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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

CMU – Conditions d'octroi

Mots clés : Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) – Avocat – Conseil d’Etat – Commission centrale d’aide sociale (CCAS) – Décision – Régularité – Compétence juridictionnelle – Ressources – Plafond

Dossier no 150620

Mme X…

Séance du 14 juin 2016

Décision lue en séance publique le 1er décembre 2016

Vu l’arrêt de renvoi du 25 février 2015 du Conseil d’Etat annulant la décision no 120409 du 30 septembre 2013 de la commission centrale d’aide sociale, qui avait prononcé le rejet du recours de Mme X… dirigé contre la décision en date du 18 novembre 2011 de la commission départementale d’aide sociale de Paris confirmant la décision de la caisse du régime social des indépendants d’Ile-de-France Centre du 7 juin 2011, en ce que la commission centrale d’aide sociale avait entaché sa décision d’irrégularité en n’ayant pas sursis à statuer en mettant Maître Olinda PINTO, l’avocate de Mme X…, en demeure d’accomplir les diligences qui lui incombaient et en n’ayant pas porté sa carence à la connaissance de la requérante ;

Vu le recours formé le 9 février 2012 par Mme X…, tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 18 novembre 2011, confirmant la décision de la caisse du régime social des indépendants d’Ile-de-France Centre lui refusant l’attribution du dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé, en date du 7 juin 2011 ;

La requérante soutient qu’elle bénéficie du régime invalidité depuis une dizaine d’années, qu’il s’agit de la première décision de refus de renouvellement qui lui est opposée, depuis la création du dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé ; elle conteste la prise en compte de l’allocation de solidarité aux personnes âgées dans le calcul de ses ressources, s’agissant de ressources non imposables ; elle estime que ses ressources s’élèvent annuellement à 8 114,40 euros dont 666,40 euros de forfait logement, 1 578 euros de la CNAV, 5 604,94 euros du RSI, 133,02 euros et 132,04 euros de retraite complémentaire ;

Vu le courrier du greffe de la commission centrale d’aide sociale du 6 août 2015 à Mme X… ;

Vu la décision du bureau d’aide juridictionnelle de Paris en date du 10 septembre 2015 indiquant que Mme X… serait assistée par Maître Olinda PINTO ;

Vu le mémoire en date du 16 décembre 2015 de Maître Olinda PINTO, conseil de Mme X…, selon lequel, notamment le refus d’attribution du dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé, prive l’intéressée d’un droit effectif d’accès à la santé ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 14 juin 2016 Maître Olinda PINTO, conseil de Mme X…, et Mme ASTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant ce qui suit :

Il résulte de l’article L. 861‑1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale et de ses textes d’application, qu’ont droit à la protection complémentaire en matière de santé les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond qui varie selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge du demandeur ;

Aucune dérogation à ce plafond n’a été prévue y compris si l’intéressée ne dépasse que faiblement le plafond de ressources applicable ;

Il résulte de l’article R. 861‑4 du code de la sécurité sociale que « les ressources prises en compte pour la détermination du droit au bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé comprennent, sous les réserves et selon les modalités de calcul ci-après, l’ensemble des ressources nettes de prélèvements sociaux obligatoires, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale, de quelque nature qu’elles soient, des personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article R. 861‑2 du code de la sécurité sociale, y compris les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ;

L’article R. 861‑10 du code de la sécurité sociale dispose que : « Ne sont pas prises en compte dans les ressources les prestations suivantes :

1o L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments institués par les articles L. 541‑1 et L. 755‑20, ainsi que la majoration mentionnée à l’article L. 541‑4 ;

2o L’allocation de rentrée scolaire instituée par les articles L. 543‑1 et L. 755‑22 ;

3o Les primes de déménagement instituées par les articles L. 542‑8 et L. 755‑21 du présent code et par l’article L. 351‑5 du code de la construction et de l’habitation ;

4o La prestation complémentaire pour recours à tierce personne et les majorations pour tierce personne ainsi que la prestation de compensation mentionnée à l’article L. 245‑1 du code de l’action sociale et des familles, l’allocation compensatrice prévue au chapitre V du titre IV du livre II du même code dans sa rédaction antérieure à la loi no 2005‑102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et l’allocation personnalisée d’autonomie mentionnée à l’article L. 232‑1 du même code ;

5o Les prestations en nature dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité ou de l’assurance accident du travail ;

6o Les indemnités complémentaires et allocations de remplacement instituées par les articles L. 613‑19‑1, L. 613‑19‑2, L. 722‑8-1 et L. 722‑8-3 et par les articles L. 732‑10 à L. 732‑12‑1 du code rural et de la pêche maritime ;

7o L’indemnité en capital attribuée à la victime d’un accident du travail prévue à l’article L. 434‑1 ;

8o La prime de rééducation et le prêt d’honneur mentionnés à l’article R. 432‑10 et à l’article L. 751‑8 du code rural et de la pêche maritime et à l’article R. 751‑40 du code rural et de la pêche maritime ;

9o La prestation d’accueil du jeune enfant mentionnée aux articles L. 531‑1 et L. 755‑19, à l’exception de la prestation partagée d’éducation de l’enfant ;

10o Les aides et secours financiers versés par des organismes à vocation sociale dont le montant ou la périodicité n’ont pas de caractère régulier ainsi que les aides et secours affectés à des dépenses concourant à l’insertion du bénéficiaire et de sa famille notamment dans les domaines du logement, des transports, de l’éducation et de la formation ;

11o Les bourses d’études des enfants mentionnés à l’article R. 861‑2, sauf les bourses de l’enseignement supérieur ;

12o Les frais funéraires mentionnés à l’article L. 435‑1 et aux articles L. 751‑8 et L. 752‑3 du code rural et de la pêche maritime ;

13o Le capital-décès servi par un régime de sécurité sociale ;

14o L’allocation du fonds de solidarité en faveur des anciens combattants d’Afrique du Nord créée par l’article 125 de la loi de finances pour 1992 (no 91‑1322 du 30 décembre 1991) ;

15o L’aide spécifique en faveur des conjoints survivants des membres des formations supplétives instituée aux premier et troisième alinéas de l’article 10 de la loi no 94‑488 du 11 juin 1994 ;

16o Les indemnités et prestations versées aux volontaires en service civique en application de l’article L. 120‑21 du code du service national » ;

Cette liste des prestations n’étant pas prises en compte dans le calcul des ressources est limitative. Il y a lieu de prendre en compte l’allocation de solidarité aux personnes âgées dès lors qu’elle ne s’y trouve pas mentionnée ;

Suivant l’article R. 861‑8 du code de la sécurité sociale, et sous réserve des dispositions des articles R. 861‑11, R. 861‑14 et R. 861‑15, les ressources prises en compte sont celles qui ont été perçues par les membres du foyer au cours de la période des douze mois civils précédant la demande, soit en l’espèce, le 20 mai 2011 ;

Aux termes de l’article L. 863‑1 du code de la sécurité sociale : « ouvrent droit à un crédit d’impôt au titre de la contribution due en application de l’article L. 862‑4, les contrats d’assurance complémentaire de santé individuels souscrits auprès d’une mutuelle, d’une entreprise régie par le code des assurances ou d’une institution de prévoyance par les personnes résidant en France dans les conditions fixées à l’article L. 861‑1 dont les ressources, appréciées dans les conditions prévues aux articles L. 861‑2 et L. 861‑2-1, sont comprises entre le plafond prévu à l’article L. 861‑1 et ce même plafond majoré de 20 % » ;

Selon l’article R. 861‑7 du code de la sécurité sociale « les aides personnelles au logement instituées par les articles L. 542‑1, L. 755‑21 et L. 831‑1 du code de la sécurité sociale et l’article L. 351‑1 du code de la construction et de l’habitation ne sont incluses dans les ressources qu’à la concurrence d’un forfait égal à 12 % du montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire lorsque le foyer se compose d’une personne (…) ;

Le foyer tel que défini à l’article R. 861‑2 du code de la sécurité sociale est composé, dans le cas présent, d’une personne, Mme X… et la période de référence applicable est celle courant du 1er mai 2010 au 30 avril 2011 ;

La caisse du régime social des indépendants d’Ile-de-France a rejeté la demande d’attribution du dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé de Mme X… par une décision du 7 juin 2011. Cette décision a été confirmée par la commission départementale d’aide sociale de Paris au motif que ses ressources dépassaient le plafond applicable par une décision du 18 novembre 2011. La commission centrale d’aide sociale a été saisie d’un recours contre la décision de la commission départementale d’aide sociale le 9 février 2012 contestant la prise en compte dans les ressources de l’allocation spécifique aux personnes âgées. Son recours a été rejeté par une décision du 30 septembre 2013. Mme X… a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat le 4 février 2014 qui a conduit à l’annulation de la décision de la commission centrale d’aide sociale pour irrégularité, prononcé en séance du 29 janvier 2015. La commission centrale d’aide sociale aurait dû surseoir à statuer et mettre l’avocate de Mme X…, absente à l’instance et n’ayant fait parvenir de mémoire, en demeure d’accomplir les diligences lui incombant et porter sa carence à la connaissance de la requérante pour éventuellement qu’elle choisisse un autre représentant. Le Conseil d’Etat sollicite le réexamen au fond devant la commission centrale d’aide sociale.

Le mémoire de Maître Olinda PINTO, conseil de Mme X…, du 16 décembre 2015, soutenu à l’audience, soulève le fait que la décision de refus d’attribution de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé est une privation au droit effectif à l’accès à la santé, contraire aux alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution et aux dispositions de l’article 35 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. De plus la décision de la commission centrale d’aide sociale porterait une atteinte disproportionnée au but poursuivi et serait ainsi contraire à l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Maître Olinda PINTO soulève aussi l’insuffisance de motivation, le non-examen particulier des circonstances d’espèce, la méconnaissance de l’étendue des pouvoirs et l’erreur manifeste d’appréciation ;

La commission centrale d’aide sociale n’est pas compétente pour statuer sur la conformité des dispositions législatives relatives au dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé au préambule de la Constitution, dont nombre de dispositions constituent des objectifs de valeur constitutionnelle ; quant à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales leurs prescriptions s’imposent dans les conditions établies par les législations et pratiques nationales qui sont précises et s’imposent dès lors à la juridiction de céans. Les autres moyens soulevés dans le mémoire de Maître Olinda PINTO apparaissent inopérants en ce qu’ils ne ressortent pas de l’examen de la décision querellée et par voie de conséquence ne sont pas établis ;

Il résulte du dossier, que les ressources du foyer de Mme X… sont constituées de pensions de retraite et de l’allocation de solidarité aux personnes âgées d’un montant de 10 938,64 euros, et elles sont donc, sans qu’il soit besoin de faire application du forfait lié à l’aide au logement, supérieures au plafond d’attribution du dispositif d’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé fixé à 9 134 euros pour un foyer d’une personne suivant le décret no 2010‑1105 du 20 septembre 2010 ;

La commission départementale d’aide sociale a donc fait une juste application des dispositions légales et réglementaires en vigueur,

Décide

Art. 1er Le recours présenté par Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, à Maître Olinda PINTO, au préfet de Paris, au directeur du régime social des indépendants Ile-de-France Centre. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 juin 2016 où siégeaient M. Paul DU BOIS DE LA SAUSSAY, président, M. MONY, assesseur, Mme ASTIER, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 1er décembre 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET