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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Curateur – Ressources – Revenus fonciers – Loyer – Donation – Usufruit

Dossier no 140603

Mme X…

Séance du 30 novembre 2016

Décision lue en séance publique le 30 novembre 2016

Vu le recours formé le 16 octobre 2014 par Maître LEPINE représentant les intérêts de Mme X… tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Nièvre du 17 juin 2014 ayant confirmé la décision du président du conseil général de la Nièvre du 8 avril 2013 ayant rejeté la demande de prise en charge des frais d’hébergement aux motifs que les ressources de Mme X… et les revenus fonciers procurés par la location d’un bien immobilier dont elle a l’usufruit lui permettrait de régler ses frais d’hébergement ;

Le requérant soutient que l’état de besoin de Mme X… est justifié et permet la prise en charge des frais d’hébergement dans la mesure où elle est usufruitière d’un immeuble dont son petit-fils est nu-propriétaire, et qu’il loue 360 euros par mois via une SCI ; que cette nue-propriété fait suite à la donation avec réserve d’usufruit effectuée par sa grand-mère le 23 avril 1998 ; que le loyer n’est pas versé à Mme X… mais à la SCI ; que le déficit mensuel de Mme X… s’élève à 310,45 euros par mois pour 2012 et 2013 et à 605 euros pour 2014 ; que ce loyer a servi à régler deux prêts souscrits par M. Y… et sa SCI pour rénover le bien immobilier ; que les deux contrats de prêts ont bien été conclus pour le compte de la SCI pour des travaux de rénovation immobilière dans la mesure où les adresses de la SCI et de l’immeuble litigieux sont identiques, ce qui a été confirmé par courrier de M. Y… du 26 avril 2013 ; que ce dernier a indiqué que le loyer ne pouvait pas être reversé à Mme X… car il servait au remboursement des prêts travaux et qu’il fournit la copie des contrats, factures confirmant qu’il y a bien eu des travaux de rénovation justifiant ce financement par crédit ; que le contenu de ces factures prouvent que les travaux, objet des prêts, étaient des réparations d’entretien établies à l’attention de la SCI et permettant de louer le bien ; que ces travaux devaient être supportés par Mme X… et non par son petit-fils, nu-propriétaire ; que cette affectation des loyers n’est pas un choix non conforme aux intérêts de Mme X…, mais une situation qui s’imposait à elle et qu’elle avait accepté ; que la commission départementale d’aide sociale devait exclure le loyer du budget de Mme X… ; que les prêts sont soldés depuis août 2014 et que M. Y… proposait de les reverser à compter de cette date ; que ce n’est néanmoins plus possible car il n’y a plus de locataire depuis le 6 juillet 2014 ; que le notaire a par ailleurs précisé que les droits en usufruit de Mme X… ne s’élèvent qu’au 2/10 de la pleine propriété, ce qui lui procurerait qu’un gain insignifiant ; que le défendeur prétend qu’il y a lieu de soulever la nullité du bail litigieux au motif que seule Mme X… aurait pu le conclure en tant qu’usufruitière et donc seule personne pouvant profiter du bien et en tirer les revenus par la location ; que néanmoins, aucun texte n’interdit au nu-propriétaire, tel que l’a fait M. Y…, de conclure un bail pour un immeuble objet d’un usufruit ; que le conseil départemental de la Nièvre n’a pas qualité pour soulever une telle nullité de contrat qui ne peut être prononcée que dans le cadre d’une action judiciaire distincte devant le juge judiciaire ; que par ailleurs, les factures sont au nom de M. Y… et de la SCI puisque les deux prêts ont été souscrits en leur nom ; que cela ne remet pas en cause les règles et le raisonnement précis selon lequel les travaux concernés devaient être supportés par Mme X…, auquel cette dernière avait consenti ; qu’enfin, le défendeur indique qu’après consultation du cadastre et d’éléments transmis par la conservation des hypothèques, il n’apparaît pas que la SCI disposerait de tout ou partie des partis du bien concerné ni de son usufruit ; que cette société ne peut être titulaire de cet usufruit puisque Mme X… l’est ;

Vu, enregistré le 2 avril 2015, le mémoire en défense du président du conseil départemental de la Nièvre ; qu’il soutient que les ressources de Mme X… s’élèvent, lors du dépôt de la demande en 2012, à 1 601,29 euros pour des charges de 1 865,84 euros, soit 271,71 euros de reste à charge, alors que la commission départementale d’aide sociale a confirmé un reste à charge de 310,45 euros dans sa décision du 17 juin 2014 ; que l’état de besoin doit être établi au 22 août 2012 et non au 1er janvier 2014 ; que la SCI, dont l’activité déclarée est la location de terrains et autres biens immobiliers, a pour siège l’adresse du bien immobilier ayant fait l’objet de la donation ; qu’il n’apparaît pas que la SCI dispose de tout ou partie des parts du bien cadastre à cette même adresse ni même de l’usufruit ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 30 novembre 2016, Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 132‑1 du code de l’action sociale et des familles : « Il est tenu compte, pour l’appréciation des ressources des postulants à l’aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu (…) » ; que, conformément à l’article L. 132‑3, « (ces) ressources de quelque nature qu’elles soient à l’exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l’aide aux personnes âgées ou de l’aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d’hébergement et d’entretien dans la limite de 90 %. » ;

Considérant qu’il résulte du dossier que Mme X… est hébergée depuis le 22 septembre 2006 en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et placée sous curatelle renforcée le 18 septembre 2012 ; que le 22 novembre 2012 une demande d’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées a été déposée puis refusée par le président du conseil général au motif que les ressources de Mme X… et les revenus fonciers procurés par la location de son bien immobilier lui permettent de régler ses frais d’hébergement ; que le 6 juin 2013, l’association A… de la Nièvre, organisme de curatelle, a déposé une requête devant la commission départementale d’aide sociale de la Nièvre tendant à obtenir l’annulation de la décision du 4 avril 2013 et la prise en charge des frais d’hébergement de Mme X… au titre de l’aide sociale ; que la commission départementale d’aide sociale a rejeté le recours par décision du 17 juin 2014 ; que par courrier du 16 octobre 2013, Maître LEPINE, représentant Mme X… et son curateur, a formé appel de cette décision devant la présente commission centrale d’aide sociale ;

Considérant que, sur l’état de besoin de Mme X…, cette dernière disposait, à la date de demande du dossier d’aide sociale, de 1 601,29 euros de ressources pour des charges de 1 865,84 euros, laissant un découvert de 271,71 euros ; que l’état de besoin de Mme X… n’est pas contesté par la commission départementale d’aide sociale ;

Considérant que Mme X… est usufruitière d’un immeuble loué 360 euros par mois à des locataires ; que les loyers qui devraient lui revenir, es qualité, sont versés à une SCI dont, selon les seules déclarations des requérants, les parts sociales appartiennent à M. Y…, unique petit-fils nu-propriétaire, et son épouse ; que le choix fait par Mme X… de ne pas percevoir ses loyers selon des modalités qui semblent relever de la seule entente familiale, sans autre formalisme, ne devrait pas conduire à écarter les règles sur l’admission à l’aide sociale ; que si Mme X… peut disposer comme elle l’entend des loyers afférents au bien loué  y compris en s’en dépouillant  ceux-ci rentrent néanmoins dans l’assiette des ressources prises en compte au titre des conditions de ressources ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’état de besoin de Mme X… n’est pas justifié et qu’il y a lieu de rejeter le recours,

Décide

Art. 1er Le recours de Maître LEPINE est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Maître A. LEPINE, au président du conseil départemental de la Nièvre. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 novembre 2016 où siégeaient M. JOURDIN, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 30 novembre 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET