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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Obligation alimentaire – Date d’effet – Ressources – Compétence juridictionnelle

Dossier no 140024

Mme Y…

Séance du 15 octobre 2015

Décision lue en séance publique le 15 octobre 2015

Vu le recours formé par Mme X…, en date du 24 juillet 2013, tendant à l’annulation de la décision en date du 11 avril 2013 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Moselle a confirmé la décision du président du conseil général de la Moselle en date du 24 janvier 2013 rejetant la prise en charge partielle des frais d’hébergement et la prise en charge totale du tarif dépendance de Mme Y…, à compter du 1er août 2012, dans l’établissement EHPAD « E… » au motif que ses débiteurs d’aliments sont en mesure de régler les frais non couverts par ses ressources ;

La requérante soutient que le reste à charge correspondant à la différence entre les ressources de Mme Y… et le prix de journée de l’établissement dans lequel elle est accueillie est trop important et qu’il lui est impossible d’aider financièrement à la fois sa fille et sa mère, sans compter les charges à régler pour son propre foyer ; que les chiffres avancés par la commission départementale d’aide sociale sont faux, que le reste à charge pour la famille est de 857,43 euros et non de 451 euros ; elle précise également que la maison de sa mère est en vente depuis 2008 et que le produit de cette vente pourrait rembourser la créance d’aide sociale ;

Vu le mémoire en défense présenté par le président du conseil général de la Moselle enregistré par le greffe de la commission centrale d’aide sociale en date du 27 janvier 2014 qui conclut au rejet de la requête aux motifs, d’une part, que les obligés alimentaires sont en mesure de régler les frais non couverts par les ressources de Mme Y… et, d’autre part, que le contentieux administratif n’est pas compétent pour régler les litiges familiaux, qu’il appartient au tuteur de saisir le juge aux affaires familiales, seule autorité compétente pour fixer la part contributive de chaque obligé alimentaire ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Vu l’acquittement de la contribution pour l’aide juridique d’un montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale d’aide sociale entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 en application de l’article 1635 bis Q du code général des impôts ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 15 octobre 2015, Mme DERVIEU, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant dans un premier temps que pour prendre sa décision, le juge se place au moment du recours, que le moyen selon lequel les montants auraient évolués depuis la décision du président du conseil général est donc inopérant, qu’il appartient à la requérante de déposer une nouvelle demande d’aide sociale si la situation a changé au point de mériter un nouvel examen ;

Considérant ensuite qu’aux termes de l’article L. 132‑1 du code de l’action et des familles : « Il est tenu compte, pour l’appréciation des ressources des postulants à l’aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire » ; qu’à ceux de l’article R. 132‑1 du même code pris pour l’application du précédent, « Pour l’appréciation des ressources des postulants prévue à l’article L. 132‑1, les biens non productifs de revenu, à l’exclusion de ceux constituant l’habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s’il s’agit d’immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s’il s’agit de terrains non bâtis et 3 % du montant des capitaux. » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’en estimant le montant des ressources de Mme Y… à 1 430 euros, le président du conseil général n’a pas commis d’erreur dans l’appréciation des textes susvisés ;

Considérant qu’en ce qui concerne l’augmentation des frais d’hébergement en 2014, la commission ne peut se prononcer, qu’elle étudie les éléments à la date de la demande d’aide sociale et non à la date du recours, qu’au moment de la demande d’aide sociale, le prix de journée s’élevait à 55,12 euros pour l’hébergement et 5,54 euros pour la dépendance, soit un montant mensuel de 1 881 euros ; que le reste à charge correspondant à la différence entre les ressources de l’intéressée et le prix de journée s’élevait donc bien à 451 euros ;

Considérant par ailleurs qu’aux termes de l’article 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin » ; qu’aux termes de l’article L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (…) La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 132‑9 du même code : « Pour l’application de l’article L. 132‑6, le postulant fournit, au moment du dépôt de sa demande, la liste nominative des personnes tenues envers lui à l’obligation alimentaire définie par les articles 205 à 211 du code civil (…). À défaut d’entente entre elles ou avec l’intéressé, le montant des obligations alimentaires respectives est fixé par l’autorité judiciaire de la résidence du bénéficiaire de l’aide sociale » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction, et notamment des documents relatifs à la situation financière de chacun des obligés alimentaires, que le président du conseil général de la Moselle a fait une exacte estimation de leur capacité contributive, en effet, ces obligés alimentaires étant au nombre de cinq et leur revenu total s’élevant à 15 724,00, le montant de leur participation pouvant être globalement de 451 euros à la date de leur première sollicitation ;

Considérant qu’il n’appartient pas aux juridictions d’aide sociale de fixer de façon contraignante la participation des obligés alimentaires, ni de répartir entre ceux-ci la participation en cas de désaccord entre eux, qu’il appartient à ceux-ci, conformément aux dispositions précitées de l’article R. 132‑9 du code de l’action sociale et des familles, de saisir le juge aux affaires familiales afin que celui-ci fixe les participations respectives de chacun en fonction de leurs capacités contributives ; qu’aucune décision du juge aux affaires familiales ni requête devant celui-ci n’a été fournie à l’appui du présent recours ; que le juge de l’aide sociale ne pourrait réviser l’évaluation à laquelle il a procédé que sur production d’une décision judiciaire rejetant toute ou partie de la demande d’aliment ou limitant la somme due par l’un ou l’autre des obligés alimentaires au titre de l’aide alimentaire, qu’en vertu du troisième alinéa de l’article L. 132‑6 déjà mentionné, il appartiendra au département de la Moselle, sur production de la décision du juge aux affaires familiales, de réviser, le cas échéant, sa décision du 24 janvier 2012 relative à la prise en charge des frais d’hébergement de Mme Y… à compter du 1er août 2012 ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête ne peut être que rejetée,

Décide

Art. 1er Le recours présenté par Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental de la Moselle. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 15 octobre 2015 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme DERVIEU, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 15 octobre 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

M.-C. Rieubernet