Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Vie maritale - Déclaration - Pension alimentaire
 

Dossier no 130165

Mme X...
Séance du 4 juillet 2014

Décision lue en séance publique le 3 octobre 2014

    Vu le recours formé le 19 décembre 2012 par Mme X..., représentée par Maître Nathalie PREGUIMBEAU, à l’encontre de la décision du 30 novembre 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne a rejeté sa demande d’annulation de la décision du directeur de la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne en date du 23 février 2012, lui notifiant la régularisation de sa situation au regard du revenu minimum d’insertion pouvant déboucher, si la fraude était retenue, sur le remboursement d’une somme de 1 600,28 euros correspondant à un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion au titre de la période du 1er février au 31 mai 2009, au motif que Mme X... n’a pas déclaré sa vie maritale avec M. Y..., père de ses trois enfants, depuis le mois de décembre 2008 alors qu’elle était connue comme personne isolée avec ses enfants à charge depuis décembre 2005 ;
    Mme X... conteste formellement la décision litigieuse et l’omission de déclaration reprochée ; elle affirme avoir été entendue par un officier de police judiciaire le 12 décembre 2012, suite au dépôt de plainte à son encontre par le président du conseil général de la Haute-Vienne concernant l’indu litigieux ; elle précise n’avoir jamais eu connaissance du rapport de contrôle établi par l’agent assermenté de la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne concernant sa situation ; elle relève ainsi une violation des droits protégés par la Convention européenne de sauvegarde des droits et libertés fondamentales et par la Constitution ; elle ajoute que les conclusions du rapport sont inexactes, elle et M. Y..., parents de trois enfants nés en 1996, 1999 et 2011, étant séparés depuis décembre 2005 date à laquelle elle est partie vivre chez sa mère avant de bénéficier d’un appartement dans lequel elle a vécu avec deux de ses enfants ; elle reconnaît avoir eu une relation ponctuelle avec M. Y..., de laquelle est né le dernier enfant ; elle n’a jamais caché cette naissance et M. Y... a reconnu l’enfant ; actuellement, elle vit seule, sans emploi, ne percevant que le revenu de solidarité active ; elle assume seule le loyer, les charges et l’éducation des enfants ; par une ordonnance en date du 19 juillet 2012, le juge aux affaires familiales de Limoges a condamné M. Y... au paiement d’une pension alimentaire, et aucun recours contre cette ordonnance n’a été formé ; Mme X... sollicite la réformation de la décision présentement en litige ainsi que l’annulation de la décision du directeur de la caisse d’allocations familiales en date du 23 février 2012 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle par décision du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris en date du 6 juin 2013, la dispensant ainsi de s’acquitter de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu le mémoire en défense de la présidente du conseil général de la Haute-Vienne en date du 4 novembre 2013 qui conclut au rejet de la requête ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 4 juillet 2014 Mme Fatoumata DIALLO, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262-2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge » ;
    Considérant que Mme X... a déposé une demande de revenu minimum d’insertion le 3 février 2003 au titre d’une personne isolée, locataire, sans activité depuis 2003, ni ressources hormis les prestations sociales, au chômage non indemnisé, ayant deux enfants à charge nés en 1996 et 1999 ; que, comme suite à un rapport d’enquête administrative sur la situation familiale et les ressources de l’intéressée en date du 5 décembre 2011, la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne a conclu que Mme X... vivait maritalement avec M. Y... depuis le 26 décembre 2008, « date du dépôt du permis de construire du couple qui constitue un élément de communauté d’intérêt renforcé par la naissance d’un troisième enfant en 2011 » ; que le 23 février 2012, le directeur de la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne a notifié à la requérante la régularisation de son dossier de revenu minimum d’insertion en intégrant les ressources perçues par M. Y..., et décidé que « si la fraude était retenue, (...) une somme de 1 600,28 euros, au titre d’un trop-perçu de revenu minimum d’insertion pour la période du mois de février 2009 au mois de mai 2009 » lui serait réclamée ; que par un courrier en date du 20 avril 2012 adressé à la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne, Mme X... a formé un recours contre cette décision, qui a été rejeté par une décision en date du 30 novembre 2012 dont la requérante assistée de son conseil Maître Nathalie PREGUIMBEAU, relève appel ;
    Considérant que Mme X... comme M. Y... nient toute reprise de vie maritale au titre de la période litigieuse ; que les deux intéressés ont des déclarations fiscales séparées pour les années 2007 à 2011 ; que le permis de construire demandé le 26 décembre 2008 conjointement par ces derniers n’est pas de nature à établir une présomption d’une communauté d’intérêts financiers et matériels, d’autant qu’il ressort du rapport d’enquête de l’agent de contrôle assermenté de la caisse d’allocations familiales en date du 5 décembre 2011 que l’allocataire a perçu une pension alimentaire d’un montant total de 1 800 euros pour l’année 2009 (déclaration fiscale 2009), versée par M. Y... ; que, par une ordonnance en date du 19 juillet 2012, le juge aux affaires familiales de Limoges a condamné M. Y... au paiement d’une pension alimentaire et qu’aucun recours contre cette ordonnance n’a été formé ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur la question de savoir si Mme X... s’est ou non rendue coupable de manœuvres frauduleuses, sujet sur lequel la juridiction pénale ne s’est pas prononcée à la date de la présente décision, aucune vie maritale ne peut être retenue à l’encontre de l’intéressée ; que si la procédure étrangère à celle prévue par les dispositions législatives et réglementaires applicables conduite par la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne laisse subsister un doute sur la nature de la décision concernant l’allocataire, le dossier ne permet pas de percevoir si elle est seulement porteuse d’une menace ou d’une assignation d’un indu ; qu’il échet de dire, qu’à défaut d’établissement de vie maritale, aucun indu au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion ne peut être assigné à Mme X...,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne en date du 30 novembre 2012, ensemble la décision du directeur de la caisse d’allocations familiales de la Haute-Vienne en date du 23 février 2012, sont annulées.
    Art. 2.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., à Maître Nathalie PREGUIMBEAU, au président du conseil général de la Haute-Vienne. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 juillet 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme DIALLO, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 3 octobre 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet