Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3200
 
  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Délai - Vie maritale - Déclaration - Conditions de délai
 

Dossier no 120294

M. X...
Séance du 8 novembre 2013

Décision lue en séance publique le 26 novembre 2013

    Vu la requête enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 2 avril 2012, présentée par le président du conseil général de l’Aube, tendant à l’annulation de la décision du 11 octobre 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Aube a annulé la décision du 25 février 2011 par laquelle il a rejeté la demande de M. X... tendant à ce que lui soit remis son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 3 223,41 euros, correspondant à la période d’octobre 2008 à mai 2009 ;
    Le président du conseil général soutient que sa décision était suffisamment motivée en droit et en fait dès lors que la motivation figurait à la fois dans l’arrêté de remise d’indu et dans la lettre d’accompagnement ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2012, présenté pour M. X... par Maître Francis SOTTAS, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête du président du conseil général est tardive et donc irrecevable ; que la décision du 25 février 2011 du président du conseil général a été prise par une autorité incompétente faute de délégation de pouvoir ou de signature du président du conseil général à la signataire de cette décision ; que la décision du 25 février 2011 du président du conseil général est entachée d’un défaut de motivation en fait, en méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 ; qu’il ne vivait pas en concubinage avec Mme Y... durant la période litigieuse dès lors qu’il n’habitait pas sous le même toit qu’elle et n’avait avec elle aucun lien de solidarité financière ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 22 mai 2012, présenté par le président du conseil général de l’Aube, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que M. X... vivait en concubinage avec Mme Y... durant la période litigieuse ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 14 juin 2012, présenté par le président du conseil général de l’Aube, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre qu’il n’a pas reçu notification de la décision de la commission départementale d’aide sociale dans les formes requises et que, par conséquent, le délai d’appel n’a pas commencé à courir et ne peut lui être opposé ; que la signataire de sa décision du 25 février 2011 disposait d’une délégation de signature à cette fin, délégation de signature qu’il produit ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que le président du conseil général de l’Aube s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 8 novembre 2013, M. LABRUNE, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir, ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...), et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X..., allocataire du revenu minimum d’insertion, s’est vu notifier, suite à un contrôle diligenté par l’organisme payeur, un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 3 223,41 euros, correspondant à la période d’octobre 2008 à mai 2009, au motif qu’il vivait maritalement avec Mme Y..., ce qu’il n’avait pas déclaré ; que M. X... a demandé la remise de cet indu au président du conseil général de l’Aube, qui a refusé par une décision du 25 février 2011 ; que M. X... a alors contesté cette décision devant la commission départementale d’aide sociale de l’Aube qui, par la décision du 11 octobre 2011 dont le président du conseil général relève appel, a annulé la décision du 25 février 2011 du président du conseil général ;
    Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que le président du conseil général de l’Aube ait reçu notification de la décision dans les formes requises ; que, par suite, on ne saurait lui opposer aucune tardiveté ; qu’il suit de là que la fin de non-recevoir soulevée par M. X... ne peut qu’être écartée ;
    Considérant que lorsqu’il statue sur un recours dirigé contre une décision qui, remettant en cause des paiements déjà effectués, ordonne la récupération de montants d’allocation de revenu minimum d’insertion que l’administration estime avoir été indument versés, il appartient au juge d’examiner d’abord les moyens tirés, le cas échéant, des vices propres de cette décision pour en prononcer, s’il y a lieu, l’annulation ; que dans ce dernier cas, il est loisible à l’administration, si elle s’y croit fondée et si, en particulier, aucune règle de prescription n’y fait obstacle, de reprendre régulièrement, sous le contrôle du juge, une nouvelle décision ; que dans le cas où aucun vice propre n’est de nature à justifier l’annulation de la décision attaquée, il appartient au juge d’examiner les droits de l’intéressé sur lesquels l’administration s’est prononcée afin d’y statuer lui-même et d’annuler ou de réformer, s’il y a lieu, cette décision ; qu’il appartient par suite à la commission centrale d’aide sociale d’examiner les moyens tirés des vices propres de la décision du 25 février 2011 du président du conseil général de l’Aube ;
    Considérant que la décision par laquelle l’autorité administrative procède à la récupération des sommes indûment versées au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion est au nombre des décisions imposant une sujétion et doit, par suite, être motivée en application de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;
    Considérant qu’il est constant que l’arrêté du 25 février 2011 par lequel le président du conseil général de l’Aube a refusé de remettre à M. X... son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion vise les dispositions législatives et réglementaires du code de l’action sociale et des familles applicables, mentionne le montant de l’indu de M. X... et fait état de « déclarations erronées » ; qu’il est également constant que la lettre d’accompagnement de cet arrêté, notifiée à M. X... en même temps que l’arrêté, expose que la décision du président du conseil général est fondée sur la « situation de vie maritale entre vous-même et Mme Y... depuis le 1er octobre 2008 », circonstance établie, selon ce courrier, par « les conclusions du rapport de contrôle effectué par les services de la Mutualité sociale agricole le 3 août dernier » ; qu’une telle motivation, alors même qu’elle ne figurait pas dans le texte de la décision elle-même, complétait la motivation de cette décision et permettait à M. X... de connaître et, le cas échéant, de discuter les motifs de droit et de faits sur lesquels le président du conseil général s’était fondé pour refuser de lui remettre sa dette ; qu’il résulte de ce qui précède que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale de l’Aube s’est fondée sur l’insuffisance de sa motivation pour annuler la décision du 25 février 2011 du président du conseil général de l’Aube ;
    Considérant, toutefois, qu’il appartient à la commission centrale d’aide sociale, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant la commission départementale d’aide sociale de l’Aube et devant la commission centrale d’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à la date du 25 février 2011 à laquelle le chef de la « mission insertion » a signé, au nom du président du conseil général de l’Aube, la décision refusant de remettre sa dette à M. X..., il disposait d’une délégation de signature à cette fin du président du conseil général, délégation produite par le président du conseil général ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision du 25 février 2011 du président du conseil général aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, notamment des nombreuses attestations de ses voisins, des contacts qu’il entretient avec la société HLM S..., de l’attestation produite par le chef de l’établissement scolaire où travaillait Mme Y..., ainsi que des réponses qu’il apporte aux observations effectuées lors du contrôle de l’organisme payeur, que M. X... résidait, durant la période litigieuse, à son domicile D... dans l’Aube et non pas chez Y..., à Z... ; qu’ainsi, alors même qu’il résulte de l’instruction, et n’est d’ailleurs pas contesté, que M. X... entretenait durant la période litigieuse une relation amoureuse avec Mme Y..., on ne saurait considérer, en l’absence de communauté de domicile et de communauté de vie matérielle, qu’il menait avec elle une vie de couple stable et continue pendant la période litigieuse ; que, dans ces conditions, le président du conseil général de l’Aube a fait une inexacte appréciation de la situation de M. X... en retenant, pour le calcul de ses droits au revenu minimum d’insertion, qu’il aurait vécu maritalement avec Mme Y... au cours de la période en litige ; qu’il y a lieu, par suite, de décharger M. X... de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le président du conseil général de l’Aube n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale de l’Aube a annulé sa décision en date du 25 février 2011,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du président du conseil général de l’Aube est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 8 novembre 2013 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 26 novembre 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet