Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Déclaration - Compétence pour prendre la décision - Compétence juridictionnelle - Précarité
 

Dossier no 130016

Mme X...
Séance du 20 mai 2014

Décision lue en séance publique le 14 novembre 2014

    Vu le recours en date du 25 septembre 2012, complété le 21 novembre 2013, formé par Mme X... qui demande l’annulation de la décision en date du 5 juin 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision en date du 12 août 2009 qui a refusé toute remise sur un indu de 21 606,72 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période d’août 2003 à juin 2008 ;
    La requérante conteste l’indu ; elle demande une remise ; elle fait valoir qu’elle s’est occupée de sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, que la police lui avait confiée alors qu’elle avait été trouvée en train d’errer ; que l’indu qu’on lui réclame est ancien et qu’il y a prescription ; qu’elle vit avec son fils de onze ans ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 23 septembre 2013 du président du conseil général du Nord qui indique que la département a signalé l’affaire au parquet et que, quand bien même il y aurait un classement sans suite, l’indu est fondé ; que Mme X... a effectué des fausses déclarations et qu’aucune remise ne peut dès lors lui être consentie ; que pour la période antérieure à mars 2006, l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles applicable évoque uniquement une faculté attribuée au président du conseil général d’accorder une remise en cas de précarité ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... s’est acquittée de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 20 mai 2014, M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ; qu’aux termes de l’article R. 262-1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262-2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (...) » ;
    Considérant qu’en vertu de l’article L. 262-41 in fine du code de l’action sociale et des familles modifié par la loi no 2004-809 du 13 août 2004 - art. 58 (V) JORF 17 août 2004 en vigueur le 1er janvier 2005 : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 in fine du code de l’action sociale et des familles en vigueur au 25 mars 2006 : « La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ;
    Considérant que Mme X... a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion en mai 2000 ; que, comme suite à une régularisation de dossier, il a été constaté qu’elle avait omis de déclarer les salaires qu’elle a perçus au titre d’un emploi d’aide ménagère auprès de sa mère depuis février 2003 ; qu’il s’ensuit que la caisse d’allocation familiales, par décision en date du 10 juillet 2008, a mis à sa charge le remboursement de la somme 21 606,72 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période d’août 2003 à juin 2008 ; que cet indu résulte du défaut de prise en compte des salaires perçus par Mme X... dans le calcul du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion ;
    Considérant que Mme X... a contesté l’indu et demandé une remise de dette ; que la caisse d’allocation familiales agissant par délégation du président du conseil général, par décision en date du 12 août 2009 a refusé toute remise gracieuse ; que saisie d’un recours, la commission départementale d’aide sociale du Nord, par décision en date du 5 juin 2012, l’a rejeté au motif : « que que la qualification frauduleuse a été retenue par le département et qu’une information a été faite auprès du procureur de la République » ;
    Considérant en premier lieu, qu’il a été versé au dossier un avis de classement du procureur de la République en date du 20 janvier 2011 sur la procédure engagée par le département du Nord contre Mme X... au motif que « les faits ou les circonstances des faits (...) n’ont pu être clairement établis par l’enquête » ;
    Considérant en deuxième lieu, que le pouvoir que l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, applicable avant l’intervention de la loi no 2004-809 du 13 août 2004 sus-rappelé dans sa rédaction antérieure à mars 2006 confère au président du conseil général, n’est pas discrétionnaire ; qu’il lui appartient d’examiner s’il y a lieu de prononcer une remise et qu’il doit motiver sa décision à la lumière de considérations en rapport avec l’objet du revenu minimum d’insertion, sous le contrôle du juge ; que les conclusions du président du conseil général du Nord présentées à cet effet sont inopérantes ;
    Considérant en troisième lieu, que l’indu litigieux porte majoritairement sur la période antérieure à mars 2006 ; qu’ainsi, les dispositions précitées de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles applicables avant l’intervention de la loi du 23 mars 2006 entrée en vigueur le 25 suivant ne font pas, en toute hypothèse, obstacle à ce qu’il en soit accordé une remise gracieuse à Mme X... ; qu’en l’espèce, la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté le recours au motif du bien-fondé de l’indu sans répondre au moyen tiré par le requérante de sa situation de précarité ; qu’ainsi, elle a méconnu sa compétence et que sa décision doit, par suite, être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu de d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que Mme X... affirme, sans être contredite, qu’elle a recueilli sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, après que la police la lui ait confiée alors qu’elle avait été trouvée en train d’errer ; que sa mère disposait de l’allocation personnalisée d’autonomie de 462 euros par mois qu’elle lui reversait sous forme de chèque emploi-service ; qu’elle ne savait pas qu’il fallait déclarer cette somme dont la mesure où les services sociaux avait connaissance qu’elle avait recueilli sa mère ; qu’actuellement, elle a un travail et perçoit un salaire de 750 euros ; qu’elle a son fils à sa charge ; qu’ainsi, ses capacités contributives sont limitées et le remboursement de la totalité de l’indu ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget et constituerait une situation de privation matérielle grave sur une longue période ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation en limitant l’indu à la charge de Mme X... à la somme de 1 000 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 5 juin 2012 de la commission départementale d’aide sociale du Nord, ensemble la décision en date du 12 août 2009 du président du conseil général, sont annulées.
    Art. 2.  -  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion laissé à la charge de Mme X... est limité à la somme de 1 000 euros.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., au président du conseil général du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 mai 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, M. BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 14 novembre 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet