Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Déclaration - Compétence juridictionnelle - Précarité
 

Dossier no 130117

Mme X...
Séance du 24 juin 2014

Décision lue en séance publique le 18 juillet 2014

    Vu le recours en date du 8 janvier 2013 et le mémoire en date du 15 janvier 2013 présentés par Maître Sandra MOLINERO, conseil de Mme X..., qui demande l’annulation de la décision en date du 12 octobre 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Eure a rejeté le recours tendant à l’annulation de la décision en date du 9 décembre 2010 du président du conseil général refusant toute remise gracieuse sur un solde d’indu de 578,35 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de février à mai 2009 ;
    Maître Sandra MOLINERO demande l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Eure en faisant valoir :
        -  que la décision attaquée ne comporte pas la signature du rapporteur et qu’ainsi, la décision méconnaît les règles de la procédure applicable ;
        -  que ni la requérante ni son conseil n’ont été convoqués à l’audience ;
        -  que la requérante n’a pas été préalablement informée du contrôle de l’organisme payeur ;
        -  que la situation de précarité n’a pas été prise en compte, alors que Mme X... ne dispose que de 515 euros par mois pour vivre.
    Maître Sandra MOLINERO demande une remise eu égard à l’incapacité de sa cliente à rembourser l’indu réclamé ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la décision en date du 20 juin 2013 du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris accordant à Mme X... le bénéfice de l’aide juridictionnelle, la dispensant ainsi de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 24 juin 2014 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-3 du même code : « Le bénéficiaire du revenu minimum d’insertion a droit à une allocation égale entre le montant du revenu minimum d’insertion défini à l’article L. 262-2 et les ressources définies selon les modalités fixées aux articles L. 262-10 et L. 262-12 » ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 262-35 du même code : « (...) Le versement de l’allocation est subordonné à la condition que l’intéressé fasse valoir ses droits aux créances d’aliments qui lui sont dues au titre des obligations instituées par les articles 203 (...) du code civil (...) » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X... a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion en juillet 2007 au titre d’une personne isolée ; que suite de contrôle de l’organisme payeur en date du 23 février 2010, il a été constaté que l’intéressée aurait omis de déclarer une pension alimentaire versée par sa mère ; qu’il s’ensuit que par décision en date du 18 mars 2010, la caisse d’allocations familiales a mis à la charge de Mme X... le remboursement de la somme de 4 145,55 euros, résultant d’allocations de revenu minimum d’insertion et de revenu de solidarité active perçues pour la période de février 2009 à février 2010 ; que seule la somme de 713,34 euros concerne le revenu minium d’insertion ;
    Considérant que Mme X... a formulé une demande de remise gracieuse en date du 12 novembre 2010 alors que le solde d’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion s’élevait à 578,35 euros ; que le président du conseil général de l’Eure a refusé toute remise par décision en date du 9 décembre 2010 ; que saisie d’un recours, la commission départementale d’aide sociale, par décision en date du 12 octobre 2012, l’a rejeté ;
    Considérant que si les contributions occasionnellement consenties à un demandeur du revenu minimum d’insertion par les membres de sa famille indépendamment de toute décision de justice leur en faisant obligation, et sans que ces contributions donnent lieu à déduction des bases de l’impôt sur le revenu des donateurs, ne doivent pas être prises en compte pour le calcul du revenu minimum d’insertion, il n’en est pas de même en cas d’aide régulière prise en compte dans le calcul de l’impôt sur le revenu des donateurs ; qu’en l’espèce, les sommes versées par la mère de Mme X..., qui ont un caractère durable et régulier et ont été reconnues fiscalement, ne représentent qu’une modalité de l’obligation alimentaire à laquelle demeurent tenus les ascendants et volontairement exécutée par ces derniers ; qu’elles doivent, dès lors, être prises en compte dans le calcul du montant du revenu minimum d’insertion, celui-ci n’ayant qu’un caractère subsidiaire ; que par suite l’indu, qui résulte de la prise en compte desdites sommes dans le calcul du montant du revenu minimum d’insertion, est fondé en droit ;
    Considérant d’une part qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262-39 et L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que toute erreur ou omission déclarative imputable à un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion ne peut être regardée comme une fausse déclaration faite dans le but délibéré de percevoir à tort le revenu minimum d’insertion ; que d’autre part, pour l’application des dispositions précitées relatives à la procédure de remise gracieuse résultant de paiement d’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion, il appartient à la commission départementale d’aide sociale, en sa qualité de juridiction de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité des décisions prises par le président du conseil général mais encore de se prononcer elle-même sur le bien-fondé de la demande de l’intéressée d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une ou l’autre partie à la date de sa propre décision ; qu’en l’espèce, la commission départementale d’aide sociale de l’Eure, par sa décision en date du 12 octobre 2012, a rejeté le recours au motif du bien-fondé de l’indu sans se prononcer sur le moyen de la précarité soulevé devant elle ; qu’ainsi ladite commission a méconnu sa compétence et que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, sa décision encourt l’annulation ;
    Considérant qu’il y a lieu de d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que Mme X... affirme, sans être contredite, que ses ressources mensuelles s’élèvent à 515 euros ; qu’elle est en situation d’une réinsertion réussie ; que ses capacités contributives sont limitées pour s’acquitter de la dette d’allocations de revenu minimum d’insertion et que la répétition de la totalité de l’indu ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de sa situation en lui accordant une remise totale de la somme de 578,35 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 12 octobre 2012 de la commission départementale d’aide sociale de l’Eure, ensemble la décision en date du 9 décembre 2010 du président du conseil général, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est consenti à Mme X... une remise totale de la somme de 578,35 euros relative à l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée à Maître Sandra MOLINERO, à Mme X..., au président du conseil général de l’Eure. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 24 Juin 2014 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M.  VIEU, assesseur, M.  BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 18 juillet 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La président Le rapporteur

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet