Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours (DOS) - Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Hébergement - Frais - Recours - Erreur - Délai - Légalité - Compétence juridictionnelle
Dossier no 130236

M. X...
Séance du 6 mars 2014

Décision lue en séance publique le 6 mars 2014

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, le 27 mai 2013, la requête présentée par le préfet du Haut-Rhin tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale déterminer le domicile de secours de M. X... pour la prise en charge de ses frais d’hébergement au centre départemental de repos et de soins au titre de l’aide sociale à compter du 19 juillet 2012, date d’entrée dans l’établissement, par les moyens que, depuis 1973, M. X... était incarcéré à la prison centrale, située dans le Haut-Rhin ; qu’en l’absence d’archives concernant l’intéressé, encore existantes, ni les agents du service pénitentiaire d’insertion et de probation, ni les services du conseil général du Haut-Rhin n’ont pu identifier un domicile de secours ; qu’à aucun moment, avant son incarcération, il n’a été établi que M. X... aurait pu être une personne sans domicile fixe ; que sans éléments prouvant une situation d’errance et aucun domicile de secours n’ayant pu être déterminé, les dépenses d’aide sociale incombent au département du Haut-Rhin, lieu de résidence de l’intéressé au moment de la demande d’aide sociale, selon les dispositions de l’article L. 121-1 du code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré le 5 septembre 2013, le mémoire en défense du président du conseil général du Haut-Rhin, tendant au rejet de la requête par les motifs que, sur la forme, conformément à l’article R. 131-8 du code de l’action sociale et des familles, le préfet du Haut-Rhin disposait d’un délai d’un mois pour saisir la commission centrale d’aide sociale ; que ce délai n’a pas été respecté et que son non-respect vaut acceptation par ce dernier de sa compétence ; que, sur le fond, il est établi que le séjour ininterrompu de l’intéressé en établissement pénitentiaire de 1973 à 2012 n’est pas acquisitif de domicile de secours ; que les démarches accomplies auprès d’autres départements dans lesquels l’intéressé aurait pu acquérir, antérieurement à son incarcération, un domicile de secours sont restées infructueuses ; que, dès lors que l’élection de domicile détermine la compétence de l’organisme compétent pour les frais d’hébergement, l’absence, comme en l’espèce, de domicile de secours et de résidence au moment de la demande entraîne la compétence de l’Etat pour prendre en charge le coût de l’hébergement ;
    Vu, enregistré le 25 septembre 2013, le mémoire en réplique du préfet du Haut-Rhin persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’il a bien saisi la commission centrale d’aide sociale dans le délai d’un mois qu’il lui était imparti ; que la durée du séjour en prison de M. X... ne pouvant être prise en compte pour l’acquisition d’un domicile de secours en raison de son caractère non volontaire, il résulte de l’instruction qu’aucun domicile de secours n’a pu être déterminé ; qu’il apparaît, sans contestation possible, que M. X... résidait bien dans le département du Haut-Rhin au moment de la demande d’aide sociale ; que selon le 2e alinéa de l’article L. 121-1 du code de l’action sociale et des familles, à défaut de domicile de secours, les dépenses incombent au département où réside l’intéressé au moment de la demande d’admission à l’aide sociale ; que le département du Haut-Rhin est donc compétent pour assumer les dépenses d’aide sociale de M. X... ;
    Vu, enregistré le 14 octobre 2013, le mémoire du président du conseil général du Haut-Rhin communiquant deux pièces complémentaires au soutien de ses précédentes écritures ;
    Vu le supplément d’instruction diligenté par la commission centrale d’aide sociale en date du 10 février 2014 et la réponse du président du conseil général du Haut-Rhin en date du 4 mars 2014 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la décision du Conseil constitutionnel no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 mars 2014, Mme CIAVATTI, rapporteure, M. G..., pour le préfet du Haut-Rhin, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la recevabilité de la requête ;
    Considérant que, nonobstant la solution donnée au fond au présent litige, il apparaît opportun, à toutes fins..., de statuer sur la contestation par le président du conseil général du Haut-Rhin de la recevabilité de la requête du préfet ;
    Considérant que le préfet du Haut-Rhin a reçu le 26 avril 2013 la réponse du président du conseil général à la transmission du dossier qu’il avait adressé à ce dernier sur le fondement du II de l’article R. 131-8 du code de l’action sociale et des familles ; que par lettre du 23 mai 2013, dont il ressort du dossier qu’elle a été postée et donc « transmise » (souligné par la CCAS) le même jour, il a transmis le dossier à la commission centrale d’aide sociale, en saisissant celle-ci du litige de l’imputation financière ; que le texte précité comme par exemple celui de l’article R. 314-3-1 en matière tarifaire tel qu’interprété par une jurisprudence constante se borne à exiger la transmission dans le délai fixé et non la réception par la juridiction de ladite transmission quel que soit le mode d’acheminement ou de dépôt utilisé ; qu’ainsi le président du conseil général du Haut-Rhin ne saurait se prévaloir de la date de réception de la requête par la commission centrale d’aide sociale ; que, d’ailleurs, l’eût-il pu, ou si la solution ci-dessus venait à être infirmée, les délais de recours contentieux sont des délais francs ; que la requête du 23 mai 2013 est recevable, dès lors que dirigée contre une décision reçue le 26 avril 2013, elle a été enregistrée à la commission centrale d’aide sociale le 27 mai 2013, soit dans le délai prévu par les dispositions précitées ; qu’ainsi et en toute hypothèse, même dans le cadre de l’argumentation, selon la présente juridiction, erronée du défendeur, la requête serait recevable ;
    Sur le délai de retour de la transmission du dossier par le préfet du Haut-Rhin au président du conseil général du Haut-Rhin par ce dernier au préfet ;
    Considérant que l’article R. 131-8 II dispose que : « Lorsque le préfet est saisi d’une demande d’admission à l’aide sociale, dont la charge financière au sens de l’article L. 121-1 lui paraît relever d’un département, il transmet le dossier au plus tard dans le mois de la réception de la demande au président du conseil général du département qu’il estime compétent. Si ce dernier n’admet pas la compétence de son département, il retourne le dossier au préfet au plus tard dans le mois de sa saisine. Si le préfet persiste à décliner la compétence de l’Etat, il transmet le dossier au plus tard dans le mois de sa saisine à la commission centrale d’aide sociale qui statue dans les conditions de l’article L. 134-3. » ; que bien que les termes « au plus tard » soient employés au titre de chacun des trois délais impartis dans les textes, il y a lieu de distinguer le délai de recours contentieux sur lequel il vient d’être statué, le délai de recours du préfet au président du conseil général et le délai, ici litigieux, de retour du dossier par ce dernier au préfet ; que s’agissant de la recevabilité de la requête au juge, les termes « au plus tard » sont impartis à peine de forclusion ; que s’agissant par contre des délais de procédure administrative, l’emploi des mêmes termes n’implique pas que leur méconnaissance entraîne déchéance de l’administration qui les a méconnus à faire valoir ses droits ; que, certes, lorsqu’un recours contentieux est subordonné à un recours préalable administratif, qui présente un caractère obligatoire, et non seulement à celui d’une procédure préalable à la saisine du juge organisée par le texte, le respect de ce délai par l’autorité saisissante est imparti à peine de nullité ; que, par contre, l’absence de respect du délai imparti par l’autorité destinataire du recours administratif préalable obligatoire (RAPO) pour statuer et retourner le dossier à l’auteur dudit recours n’est pas imparti à telle peine ;
    Considérant, en l’espèce, qu’il y a lieu, comme l’a déjà fait la présente juridiction, de considérer la procédure prévue au II de l’article R. 131-8 comme manifestant l’exercice par le préfet d’un recours préalable obligatoire au président du conseil général et non seulement l’existence d’une procédure spéciale organisée pour garantir le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales ; que dans ces conditions et en tout état de cause le préfet a, comme il n’est pas contesté, effectivement respecté le délai de RAPO d’un mois, en transmettant le dossier d’aide sociale reçu le 20 novembre 2012 au président du conseil général dès le 13 décembre 2012 ; que, par contre, le président du conseil général, du fait de la saisine, postérieurement à la transmission par le préfet, du département des Bouches-du-Rhône pour reconnaissance du domicile de secours dans ce département, par une lettre adressée d’abord par erreur au département des Alpes-Maritimes et transmise par ce dernier au département des Bouches-du-Rhône, n’a fait retour au préfet que le 24 avril 2013 par la lettre ci-dessus évoquée reçue le 26 avril 2013 et qu’ainsi, le second délai de « retour » n’a pas été respecté ; que, toutefois, en admettant, comme il a été relevé ci-dessus, que l’obligation de saisine préalable du président du conseil général par le préfet prévue par le II de l’article R. 131-8 soit de la nature de celle d’un RAPO, la circonstance que le président du conseil général n’ait pas statué sur ce recours dans le délai d’un mois prévu par ce texte est sans incidence sur la solution du litige, dès lors que ce délai n’a pas été imparti à l’autorité administrative destinataire, même lorsqu’elle a été saisie d’un RAPO, à peine de nullité ; qu’a fortiori, la saisine dont s’agit dut-elle être assimilée, contrairement à ce qui vient d’être jugé, à une procédure spéciale non assimilable à un RAPO, la transmission tardive de la décision du président du conseil général au préfet, avant saisine par celui-ci du juge de la commission centrale d’aide sociale, demeure sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, comme sur la détermination de la collectivité en charge de l’imputation financière de la dépense ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin d’examiner la question de savoir si le président du conseil général du Haut-Rhin, qui, ainsi qu’il l’explicite dans son mémoire en défense, a entendu respecter les critères prioritaires successivement applicables pour la détermination de la collectivité en charge de la dépense, en saisissant d’abord, à la réception de la transmission du préfet et au vu des éléments du dossier dont il disposait, le département des Bouches-du-Rhône, avant de retourner le dossier au préfet, en l’absence de pertinence de sa saisine dudit département, aurait dans ces circonstances bénéficié d’une prorogation du délai de recours jusqu’à la réception de la décision de refus de reconnaissance de sa compétence du président du conseil général des Bouches-du-Rhône auquel celui des Alpes-Maritimes avait, comme il y était tenu, transmis le dossier initialement à tort à lui adressé par le président du conseil général du Haut-Rhin, le préfet requérant n’est pas fondé à soutenir, comme il le fait par un premier moyen, que « le conseil général ayant reçu le 13 décembre 2012 la demande d’aide sociale de M. X... transférée par mes services au titre du II de l’article R. 131-8, il disposait d’un délai d’un mois, soit jusqu’au 13 janvier 2013, pour contester sa compétence. Il convient donc (...) de considérer que l’absence de réponse dans le délai imparti vaut acceptation par le département de sa compétence » ;
    Sur la saisine antérieure du président du conseil général et son absence de saisine de la collectivité recherchée ;
    Considérant que, par un second moyen, le préfet soutient que le président du conseil général, ayant été saisi antérieurement par l’établissement d’accueil - et d’ailleurs non par le demandeur d’aide sociale - d’une demande tendant à l’octroi de l’aide litigieuse, l’avait rejetée par une décision notifiée au demandeur du 18 septembre 2012 sans mettre en œuvre la procédure prévue à l’article L. 122-4 du code de l’action sociale et des familles ; que, toutefois et pour regrettable, d’ailleurs, qu’elle puisse être, cette absence de saisine lors de la première demande au motif que le domicile de secours était dans un autre département que le département recherché demeure sans incidence dans la présente instance où le demandeur a, en tout état de cause, saisi non un département mais l’Etat sur le droit du président du conseil général, saisi, en conséquence, par le préfet, à faire valoir dans la présente instance que la collectivité d’aide sociale en charge de l’imputation financière de la dépense est l’Etat ;
    Sur la détermination de l’imputation financière des dépenses d’aide sociale ;
    Sur l’ordre d’examen des questions par le juge de cette imputation ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 122-1 à 4 et L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient au juge statuant sur des prestations d’aide sociale accordées à un majeur, dans le cadre de l’article L. 134-3 du même code, de rechercher successivement par ordre de subsidiarité :
            -  en premier lieu, si un domicile de secours peut être déterminé après l’accession à la majorité du demandeur ;
            -  en deuxième lieu, si tel n’est pas le cas, si un tel domicile a été acquis durant la minorité de celui-ci et conservé après la majorité ;
            -  en troisième lieu, si tel n’est toujours pas le cas, de rechercher quelle est la résidence du demandeur au moment de la demande d’aide sociale ;
            -  en quatrième lieu, toutefois, d’écarter cette recherche lorsqu’à la date de la demande d’aide sociale le demandeur est admis dans un établissement « sanitaire et social » autorisé dans lequel le domicile de secours ne peut être acquis ;
            -  en cinquième lieu, si l’imputation financière ne peut être déterminée prioritairement en fonction du domicile de secours, subsidiairement en fonction de la résidence au moment de la demande d’aide sociale, de rechercher plus subsidiairement encore si les conditions d’application de l’article L. 111-3 sont réunies ;
    Que si cet article ne concerne littéralement que les personnes « pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé » la jurisprudence du Conseil d’Etat (département des Pyrénées-Atlantiques) a étendu le champ de cet article à l’hypothèse où la demande d’aide sociale formulée avant le retour en France par une personne qui avait à l’étranger un domicile fixe avait été formulée à l’étranger ; que la présente formation a étendu cette solution à l’hypothèse où, dans la même situation de retour en France, la demande y avait été formulée avant que le demandeur n’ait pu acquérir par une résidence continue de trois mois un domicile de secours dans un département ;
    Considérant que c’est dans le cadre d’un tel schéma qu’il y a lieu de statuer dans le présent litige ;
    Sur la discussion des parties ;
    Considérant que le préfet du Haut-Rhin soutient que l’article L. 122-1, 2e alinéa, du code de l’action sociale et des familles (détermination de l’imputation financière par la résidence au moment de la demande) est applicable à la situation de l’espèce, en se fondant notamment sur une décision de la présente formation de jugement antérieure à la décision du Conseil d’Etat de 2005 (département du Val-d’Oise) qui l’a infirmée ; que dans cette décision ladite juridiction considérait qu’une personne accueillie dans un établissement social n’y acquérait certes pas son domicile de secours mais que sa situation était bien une situation de résidence (elle y vit, elle y reçoit son courrier, elle est un habitant de la commune - et donc du département - parfois « comme les autres », parfois « un peu différent » mais néanmoins assimilable) ; que, quel que puisse être le bien-fondé de la position qu’avait alors prise la commission centrale d’aide sociale, celle-ci applique depuis l’intervention de la décision (département du Val-d’Oise) la jurisprudence du Conseil d’Etat d’où il ressort qu’une personne admise dans un établissement « sanitaire et social » ne peut y « résider » dès lors qu’elle ne peut y acquérir un domicile de secours ; qu’ainsi le moyen du préfet requérant formulé sur le fondement du 2e alinéa de l’article L. 122-1 ne peut qu’être écarté ;
    Considérant que le président du conseil général du Haut-Rhin soutient que dès lors, ce qui n’est ni contesté, ni infirmé par les pièces du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale, qu’aucun domicile de secours ne peut être déterminé, puisque M. X... ayant été admis dans divers établissements pénitentiaires du département du Haut-Rhin depuis 1973, avant de l’être au centre départemental de repos et de soins en 2012, n’avait ainsi pu, comme il n’est également pas contesté, acquérir, faute de liberté de choix de son changement de résidence, un domicile de secours dans le département du Haut-Rhin et était, par ailleurs, placé au CRDS « sous le contrôle » de l’administration pénitentiaire dans l’attente d’une éventuelle libération conditionnelle, s’applique en conséquence l’article L. 111-3 pour la catégorie de personnes dont « aucun domicile fixe ne peut être déterminé » ; que si la solution du litige doit être apportée dans le seul cadre de la discussion des parties, le président du conseil général du Haut-Rhin ne saurait de toute façon se prévaloir, dans la présente instance, de la décision de la présente formation du 27 août 2010 intervenue dans une situation où l’intéressé ne disposait pas, certes comme M. X..., d’un domicile de secours identifiable avant son incarcération, mais avait immédiatement après celle-ci été en situation d’errance sur un territoire dont il n’était pas établi qu’il fut celui d’un seul département et n’avait été admis dans un établissement « sanitaire et social » qu’à l’issue de cette période d’errance postérieure à l’incarcération ; qu’une telle situation est de la nature de celles sur lesquelles a statué la jurisprudence du Conseil d’Etat (département des Hauts-de-Seine) de 1988 et, à la connaissance de la commission, l’ensemble de la jurisprudence de la juridiction régulatrice où, antérieurement à sa (première) admission en établissement « sanitaire et social », l’intéressé était en situation d’errance ; que force est de constater que tel n’est pas le cas dans la présente instance, où il résulte des faits ci-dessus rapportés, qu’après avoir été incarcéré de 1973 à 2012, M. X... a été directement transféré, fût-ce sous le contrôle d’ailleurs de l’administration pénitentiaire, dans un établissement « sanitaire et social » dont le caractère d’établissement autorisé n’est ni contesté, ni infirmé par les pièces du dossier, où, en tout état de cause, il se trouvait à la date de la demande d’aide sociale ; qu’ainsi, il apparaît difficile d’affirmer littéralement que M. X... se trouvait « sans domicile fixe » au moment de sa demande d’aide sociale, puisqu’il n’était pas en situation d’errance ; que, toutefois, comme il a été relevé ci-dessus, la jurisprudence a déjà étendu le champ d’application de l’article L. 111-3 au cas de demandes formulées au retour en France ou, en ce qui concerne la commission centrale d’aide sociale, dans les trois mois de ce retour, d’admission à l’aide sociale d’une personne ayant antérieurement, mais à l’étranger, un « domicile fixe » ; qu’alors que le juge est tenu de donner aux litiges dont il est saisi, même en cas d’obscurité ou d’incomplétude de la loi, une solution autant que possible raisonnable (et il apparait peu raisonnable dans des circonstances telles celles de l’espèce de ne désigner aucune collectivité d’aide sociale...), il y a lieu d’étendre également le champ d’application de l’article L. 111-3 à l’hypothèse de l’espèce où, même en l’absence d’errance établie antérieure à l’admission dans l’établissement pénitentiaire d’Ensisheim, puis dans l’établissement « sanitaire et social » CRDS, le demandeur ne relevait ni des articles L. 122-2 et L. 122-3 pour n’avoir pas acquis et/ou conservé un domicile de secours, ni de l’article L. 111-3 au sens où il n’était pas littéralement « sans domicile fixe », et où la résidence, après la majorité le 23 décembre 1971 et avant l’admission en établissement pénitentiaire en 1973, puis en établissement médico-social autorisé, n’a pu être établie ;
    Sur la situation de M. X... durant sa minorité ;
    Considérant que, comme il a été rappelé ci-dessus, lorsque le demandeur n’acquiert pas de domicile de secours après sa majorité, il conserve, s’il en a acquis un durant sa minorité, celui qui a été le sien durant celle-ci, soit celui des parents ou du parent exerçant l’autorité parentale ; que s’il est vrai que cette solution a été, à la connaissance de la présente juridiction, appliquée lorsqu’après sa majorité le demandeur, qui n’avait pu alors acquérir par une résidence continue de plus de trois mois dans un département un domicile de secours après celle-ci, avait été après moins de trois mois admis dans un établissement « sanitaire et social » et était demeuré dans cet établissement ou tout autre de même nature, sans que dans le second cas des intervalles de plus de trois mois de résidence continue dans un même département puissent être établis par l’instruction, il apparait à la présente formation raisonnable, voire indispensable, d’étendre cette solution à la situation de l’espèce où M. X..., qui a atteint sa majorité le 23 décembre 1971, s’est trouvé dans une situation de résidence, notamment dans les Bouches-du-Rhône, qui n’a pu être établie de cette date à sa première admission en établissements pénitentiaires en 1973, ensuite continue jusqu’en 2012 et pour lequel aucun domicile de secours n’a pu être déterminé après la majorité et avant l’incarcération ; qu’il y a lieu alors, comme il a été rappelé ci-dessus, d’examiner préalablement si M. X..., incarcéré en 1973, n’avait pas conservé, en l’absence de domicile de secours déterminable après sa majorité, le domicile de secours qu’il avait acquis durant sa minorité et qu’il n’avait pu perdre par l’incarcération, en l’absence de liberté de choix ; que, comme il a été également rappelé, une réponse positive rend sans objet de statuer sur la question de savoir si l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles est ou non applicable dans la situation de l’espèce ;
    Considérant, à cet égard, qu’il ressort des pièces versées au dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale, que M. X..., selon l’extrait d’acte d’état civil établi par l’officier d’état civil de Charleville-Mézières, est né le 23 décembre 1950 dans les Ardennes où résidaient ses parents ; que selon la lettre du président du conseil général du Haut-Rhin au centre départemental de repos et de soins du 18 septembre 2012 « ses parents étaient domiciliés dans les Ardennes » ; qu’il résulte de l’instruction que les communes de A... et B... ont fusionné en 1966 et qu’à la date de la majorité de M. X..., le 23 décembre 1971, B... faisait partie de la commune de A... (Ardennes) ; que la question à laquelle le dossier n’apportait pas réponse était alors de déterminer si les parents de M. X..., exerçant sur lui l’autorité parentale durant sa minorité, se trouvaient domiciliés à A... durant celle-ci et notamment au moment de la majorité de M. X... ; qu’à cette fin, par supplément d’instruction contradictoire du 10 février 2014, la commission centrale d’aide sociale a demandé au président du conseil général du Haut-Rhin de préciser notamment à quelle adresse était domicilié M. X... durant sa minorité et notamment dans les trois derniers mois de celle-ci ; qu’en réponse à ce supplément d’instruction, le président du conseil général du Haut-Rhin expose que les époux X... « se sont mariés le 22 mai 1948 à B... » (alors commune) ; que « Mme X... est décédée. M. X... est domicilié rue Z... depuis au moins 1991 » (souligné par la commission centrale d’aide sociale) « en effet, le transfert informatique des listes électorales en 1991 a repris cette adresse » ; que, toutefois, ces éléments, pour plausible que puisse être la résidence continue des époux X... puis de M. X... à B... puis A... de la naissance à la majorité de leur fils, ne permettent pas de considérer avec un degré de certitude suffisant, même si l’assisté est né à B... devenue A..., que ses parents - son père ? - y résidaient de manière continue durant la minorité de leur fils et notamment à la fin de celle-ci ; que dans ces conditions, et en admettant même qu’il eût appartenu à la commission centrale d’aide sociale de le faire d’office dans l’hypothèse où les faits seraient établis par l’instruction, il ne peut être fait application, en l’état du dossier, des dispositions du 2e alinéa de l’article L. 122-2 du code de l’action sociale et des familles et il y a lieu, pour les motifs ci-dessus exposés, de faire application de celles de l’article L. 111-3 du même code,

Décide

    Art. 1er.  -  L’imputation financière des dépenses d’aide sociale, exposées au centre départemental de repos et de soins pour M. X..., est effectuée en application des dispositions de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles.
    Art. 2.  -  La requête susvisée du préfet du Haut-Rhin est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée par le greffe de la commission centrale d’aide sociale au préfet du Haut-Rhin et au président du conseil général du Haut-Rhin. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 mars 2014 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, Mme CIAVATTI, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 6 mars 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet