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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Ressources – Déclaration – Recevabilité – Modalités de calcul – Prélèvement pour répétition de l’indu – Légalité

Dossier no 150415

Mme X…

Séance du 23 novembre 2016

Décision lue en séance publique le 30 janvier 2017

Vu le recours formé le 15 octobre 2014 par Mme X… tendant à l’annulation de la décision du 25 août 2014 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Bas-Rhin a rejeté son recours dirigé contre la décision du 5 février 2010 du président du conseil général du Bas-Rhin qui a refusé toute remise gracieuse sur un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant initial de 2 114,72 euros décompté sur la période de juillet 2008 à mars 2009 ;

La requérante ne conteste pas l’indu mais en demande une remise ; elle soutient se trouver dans l’impossibilité de s’acquitter de sa dette, ne disposer pour seule ressource que du revenu de solidarité active, et avoir un enfant de 17 ans à charge ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense présenté par le président du conseil départemental du Bas-Rhin, enregistré au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 15 octobre 2015, demandant à la juridiction de déclarer le recours irrecevable en tant que Mme X… n’a pas fourni la décision de la commission départementale d’aide sociale du 25 août 2014 à l’appui de sa requête, et de rejeter, à titre subsidiaire, le recours formé par Mme X… comme étant infondé ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 23 novembre 2016 Mme BLOSSIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262‑10 et L. 262‑12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262‑2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑3 du même code : « Le bénéficiaire du revenu minimum d’insertion a droit à une allocation égale à la différence entre le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262‑2 et les ressources définies selon les modalités fixées aux articles L. 262‑10 et L. 262‑12 » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑10 du même code : « L’ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑39 et L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que toute erreur ou omission déclarative imputable à un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion ne peut être regardée comme une fausse déclaration faite dans le but délibéré de percevoir à tort le revenu minimum d’insertion ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, suite à un contrôle de la caisse d’allocations familiales du Bas-Rhin, Mme X… s’est vu assigner un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion à hauteur de 2 114,72 euros au motif qu’elle a omis de mentionner sur ses déclarations trimestrielles de ressources de juillet 2008 à mars 2009 la perception d’une allocation d’aide au retour à l’emploi ; que le 5 février 2010, le président du conseil général du Bas-Rhin a rejeté sa demande de remise gracieuse en raison de l’absence de pièces justificatives sur la situation de Mme X… ; que le 23 février 2010, Mme X… a formé un recours contre cette décision auprès de la commission départementale d’aide sociale du Bas-Rhin, qui l’a rejeté par décision du 25 août 2014 dont Mme X… relève appel ;

Considérant que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Bas-Rhin du 25 août 2014 figure bien au dossier à l’appui du recours formé par Mme X… le 15 octobre 2014 ; qu’il n’y a donc pas lieu de déclarer le recours irrecevable ;

Considérant que les commissions départementales d’aide sociale sont des juridictions administratives lorsqu’elles statuent sur les décisions relatives à l’allocation de revenu minimum d’insertion ; qu’en vertu des règles gouvernant l’attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s’il incombe, en principe, à chaque partie d’établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu’une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamées qu’à celles-ci ; qu’il appartient, dès lors, au président du conseil général, pour l’application des dispositions précitées du code de l’action sociale et des familles, de justifier du calcul des sommes dont le remboursement est demandé au bénéficiaire du revenu minimum d’insertion au motif que des montants d’allocations auraient été indûment versés ; qu’il lui revient, notamment, de fournir les données ayant servi au calcul des allocations effectivement versées, c’est-à-dire la composition du foyer, le montant et la nature des ressources prises en compte, ainsi que la période et le mode de calcul de l’indu détecté et les déclarations trimestrielles de ressources couvrant la période litigieuse ;

Considérant qu’en l’espèce, la décision de refus de remise gracieuse du président du conseil général du Bas-Rhin du 5 février 2010 mentionne, à la charge de Mme X…, un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 2 114,72 euros en raison de la perception d’indemnités journalières maladie non déclarées ; qu’il s’agit en fait de la perception d’allocations de retour à l’emploi non déclarées durant la période litigieuse ; que les pièces du dossier ne permettent d’attester de la perception d’allocations de retour à l’emploi de Mme X… que pour la période de juillet 2008 à décembre 2008 ; qu’un courrier de la caisse d’allocations familiales adressé au président du conseil général le 11 mai 2015 mentionne une dette imputée à Mme X… à hauteur de 4 049,88 euros ; que la décision de la commission départementale d’aide sociale attaquée mentionne que le solde de la dette s’élève à 1 287,68 euros ; qu’en l’état, les pièces du dossier ne permettent de justifier ni de la nature des ressources que Mme X… aurait perçues, ni de la période exacte sur laquelle ces revenus n’auraient pas été déclarés, ni du montant précis initialement mis à la charge de Mme X… ; que l’indu ne peut en conséquence être regardé comme, ne serait-ce que partiellement fondé dans son principe, que dans la mesure où il n’est pas intégralement et formellement contesté par la requérante ;

Considérant que l’indu assigné à Mme X… ne résulte ni d’une fraude ni d’une fausse déclaration faite dans le but délibéré de percevoir à tort le revenu minimum d’insertion ; qu’ainsi, les dispositions précitées de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles ne font pas obstacle à ce qu’il en soit accordé une remise gracieuse ;

Considérant que, selon l’article L. 262‑42 du code de l’action sociale et des familles, le recours portant sur la contestation ou la demande de remise ou de réduction d’un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion est suspensif de recouvrement ; qu’il ressort des pièces du dossier que des prélèvements en vue du remboursement de l’indu ont néanmoins été effectués depuis plusieurs mois sur les prestations sociales de Mme X… ;

Considérant que Mme X… est bénéficiaire du revenu de solidarité active ; qu’elle a un enfant de 17 ans à charge ; qu’elle soutient, sans être contredite, devoir s’acquitter d’un loyer d’environ 315 euros par mois et de factures d’électricité pour environ 50 euros par mois ; qu’il s’ensuit que le remboursement de la totalité de l’indu ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation en limitant l’indu mis à sa charge à la somme de 500 euros, et en enjoignant le président du conseil départemental du Bas-Rhin de restituer à Mme X… les sommes illégalement récupérées excédant ce montant,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale du Bas-Rhin en date du 25 août 2014, ensemble la décision du président du conseil général du Bas-Rhin du 5 février 2010, sont annulées.

Art. 2.  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à la charge de Mme X… est limité à la somme de 500 euros.

Art. 3.  Il est enjoint au président du conseil départemental du Bas-Rhin de restituer à Mme X… les sommes récupérées au mépris des dispositions de l’article L. 262‑42 du code de l’action sociale et des familles, excédant la somme de 500 euros dont elle est finalement redevable.

Art. 4.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental du Bas-Rhin. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 23 novembre 2016 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme BLOSSIER, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 30 janvier 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET