Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Prestation de compensation du handicap (PCH) - Charges - Composition de la formation de jugement - Compétence juridictionnelle - Conditions d’octroi - Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) - Prescription
Dossier no 130466

M. X...
Séance du 26 juin 2014

Décision lue en séance publique le 26 juin 2014     Vu, enregistrée à la direction départementale de la cohésion sociale de la Loire le 18 mars 2013 et transmise à la commission centrale d’aide sociale le 19 septembre 2013, la requête présentée par M. X..., demeurant dans la Loire, et le mémoire, enregistré le 5 août 2013 au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, présenté, pour ce dernier, par Maître PREZIOSI, avocat, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale 1o « réformer la décision rendue le 6 décembre 2012 » par la commission départementale d’aide sociale de la Loire rejetant sa demande dirigée contre la décision du 25 janvier 2012 du président du conseil général de la Loire interrompant le versement de la prestation de compensation du handicap de M. X... à compter de février 2012 et décidant de la répétition des arrérages de cette prestation perçus du 1er septembre 2007 au 31 janvier 2012 en demandant à M. X... de produire les documents permettant de calculer le montant de la répétition ; 2o d’annuler la décision précitée et la décision du président du conseil général de la Loire du 19 février 2013 fixant le montant de la répétition dont s’agit ; 3o condamner le département de la Loire à lui rembourser les montants à lui-même remboursés en exécution de la décision attaquée, ainsi qu’à lui verser l’intégralité des montants dus au titre de la prestation depuis le 19 septembre 2007 ; 4o condamner le département de la Loire à lui verser 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ; 5o le condamner aux entiers dépens par les moyens que c’est à tort que « le conseil général de la Loire » a considéré que les dispositions de l’article L. 245-42 du code de l’action sociale et des familles légitimeraient une action en « récupération » et une cessation du bénéfice du droit au versement ; qu’il n’a pas compétence pour ajouter des conditions supplémentaires pour l’ouverture du droit à la prestation de compensation du handicap ; que dans la mesure où « les frais supportés par la personne » mentionnés à l’article R. 245-42 sont envisagés au regard des critères prévus par les textes et qu’aucun texte ne mentionne expressément le traitement des sommes perçues par des personnes indemnisées au titre du dommage corporel, seules les conditions de cumul avec une prestation en espèces de la sécurité sociale étant précisées par la loi et l’article D. 245-43 ; que l’article D. 245-25 qui définit les pièces à produire ne mentionne pas les protocoles et les jugements d’indemnisation de droit commun à l’appui de celles à joindre à une demande de prestation de compensation du handicap à laquelle le droit est ouvert, dès lors que le demandeur répond aux conditions des articles L. 245-1, R. 245-1 àR. 245-12 ; qu’il appartient au législateur de clarifier l’articulation des prises en charge et de réformer l’article R. 245-40 s’il l’estime souhaitable ; que l’indemnisation et la prestation de compensation du handicap répondent à des logiques différentes ; qu’en effet, contrairement à la prestation de compensation du handicap, l’indemnisation de droit commun est exclusivement calculée au regard d’un besoin pour l’engagement d’une dépense ; que, comme l’indique la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Loire, les sommes versées au titre de la prestation de compensation du handicap et au titre d’une indemnisation d’un préjudice ont des logiques différentes et sont donc cumulables au regard de la loi ; que c’est donc à tort que la commission considère que ces montants ne pourraient s’ajouter au motif que la prestation est versée dans la limite des frais supportés par la personne handicapée, l’article D. 245-42 ayant pour seul objet l’application du principe d’effectivité de la prestation, alors que les jurisprudences tant judiciaire qu’administrative retiennent que l’indemnisation de la tierce personne doit être faite au regard des seuls besoins et non de l’engagement d’une dépense ; que le montant du coût horaire de la tierce personne est fixé en application de règles différentes dans le cadre de l’indemnisation de droit commun et de l’attribution de la prestation de compensation du handicap et qu’il n’est ainsi pas possible en l’état actuel du droit de considérer que la prestation de compensation du handicap doit être « suspendue »... lorsqu’il y a indemnisation, alors que chaque montant horaire versé est calculé selon des critères différents et alloué en partie pour des prestations différentes ; que l’indemnisation répond au principe de libre disposition, alors que la prestation de compensation du handicap est une prestation affectée dont le versement est conditionné au contrôle de l’utilisation effective pour le besoin d’assistance par l’article L. 245-5 sur la base de tarifs et de taux de prise en charge fixés par arrêté ministériel ; que la prestation de compensation du handicap est versée soit en nature, soit en espèces et que lorsqu’elle l’est en espèces le montant varie selon le type d’aide que choisit la personne en situation de handicap, alors que le bénéficiaire de l’indemnisation de droit commun est libre de disposer comme il le veut des montants de l’indemnisation de son dommage corporel ; que le président du conseil général n’est pas sur le fondement de l’article D. 245-58 compétent pour contrôler les montants de l’indemnisation et ne peut exercer un droit de regard sur ces montants, ni les considérer comme effectivement affectés ou équivalents à une prestation d’aide humaine de la sécurité sociale ; que le « conseil général » ne dispose d’aucun recours subrogatoire pour le versement de la prestation de compensation du handicap ; que la pratique de l’indemnisation tend à l’heure actuelle dans la jurisprudence de la Cour de cassation à prendre en compte la prestation de compensation du handicap, compte tenu de deux arrêts contradictoires successifs de la Cour des 28 avril et 16 mai 2013, les victimes se trouvant ainsi placées dans une situation impossible, obligées de rembourser la prestation de compensation du handicap parce qu’indemnisées et indemnisées déduction faite de la prestation parce que bénéficiaires de la solidarité nationale, difficulté qu’il n’appartient qu’au seul législateur de régler ; que la prestation de compensation du handicap n’est pas concernée par la récupération pour retour à meilleure fortune ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu la pièce complémentaire (décision de la Cour de cassation no R. 1223706 du 13 février 2014) communiquée par M. X... par lettre enregistrée le 21 mars 2014 et communiquée par le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale au président du conseil général de la Loire par lettre du 24 mars 2014 ;
    Vu, enregistré le 15 novembre 2013, le mémoire en défense du président du conseil général de la Loire tendant au rejet de la requête par les motifs que l’article R. 240 dispose que seuls sont déduits du montant attribué au titre de la prestation de compensation du handicap « les sommes versées correspondant à un droit de même nature ouvert au titre d’un régime de sécurité sociale » et qu’ainsi la prestation et l’indemnisation de droit commun sont cumulables au regard de la loi ; que l’article R. 245-42 sur lequel l’administration appuie sa décision précise que « les montants attribués au titre des divers éléments de la prestation de compensation du handicap sont déterminés dans la limite des frais supportés par la personne handicapée » ; que cet article, contrairement à l’interprétation du requérant, ne se limite pas à poser une obligation d’effectivité mais précise bien que les montants versés se limitent aux frais réellement supportés ; que lorsque les sommes ont déjà été versées au titre de l’indemnisation pour financer les mêmes besoins que ceux sollicités dans le cadre de la prestation de compensation du handicap, ledit article permet de limiter le montant de celle-ci au montant du reste à charge ; que, toutefois, la prestation primant sur les autres aides, on ne peut attendre d’en connaître leur montant pour se prononcer sur son versement et que l’action en « récupération »... est alors justifiée dès que le montant et l’affectation sont connus ; que dans ce cadre, il a déterminé à partir du montant de l’indemnisation accordée par le jugement du 13 avril 2011 du tribunal de grande instance de Saint-Etienne que celui-ci était supérieur à la valorisation du besoin évalué au titre de la prestation de compensation du handicap et que M. X... ne supportant en réalité aucun frais au titre de l’aide humaine, l’indemnisation couvrait l’ensemble des besoins évalués au vu des conclusions de l’expertise faite sans prendre en compte le versement d’une éventuelle prestation de compensation du handicap ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
    Après avoir entendu, à l’audience publique du 26 juin 2014, Mme ERDMANN, rapporteure, Maître MISTRE-VERONNEAU, avocat associé de Maître PREZIOSI, pour M. X..., en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que la décision attaquée dispose « après avoir entendu Mme Chrystelle RATAJCZAK, rapporteur, » et dans son dispositif « délibéré par la commission départementale d’aide sociale lors de sa séance du 6 décembre 2012 où siégeaient la présidente et la rapporteure » ; qu’ainsi la mention du dernier paragraphe des motifs de la décision attaquée selon laquelle « au vu des éléments ci-dessus la présidente de la commission départementale d’aide sociale décide », bien qu’elle soit génératrice d’une confusion sur les conditions d’intervention « à une ou à deux », peut être regardée comme procédant d’une erreur matérielle et il n’y a pas lieu en l’état du dossier, même si la mention dite gagnerait à ne plus être utilisée, à annuler la décision attaquée pour méconnaissance de la composition de la commission départementale d’aide sociale en l’état constituée du président et du rapporteur ;
    Considérant qu’après avoir mentionné les conditions de fait de l’intervention de la décision attaquée du 25 janvier 2012 et analysé les moyens des parties, la décision attaquée est ainsi motivée en droit aux paragraphes 3 et 4 de sa page 3 : « Il résulte des arguments invoqués ci-dessus que c’est à juste titre que le président du conseil général de la Loire a décidé de suspendre le versement de la prestation de compensation du handicap à M. X... à compter du 1er février 2012 et de lui demander le remboursement des sommes perçues (...) pour la période du 1er septembre 2007 au 31 janvier 2012. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société des frais déjà largement couverts par une indemnisation attribuée pour l’assistance d’une tierce personne » ; qu’en statuant ainsi, la commission n’a donné aucun fondement juridique à sa décision où elle se borne à considérer que les moyens de défense sont pertinents et non ceux du requérant et à se fonder sur « l’équité » alors que, comme le rappelle M. X..., le caractère éventuellement « inéquitable » de la situation actuelle dans les rapports de l’indemnisation de droit commun et de la prestation de compensation du handicap procède du défaut d’articulation des législations applicables qui ne peut être pallié que par une intervention du législateur ; que, toutefois, le moyen tiré du défaut de motivation dont s’agit n’est pas d’ordre public et d’ailleurs M. X... considère lui-même que la commission en s’appropriant les moyens du défendeur sans préciser pour quels motifs elle les estimait fondés a suffisamment motivé sa décision qu’il conteste ainsi uniquement sur le fond ; que dans cette situation dont il est saisi, comme d’ailleurs à l’accoutumée dans le contentieux de l’aide sociale, le juge d’appel se trouve en fait, fût-ce dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel et non de l’évocation, statuer comme juge de première instance... situation qui, en l’espèce, a paru mériter d’être expressément relevée ;
    Sur les conclusions dirigées, devant la commission centrale d’aide sociale, contre la décision du 19 février 2013 ;
    Considérant que la décision attaquée a été rendue le 6 décembre 2012 et qu’elle n’a pu statuer sur une décision ultérieure fixant le montant de la répétition dont le principe avait été décidé par la décision du 25 janvier 2012 déférée à la commission départementale d’aide sociale de la Loire ; qu’il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale, juge d’appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale intervenue au titre de la décision du 25 janvier 2012, de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 19 février 2013, alors même que lesdites conclusions sont dirigées contre une décision intervenue par voie de conséquence de celle attaquée devant le premier juge ; que, toutefois, la décision du 25 janvier 2012 statuait sur le principe de la répétition et se bornait pour le surplus à demander à M. X... les documents nécessaires pour calculer le quantum de celle-ci ; qu’elle lui faisait donc grief et était susceptible d’être attaquée ; que, d’ailleurs, la décision du 19 février 2013 ne comporte pas l’indication des voies et délai de recours et dans l’état du dossier peut toujours être attaquée devant la commission départementale d’aide sociale ; qu’au demeurant, dans l’hypothèse, que la commission centrale d’aide sociale envisage difficilement, où l’administration n’entendrait pas, en ce qui concerne la répétition, tirer les conséquences de la présente décision annulant la décision du 25 janvier 2012 statuant sur le principe de ladite répétition, il appartiendrait à M. X... d’user des voies de droit qui lui demeureraient ouvertes mais la commission centrale d’aide sociale considère ne pas pouvoir dans la présente instance statuer sur une décision distincte qui n’a pas été contestée devant le premier juge, ni même renvoyer l’examen de l’affaire à la commission départementale d’aide sociale ; que les conclusions dirigées contre la décision du 19 février 2013 ne peuvent en conséquence être accueillies ;
    Sur les moyens à prendre en compte ;
    Considérant qu’en faisant valoir que le président du conseil général « n’a pas compétence pour contrôler les montants de l’indemnisation », nonobstant les dispositions de l’article D. 245-58 du code de l’action sociale et des familles, M. X... peut être regardé comme invoquant implicitement, mais nécessairement, la méconnaissance des articles R. 245-70, 71 et 72 dudit code ; qu’en toute hypothèse, d’ailleurs, ne serait-il pas regardé comme le faisant, le moyen tiré de la méconnaissance du champ d’application de la loi au titre de l’article R. 245-70 est d’ordre public, de même que celui tiré de la méconnaissance de la compétence exclusive de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées pour statuer au fondement de l’article R. 245-71 ; qu’en outre, l’article R. 245-72 ne concernant, comme il sera précisé ci-après, que les modalités de recouvrement des arrérages répétés, il appartient au juge de l’aide sociale, saisi de conclusions dirigées contre la décision attaquée en tant qu’elle procède à la fois à la cessation du versement pour l’avenir et à la répétition des arrérages estimés indus au fondement des mêmes dispositions en l’espèce de l’article R. 245-42, de statuer d’abord sur l’invocabilité en l’espèce de ces dispositions au titre de la cessation du versement puis, si elles ne sont pas ainsi invocables, de tirer, par voie de conséquence, les conséquences de cette absence d’invocabilité en ce qui concerne la répétition des arrérages estimés indus à laquelle a procédé, par la même décision, le président du conseil général ;
    Sur la décision du 25 janvier 2012 en tant qu’elle met fin pour l’avenir au versement de la prestation de compensation du handicap attribuée à M. X... ;
    Considérant que la décision attaquée indique que M. X... « ne percevra plus la prestation de compensation du handicap à compter du mois de février 2012 » ; que dans son mémoire en défense le président du conseil général de la Loire analyse ladite décision comme une décision de suspension (page 2, paragraphe 6) ;
    Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article R. 245-70 du code de l’action sociale et des familles : « Le versement de la prestation de compensation (...) peut être suspendu par le président du conseil général en cas de manquement du bénéficiaire à ses obligations déclaratives, après que l’intéressé a été mis en mesure de faire connaître ses observations. La suspension prend fin dès que le bénéficiaire justifie des éléments exigés ou s’acquitte de ses obligations déclaratives. Les sommes correspondant aux droits acquis pendant la période de suspension lui sont alors versées. » ;
    Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article R. 245-71 du même code : « Lorsqu’il estime que la personne handicapée cesse de remplir les conditions au vu desquelles le bénéfice de la prestation de compensation lui a été attribué, le président du conseil général saisit la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées aux fins de réexamen du droit à la prestation et lui transmet toutes informations portées à sa connaissance relatives à l’établissement des droits de l’intéressé à cette prestation. La commission statue sans délai. » ; que dans ce cadre, elle doit selon l’article D. 245-31 « avoir mis la personne handicapée en mesure de faire connaître ses observations dans le cadre des procédures prévues aux articles R. 141-32 et R. 141-35 » ;
    Considérant, d’une part, qu’il n’est ni établi ni même allégué, le contraire résultant d’ailleurs des éléments du dossier puisque c’est M. X... qui aurait informé l’administration de l’intervention du jugement du tribunal de grande instance de Saint-Etienne du 13 avril 2011, que M. X... se soit soustrait aux obligations déclaratives dont la violation est seule de nature, et selon la procédure prévue à peine d’illégalité, à justifier la suspension du versement ; qu’en tant que le président du conseil général aurait réellement par la décision attaquée entendu prendre une décision de « suspension » ainsi qu’il la qualifie dans son mémoire en défense, cette décision serait illégale et devrait être annulée au titre, non d’une fausse application de la loi, mais de la méconnaissance du champ d’application de celle-ci ;
    Considérant, d’autre part, qu’en réalité il résulte du contenu même de la décision attaquée que le président du conseil général a entendu lui-même interrompre le versement de la prestation de compensation du handicap au motif que les conditions d’attribution n’étaient pas remplies (et en conséquence, comme il sera envisagé ci-après, répéter l’indu) ; qu’en l’état des textes applicables, la décision attaquée, qui ne peut s’analyser comme un retrait de la décision initiale d’attribution, dont les conditions n’étaient au demeurant plus remplies lorsqu’elle est intervenue, ne peut être regardée en l’état partiel et lacunaire des textes applicables, en tant qu’elle statue pour l’avenir, que comme une décision d’interruption ; que, toutefois, dans cette hypothèse, le président du conseil général ne saurait compétemment statuer lui-même et doit saisir la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) pour qu’elle « réexamine le droit à la prestation » ; qu’ainsi, dans la réalité du contenu de la décision attaquée, celle-ci a été prise par une autorité incompétente et doit pour ce motif être annulée ; que, s’agissant des droits ouverts à compter du 1er février 2012 et non des arrérages antérieurs répétés, il appartient néanmoins à la commission centrale d’aide sociale de statuer sur les droits de M. X... ;
    Considérant que la défense du président du conseil général doit être regardée comme soutenant - et soutenant seulement - sans d’ailleurs qu’il précise le fondement législatif et/ou réglementaire de son argumentation, qu’il lui appartenait, dans le cadre du contrôle d’effectivité et du respect du plan de compensation du handicap, de vérifier si les conditions posées à l’article R. 245-42 étaient ou non réunies ;
    Considérant, d’une part, qu’il résulte de ce qui précède, que le président du conseil général ne pouvait ni suspendre le versement de la prestation, faute que les conditions d’une telle suspension ne soient remplies, ni l’interrompre sans saisir la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées ;
    Considérant, d’autre part, d’ailleurs et en toute hypothèse, comme l’a jugé la commission centrale d’aide sociale dans sa décision no 120456 - M. A... - du 6 avril 2013, sur pourvoi du département du Rhône évoquant notamment le moyen tiré de l’erreur de droit au regard de l’article R. 245-42, confirmée par décision no 369700 de non-admission du 4 décembre 2013 du Conseil d’Etat, que le moyen tiré de la violation de l’article R. 245-42 précité ne relève pas de la fixation du taux de la prestation en fonction des ressources prévue à l’article R. 245-46 relevant de la compétence du président du conseil général mais de celle du besoin par l’application de tarifs en fonction dudit besoin par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées et que la contestation portant sur la méconnaissance des conditions d’application dudit article ne peut être appréciée que par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées sous le contrôle de la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale et ne peut l’être lors de l’octroi de la prestation par le président du conseil général ; que les dispositions de l’article D (...). 245-58 selon lesquelles « le président du conseil général peut à tout moment procéder ou faire procéder à un contrôle sur place ou sur pièces en vue de vérifier si les conditions d’attribution de la prestation de compensation sont ou restent réunies ou si le bénéficiaire de cette prestation a consacré cette prestation à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée. » n’ont pas eu pour objet et n’auraient pu avoir légalement pour effet de permettre au président du conseil général d’interrompre lui-même le versement de la prestation de compensation pour l’avenir sans saisine préalable de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées ; qu’ainsi, s’il est vrai, qu’à la différence de l’instance précitée, la présente instance ne porte pas sur l’octroi de la prestation mais sur l’interruption du versement de celle-ci (et la répétition des arrérages versés), le président du conseil général, en admettant qu’il soit fondé, comme le juge la présente commission, à constater que l’assisté n’a pas respecté les dispositions qu’il a acceptées du plan de compensation et à en tirer les conséquences en ce qui concerne la répétition des arrérages versés, n’est par contre pas fondé à interrompre le versement de la prestation sur le fondement seul identifiable par la présente juridiction de l’article R. 245-71 (non plus que sur celui de l’article R. 245-70), dès lors que le motif de l’interruption au titre de l’article R. 245-42 ne peut être apprécié, en toute hypothèse, que par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées lorsque le président du conseil général « estime que la personne handicapée cesse de remplir les conditions au vu desquelles le bénéfice de la prestation de compensation lui a été attribué », situation que la décision précitée de la commission centrale d’aide sociale avait d’ailleurs analysée comme procédant d’une révision (pour l’avenir) de la situation litigieuse ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que, dès lors que le seul fondement légal et réglementaire envisageable comme fondement de la décision attaquée qui ne pouvait être légalement prise sur le fondement de l’article R. 245-70, est celui de l’article R. 245-71, le président du conseil général ne pouvait statuer à la cessation du versement des arrérages à compter du 1er février 2012 jusqu’au 31 août 2012 que pour autant qu’il ait, tant en vertu des dispositions réglementaires précitées de l’article R. 245- (et non D...) 71, que de la nature de la question posée pour justifier la cessation du versement, saisi préalablement la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées dont la décision n’aurait été soumise qu’au seul contrôle de la juridiction du contentieux technique de la ssus écurité sociale ; qu’il y a lieu, en conséquence, d’annuler la décision attaquée en tant qu’elle porte sur la période du 1er février 2012 au 31 août 2012 ; que, par contre, il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale de statuer sur la période courant du 1er septembre 2012 qui aurait nécessairement donné lieu à une décision nouvelle et distincte de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées puis à une décision, par voie de conséquence, du président du conseil général, mais qui n’entre pas dans le cadre du seul litige soumis en l’instance au juge de l’aide sociale ; qu’ainsi, dans la mesure où les conclusions susanalysées de M. X... entendraient solliciter de la présente juridiction qu’elle statue sur la période courant du 1er septembre 2012, elles ne pourraient être que rejetées ;
    Sur la répétition de l’indu ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 245-8 du code de l’action sociale et des familles : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de la prestation se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable à l’action intentée par le président du conseil général en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration. » ; qu’aucune autre disposition législative ne régit, à la connaissance de la présente juridiction, les modalités de répétition de la prestation ; qu’aux termes de l’article R. 245-72 du même code : « Tout paiement indu est récupéré en priorité par retenue sur les versements ultérieurs de la prestation de compensation. A défaut, le recouvrement de cet indu est poursuivi comme en matière de contributions directes, conformément aux dispositions de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales. » ;
    Considérant que les dispositions réglementaires précitées, en l’état des dispositions législatives également précitées, n’ont eu pour objet et n’auraient pu légalement avoir pour effet que de préciser les modalités de recouvrement des indus et non d’attribuer au président du conseil général, compétent pour constater ceux-ci à la suite d’une décision de cessation de versement, décision qui ne relèverait, en ce qui concerne tant la compétence que le fond du droit, comme il a été exposé ci-dessus, que de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, sous le contrôle de la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ; que retenir, en l’état des textes, une solution différente, selon laquelle, il n’appartiendrait qu’à ces dernières autorités administrative et juridictionnelle de statuer sur le droit à la prestation au stade de l’octroi initial de celle-ci et au président du conseil général, sous le contrôle du juge administratif, de statuer sous réserve, le cas échéant, de question préjudicielle à l’autorité judiciaire, sur le respect de conditions qui ne relèvent pas de sa compétence au stade initial de l’octroi de la prestation, conduirait à une situation à la fois juridiquement et pratiquement inextricable ; qu’ainsi, et en l’état des dispositions réglementaires précitées, lorsque le président du conseil général prend une décision de cessation des versements qui ne relève ni quant à sa compétence, ni quant au fond du droit, de son office, la décision qu’il prend, par voie de conséquence et sur le même fondement (souligné par la commission centrale d’aide sociale), de répéter les arrérages indus ne peut qu’être infirmée par voie de conséquence de l’infirmation de la décision dans laquelle il statue pour l’avenir sur le principe du droit du bénéficiaire à la prestation ; que, comme il a été indiqué ci-dessus, les dispositions de l’article D. 245-58 ne sauraient avoir légalement pour objet et pour effet de permettre au président du conseil général et au juge de l’aide sociale de statuer à la suite du contrôle effectué par l’administration, pour « vérifier si les conditions d’attribution de la prestation sont ou restent réunies », sur une décision et sur une question de fond qui ne relèvent au stade de l’octroi de la prestation que de la compétence de la CDAPH et de l’autorité judiciaire ; qu’en l’état, comme il a été dit, lacunaire et imprécis, à la compréhension de la présente juridiction, des textes réglementaires et d’ailleurs de leurs fondements législatifs, il ne saurait appartenir qu’au législateur et/ou au pouvoir réglementaire de préciser davantage l’articulation, non seulement, comme il résulte du présent dossier, des rapports entre la prestation de compensation du handicap et l’indemnisation de droit commun (!), mais encore celle entre les compétences de la CDAPH et du président du conseil général chargé du versement de la prestation sur les conditions d’octroi de laquelle elle a statué au cours de la période de versement et en conséquence sur les compétences juridictionnelles des deux ordres de juridictions pour respectivement connaître de la violation alléguée desdites conditions ;
    Considérant en définitive qu’en l’état la commission centrale d’aide sociale considère que lorsque, par une seule décision, le président du conseil général, au motif que ne sont pas remplies des conditions justifiant la saisine de la CDAPH et portant d’ailleurs sur le fond du droit de la compétence de décision de celle-ci, décide à la fois de cesser pour l’avenir les versements des arrérages de la prestation et de répéter les arrérages selon lui indus, l’annulation de la décision de cessation par le juge administratif de l’aide sociale emporte par voie de conséquence l’annulation de la décision de répétition ; qu’ainsi la décision du 25 janvier 2012 doit être annulée en tant qu’elle porte tant sur ladite cessation que sur ladite répétition ;
    Sur les conclusions tendant à la condamnation du « conseil général de la Loire » (...) « à rembourser à M. X... les montants qui ont été remboursés par » celui-ci « en exécution de la décision du 6 décembre 2012 de la commission départementale d’aide sociale » et à lui « verser (...) l’intégralité des montants dus au titre de la prestation depuis le 1er septembre 2012 » ;
    Considérant que, pour la période du 1er septembre 2007 au 31 août 2012, il appartiendra nécessairement à l’administration de tirer les conséquences de la présente décision qui infirme tant le principe et le montant de la décision de cessation de versement des arrérages que le principe de la répétition ; que, dans l’hypothèse où l’administration n’exécuterait pas la présente décision, il appartiendrait à M. X... de soumettre au juge le litige distinct né d’un tel refus d’exécution, mais qu’en l’état il n’appartient pas à ce juge de faire droit aux conclusions précitées pour la période dite ; qu’il résulte de ce qui précède que ces conclusions ne peuvent être que rejetées pour la période courant du 1er septembre 2012 ;
    Sur les conclusions tendant à la condamnation du « conseil général de la Loire » à verser à M. X... une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépitibles ;
    Considérant qu’il y a lieu dans les circonstances de l’espèce, sur le fondement de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de faire droit auxdites conclusions ;
    Sur les conclusions de M. X... tendant à la condamnation du « conseil général aux entiers dépens » ;
    Considérant qu’en matière d’aide sociale les dépens sont constitués du seul acquit du droit de timbre alors prévu à l’article 1635 bis Q du code général des impôts au titre de la contribution pour l’aide juridique ; qu’en demandant la condamnation aux entiers dépens le requérant doit être regardé comme sollicitant expressément nécessairement la condamnation en remboursement des droits de timbres qu’il a exposés en appel et, le cas échéant, en première instance ; qu’il y a lieu de condamner le département de la Loire à lui rembourser les montants desdits droits ;

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Loire du 6 décembre 2012 et du président du conseil général de la Loire du 25 janvier 2012 sont annulées.
    Art. 2.  -  M. X... est rétabli dans ses droits à la prestation de compensation du handicap pour la période du 1er septembre 2007 au 31 août 2012.
    Art. 3.  -  Le département de la Loire paiera à M. X... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
    Art. 4.  -  Le département de la Loire remboursera à M. X... les droits de timbre qu’il a acquittés au titre de la contribution pour l’aide juridique en appel et, le cas échéant, en première instance.
    Art. 5.  -  Le surplus des conclusions de la requête susvisée de M. X... est rejeté.
    Art. 6.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., à Maître PREZIOSI, pour information, et au président du conseil général de la Loire. Copie en sera adressée au secrétariat de la commission départementale d’aide sociale de la Loire et à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 26 juin 2014 où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 26 juin 2014, à 19 heures.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet