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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Ressources – Capitaux placés

Dossier no 150164

Mme X…

Séance du 7 juillet 2017

Décision lue en séance publique le 10 juillet 2017

Vu le recours formé le 19 janvier 2015 par l’association A…, représentant légal de Mme X…, tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne en date du 20 novembre 2014 qui a rejeté son recours contre la décision du président du conseil départemental de la Dordogne du 27 juin 2014 ayant confirmé la décision de rejet d’aide sociale du président du conseil départemental ;

La requérante sollicite l’annulation de la décision contestée et demande d’admettre Mme X… au bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement à compter du 1er mars 2014 ; elle soutient, sur la base de l’article L. 113‑1 du code de l’action sociale et des familles, que Mme X… dispose de ressources à hauteur de 1 897,97 euros par mois dont 74,28 euros de revenus du capital pour 189,80 euros de charges, lui laissant un reste à vivre de 1 708,17 euros ; que les frais de séjour s’élevant à 2 021,55 euros, il manque 313,38 euros par mois pour payer les frais de séjour ; que la commission départementale d’aide sociale a commis une erreur de droit en indiquant qu’avec les capitaux détenus, l’intéressée pouvait faire face à ses frais de séjour pendant 18 mois ; que le seul obligé alimentaire de Mme X…, son fils, ne peut être sollicité eu égard à ses charges ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense du président du conseil départemental de la Dordogne en date du 25 juin 2015 ;

Il soutient qu’une personne âgée doit être privée de ressources propres suffisantes ou de créances alimentaires suffisantes pour être admise au bénéfice de l’aide sociale ; que l’aide sociale a un caractère subsidiaire lorsqu’existent des capitaux suffisants pour procéder au règlement des frais d’hébergement en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes pendant une certaine période ; que les ressources de Mme X… qui détient 31 381,624 euros de capitaux répartis entre un livret A, un livret de développement durable, un livret d’épargne populaire, un plan épargne logement, un compte à terme, un compte sur livret, une épargne vie et un compte courant, lui permettent d’assumer ses frais de séjour pendant 82 mois tout en conservant une somme de 5 000 euros pour faire face aux frais d’obsèques ; que Mme X… peut, en outre, solliciter son fils en application des articles 205 du code civil et L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles, le juge aux affaires familiales étant seul compétent pour décharger un obligé alimentaire de sa participation au regard de sa situation ; que la décision du département n’est pas incompatible avec les dispositions de l’article L. 132‑1 du code de l’action sociale et des familles puisqu’elle ne subordonne pas l’admission de l’aide sociale à l’épuisement total des comptes d’épargne des bénéficiaires ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 7 juillet 2017 Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction du dossier que Mme X… réside dans une maison de retraite depuis le 18 mai 2009 et est placée sous protection de l’association A… ; que le 13 février 2014, l’association A… a présenté une demande d’aide sociale à l’hébergement avec effet au 1er janvier 2014, qui a été rejetée le 27 juin 2014 par le président du conseil général de la Dordogne au motif que les ressources de Mme X…, y compris ses capitaux placés, lui permettaient d’acquitter ses frais de séjour en EHPAD sans recours à l’aide sociale ; que le recours formé par l’association A… contre cette décision a été rejeté par la commission départementale d’aide sociale de la Dordogne le 20 novembre 2014, qui a considéré que Mme X… était en mesure de faire face à ses frais d’hébergement pendant 18 mois ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 132‑3 du même code : « Les ressources de quelque nature qu’elles soient à l’exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l’aide aux personnes âgées ou de l’aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d’hébergement et d’entretien dans la limite de 90 %. Toutefois, les modalités de calcul de la somme mensuelle minimum laissée à la disposition du bénéficiaire de l’aide sociale sont déterminées par décret. » ; qu’en vertu des articles L. 232‑4 et L. 232‑8 du code de l’action sociale et des familles le montant des prestations d’allocation personnalisée d’autonomie allouées à chaque bénéficiaire, qu’il soit hébergé à domicile ou en établissement, est diminué du montant de sa participation, calculée en fonction de ses ressources, elles-mêmes déterminées dans les conditions fixées aux articles L. 132‑1 et L. 132‑2 du même code ; que le premier alinéa de l’article L. 132‑1 prévoit que, pour l’appréciation des ressources des postulants à l’aide sociale, il est tenu compte des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire ; qu’aux termes de l’article R. 232‑5 du même code, l’appréciation des ressources du demandeur, en vue du calcul de la participation mentionnée aux articles L. 232‑4 et L. 232‑8, tient compte notamment des biens ou capitaux qui ne sont ni exploités ni placés, selon les modalités fixées à l’article R. 132‑1 ; que l’article R. 132‑1 prévoit que pour l’appréciation des ressources des postulants prévue à l’article L. 132‑1, les biens non productifs de revenu (…) sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à (…) à 3 % du montant des capitaux ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu tenir compte pour apprécier les ressources des personnes demandant l’aide sociale des seuls revenus périodiques, tirés notamment d’une activité professionnelle, du bénéfice d’allocations ou rentes de solidarité instituées par des régimes de sécurité sociale ou des systèmes de prévoyance et des revenus des capitaux mobiliers et immobiliers ; qu’à défaut de placement de ces derniers, dès lors qu’il ne s’agit pas de l’immeuble servant d’usage principal d’habitation, il a prévu d’évaluer fictivement les revenus que l’investissement de ces capitaux seraient susceptibles de procurer au demandeur ; qu’en tout état de cause il a écarté la prise en compte du montant des capitaux eux-mêmes dans l’estimation de ces ressources ;

Considérant que Mme X… perçoit 1 823,69 euros de pensions et retraites et 74,28 euros d’intérêts de capitaux placés par mois ; que les frais de séjour s’élevant à 2 021,55 euros par mois, le montant non couvert est de 313,37 euros par mois ; que Mme X… dispose d’un capital épargné de 30 785,04 euros répartis entre un Livret A, un livret de développement durable, un livret d’épargne populaire, un plan épargne logement, un compte à terme, un compte sur livret, une épargne vie et un compte courant, ; que s’agissant des comptes d’épargne, seuls les revenus issus de ces placements, les intérêts, doivent être pris en compte dans l’appréciation des ressources ; que s’agissant des comptes courants, ils doivent être considérés comme des biens non productifs de revenus et que seuls 3 % du montant des sommes placées sur un compte courant doivent être pris en compte dans l’appréciation des ressources du postulant à l’aide sociale ; qu’en considérant, à la date de l’évaluation de ses ressources, que ce capital permettait à Mme X… de faire face à ses frais de séjour non couverts par ses ressources pendant 18 mois eu égard à la décision du conseil départemental de laisser à l’intéressée la disposition de son capital à hauteur de 25 000 euros, la commission départementale d’aide sociale a fait une inexacte application des articles L. 132‑1 et R. 132‑1 du code de l’action sociale et des familles ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association A… est fondée à demander l’annulation des décisions du président du conseil général du 27 juin 2014 et de la commission départementale d’aide sociale du 20 novembre 2014,

Décide

Art. 1er Les décisions du président du conseil général du 27 juin 2014 et de la commission départementale d’aide sociale du 20 novembre 2014 sont annulées.

Art. 2.  Mme X… est admise au bénéfice de l’aide sociale pour la prise en charge de ses frais d’hébergement à compter du 1er janvier 2014 conformément aux motifs de la présente décision et l’association A… est renvoyée devant le président du conseil départemental de la Dordogne pour liquidation de ses droits.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à l’association A…, au président du conseil départemental de la Dordogne. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 7 juillet 2017 où siégeaient Mme VESTUR, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 10 juillet 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET