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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Ressources – Obligation alimentaire – Jugement – Date d’effet – Compétence juridictionnelle

Dossier no 150061

Mme X…

Séance du 24 avril 2017

Décision lue en séance publique le 7 juillet 2017

Vu le recours formé le 5 février 2015 par l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) d’Eure-et-Loir tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale d’Eure-et-Loir en date du 1er décembre 2014 rejetant le recours contre la décision du président du conseil général d’Eure-et-Loir du 2 octobre 2013 refusant la participation aux frais d’accueil en établissement et d’hébergement au motif que les obligés alimentaires peuvent régler la part non couverte par les ressources de Mme X… ;

Le requérant conteste la décision et en demande l’annulation au motif qu’une seule personne parmi les enfants de Mme X… est désignée débiteur alimentaire à hauteur d’une somme importante de 850 euros, mais que cette personne est insolvable (information du Trésor public) ; que la date retenue par le juge aux affaires familiales est le 18 avril 2014, alors que l’EHPAD d’Eure-et-Loir a saisi le juge le 18 décembre 2013 et que Mme X… est présente depuis le 15 mars 2012 ;

Vu l’absence de mémoire en défense ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le courrier du président du conseil général du 13 avril 2015 à l’EHPAD d’Eure-et-Loir indiquant que Mme X… est admise au bénéfice de l’aide sociale à compter du 23 septembre 2013 ;

Vu le courrier de l’EHPAD d’Eure-et-Loir, en réponse au courrier d’admission à l’aide sociale de Mme X… à compter du 23 septembre 2013, indiquant que cette décision d’admission n’annule en rien le recours puisque celle-ci n’a pas pour date d’effet la date d’entrée en établissement de Mme X…, le 15 mars 2012 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 24 avril 2017 Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. » ; qu’aux termes de l’article 208 du même code : « Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit. » ; qu’en vertu de l’article L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (…) La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 132‑9 du même code : « Pour l’application de l’article L. 132‑6, le postulant fournit, au moment du dépôt de sa demande, la liste nominative des personnes tenues envers lui à l’obligation alimentaire définie par les articles 205 à 211 du code civil (…). À défaut d’entente entre elles ou avec l’intéressé, le montant des obligations alimentaires respectives est fixé par l’autorité judiciaire de la résidence du bénéficiaire de l’aide sociale » ;

Considérant que s’il appartient aux seules juridictions de l’aide sociale de fixer le montant du concours des collectivités publiques en vue de l’hébergement des personnes prises en charge au titre de l’aide sociale, compte tenu notamment de l’évaluation qu’elles font des ressources des intéressés ainsi que de celle des débiteurs de l’obligation alimentaire, il n’appartient en revanche qu’au juge judiciaire, en cas de contestation sur ce point, de fixer le montant des contributions requises au titre de l’une ou l’autre de ces obligations ; que, par suite, en cas de contestation du montant qu’il est proposé de laisser à leur charge, il appartient aux obligés alimentaires de saisir le juge aux affaires familiales ; que le représentant de l’Etat ou le président du conseil général peut également saisir ce dernier pour demander à l’autorité judiciaire la fixation de la dette alimentaire et le versement de son montant ;

Considérant qu’il résulte du dossier qu’une demande d’aide sociale a été constituée par la famille de Mme X…, résidente à l’EHPAD intercommunal d’Eure-et-Loir ; que comme suite à la décision du président du conseil général en date du 2 octobre 2013 demandant aux obligés alimentaires de régler la part non couverte par les ressources de l’intéressée, deux enfants de Mme X… ont saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chartres le 25 octobre 2013 sur le fondement de l’article 207 du code civil ; que le 16 mai 2014, le juge aux affaires familiales a convoqué les trois enfants et le représentant de l’EHPAD d’Eure-et-Loir et que Mme L…, un de enfants, ne s’est pas présentée ; que Mme X… a indiqué au juge n’avoir élevé aucun des trois enfants ; que le juge aux affaires familiales a néanmoins, par jugement du 17 octobre 2014, déchargé de l’obligation alimentaire les deux enfants ayant formé un recours, mais a fixé en dépit des déclarations de Mme X… à compter du 18 avril 2014 à hauteur de 850 euros la participation de Mme L…, au motif, peut être, qu’elle n’était pas présente à l’audience et qu’elle n’a répondu à aucun courrier ; que la décision du 13 décembre 2014 de la commission départementale d’aide sociale d’Eure-et-Loir, ne pouvait que se conformer au jugement du juge aux affaires familiales ; que le recours de l’EHPAD d’Eure-et-Loir contre cette décision ne peut lui-même qu’être rejeté, quelle que soit la portée et les motifs du jugement du juge aux affaires familiales qui n’a pas été frappé d’appel ; que toutefois, à la suite d’un courrier du 13 avril 2015, le président du conseil général a indiqué que Mme X… est admise au bénéfice de l’aide sociale à compter du 23 septembre 2013 ; que cette décision d’admission ne satisfait pas l’EHPAD d’Eure-et-Loir car la date d’entrée en établissement de Mme X… est le 15 mars 2012 ; que le président du conseil général aurait dû se fonder sur la date d’effet fixée par le juge pour l’obligation alimentaire requise par Mme L…, ce qui n’a pas été le cas ; que le président du conseil général a en revanche fixé une date antérieure à la date de saisine du juge aux affaires familiales qui est plus favorable à l’intéressée ;

Considérant qu’il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale, devant qui cette question n’est pas soulevée, pas plus qu’elle ne l’a précédemment été devant la commission départementale, de se prononcer sur la date d’effet de la décision du président du conseil général ; que l’EHPAD d’Eure-et-Loir peut, s’il s’y croit fondé, tenter d’engager la responsabilité du département, mais ne peut le faire que devant les juridictions de droit commun ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête ne peut qu’être rejetée,

Décide

Art. 1er Le recours de l’EHPAD d’Eure-et-Loir est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à l’EHPAD d’Eure-et-Loir, au président du conseil départemental d’Eure-et-Loir. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 24 avril 2017 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. MATH, assesseur, Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 7 juillet 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé et, à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET