Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Train de vie - Précarité
 

Dossier no 120307

M. X...
Séance du 3 octobre 2014

Décision lue en séance publique le 14 novembre 2014

    Vu le recours formé le 7 février 2012 par M. X... à l’encontre de la décision du 19 octobre 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d’annulation de la décision du président du conseil général des Bouches-du-Rhône en date du 28 août 2008 refusant de lui accorder une remise de dette sur un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 1 939,80 euros décompté pour la période du 1er août au 31 décembre 2007, au motif « qu’un contrôle CAF effectué en décembre 2007 révèle que l’allocataire vit dans une confortable maison de 100 mètres carrés dont le loyer s’élève à 950 euros par mois ; qu’il déclare recevoir de l’aide financière de ses amis, sans pouvoir les nommer, et avoir bénéficié d’un héritage de son parrain, dont il n’a pas communiqué le montant ; qu’ainsi la CAF a supprimé l’allocation et édité un trop-perçu pour la période concernée » ;
    M. X... affirme qu’il subit de graves problèmes de santé qui l’obligent à « vivre dans un lieu sans marche, de plain-pied et d’accès facile » ; il soutient avoir bénéficié de l’aide financière d’une amie durant la période litigieuse ; que depuis mars 2011, il est en service de rééducation et d’hospitalisation, étant dans l’impossibilité de se déplacer et n’ayant plus aucun revenu ; il sollicite une exonération totale de la dette qui lui a été assignée ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que M. X... s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;
    Vu la lettre en date du 7 novembre 2013 adressée à la présente commission par Mme Y..., amie de M. X... ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 octobre 2014, Mme Fatoumata DIALLO, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;     Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’article L. 262-10-1 du même code : « Lorsqu’il est constaté (...) à l’occasion de l’instruction d’une demande ou lors d’un contrôle, une disproportion marquée entre, d’une part, le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire et, d’autre part, les ressources qu’il déclare, une évaluation forfaitaire des éléments du train de vie est effectuée. Cette évaluation forfaitaire est prise en compte pour la détermination du droit à la prestation » ; qu’aux termes de l’articleR. 262-22-1 du décret no 2008-88 du 28 janvier 2008 relatif aux modalités d’évaluation des biens et des éléments de train de vie pour le bénéfice de certaines prestations sociales sous condition de ressources : « I.  -  L’évaluation forfaitaire du train de vie prévue à l’article L. 262-10-1 prend en compte les éléments et barèmes suivants : 1o  Propriétés bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; 2o  Propriétés non bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1509 à 1518 A du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-22-4 du même décret : « Lorsqu’il est envisagé de faire usage de la procédure prévue à l’article L. 262-10-1, le président du conseil général, sur demande ou après consultation de l’organisme payeur, en informe le demandeur ou le bénéficiaire de la prestation, par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette lettre a pour objet : 1o  De l’informer de l’objet de la procédure engagée, de son déroulement, de ses conséquences, de sa possibilité de demander à être entendu et à être assisté, lors de cet entretien, du conseil de son choix, des sanctions applicables en cas de déclarations fausses ou incomplètes et de ce que le résultat de cette évaluation sera transmis aux autres organismes de sécurité sociale qui lui attribuent, les cas échéant, des prestations sous conditions de ressources ; 2o  De l’inviter à renvoyer, dans un délai de trente jours, le questionnaire adressé par l’organisme visant à évaluer les différents éléments de son train de vie accompagné de toutes les pièces justificatives, en précisant qu’à défaut de réponse complète dans ce délai les dispositions du troisième alinéa de l’article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale seront appliquées » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262-2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge » ;
    Considérant que M. X... est entré dans le dispositif du revenu minimum d’insertion le 1er février 2003 au titre d’une personne isolée, sans enfant à charge, sans activité ni aucun revenu ; qu’un rapport d’enquête de la caisse d’allocations familiales des Bouches-du-Rhône en date du 27 décembre 2007 a révélé que l’allocataire habite depuis août 2007 une maison de 100 mètres carrés pour laquelle il acquitte un loyer mensuel de 950 euros, concluant que les moyens d’existence de ce dernier ne sont pas conformes à ses déclarations ; que par une décision en date du 16 janvier 2008, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a radié le requérant du dispositif du revenu minimum d’insertion à compter du 1er août 2007 ; que le 23 mai 2008, un titre exécutoire concernant un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 1 939,80 euros a été émis à l’encontre de l’intéressé pour la période du 1er août au 31 décembre 2007 ; que par une décision datée du 28 août 2008, le président du conseil général a rejeté une demande de remise de dette formulée par le requérant au motif que son train de vie était incompatible avec la situation de précarité ; que par un courrier en date du 3 septembre 2008 adressé à la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, M. X... a sollicité un dégrèvement de sa dette, invoquant l’impossibilité financière pour lui de la rembourser à raison de ses graves problèmes de santé et de ses handicaps physiques, n’ayant aucun revenu hormis les prestations sociales et reconnu handicapé de catégorie B ; qu’il a également indiqué que le loyer d’un montant de 950 euros litigieux est payé par un couple d’amis qui lui rendaient service, à charge pour lui de les rembourser dès que possible ; qu’il a ajouté être à la recherche d’un logement plus adapté à sa situation financière et à son handicap ; que par une décision du 19 octobre 2011, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté son recours au motif « qu’un contrôle CAF effectué en décembre 2007 révèle que l’allocataire vit dans une confortable maison de 100 mètres carrés dont le loyer s’élève à 950 euros par mois ; qu’il déclare recevoir de l’aide financière de ses amis, sans pouvoir les nommer, et avoir bénéficié d’un héritage de son parrain, dont il n’a pas communiqué le montant ; qu’ainsi la CAF a supprimé l’allocation et édité un trop-perçu pour la période concernée » ;
    Considérant que la décision de la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône est insuffisamment motivée et ne répond pas au moyen du recours dont elle était saisie ; que, par suite, elle doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la requête de M. X... ;
    Considérant que le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale a demandé, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 octobre 2013, à M. X... de lui faire parvenir les justificatifs des aides financières apportées par ses amis payant son loyer d’un montant de 950 euros concernant la maison située dans le sud de la France, ainsi que les justificatifs de ses conditions de vie et de ressources actuelles, et les actes médicaux attestant ses divers problèmes de santé ; qu’en réponse à cette correspondance, la présente commission a reçu une lettre en date du 7 novembre 2013 émanant d’une certaine Mme Y... qui affirme assumer les soins de santé à domicile du requérant, et gérer les courriers de ce dernier en cas de besoin ; qu’elle déclare que l’allocataire est suivi médicalement depuis deux ans, n’a plus aucun revenu ni famille pour l’aider et n’est plus en état de travailler ; qu’elle précise être la personne qui avait aidé l’intéressé à trouver son logement dans le sud, à payer son loyer et la taxe d’habitation à sa place ; qu’elle avait choisi cette maison pour ses besoins propres également, étant amenée à faire des expositions de peinture dans le cadre de son travail ; qu’elle a fini par mettre le bail à son nom propre pour faciliter le paiement du loyer et de la taxe d’habitation ; qu’elle indique rechercher les documents demandés par la présente commission et les lui faire parvenir ; que par une autre lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 juin 2014, le secrétariat de la présente commission a réitéré sa demande auprès de M. X... ; que ce dernier, par un courrier en date du 26 juin 2014, adressé à la présente commission, affirme être sans activité professionnelle depuis son arrêt maladie établi en avril 2011, étant hospitalité à domicile pour une longue période, subissant des soins intensifs et suivi par des infirmiers ; qu’il est en fauteuil roulant, bénéficiant également d’un lit médicalisé ; qu’il a été hospitalisé en 2013 et 2014 ; qu’il est sans ressources et est hébergé par des amis ; que son avis d’impôt 2013 indique qu’il n’était pas imposable à l’impôt sur le revenu de l’année 2012 ;
    Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en accordant à M. X... une remise totale des sommes réclamées au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône en date du 19 octobre 2011, ensemble la décision du président du conseil général des Bouches-du-Rhône en date du 28 août 2008, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est accordé à M. X... une remise totale de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 1 939,80 euros porté à son débit.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., au président du conseil général des Bouches-du-Rhône. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 octobre 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme DIALLO, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 14 novembre 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet