résulte de l’instruction que Mme X... est décédée le 22 janvier 2009 ; que le taux d’incapacité requis pour bénéficier des dispositions du 2e alinéa dont s’agit n’a été fixé que par le décret no 2009-206 du 19 février, publié le 21 février 2009 ; qu’ainsi Mme X..., décédée antérieurement à la fixation du taux requis pour l’entrée en application du 2e alinéa de l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles issu de la loi du 11 février 2005, n’a pu, en toute hypothèse, durant son admission à l’aide sociale au titre de son placement à l’EHPAD E..., bénéficier du régime d’aide sociale aux personnes handicapées mais relevait bien de celui applicable aux personnes âgées ; que dans ces conditions, et quelle qu’ait pu être d’ailleurs la pertinence des autres motifs retenus par le premier juge statuant sur le fond, les conclusions de Mme Y... tendant à la restitution de la différence entre les sommes versées par Mme X... en qualité de personne âgée et celles qu’elle aurait dû, selon elle, verser en qualité de personne handicapée ne peuvent être que rejetées ;
    Considérant que la responsabilité de l’Etat à raison de l’intervention estimée tardive du décret du 19 février 2009 ne pourrait être, le cas échéant, recherchée que devant la juridiction administrative de droit commun ; qu’il en va de même, en toute hypothèse, en ce qui concerne les conclusions qui paraissent formulées par Mme Y... au titre de son argumentation relative au « placement arbitraire », du fait des services de l’aide sociale, de Mme X... dans un EHPAD et à son admission en conséquence à l’aide sociale aux personnes âgées ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des conclusions de la requête de Mme Y... ne peut être que rejeté,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête de Mme Y... est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 17 mai 2013 où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 31 mai 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général, par intérim,
de la commission centrale d’aide sociale,
G. Janvier