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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Aide régulière – Charge – Prélèvement pour répétition de l’indu – Légalité

Dossier no 130333 bis

M. X…

Séance du 19 février 2016

Décision lue en séance publique le 9 mars 2016

Vu le recours en date du 3 mai 2013 et le mémoire en date du 18 décembre 2014, présentés par Maître Véronique MICHEL GICQUEL, conseil de M. X…, qui demande l’annulation de la décision en date du 7 décembre 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté le recours tendant à l’annulation de la décision en date du 26 janvier 2010 par laquelle la commission de recours amiable agissant sur délégation du président du conseil de Paris a refusé toute remise sur un indu de 6 720 euros , résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de mai 2007 à avril 2009 ;

Maître Véronique MICHEL GICQUEL demande l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale en faisant valoir que l’indu assigné à M. X… ne repose sur aucun fondement ; que l’aide familiale dont il a bénéficié s’analyse comme une série de prêts ; que les services de la caisse d’allocations familiales n’ont pas pris en compte sa situation en tant que parent isolé ayant la charge de deux enfants ;

Maître Véronique MICHEL GICQUEL fait en outre valoir que la décision en date du 26 janvier 2010 du président du conseil de Paris refusant toute remise est irrégulière puisqu’elle a été prise sur la base de la décision du 23 avril 2009 qui a considéré M. X… comme personne isolée, alors qu’il avait deux enfants à sa charge ; qu’ainsi, la décision a privé M. X… de ses droits ; que celui-ci vit une situation de précarité avérée ; que la caisse d’allocations familiales opère des prélèvements sur ses prestations familiales en vue du remboursement de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion ;

Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée à la présidente du conseil de Paris qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les pièces desquelles il ressort que Maître Véronique MICHEL GICQUEL s’est acquittée de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu les observations présentées M. X… assisté de son conseil, Maître Véronique MICHEL GICQUEL, à l’audience du 13 mars 2015 ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu la décision avant dire droit rendue par la commission centrale d’aide sociale le 17 avril 2015 ;

Vu la réponse en date du 21 mai 2015 de Maître Véronique MICHEL GICQUEL ;

Vu la réponse en date du 23 décembre 2015 de la présidente du conseil de Paris ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 19 février 2016, M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑3 du même code : « Le bénéficiaire du revenu minimum d’insertion a droit à une allocation égale entre le montant du revenu minimum d’insertion défini à l’article L. 262‑2 et les ressources définies selon les modalités fixées aux articles L. 262‑10 et L. 262‑12 » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑35 du même code : « Le versement de l’allocation est subordonné à la condition que l’intéressé fasse valoir ses droits aux créances d’aliments qui lui sont dues au titre des obligations instituées par les articles 203 (…) du code civil (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑42 du même code : « Le recours mentionné à l’article L. 262‑41 et l’appel contre cette décision devant la commission centrale d’aide sociale ont un caractère suspensif. Ont également un caractère suspensif : le dépôt d’une demande de remise ou de réduction de créance ; la contestation de la décision prise sur cette demande, devant la commission départementale et la commission centrale d’aide sociale » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction, que M. X… a été admis au revenu minimum d’insertion en 1998 ; que, comme suite à un contrôle de l’organisme payeur en date du 23 avril 2009, il a été constaté que l’intéressé s’acquittait d’un loyer de 850 euros , supérieur à l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que M. X… a reconnu bénéficier depuis septembre 2005 d’une aide mensuelle de 280 euros de sa famille, et que ses parents payaient parfois directement son loyer au bailleur ; que l’intéressé avait omis de mentionner les montants de cette aide familiale sur ses déclarations trimestrielles de ressources ; qu’il s’ensuit que la caisse d’allocations familiales, par décision en date du 18 mai 2009, a mis à sa charge le remboursement d’une somme de 6 720 euros , à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de mai 2007 à avril 2009 ;

Considérant que M. X… a contesté l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion et demandé une remise de dette ; que la caisse d’allocations familiales, par décision en date du 10 août 2009, a confirmé l’indu ; que la commission de recours amiable agissant sur délégation du président du conseil de Paris, par décision en date du 26 janvier 2010, a refusé toute remise gracieuse ; que, saisie d’un recours sur le bien-fondé de l’indu, la commission départementale d’aide sociale de Paris, par décision en date du 7 décembre 2012, l’a rejeté ;

Considérant que, par décision avant dire droit en date du 17 avril 2015, la commission centrale d’aide sociale à enjoint la présidente du conseil de Paris de préciser à quel titre M. X… a été allocataire du revenu minimum d’insertion, personne isolée ou personne isolée avec des enfants à charge durant la période litigieuse, et d’indiquer le mode de calcul de l’indu assigné au requérant en précisant les ressources qui ont été prises en compte dans sa constitution, et demandé à M. X… de faire connaître, justificatifs à l’appui, sa situation ainsi que ses ressources et ses charges actuelles ;

Considérant que le département de Paris indique, dans sa réponse en date du 23 décembre 2015, « que M. indique sur les DTR retournées en janvier 2009 s’occuper de ses enfants en garde alternée la moitié du temps, et en juillet 2009, que le rattachement de ses enfants à son propre dossier est en cours » ; qu’il y a donc lieu de considérer que durant la période litigieuse, soit de mai 2007 à avril 2009, M. X… a perçu le revenu minimum d’insertion en qualité de personne isolée, alors qu’il n’est pas contesté qu’il avait la garde alternée de ses enfants ; qu’il suit de là que l’indu qui lui a été assigné, intégrant à juste titre les aides familiales perçues, n’est pas fondé dans son intégralité, dans la mesure où la prestation servie se devait de prendre en compte, au moins partiellement, les enfants de l’intéressé ;

Considérant par ailleurs, que la caisse d’allocations familiales a opéré des prélèvements sur les prestations familiales servies à M. X… en vue du remboursement de l’indu en litige ; que, si ces prélèvements ont été réalisés de manière illégale dans la mesure où le recours est suspensif, cette illégalité a été aggravée du fait que ceux-ci se seraient opérés en compensation sur une autre prestation qui n’est pas attribuée par le président du conseil de Paris ; que ces ponctions n’ont cessé que sur injonction de la commission centrale d’aide sociale ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que, tant la décision en date du 26 janvier 2010 par laquelle la commission de recours amiable agissant sur délégation du président du conseil de Paris a refusé toute remise gracieuse, que la décision en date du 7 décembre 2012 de la commission départementale d’aide sociale de Paris qui l’a validée, doivent être annulées ; qu’au vu des circonstances particulières de l’espèce, il y a lieu de limiter l’indu laissé à la charge de M. X… à la somme de 1 500 euros ; que les sommes prélevées au mépris des dispositions de l’article L. 262‑42 du code précité au-delà de ce montant devront lui être restituées,

Décide

Art. 1er  La décision en date du 7 décembre 2012 de la commission départementale d’aide sociale de Paris, ensemble la décision en date du 26 janvier 2010 de la commission de recours amiable agissant sur délégation du président du conseil de Paris, sont annulées.

Art. 2. L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion laissé à la charge de M. X… est limité à la somme de 1 500 euros .

Art. 3  Les montants illégalement prélevés au-delà de cette somme devront être restitués à M. X… ;

Art. 4  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 5.  La présente décision sera notifiée à M. X…, à Maître Véronique MICHEL GICQUEL, à la présidente du conseil de Paris. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 19 février 2016 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 9 mars 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET