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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Bien immobilier – Ressources – Commission départementale d’aide sociale (CDAS) – Erreur manifeste d’appréciation – Fraude

Dossier no 130553

Mme X…

Séance du 4 mars 2015

Décision lue en séance publique le 11 mai 2015

Vu le recours en date du 12 août 2013 formé par Maître Mathieu SCHWARTZ, conseil de Mme X…, qui demande l’annulation de la décision du 21 mars 2013 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Hauts-de-Seine s’est bornée à ramener à la somme de 6 205,75 euros l’indu initial de 38 767,12 euros assigné Mme X… à raison d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion détecté pour la période d’octobre 2000 à mai 2009 ;

Maître Mathieu SCHWARTZ interjette appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale et conteste l’indu en faisant valoir :

 que l’indu d’allocations de revenu de solidarité active a été annulé par arrêt en date du 6 décembre 2011 de la cour administrative d’appel de Versailles, et que le Conseil d’Etat n’a pas admis le pourvoi du département des Hauts-de-Seine ;

 que les sommes versées par Mme X… sur son compte sont modestes et proviennent d’aides familiales ponctuelles ;

 que les voyages reprochés à Mme X… ne sont pas démontrés ;

 que la fixation de l’indu à la somme de 6 205,75 euros est arbitraire et ne se fonde sur aucun calcul réel notamment de la valeur locative de la maison que possède Mme X… en Moselle ; il affirme qu’elle n’a aucune ressource, et qu’elle avait signalé dans sa demande de revenu minimum d’insertion, posséder une « maison familiale avec dépendances » ; que le parquet d’Aix-en-Provence, saisi d’une plainte pour fraude, a rendu une décision de classement sans suite ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les pièces desquelles il ressort que Maître Mathieu SCHWARTZ s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;

Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au président du conseil général des Hauts-de-Seine qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 4 mars 2015 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations (…) est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou s’il n’est plus éligible au revenu minimum d’insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements. (…) La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent, (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑9 du même code : « Les ressources prises en compte pour le calcul de l’allocation sont égales à la moyenne trimestrielle des ressources perçues au cours des trois mois précédant la demande ou la révision » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑22‑1 du même code : « L’évaluation forfaitaire du train de vie prévue à l’article L. 262‑10‑1 prend en compte les éléments et barèmes suivants : 1o Propriétés bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; 2o Propriétés non bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1509 à 1518 A du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; 3o Travaux, charges et frais d’entretien des immeubles : 80 % du montant des dépenses ; 4o Personnels et services domestiques : 80 % du montant des dépenses ; 5o Automobiles, bateaux de plaisance, motocyclettes : 6,25 % de la valeur vénale de chaque bien lorsque celle-ci est supérieure à 10 000 euros ; 6o Appareils électroménagers, équipements son-hifi-vidéo, matériels informatiques : 80 % du montant des dépenses lorsque celles-ci sont supérieures à 1 000 euros ; 7o Objets d’art ou de collection, articles de joaillerie et métaux précieux : 0,75 % de leur valeur vénale ; 8o Voyages, séjours en hôtels et locations saisonnières, restaurants, frais de réception, biens et services culturels, éducatifs, de communication ou de loisirs : 80 % du montant des dépenses ; 9o Clubs de sports et de loisirs, droits de chasse : 80 % du montant des dépenses ; 10o Capitaux : 2,5 % du montant à la fin de la période de référence (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑40 du même code : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation (…) se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;

Considérant qu’il ressort de l’instruction, que Mme X… a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion en octobre 2000 dans le département des Hauts-de-Seine ; que, comme suite à un contrôle de l’organisme payeur de Moselle où elle avait demandé le bénéfice du revenu minimum d’insertion, et le transfert de son dossier, une enquête a été diligentée le 23 mars 2009 pour vérifier son lieu de résidence ; qu’il a alors été constaté qu’elle était propriétaire d’une maison acquise en juin 2001 pour un montant de 51 832 euros sans recours à un emprunt immobilier, et dont les factures d’électricité étaient régulièrement payées ; qu’à l’occasion d’un second contrôle diligenté par la caisse d’allocations familiales des Hauts-de-Seine en date du 5 octobre 2009, il a été constaté que l’adresse de l’intéressée était un local de 7,35 m², loué pour un montant de 236 euros par mois, qui ne disposait ni de couchage, ni d’effets personnels, ni de table de cuisson ou réfrigérateur ; qu’il est également apparu qu’elle avait effectué plusieurs dépôts en numéraire dans une banque mosellane ; que, considérant que la situation de Mme X… était incompatible avec le bénéfice d’une prestation destinée aux plus démunis, la caisse d’allocations familiales a mis à la charge de Mme X… le remboursement de la somme de 38 767,12 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de d’octobre 2000 à mai 2009 ; que cet indu correspond à la totalité des montants versés au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion à Mme X… ;

Considérant que le président du conseil général, par décision en date du 21 septembre 2010, a refusé toute remise gracieuse ; que saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale des Hauts-de-Seine a, par une première décision en date du 21 juin 2011, prononcé un sursis à statuer en attente de la production par la caisse d’allocations familiales des éléments de calcul correspondant aux ressources perçues sur la période de janvier 2007 à mai 2009 ; que, par une seconde décision en date du 21 mars 2013, elle a réformé la décision du président du conseil général, d’une part en annulant l’indu d’un montant de 28 749,51 euros correspondait à la période d’avril 2001 à septembre 2007 « faute de justificatifs sur les revenus allégués », confirmé d’autre part tant l’indu d’un montant de 2 123,46 euros pour la période du 4e trimestre 2000 et du 1er trimestre 2001, que l’indu d’un montant de 4 082,29 euros « correspondant à la différence entre le revenu minimum d’insertion perçu 7 897,15 euros et le revenu minimum d’insertion estimé dû, soit 3 811,86 euros (…) sur la période d’octobre 2007 à mai 2008 » ;

Considérant que la commission départementale d’aide sociale des Hauts-de-Seine, par la décision en date du 21 mars 2013 attaquée, en confirmant un indu pour la période du 4e trimestre 2000 et du 1er trimestre 2001 sans avoir au préalable constaté une fausse déclaration, condition sine qua non pour lever la prescription biennale visée par l’article L. 262‑40 du code de l’action sociale et des familles, a commis une erreur de droit ; que sa décision doit, par suite, être annulée ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;

Considérant que le rapport de contrôle du 5 octobre 2009 a établi que Mme X… avait déclaré depuis le 1er octobre 2000 comme adresse de domicile, un local de 7,35 m² situé dans les Hauts-de-Seine, loué moyennant un loyer d’un montant de 320 euros minoré suite à des travaux à 236 euros par mois, qui ne disposait ni de couchage, ni d’effets personnels, ni de table de cuisson ou réfrigérateur, alors qu’il est établi qu’elle est propriétaire d’une maison en Moselle et qu’elle a effectué dans ce département des dépôts sur ses comptes bancaires ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens soulevés, il est avéré qu’elle a effectué de fausses déclarations pour obtenir l’attribution du revenu minimum d’insertion ;

Considérant que, dans la mesure où le président du conseil général des Hauts-de-Seine n’a pas fait appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale, et que les délais pour ce faire sont expirés, il n’y a pas lieu de s’interroger sur la question de savoir si la commission départementale d’aide sociale a indûment minoré le montant de l’indu assigné à Mme X… ; qu’eu égard aux manœuvres frauduleuses dont s’est rendue coupable l’intéressée, celle-ci n’est toutefois pas fondée à se plaindre que la commission départementale d’aide sociale des Hauts de Seine n’ait pas fixé à un montant inférieur à 6 205,75 euros le montant de sa dette,

Décide

Art. 1er La décision en date de 21 mars 2013 de la commission départementale d’aide sociale des Hauts-de-Seine est annulée.

Art. 2.  Le montant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion assigné à Mme X… est fixé à 6 205,75 euros.

Art. 3.  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 4.  La présente décision sera notifiée à Maître Mathieu SCHWARTZ, à Mme X…, au président du conseil départemental des Hauts-de-Seine. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 mars 2015 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 11 mai 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET