Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Déclaration - contrôle - Revenu de solidarité active (RSA) - Fraude - Remise - Date d’effet
 

Dossier no 130150

Mme X...
Séance du 14 mai 2014

Décision lue en séance publique le 17 juin 2014

    A été assigné à Mme X... un indu d’un montant de 21 186,53 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’elle n’a pas déclaré ses revenus salariés pour la période du 1er novembre 2004 au 31 mai 2009. Par décision en date du 16 juin 2010, le président du conseil général du Nord a refusé d’accorder à Mme X... toute remise gracieuse. La commission départementale d’aide sociale du même département, par décision en date du 16 octobre 2012, a confirmé cette décision du président du conseil général. Mme X..., par courrier en date du 27 décembre 2012, a demandé à la commission centrale d’aide sociale d’annuler ces décisions et de lui accorder une remise de l’indu qui lui a été assigné ;
    La requérante ne conteste pas le bien-fondé de l’indu mais en demande la remise. Elle soutient que, lorsqu’il s’est rendu à son domicile, le contrôleur de la caisse d’allocations familiales s’est conduit de manière brutale et qu’elle a signé le document qu’il lui a présenté sans réellement le comprendre. Elle affirme qu’elle est de bonne foi et qu’elle pensait pouvoir cumuler un salaire dont le montant était faible avec l’allocation de revenu minimum d’insertion. Elle expose qu’un échéancier a été mis en place et qu’elle rembourse sa dette à raison de 171 euros mensuels prélevés sur son allocation de revenu de solidarité active. Elle soutient que le montant de son salaire se limite à 793 euros mensuels, qu’elle rencontre de grandes difficultés financières, et que sa santé, psychologique et physique, demeure très fragile.
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... s’est acquittée de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 mai 2014 Mme Hortense GAUTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction que Mme X... a formé une demande de revenu minimum d’insertion en novembre 2001 ; que la caisse d’allocations familiales a diligenté, en date du 13 juillet 2009, un contrôle au domicile de Mme X... dont il est ressorti qu’elle était salariée à temps partiel au sein de l’association A... depuis janvier 2002 ; que par suite, a été assigné à Mme X... un indu d’un montant de 21 186,53 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’elle n’a pas fait mention, sur ses déclarations trimestrielles de ressources, des revenus salariés qu’elle a perçus pour la période du 1er novembre 2004 au 31 mai 2009 ; que le président du conseil général du Nord, par décision en date du 16 juin 2010, a refusé de lui accorder une remise gracieuse ; que la commission départementale d’aide sociale du Nord, par décision en date du 16 octobre 2012, a confirmé cette décision du président du conseil général ; que Mme X..., par courrier en date du 27 décembre 2012, a demandé à la commission centrale d’aide sociale d’annuler ces décisions et de lui accorder une remise de l’indu qui lui a été assigné ;
    Considérant qu’en vertu du premier alinéa de l’article L. 262-41 du code l’action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse, tout paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion devait normalement donner lieu à récupération ; que, si le dernier alinéa de cet article permettait au président du conseil général, en cas de précarité de la situation du débiteur, de réduire la créance du département ou d’en accorder la remise, il résultait des dispositions ajoutées à cet alinéa par la loi du 23 mars 2006, entrées en vigueur le 25 mars suivant, que cette faculté de réduction ou de remise était toutefois exclue en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration de la part de l’intéressé ; qu’en décidant ainsi de priver les allocataires se livrant à des manœuvres frauduleuses ou à de fausses déclarations de toute possibilité de réduction ou de remise, le législateur a entendu sanctionner ces agissements et empêcher leur réitération ; que ces dispositions n’étaient par suite applicables qu’aux seuls faits commis postérieurement à leur entrée en vigueur ;
    Considérant que, par suite, les dispositions de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, telles qu’elles résultent de la loi du 23 mars 2006, font obstacle à ce que l’indu d’allocation de revenu minimum d’insertion de Mme X... correspondant à la période du 25 mars 2006 au 31 mai 2009 soit remis dès lors qu’il résulte de l’instruction que Mme X... a délibérément commis, durant cette période des omissions dans l’exercice de son obligation déclarative qui doivent être regardées comme de fausses déclarations ;
    Considérant, en revanche, que les dispositions ajoutées à l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles par la loi du 23 mars 2006, entrées en vigueur le 25 mars suivant, ne sont pas applicables à l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de Mme X... correspondant à la période du 1er novembre 2004 au 25 mars 2006 ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X... perçoit un salaire de 793 euros mensuels et qu’elle rencontre de grandes difficultés financières ; que sa santé psychologique et physique est dégradée, ce qu’atteste la notification de prise en charge à 100 % pour affection de longue durée adressée à la requérante par la caisse primaire d’assurance maladie du Nord en date du 19 juin 2012 ; que le remboursement par Mme X... de son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion correspondant à la période du 1er novembre 2004 au 25 mars 2006 pourrait porter une atteinte irréversible à l’équilibre précaire de son budget ; que, dès lors, dans les circonstances spécifiques de l’espèce, il sera fait une juste appréciation de cette situation en lui accordant une remise totale de son indu d’allocations de revenu minimum d’insertion correspondant à la période du 1er novembre 2004 au 25 mars 2006 ;
    Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède, que Mme X... est fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté intégralement sa demande tendant à la remise de sa dette ; qu’il y a lieu, dès lors, d’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord du 16 octobre 2012 ainsi que la décision du président du conseil général du Nord du 16 juin 2010,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord en date du 16 octobre 2012, ensemble la décision du président du conseil général du même département en date du 16 juin 2010, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est accordé à Mme X... une remise totale de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui a été assigné pour la période du 1er novembre 2004 au 25 mars 2006.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., au président du conseil général du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 mai 2014 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GAUTIER, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 17 juin 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet