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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Titre – Prescription – Législation – Jugement – Fraude

Dossier no 150739

Mme X…

Séance du 14 mars 2017

Décision lue en séance publique le 4 mai 2017

Vu le recours en date du 21 décembre 2015 formé par Maître Virginie STIENNE-DUWEZ, conseil de Mme X…, qui demande l’annulation de la décision en date du 6 octobre 2015 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté son recours tendant à l’annulation du titre exécutoire émis par le département du Nord en date du 13 novembre 2012 d’un montant de 13 228,82 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion détecté pour la période de juin 2004 à septembre 2008 ;

Maître Virginie STIENNE-DUWEZ, conseil de Mme X…, conteste la décision en faisant valoir :

 que le titre exécutoire a été émis le 13 novembre 2012 ; qu’ainsi les sommes réclamées pour la période du 1er juin 2004 au 12 novembre 2007 sont prescrites en application de l’article 2224 du code civil qui fixe la prescription à cinq ans ;

 que le titre exécutoire ne porte pas la signature de son auteur, qu’il n’est pas motivé et qu’il est irrégulier dans la mesure où Mme X… n’a pas été mise en mesure de présenter des observations ;

Maître Virginie STIENNE-DUWEZ, conseil de Mme X…, demande l’annulation du titre exécutoire émis le 13 novembre 2012 ; elle demande également la condamnation du département du Nord à payer à Mme X… la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu la décision contestée ;

Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au président du conseil départemental du Nord qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 14 mars 2017 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑40 du même code : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation (…) se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 134‑1 du même code : « A l’exception des décisions concernant l’attribution des prestations d’aide sociale à l’enfance, les décisions du président du conseil général et du représentant de l’Etat dans le département prévues à l’article L. 131‑2 sont susceptibles de recours devant les commissions départementales d’aide sociale mentionnées à l’article L. 134‑6 dans des conditions fixées par voie réglementaire » ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi no 68‑1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics : Sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d’un comptable public » ; qu’aux termes de l’article 2 de la même loi : « La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l’autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l’administration saisie n’est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l’auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l’administration qui aura finalement la charge du règlement n’est pas partie à l’instance. Toute communication écrite d’une administration intéressée, même si cette communication n’a pas été faite directement au créancier qui s’en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance ; Toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu’une partie de la créance ou si le créancier n’a pas été exactement désigné. Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l’interruption. Toutefois, si l’interruption résulte d’un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction, que Mme X… a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion en mars 2004 ; que suite un contrôle de l’organisme payeur en date du 15 octobre 2008, il a été constaté que l’intéressée travaillait depuis septembre 2001 et n’avait pas mentionné sur ses déclarations trimestrielles de ressources les salaires qu’elle avait perçus ; que, par suite, le remboursement de la somme de 13 228,82 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour période de juin 2004 à septembre 2008 a été mis à sa charge ; que le département du Nord a déposé plainte auprès du procureur de la République ; que par jugement rendu le 14 juin 2011, devenu définitif, le tribunal correctionnel du Nord a condamné Mme X… à une amende de 1 000 euros avec sursis, pour obtention frauduleuse du revenu minimum d’insertion pour la période de juin 2004 à septembre 2008 ;

Considérant que le département du Nord a émis en date du 13 novembre 2012 un titre exécutoire formant avis des sommes à payer ; que saisie d’un recours contre ce titre, la commission départementale d’aide sociale du Nord, par décision en date du 6 octobre 2015, l’a rejeté ;

Sur la régularité du titre exécutoire :

Considérant que le titre exécutoire émis par le département du Nord porte le nom de son auteur, M. R…, directeur des finances ; qu’il vise expressément un indu de revenu minimum d’insertion pour la période de juin 2004 à septembre 2008 détecté par la caisse d’allocations familiales du Nord ; qu’ainsi, il remplissait toutes les conditions pour une information complète de Mme X… ; que, de surcroît, l’intéressée a été destinataire de la décision en date du 7 juillet 2009 de la caisse d’allocations familiales qui l’informait que le conseil général avait retenu la qualification fraudeuse et que, du fait qu’elle ne percevait plus l’allocation de revenu minimum d’insertion, c’était le Trésor public qui allait lui réclamer le remboursement des sommes qui lui ont été servies indûment ; que, par ailleurs, Mme X… a pu former un recours contre le titre exécutoire litigieux ; qu’ainsi, aucun de ses droit n’a été méconnu et que les conclusions visant l’irrégularité du titre exécutoire sont infondées ;

Sur la prescription :

Considérant qu’il résulte des termes de l’article 2 de la loi no 68‑1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics susvisé applicable à l’espèce, que la prescription quadriennale est interrompue par l’existence d’un recours juridictionnel ; qu’en l’espèce, le département du Nord avait déposé une plainte auprès du procureur de la République contre Mme X… ; que cette plainte avait pour effet de suspendre le délai de prescription et d’en ouvrir un nouveau ; qu’ainsi, les conclusions sur le délai de prescription sont infondées ;

Considérant qu’il y a lieu de rejeter la demande de condamnation du département du Nord à payer à Mme X… la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que Mme X… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Nord, par sa décision en date du 6 octobre 2015, a rejeté son recours,

Décide

Art. 1er Le recours de Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, à Maître Virginie STIENNE-DUWEZ, au président du conseil départemental du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 mars 2017 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 4 mai 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET