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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Ressources – Déclaration – Train de vie – Règlement

Dossier no 150377

Mme X…

Séance du 12 juillet 2016

Décision lue en séance publique le 30 septembre 2016

Vu le recours en date du 1er avril 2015 formé par le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis qui demande l’annulation de la décision en date du 19 décembre 2014 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du même département a accordé à Mme X… une remise de 80 % sur un solde d’indu de 7 882,32 euros relatif à un indu initial de 9 445,99 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion détecté pour la période de juin 2007 à mai 2009 ;

Le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis conteste la décision en faisant valoir que la procédure applicable au litige n’était pas celle relative à l’évaluation du train de vie ; que l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles applicable fait obstacle à toute remise de dette ; que le recours introduit par Mme X… devant la commission départementale d’aide sociale n’était pas signé et était donc irrecevable ;

Vu le mémoire en défense en date du 29 septembre 2015 de Mme X… qui fait valoir sa bonne foi ; elle affirme avoir déclaré ses revenus fonciers au fisc ; qu’elle pensait ne pas avoir à déclarer ses loyers destinés à régler les échéances de son prêt immobilier ; qu’elle a remboursé une partie de son indu ; qu’elle est allocataire du revenu de solidarité active ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 12 juillet 2016 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…), et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tels que défini à l’article R. 262‑1 du même code ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments. (…) » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X… a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion en juin 2007 ; que, comme suite à un contrôle de l’organisme payeur en date du 9 avril 2009, il a été constaté que l’intéressée percevait des loyers servant à rembourser un emprunt contracté pour l’acquisition d’un bien immobilier, qui n’étaient pas reportés sur les déclarations trimestrielles de ressources correspondantes ; qu’il s’ensuit que le remboursement de la somme de 9 445,99 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de juin 2007 à mai 2009, a été mis à la charge de Mme X… ; qu’un titre exécutoire a été émis en octobre 2009 ;

Considérant, alors que le solde de l’indu était de 7 882,32 euros, suite à des remboursements volontaires, que Mme X… a formulé à trois reprises des demandes de remises gracieuses qui ont été rejetées par le président du conseil général ; que suite à la troisième décision de refus de remise en date du 8 novembre 2013, l’intéressée a saisi la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis qui, par décision en date du 19 décembre 2014, lui a accordé une remise de 80 %, laissant à sa charge un reliquat de 1 576 euros ;

Considérant que la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis a motivé sa décision en date du 19 décembre 2014 par l’application de l’article R. 262‑22‑1 du code de l’action sociale et des familles relatif à l’évaluation forfaitaire du train de vie concernant les propriétés bâties, alors qu’en l’espèce, les dispositions applicables sont celles des articles R. 262‑3 et R. 262‑44 dudit code ; qu’ainsi, la décision est entachée d’une erreur de droit et qu’elle encourt, dès lors, l’annulation ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;

Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire régissant le revenu minimum d’insertion n’autorise à déduire les sommes tirées de la location des biens immobiliers du montant des revenus qui doivent être pris en compte pour la détermination des droits au revenu minimum d’insertion au motif qu’elles serviraient à rembourser des emprunts ; qu’ainsi, l’indu assigné à Mme X… est fondé en droit ;

Considérant que la copie du recours de Mme X… devant la commission départementale d’aide sociale qui a été versée au dossier est signée ; qu’au surplus, aucun élément du dossier n’indique que le conseil général a soulevé ce moyen devant la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’absence de signature sur le recours de Mme X… évoquée par le président du conseil général ne peut qu’être rejeté ;

Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑39 et L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que toute erreur ou omission déclarative imputable à un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion ne peut être regardée comme une fausse déclaration faite dans le but délibéré de percevoir à tort le revenu minimum d’insertion ; qu’en l’espèce, Mme X… a déclaré ses loyers aux services fiscaux ; qu’aucun élément du dossier n’indique qu’elle se soit rendue coupable de manœuvre frauduleuse ; qu’il suit de là qu’il n’y a pas, en toute hypothèse, obstacle à ce qu’il lui soit accordé une remise ;

Considérant que Mme X… précise avoir repris son bien immobilier pour l’occuper ; qu’elle a été admise au revenu de solidarité active ; qu’ainsi, ses capacités contributives sont limitées et le remboursement de la totalité du reliquat de l’indu ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de sa situation en lui accordant une remise de 40 % sur le solde d’indu de 7 882,32 euros,

Décide

Art. 1er La décision en date du 19 décembre 2014 de la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis, ensemble la décision en date du 8 novembre 2013 du président du conseil général, sont annulées.

Art. 2.  Il est consenti à Mme X… une remise de 40 % sur le solde d’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 7 882,32 euros.

Art. 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X… au président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 12 juillet 2016 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 30 septembre 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET