Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Recours en récupération - Récupération sur donation - Procédure - Conditions relatives au recours - Contradictoire
 

Dossiers nos 120446 et 120447

Mme X...
Séance du 14 décembre 2012

Décision lue en séance publique le 17 janvier 2013

    Vu 1 et 2, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, le 11 mai 2012, les requêtes formulées par M. C... et M. R..., chez M. J... demeurant dans le Rhône, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Lozère en date du 30 novembre 2010, dont ils ont reçu notification le 19 avril 2012, confirmant celle du président de conseil général de la Lozère du 28 juillet 2010 d’exercer un recours sur la succession de Mme X..., qui a bénéficié de la prise en charge par l’aide sociale d’une partie de ses frais d’hébergement et d’entretien à la maison de retraite V... du 1er septembre 2004 au 27 décembre 2009, jour de son décès, et ce par le moyen que les héritiers de l’intéressée, en application de l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles, qui étend aux ayants droit d’une personne ayant reçu des soins de longue durée ou été prise en charge dans un établissement ou un service pour personnes âgées et atteinte d’un taux d’invalidité égal ou supérieur à 80 %, les règles d’exonération de recours sur la succession prévues à l’article L. 344-5 du même code en faveur des enfants, du conjoint survivant ou de la personne ayant supporté la charge effective et constante d’un handicapé, sont exempts de l’action en récupération poursuivie par l’administration ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu l’absence de mémoires en défense du président du conseil général de la Lozère ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles, notamment les articles L. 134-2 et L. 134-6 ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 décembre 2012, M. GOUSSOT, rapporteur, MM. C... et R..., en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les deux requêtes susvisées présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre pour qu’il y soit statué par une seule décision ;
    Considérant qu’il est constant que les décisions attaquées n’ont pas été notifiées aux requérants, mais seulement à leur frère M. J..., après leur intervention ; que ce n’est qu’à la suite de la demande qu’ils ont faite d’une telle notification que celle-ci leur a été adressée à une date telle que les recours courant de leur réception de la décision attaquée sont recevables quant au délai ; que la notification à M. J... ne leur est pas opposable, alors même qu’ils avaient indiqué, comme adresse dans leurs requêtes, « chez M. J... », l’administration n’en devant pas moins dans cette circonstance notifier trois décisions, ce nonobstant le caractère de recours contre la succession de l’action prévue à l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ;
    Considérant que dans sa décision M. J... du 26 octobre 2011, la commission centrale d’aide sociale n’a annulé la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale de la Lozère qu’en tant qu’elle concerne M. J... ; qu’il y a donc lieu de statuer sur les conclusions de MM. C...et R... tendant à l’annulation de ladite décision en tant qu’elle les concerne qui conservent leur objet ;
    Considérant que par les motifs mêmes plus longuement exposés dans la décision M. J... du 26 octobre 2011, le respect du principe du contradictoire impose la notification du mémoire en défense de l’administration au requérant afin qu’il puisse formuler ses observations ; qu’il en va d’autant plus ainsi dans les présentes instances que, d’une part, c’est dans les mémoires en défense que l’administration permet pour la première fois en général aux requérants de connaître sa position juridique quant aux litiges qui les opposent et qu’en outre, en l’espèce, n’ayant pas reçu de mémoire en défense, les requérants ont exposé oralement leur position à la commission départementale d’aide sociale à l’audience après, ce qui n’est pas contesté et paraît à tout le moins plausible, que la présidente de la juridiction leur ait suggéré de soumettre l’argumentation nouvelle qu’ils développaient, sans que préalablement la commission départementale d’aide sociale n’ait pourvu à la régularisation des demandes non motivées dont elle était saisie, au président du conseil général plutôt que de renvoyer l’audience ; qu’ainsi la sanction de l’absence de respect du principe dont il s’agit, qui en toute hypothèse doit intervenir dans les cas où il n’est pas respecté, apparaît d’autant plus pertinente en l’instance au regard des circonstances spécifiques de fait qui viennent d’être rappelées ; qu’il y a lieu dans ces conditions d’annuler la décision attaquée et d’évoquer les demandes ;
    Sur la légalité de la décision du président du conseil général de la Lozère sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
    Considérant qu’il ressort du dossier et n’est pas contesté que Mme X..., née en 1917, s’est vu octroyer une carte d’invalidité au taux de 80 % pour la première fois en 1974, soit avant 65 ans ; qu’après 1975, et nonobstant l’octroi par ailleurs d’une carte « station debout pénible » qui ne préjuge pas d’un tel taux d’invalidité, ledit taux lui a été constamment reconnu par diverses décisions de la COTOREP, notamment, portant sur la période du 1er octobre 1996 au 1er octobre 2006 ; qu’à la date du décès de Mme X..., le 29 avril 2009 - celle du fait générateur de la récupération - les dispositions du 2e alinéa de l’article L. 344-5-1 issues de l’article 18 de la loi du 11 février 2005 étaient applicables compte tenu de l’intervention du décret du 19 février 2009 insérant au code de l’action sociale et des familles un article D. 344-40 fixant à 80 % le taux d’incapacité requis par cet alinéa ; que l’article 18-VI de la loi du 11 février 2005 dispose que « les dispositions » (de l’article L. 344-5-1) « s’appliquent aux personnes handicapées accueillies au 12 février 2005 dans les établissements ou services mentionnés au 6o du 1 de l’article L. 312-1 du même code dès lors qu’elles satisfont aux conditions posées » et que les deux alinéas de l’article L. 344-5-1 ont ainsi pour objet et pour effet de prévoir l’impossibilité de récupération non seulement pour les frais exposés postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi mais pour ceux qui l’ont été antérieurement dès lors par ailleurs que le fait générateur de la récupération est, ce qui comme il a été dit est le cas en l’espèce, postérieur à ladite entrée en vigueur ;
    Considérant que le remboursement du droit de timbre n’est pas sollicité et qu’en l’état de la jurisprudence du Conseil d’Etat, il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale d’ordonner un tel remboursement alors même que le droit de timbre est partie des dépens,

Décide

    Art. 1er.  -  Ensemble sont annulées les décisions du président du conseil général de la Lozère et de la commission départementale d’aide sociale de la Lozère, respectivement des 28 juillet et 30 novembre 2010.
    Art. 2.  -  La succession de Mme X... ne donne lieu à aucun recours à l’encontre de MM. C... et R... au sens des articles L. 344-5 et L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 décembre 2012 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 17 janvier 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer