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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Recours – Procédure – Foyer – Ressources – Déclaration – Compétence juridictionnelle – Précarité

Dossiers nos 160011 et 160302

Mme X…

Séance du 4 mai 2017

Décision lue en séance publique le 12 juin 2017

Vu le recours no 160011, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 7 janvier 2016, formé par Mme X… qui demande l’annulation de la décision en date du 6 octobre 2015 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision en date du 13 octobre 2009 du président du conseil général refusant toute remise gracieuse sur un indu de 2 779,27 euros résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de mai 2007 à décembre 2008 ;

Vu le recours no 160302 et le mémoire, enregistrés au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale les 3 juin et 22 juillet 2016, présentés par Mme X… qui demande l’annulation de la décision en date du 10 mars 2016 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté, pour irrecevabilité, son recours tendant à l’annulation de la décision en date du 25 juillet 2014 du président du conseil général refusant toute remise gracieuse sur un indu d’un montant initial de 2 779,27 euros ramené après prélèvements à 1 691,27 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de mai 2007 à décembre 2008 ;

La requérante ne conteste pas l’indu mais en demande une remise ; elle fait valoir qu’elle est allocataire du revenu de solidarité active et qu’elle se trouve dans une situation d’extrême précarité ;

Vu la décision contestée ;

Vu les pièces desquelles il ressort que les requêtes no 160011 et no 160302 ont été communiquées au président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 4 mai 2017 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ;

Considérant que les recours no 160011 et no 160302 sont introduits à l’instance par la même requérante, qu’ils ont été soumis l’un et l’autre à la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône en qualité de juridiction de premier ressort ; qu’ils présentent à juger le même litige ; que dès lors il y a lieu, pour une bonne administration de la justice, de joindre les deux recours et d’y statuer par une seule décision ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, comme suite à un contrôle diligenté par l’organisme payeur en date du 8 juin 2009, il a été constaté que la fille de Mme X…, Z…, membre du foyer, avait perçu des salaires et des allocations ASSEDIC qui n’ont pas été renseignés sur les déclarations trimestrielles de ressources ; que, par suite, le remboursement de la somme de 2 779,27 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de mai 2007 à décembre 2008, a été mis à la charge de Mme X… ; que cet indu, qui procède du défaut de prise en compte des salaires et indemnités chômage perçus par Z…, fille de Mme X… et membre du foyer, dans le calcul du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion servi, est fondé en droit ;

Considérant que le président du conseil général a, par décision en date du 13 octobre 2009, refusé toute remise gracieuse ; que, saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, par décision en date du 6 octobre 2015, l’a rejeté au motif que l’indu était fondé ;

Sur le recours no 160011 :

Considérant d’une part qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑39 et L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles, qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que toute erreur ou omission déclarative imputable à l’administré ne peut, à elle seule, constituer une fausse déclaration, laquelle implique une intention délibérée de percevoir sans droit le revenu minimum d’insertion ; qu’en l’espèce, aucun élément du dossier n’indique que Mme X… ait voulu percevoir indûment le revenu minimum d’insertion ; que d’autre part, il appartient à la commission départementale d’aide sociale en sa qualité de juridiction de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité des décisions prises par le président du conseil général, mais encore de se prononcer elle-même sur le bien-fondé de la demande de l’intéressé d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une ou l’autre partie à la date de sa propre décision ; qu’en l’espèce, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, dans sa décision en date du 6 octobre 2015, a rejeté le recours de Mme X… au motif du bien-fondé de l’indu, sans avoir examiné elle-même la situation de précarité de l’intéressée alors même qu’elle en avait connaissance ; qu’en conséquence, sa décision encourt l’annulation ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;

Considérant que Mme X… affirme, sans être contredite, que ses seules ressources sont constituées du revenu de solidarité active ; qu’ainsi, ses capacités financières sont limitées et le remboursement de la totalité de l’indu ferait peser des menaces de déséquilibre sur son budget et constituerait une menace de privation sur une longue période ; qu’il sera fait une juste appréciation de sa situation en lui accordant une remise de 75 % sur l’indu de 2 779,27 euros ;

Sur le recours no 160302 :

Considérant, alors que le recours dirigé contre la décision en date du 13 octobre 2009 du président du conseil général qui a refusé toute remise gracieuse sur l’indu de 2 779,27 euros était pendant devant la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, Mme X… a introduit une nouvelle demande de remise gracieuse auprès du président du conseil général qui, par une nouvelle décision en date du 25 juillet 2014, l’a rejetée ; que saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône l’a rejeté pour irrecevabilité, par décision en date du 10 mars 2016 ;

Considérant que, sous peine de commettre une erreur de droit, un même litige ne peut être jugé deux fois par la même juridiction ; qu’il s’ensuit que Mme X… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a, par sa décision en date du 10 mars 2016, rejeté son recours pour irrecevabilité,

Décide

Art. 1er La décision en date du 6 octobre 2015 de la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, ensemble la décision en date du 13 octobre 2009 du président du conseil général, sont annulées.

Art. 2.  Il est accordé à Mme X… une remise de 75 % sur l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 2 779,27 euros porté à son débit.

Art. 3.  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 4.  Le recours no 160302 de Mme X… est rejeté.

Art. 5.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 mai 2017 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 12 juin 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET