Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Logement - Compétence juridictionnelle - Ressources - Déclaration - Justificatif
 

Dossier no 110568

M. X...
Séance du 30 janvier 2014

Décision lue en séance publique le 20 février 2014

    Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 23 mai 2011, présentée par M. X... qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o  D’annuler la décision du 19 janvier 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire a rejeté son recours tendant, d’une part, à la décharge, ou subsidiairement à la remise gracieuse, de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge, correspondant à la période du 1er mai 2008 au 31 mai 2009 et d’un montant de 4 578,72 euros, d’autre part à l’annulation du titre de recette no 2444/2010 du 20 avril 2010 relatif à cet indu ;
    2o  De le décharger, ou subsidiairement de lui accorder une remise gracieuse, de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge, correspondant à la période de mai 2008 à mai 2009 et d’un montant de 4 578,72 euros, et d’annuler en conséquence le titre de recette no 2444/2010 du 20 avril 2010 relatif à cet indu ;
    M. X... soutient qu’il n’a perçu aucun revenu en 2008 dès lors, en premier lieu, qu’il s’était certes inscrit au barreau de Bruxelles, mais sans exercer comme avocat en Belgique et sans, par conséquent, percevoir de revenus à ce titre, en second lieu qu’il a, certes, commencé une activité auprès de la Cour pénale internationale en 2008, activité exercée en février, avril et décembre, mais n’a commencé à percevoir une rémunération à ce titre qu’en mars 2009 ; que les courriers de la Cour pénale internationale témoignent d’ailleurs de ce délai entre les périodes d’exercice et les dates de mise en paiement de la rémunération correspondante ; qu’il était donc éligible au revenu minimum d’insertion en 2008 et n’a, à cet égard, pas manqué à ses obligations déclaratives ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 12 mars 2013, présenté par M. X..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que s’il est vrai qu’il a perçu des revenus de janvier à mai 2009, son référent du conseil général était au courant de ses activités à la Cour pénale internationale, d’une part, et du fait qu’il était inscrit au barreau de Bruxelles, uniquement à des fins de domiciliation professionnelle, d’autre part ; que s’il a déclaré tardivement les revenus qu’il avait perçu entre janvier et juin 2009, c’est parce qu’il était absent de France ; qu’il convient de distinguer les revenus qu’il a perçus au titre de ses activités auprès de la Cour pénale internationale, qui constituent pour lui des ressources, et les remboursements par la Cour de frais qu’il avait engagés pour des raisons professionnelles, qui ne constituent pas des ressources ; que sa bonne foi est établie et qu’il est donc possible, pour la période de janvier à juin 2009, seule période pour laquelle son indu est fondé, de lui accorder une remise gracieuse, au vu de la précarité de sa situation depuis que ses activités auprès de la Cour pénale internationale ont pris fin, en août 2011 et depuis qu’il a décidé de repartir, à la même période, en République démocratique du Congo, où sa réinsertion professionnelle est difficile ; il conclut en outre à ce que le droit à l’aide personnalisée au logement dont jouissait son épouse et qui a été supprimé depuis le 30 décembre 2010 lui soit rétabli ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2013, présenté par le président du conseil général d’Indre-et-Loire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que l’indu mis à la charge de M. X... est fondé, dès lors que celui-ci a bien perçu, durant la période litigieuse, des revenus qu’il n’avait pas déclarés ; que cette omission déclarative présente un caractère frauduleux ; que si M. X... a déclaré, tardivement, en août 2009, certains revenus, ceux-ci ne se rapportent en aucun cas aux sommes qu’il a reçues de la Cour pénale internationale ; que, dès lors que M. X... était absent du territoire français entre janvier 2009 et juin 2009, soit plus de trois mois, il ne pouvait, en vertu de l’article R. 262-2-1 du code de l’action sociale et des familles, percevoir le revenu minimum d’insertion durant cette période ; que dans son courrier du 26 juillet 2009 au préfet d’Indre-et-Loire, adressé dans le cadre de sa demande de naturalisation, M. X... affirme être avocat-associé au cabinet Mudera et Youna à Bruxelles et percevoir mensuellement 6 000 euros d’honoraires ; qu’il a avancé durant la période litigieuse, pour des raisons professionnelles, des sommes importantes qui permettent de douter de ce qu’il n’avait comme seules ressources des prestations d’aide sociale ; qu’en l’absence d’informations claires et précises sur les revenus de M. X..., l’autorité administrative est en droit, sous réserve des délais de prescriptions, de procéder à la répétition de l’intégralité des sommes qui lui ont été versées ; que les agissements frauduleux de M. X... font obstacle à toute remise gracieuse ; qu’au surplus, il ne se trouve pas dans une situation de précarité de nature à justifier une remise gracieuse ; qu’il lui est loisible de solliciter la mise en place d’un échéancier de paiement ;
        Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 août 2013, présenté par M. X..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que le tribunal administratif de Nantes, dans une décision relative à sa demande de naturalisation, a reconnu qu’il n’avait perçu en 2008 aucun revenu, la rémunération correspondant à ses activités de 2008 n’ayant été versée qu’en 2009 ; que, par suite, s’il ne conteste pas que l’indu mis à sa charge au titre de l’année 2009 est fondé, l’indu mis à sa charge au titre de l’année 2008 est infondé ; que les frais qu’il a avancés pour des raisons professionnelles lui avait été prêtés, notamment par ses frères et sœurs, et qu’il a remboursé ses créanciers lorsque la Cour pénale internationale lui a remboursé ces frais ; qu’il se trouve bien dans une situation de précarité aujourd’hui, sa situation étant bien moins favorable que celle dont il jouissait en 2009, à laquelle se réfère le président du conseil général ; que sa bonne foi permet de lui accorder une remise gracieuse pour la période de janvier à juin 2009, seule période pour laquelle son indu est fondé ; qu’il sollicite, à titre subsidiaire, la mise en place d’un échéancier de paiement ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 30 janvier 2014, M. LABRUNE, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
        Sur les conclusions relatives à l’aide personnalisée au logement :
    Considérant que M. X... demande que le droit à l’aide personnalisée au logement dont jouissait son épouse et qui a été supprimé depuis le 30 décembre 2010 lui soit rétabli ; que toutefois, en vertu de l’article L. 351-14 du code de la construction et de l’habitation, ses compétences ne ressortissent pas à la compétence de la juridiction de l’aide sociale, juridiction administrative spécialisée ; que, par suite, les conclusions de M. X... relatives à l’aide personnalisée au logement doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
        Sur les conclusions relatives au revenu minimum d’insertion :
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...). » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... s’est vu notifier un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 4 578,72 euros, correspondant à la période du 1er mai 2008 au 31 mai 2009, au motif qu’il avait, durant cette période, perçu et non déclaré, des revenus qu’il tirait de son activité auprès de la Cour pénale internationale ; que M. X... a contesté cet indu et sollicité une remise gracieuse auprès du président du conseil général d’Indre-et-Loire qui, par une décision du 15 avril 2010, a rejeté sa demande ; qu’un titre de recette, portant le no 2444/2010 et relatif à cet indu, a alors été émis, le 20 avril 2010 ; que M. X... a demandé l’annulation de ce titre, la décharge de son indu et, à titre subsidiaire, sa remise gracieuse, à la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire qui, par la décision du 19 janvier 2011 dont M. X... relève appel, a rejeté son recours ;
        En ce qui concerne le bien-fondé de l’indu :
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... a exercé une activité auprès de la Cour pénale internationale en 2008 et 2009 ; qu’il a perçu à ce titre, pour les périodes travaillées de février, avril et décembre 2008, une rémunération, dont le versement a été demandé par le greffe de la Cour pénale internationale respectivement les 15 décembre 2008, 18 décembre 2008 et 27 mai 2009 ; que M. X... n’a effectivement appréhendé ces sommes qu’en 2009 et qu’il n’a donc perçu, en 2008, aucun revenu provenant de son activité auprès de la Cour pénale internationale ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutient le président du conseil général, l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de M. X... correspondant à la période du 1er mai 2008 au 31 décembre 2008 n’est pas fondé ; que M. X... est donc fondé à demander la décharge de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion porté à son débit au titre de la période du 1er mai 2008 au 31 décembre 2008 ;
    Considérant que M. X... ne conteste pas le bien fondé de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 mai 2009, mais demande seulement qu’il lui soit accordé une remise gracieuse de celui-ci, eu égard à sa situation de précarité ;
        En ce qui concerne la demande de remise gracieuse de l’indu correspondant à la période du 1er janvier 2009 au 31 mai 2009 :
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X..., qui se borne à faire valoir qu’il a cessé son activité auprès de la Cour pénale internationale et qu’il a décidé volontairement de partir en République démocratique du Congo où son insertion professionnelle est difficile, sans apporter aucun élément chiffré sur ses ressources, ne se trouve pas dans une situation de précarité, que la commission centrale d’aide sociale ne saurait présumer, de nature à justifier que lui soit accordée une remise gracieuse de l’indu restant à sa charge ; qu’ainsi, à supposer même qu’il soit possible, au regard des prescriptions de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, d’accorder à M. X... une remise gracieuse de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion, il n’y a, en tout état de cause, pas lieu de lui accorder une telle remise ;
    Considérant au surplus que si M. X... rencontre des difficultés à s’acquitter immédiatement de la créance restant à sa charge, il lui appartient de solliciter du payeur départemental un échéancier de paiement,

Décide

    Art. 1er.  -  Les conclusions de M. X... relatives à l’aide personnalisée au logement sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
    Art. 2.  -  Il est accordé à M. X... la décharge de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion porté à son débit au titre de la période du 1er mai 2008 au 31 décembre 2008.
    Art. 3.  -  La décision du 19 janvier 2011 de la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire et le titre de recette no 2444/2010 du 20 avril 2010 sont réformés en ce qu’ils ont de contraire à la présente décision.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de M. X... est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., à Maître Emmanuel DAOUD, au conseil général d’Indre-et-Loire, au préfet d’Indre-et-Loire. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 janvier 2014 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 20 février 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet