Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Déclaration - Bonne foi - Prescription - Précarité
 

Dossier no 120528

Mme X...
Séance du 14 mai 2014

Décision lue en séance publique le 17 juin 2014

    A été assigné à Mme X... par décision du président du conseil général du Nord en date du 11 septembre 2009, un trop perçu d’un montant de 4 181,76 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’elle n’a pas déclaré l’intégralité des salaires qu’elle a perçus pour la période du 1er avril 2004 au 31 mars 2009. Par décision en date du 18 janvier 2010, le président du conseil général du Nord a refusé d’accorder à Mme X... toute remise gracieuse. La commission départementale d’aide sociale du même département, par décision en date du 25 janvier 2012, a confirmé la décision du président du conseil général. Mme X..., par courrier en date du 4 avril 2012, puis son conseil, Maître Marie-Véronique LE FEVRE par conclusions du 10 mars 2014, ont demandé à la commission centrale d’aide sociale d’annuler ces décisions et de faire droit à leur demande de remise de dette ;
    La requérante assistée de son conseil Maître Marie-Véronique LE FEVRE, ne conteste pas le bien-fondé de l’indu mais en demande la remise. Elle expose avoir occupé un emploi d’aide à domicile à compter du 17 septembre 2004 et qu’elle était par ailleurs employée quelques heures en qualité d’aide ménagère par quatre personne qui lui versaient un salaire par chèques emploi service. Elle soutient qu’un contrôle de sa situation a été effectué par la caisse d’allocations familiales dont il est ressorti qu’elle n’avait pas déclaré les revenus qu’elle percevait au titre de ses emplois d’aide ménagère, ce qu’elle a confirmé. Elle affirme qu’elle pensait que les revenus qui lui étaient versés par chèques emploi service étaient directement adressés par le centre chèque emploi service à la caisse d’allocations familiales comme c’est le cas pour les services fiscaux. Elle fait valoir que cela lui semblait logique car seules des attestations d’emploi lui étaient fournies par le centre chèques emploi service et que l’envoi de ces attestations dépendait de l’envoi régulier par l’employeur de ses propres volets sociaux. Elle expose que le conseil général du Nord a déposé plainte contre elle auprès du procureur de la république qui a décidé de classer l’affaire sans suite. Elle soutient qu’elle ne connaît pas les mécanismes complexes de calcul des ressources pour l’obtention de l’allocation de revenu minimum d’insertion. Elle fait valoir que la fraude et la fausse déclaration se définissent comme un acte intentionnel destiné à dissimuler des ressources et que la caisse d’allocations familiales a qualifié de fraude son omission en présumant sa mauvaise foi sans autre élément que celui de l’absence de déclaration dans le but de lever le délai de prescription. Elle soutient qu’elle a commis une erreur caractérisée mais non délibérée et que, dès lors, le délai de prescription de deux ans est applicable. Elle affirme que la caisse d’allocations familiales ne donne aucune précision sur les modalités de calcul de sa créance et de son allocation de revenu minimum d’insertion. Elle fait valoir que ses ressources sont très faibles, qu’elle a un enfant à charge, cela la plaçant dans l’incapacité d’apurer la dette qui lui a été imputée mais que, si elle était tenue de le faire, un échéancier devrait être mis en place ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... bénéficie de l’aide juridictionnelle totale par décision du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris du 21 février 2013, la dispensant ainsi de s’acquitter de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informée de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 mai 2014 Mme Hortense GAUTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie règlementaire (...). La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-40 du même code : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation (...) se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction qu’un contrôle a été diligenté par la caisse d’allocations familiales au domicile de Mme X... en date du 29 janvier 2009 qui a révélé que Mme X... a déclaré les salaires versés par son employeur principal, mais n’a pas déclaré les salaires payés sous forme de chèques emploi service, ce qu’elle a reconnu ; que par suite, par décision du président du conseil général du Nord du 11 septembre 2009, a été assigné à Mme X... un indu d’un montant de 4 181,76 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment versées pour la période du 1er avril 2004 au 31 mars 2009 ; que le président du conseil général du Nord, par décision en date du 18 janvier 2010, a refusé de lui accorder toute remise gracieuse ; que saisie, la commission départementale d’aide sociale du même département, par décision en date du 25 janvier 2012, a confirmé la décision du président du conseil général du Nord ; que Mme X..., par courrier en date du 4 avril 2012, puis Maître Marie-Véronique LE FEVRE par conclusions du 10 mars 2014, ont demandé à la commission centrale d’aide sociale d’annuler ces décisions et de faire droit à leur demande de remise de dette ;
    Considérant que durant la période litigieuse, Mme X... a toujours déclaré les revenus qui lui étaient versés par son employeur principal et que le montant des salaires qu’elle a omis de déclarer était faible ; qu’elle pensait que les revenus qui lui étaient versés par chèques emploi service étaient directement adressés par le centre chèque emploi service à la caisse d’allocations familiales comme c’est le cas pour les services fiscaux ; que ses attestations d’emploi, dépendant de l’envoi préalable par ses employeurs de ses volets sociaux au centre chèque emploi service, lui étaient adressées de manière irrégulière, ce qui rendait complexe la déclarations des revenus correspondant ; que le conseil général du Nord a déposé une plainte contre Mme X... dont le parquet du procureur de la république du tribunal de grande instance de Lille a estimé qu’elle ne justifiait pas de poursuite pénale ; qu’il suit de là qu’il n’est pas établi que Mme X... aurait effectué de fausses déclarations ou se serait livrée à des manœuvres frauduleuses ; que dès lors, la prescription biennale est applicable et l’indu imputé à Mme X... ne couvre que la période du 12 septembre 2007 au 31 mars 2009 ; que par suite, Mme X... doit être déchargée de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui a été assigné pour la période du 1er avril 2004 au 11 septembre 2007 ;
    Considérant que pendant la période litigieuse restante, Mme X... percevait des salaires dont le montant était irrégulier ; que ses ressources sont très faibles, qu’elle a un enfant à charge et que cela la place dans l’incapacité d’apurer la dette qui lui a été imputée ; que ces éléments révèlent une réelle précarité ; que les capacités contributives de l’intéressée sont limitées et le remboursement de la totalité de la dette ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur le budget de son foyer ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation en accordant une remise de 80 % de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période du 12 septembre 2007 au 31 mars 2009 ; que cela emporte remboursement des sommes indûment prélevées par le trésorier payeur départemental ou remboursées par la requérante ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord en date du 25 janvier 2012, ensemble les décisions du président du conseil général du même département en date des 11 septembre 2009 et 18 janvier 2010, sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est déchargée de la totalité de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui a été imputé pour la période du 1er avril 2004 au 11 septembre 2007 en application de la prescription biennale.
    Art. 3.  -  Il est accordé à Mme X... une remise de 80 % du montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui a été assigné pour la période du 12 septembre 2007 au 31 mars 2009.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., à Maître Marie-Véronique LE FEVRE, au président du conseil général du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 mai 2014 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GAUTIER, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 17 juin 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente La rapporteure

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet