Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Déclaration - Erreur - Précarité
 

Dossier no 120918

M. X...
Séance du 30 janvier 2014

Décision lue en séance publique le 20 février 2014

    Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 26 octobre 2012, présentée par M. X... qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o D’annuler la décision du 5 juillet 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Calvados a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du 7 mai 2009 par laquelle le président du conseil général du Calvados a rejeté sa demande de remise gracieuse de son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 19 485,97 euros, correspondant à la période du 1er décembre 2002 au 31 décembre 2007, d’autre part à la remise gracieuse de cet indu ;
    2o D’annuler la décision du 7 mai 2009 par laquelle le président du conseil général du Calvados a rejeté sa demande de remise gracieuse de son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 19 485,97 euros, correspondant à la période du 1er décembre 2002 au 31 décembre 2007, et de lui accorder la remise gracieuse de cet indu ;
    M. X... soutient qu’il n’a pas été informé de la date d’examen de son recours par la commission départementale d’aide sociale et n’a, en conséquence, pas pu assister à l’audience ; qu’il ne conteste pas le bien-fondé de l’indu mis à sa charge et reconnaît une accumulation d’erreurs de sa part dans ses échanges avec les services administratifs chargés de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; qu’en revanche, il n’a jamais eu l’intention de manquer à ses obligations déclaratives et n’a pas commis de fraude ; que ses omissions déclaratives sont dues essentiellement, d’une part, aux moments difficiles qu’il a dû traverser en accompagnant sa mère en fin de vie, et, d’autre part, à ses absences répétées à l’étranger ; que sa situation financière ne lui permet pas de faire face à un indu aussi important que celui mis à sa charge, dès lors que son revenu imposable s’est élevé en 2011 à 12 795 euros, soit une moyenne mensuelle de 1 066 euros ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2013, présenté par le président du conseil général du Calvados, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que, durant la période litigieuse, M. X... n’a pas déclaré sa situation correctement et qu’il a donc été impossible d’évaluer ses ressources ; que l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles fait obstacle à ce que soit accordée à M. X... une remise gracieuse, dès lors que celui-ci s’est rendu coupable de manœuvres frauduleuses et de fausses déclarations ; que la situation de M. X... et sa possible participation contributive justifie un refus de remise gracieuse ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que M. X... s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 30 janvier 2014 M. LABRUNE, rapporteur, M. X..., requérant, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...), et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) » ;
    Considérant que, en vertu du premier alinéa de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, tout paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion doit normalement donner lieu à récupération ; que, si le dernier alinéa de cet article permet au président du conseil général, en cas de précarité de la situation du débiteur, de réduire la créance du département ou d’en accorder la remise, il résulte des dispositions ajoutées à cet alinéa par la loi no 2006-339 du 23 mars 2006, entrées en vigueur le 25 mars suivant, que cette faculté de réduction ou de remise est toutefois exclue en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration de la part de l’intéressé ; qu’en décidant ainsi de priver les allocataires se livrant à des manœuvres frauduleuses ou à de fausses déclarations de toute possibilité de réduction ou de remise, le législateur a entendu sanctionner ces agissements et empêcher leur réitération ; que ces dispositions ne sont par suite applicables qu’ aux seuls faits commis postérieurement à leur entrée en vigueur ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... s’est vu notifier un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion, d’un montant de 19 485,97 euros, correspondant à la période du 1er décembre 2002 au 31 décembre 2007, au motif qu’il avait perçu durant cette période des revenus qu’il avait omis de déclarer et qu’il était donc impossible de déterminer le montant de ses ressources d’alors ; que M. X... a sollicité une remise de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion auprès du président du conseil général du Calvados qui a refusé par une décision du 7 mai 2009 ; que M. X... a contesté cette décision devant la commission départementale d’aide sociale du Calvados qui, par la décision du 5 juillet 2012 dont M. X... relève appel, a rejeté la demande qu’il lui avait présentée ;
    Considérant que si M. X... soutient qu’il n’a pas été informé de la date d’examen de son recours par la commission départementale d’aide sociale et n’a, en conséquence, pas pu assister à l’audience, il n’apporte, à l’appui de cette allégation, aucun élément susceptible de permettre d’en apprécier le bien-fondé ;
    Considérant que M. X... ne conteste pas le bien-fondé des sommes mises à sa charge mais demande qu’elles lui soient remises eu égard à sa situation de précarité ;
    Considérant que la notion de fausse déclaration au sens de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, notion au demeurant applicable aux seuls faits commis postérieurement au 25 mars 2006, doit s’entendre comme visant les inexactitudes ou omissions délibérément commises par l’allocataire dans l’exercice de son obligation déclarative ;
    Considérant que si M. X... n’a pas déclaré certains des revenus qu’il a perçus durant la période litigieuse, il ne résulte pas de l’instruction qu’il aurait volontairement dissimulé ces ressources, dès lors, notamment, qu’il ne pensait pas que les revenus mobiliers provenant du portefeuille de valeurs donné par sa mère constituaient des ressources au sens et pour l’application des dispositions précitées du code de l’action sociale et des familles et qu’il a connu des difficultés psychologiques en accompagnant sa mère malade et isolée ; que, par suite, les erreurs et omissions commises par M. X... doivent en tout état de cause être regardées comme non délibérées et dépourvues de toute intention de fraude, qu’elles soient survenues avant ou après le 25 mars 2006 ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, et n’est d’ailleurs pas sérieusement contesté, que M. X..., dispose de ressources annuelles de l’ordre de 12 800 euros, soit une moyenne de revenus mensuels d’environ 1 000 euros ; que, par suite, le remboursement par M. X... de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion pourrait porter une atteinte irréversible à l’équilibre financier précaire de son foyer au regard des ressources dont il dispose ; que, dès lors, il sera fait une juste appréciation de cette situation en lui accordant une remise de 45 % de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la décision du 7 mai 2009 du président du conseil général du Calvados, qui refusait à M. X... toute remise de dette, doit être annulée ; que M. X... est fondé à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Calvados a, par sa décision attaquée du 5 juillet 2012, rejeté sa demande ;
    Considérant au surplus que si M. X... rencontre des difficultés à s’acquitter immédiatement de la créance restant à sa charge, il lui appartiendra de solliciter du payeur départemental un échéancier de paiement,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 7 mai 2009 du président du conseil général du Calvados, ensemble la décision du 5 juillet 2012 de la commission départementale d’aide sociale du Calvados sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est accordé à M. X... une remise de 45 % de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., au conseil général du Calvados, au préfet du Calvados. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 janvier 2014 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 20 février 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet