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Dispositions communesà tous les types d'aide sociale

Recours en récupération

Récupération sur succession

Mots clés : Recours en récupération – Récupération sur succession – Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Personnes handicapées – Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) – Actif successoral – Précarité – Justificatifs

Dossier no 140424

Mme X…

Séance du 26 septembre 2016

Décision lue en séance publique le 30 novembre 2016

Vu le recours formé le 28 avril 2014 par Mme Y…, mandataire, et Mme Z… tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne réunie le 21 novembre 2013 qui a rejeté le recours aux motifs que la prestation d’hébergement n’est pas visée par le plafond de l’article R. 132‑12 du code de l’action sociale et des familles, et que la situation d’impécuniosité de la requérante n’est pas justifiée ;

La requérante soutient que, au regard des articles L. 132‑8 et R. 132‑12 du code de l’action sociale et des familles, si la prestation d’hébergement servie du vivant de sa mère, Mme X…, par le conseil général du Val-de-Marne au titre de son accueil en service de soins longue durée n’est pas explicitement citée, il n’apparaît pas logique que le conseil général y fait référence pour justifier sa décision du 10 juillet 2013 sans « compromettre » (sic) une erreur de droit ; que le jugement de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne ne pouvait pas confirmer la décision du 10 juillet 2013 du président du conseil général sans indiquer les fondements textuels de sa décision ; qu’aux termes des articles L. 344‑1, L. 344‑5 et L. 312‑1-7 du code de l’action sociale et des familles, Mme X… étant une personne âgée handicapée hébergée, ses frais d’hébergement à l’hôpital peuvent relever des dispositions des articles précités qui prévoient que, pour les frais d’hébergement, il n’y a pas de récupération des prestations d’aide sociale servies lorsque les héritiers sont notamment les enfants du bénéficiaire décédé ; que Mme Z… n’a donc pas à rembourser au conseil départemental l’actif net successoral hérité en tant qu’enfant de Mme X… ; que dans l’hypothèse où la commission centrale d’aide sociale considère que ces dispositions précitées ne sont pas applicables, il est demandé de préciser les dispositions applicables au cas d’espèce ; que, par ailleurs, le montant total de l’aide sociale attribué à Mme X… est évalué à 128 138,94 euros, alors qu’en réalité le montant est de 120 943,14 euros, justifié par les tableaux récapitulatifs faisant état des sommes allouées ; que selon la décision de la commission centrale d’aide sociale du 11 mai 2004, département de l’Eure, il appartient au président du conseil départemental de modérer les sommes à récupérer par rapport à la créance départementale en tenant compte de l’état d’impécuniosité, de la situation sociale ou la santé de l’intéressé ; que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne précise qu’elle dispose d’un pouvoir de modération mais qu’elle n’en a pas été en mesure d’y faire application, faute pour Mme Z… d’établir une situation personnelle difficile ou de son impécuniosité ; qu’il est demandé à la commission centrale d’aide sociale de faire jouer le pouvoir de modération et communiquer les revenus mensuels (2 085,13 euros) et charges (1 316,33 euros) de Mme Z…, laissant un reste à vivre de 768,80 euros ;

Vu, enregistré le 24 juillet 2014, le mémoire en défense du président du conseil départemental du Val-de-Marne qui demande à la commission centrale d’aide sociale de rejeter le recours et de confirmer le recours en récupération de 40 793,22 euros pour les motifs ci-après ; que Mme X… a été prise en charge par l’aide sociale pour ses frais d’hébergement en tant que personne âgée dans un établissement pour personnes âgées, et que les articles L. 132‑1, L. 132‑3, L. 132‑6 et L. 132‑9, L. 231‑4 et R. 131‑1 et suivants du code de l’action sociale et des familles s’appliquent ; que les articles L. 344‑1 et L. 344‑5 du même code concernant l’hébergement des personnes handicapées ne sont pas applicables à Mme X…, non reconnue comme personne handicapée à 80 % par la maison départementale des personnes handicapées du Val-de-Marne ; que, par ailleurs, les frais d’hébergement ne font pas partie des prestations sur lesquelles peuvent s’exercer une récupération sur succession pour la partie de l’actif net successoral qui excède 46 000 euros ; qu’en conséquence, la récupération partielle de la créance d’un montant évalué à 128 138,94 euros sur la succession de la bénéficiaire à l’aide sociale est justifiée ; que, sur le montant de la créance, le conseil départemental a reconnu devant la commission départementale que le calcul devait être revu et que la somme qui doit être récupérée correspond, a minima, au montant de l’actif net successoral de 40 793,22 euros, la somme étant inférieure à l’état des frais, soit 69 933,86 euros ; qu’enfin, sur la situation de Mme Z…, après diminution des charges de ses ressources, il lui reste 768,80 euros par mois ; que seul le montant de l’imposition figure sur l’avis d’imposition de cette dernière et que les éventuels produits autres que les pensions de retraite sont inconnus ; qu’il n’est pas établi que sa situation actuelle permette de dire qu’elle connaît des difficultés justifiant une diminution du montant de la récupération ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le courrier de Mme Z… du 11 août 2016 faisant état de sa situation actuelle et invoquant ses difficultés financières ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu, à l’audience publique du 26 septembre 2016, Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas par l’Etat ou le département : 1o Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; 2o Contre le donataire, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ; 3o Contre le légataire » ; qu’aux termes de l’article R. 132‑11 du même code, « Les recours prévus à l’article L. 132‑8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de l’aide sociale » ; que le recours en récupération est exercé contre la succession du bénéficiaire, et non sur les biens propres des héritiers, dans la limite de l’actif net successoral et à hauteur des prestations allouées ;

Considérant qu’il résulte du dossier que Mme X…, décédée le 21 novembre 2012, a bénéficié de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de frais d’hébergement du 5 décembre 2008 au 31 décembre 2011 à hauteur de 797 euros par mois, puis du 1er avril 2012 au 31 décembre 2014 à hauteur de 1 102 euros par mois ; que par décision du président du conseil départemental du 10 juillet 2013, une demande de récupération partielle de la créance départementale de 128 138,94 euros a été adressée à sa fille, Mme Z…, à concurrence de l’actif net successoral de 40 793,22 euros ; que, suite au recours en annulation formé par le conseil de Mme Z…, la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne a, par décision du 21 novembre 2013, rejeté ledit recours ; que cette décision est contestée devant la commission centrale d’aide sociale ;

Considérant que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne vise expressément l’article L. 132‑8 ainsi que l’article R. 132‑12 du code de l’action sociale et des familles ; qu’elle précise que la prestation des frais d’hébergement en établissement pour personnes âgées, ce qui est le cas de Mme X…, n’est pas listée par l’article R. 132‑12 précité, et est donc récupérable au premier euro ; que, sur la récupération sur succession de la créance du département, Mme X… a été prise en charge au titre de l’aide sociale pour ses frais d’hébergement en tant que personne âgée, excluant ainsi l’application des dispositions des articles L. 344‑1 et L. 344‑5 du code de l’action sociale et des familles concernant l’hébergement des personnes handicapées ; qu’en motivant sa décision comme elle l’a fait, la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant par ailleurs que l’aide sociale est un droit subsidiaire, que la collectivité n’intervient qu’à défaut des ressources de la bénéficiaire et de ses obligés alimentaires et que la récupération a lieu lorsque la succession de la bénéficiaire fait état d’un patrimoine ; qu’en l’espèce, le montant de la créance a été ramené de 128 138,94 euros à 120 943,14 euros comme demandé par la requérante mais que la créance départementale, ne pouvant excéder le montant de l’actif net successoral, est réévaluée à 40 793,22 euros ; qu’au regard des justificatifs apportés par Mme Z…, cette dernière perçoit 2 085,13 euros de ressources mensuelles pour plus de 1 316,33 euros de charges totales comprenant un loyer, des impôts et diverses factures, soit 768,80 de reste à vivre ; qu’il ressort, au regard des pièces du dossier et des pièces complémentaires apportées par la requérante, que les charges ont augmenté et que la situation financière, sociale ou l’état de santé de Mme Z… justifient une modération du montant de la récupération sur l’actif net successoral de Mme X… ; que, par suite, il y a lieu de modérer le montant du recours en récupération exercé sur la succession de Mme X… et de laisser à la charge de Mme Z… la somme de 4 000 euros ; qu’il appartient à la requérante de solliciter un échéancier de paiement auprès du payeur départemental et éventuellement de saisir celui-ci si, dans le cours de l’exécution de cet échéancier, sa situation venait à s’aggraver,

Décide

Art. 1er.  La créance réclamée par le département auprès de Mme Z… est modérée à hauteur de 4 000 euros.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme Y…, à Mme Z… et au président du conseil départemental du Val-de-Marne. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 26 septembre 2016 où siégeaient M. JOURDIN, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, et Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 30 novembre 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET