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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Prise en charge – Date d’effet – Obligation alimentaire – Recours – Procédure – Compétence d’attribution – Délai – Recevabilité

Dossier no 140308

Mme X…

Séance du 26 avril 2017

Décision lue en séance publique le 10 juillet 2017

Vu, enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 18 juin 2014, la requête présentée par Maître Henri ABECASSIS pour l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) du Nord tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Meuse du 2 avril 2014 en ce qu’elle rejette comme irrecevables les prétentions de l’EHPAD  O… ;

Le requérant soutient que la décision du 21 octobre 2013, par laquelle le département de la Meuse refuse de faire droit à la demande de prise en charge intégrale des frais d’hébergement de Mme X… du 14 janvier 2008 jusqu’à son décès, ne faisait pas mention des voies et délais de recours ; que, par conséquent, les délais de recours ne sauraient lui être opposés ; que, par sa décision de refus de révision du montant de la prise en charge des frais d’hébergement de Mme X…, le conseil général de la Meuse a méconnu les dispositions de l’article L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles ; que la commission départementale d’aide sociale a commis une erreur de droit en omettant de statuer sur cette demande de prise en charge ; que la décision du président du conseil général du 18 mai 2011 acceptant la prise en charge des frais d’hébergement de l’intéressée du 1er février 2011 au 31 janvier 2014 pour un montant de 336,35 euros par mois est entachée d’illégalité ; que l’appel de l’EHPAD  O… est recevable à raison de sa qualité d’intervenant volontaire ; que, compte tenu de cette qualité, les délais de recours ne sauraient lui être opposés ; que l’EHPAD  O… justifie de son intérêt à agir en ce qu’il démontre que lui fait grief l’erreur commise par le département dans l’appréciation de la contribution globale des obligés alimentaires et que lui est préjudiciable la décision du 21 octobre 2013 ; que, par suite, devront être annulées les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Meuse du 2 avril 2014 et du conseil général du 21 octobre 2013 ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré le 22 août 2014, le mémoire en défense présenté par le président du conseil général de la Meuse tendant au rejet de la requête au motif que la décision de la commission départementale d’aide sociale en date du 4 mai 2011 estimant que le président du conseil général de la Meuse avait fait une exacte estimation de la contribution globale des obligées alimentaires n’a pas été contestée ; que le requérant se prévaut d’une décision du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Dunkerque qui déchargerait les obligés alimentaires sans la produire ; qu’une demande de révision ne peut être examinée que sur présentation d’une telle décision ; qu’en tout état de cause, l’EHPAD  O… n’est pas recevable à déposer une telle demande de révision ;

Vu, enregistré le 27 janvier 2015, le mémoire en réplique présenté pour l’établissement  O…  tendant à ce que soit constaté que le mémoire en intervention ne tendait pas directement à contester la décision du 18 mai 2011 mais à appuyer les prétentions des requérantes ; que la commission départementale d’aide sociale a, dès lors, commis une erreur en se fondant sur le caractère définitif de la décision du 18 mai 2011 pour rejeter les demandes de l’EHPAD dès lors qu’aucun délai de recours n’est opposable à l’intervenant volontaire ; que la requête de l’établissement devant la commission départementale d’aide sociale devrait être partiellement requalifiée de requête par voie d’action dès lors qu’elle concluait à la réformation d’une décision autre que celle attaquée au principal, soit la décision du 21 octobre 2013 ; que, s’agissant de la recevabilité du recours formé contre la décision précitée, l’irrecevabilité ne saurait être opposée au requérant ; qu’en effet le droit de faire appel est ouvert aux intervenants volontaires ou forcés de première instance dès lors qu’ils peuvent avoir la qualité de parties à l’instance ; que, dans le cadre d’un recours de plein contentieux, l’intervenant volontaire est admis à interjeter appel dès lors que son intervention est recevable en première instance au titre d’un droit auquel la décision rendue a préjudicié ; que la décision du président du conseil général du Nord en date du 18 mai 2011 a préjudicié à son droit au recouvrement de la créance qu’il détenait contre Mme X… ; que son appel était donc recevable ; que, s’agissant de la décision du 21 octobre 2013, les délais de recours ne lui étaient pas opposables en ce qu’ils ne lui avaient pas été notifiés ; que l’objet du présent litige porte sur la fixation de la contribution globale des obligés alimentaires que les juridictions de l’aide sociale ont compétence pour connaître ; que la participation globale des obligés alimentaires a été fixée compte tenu de la participation de Mme X… dont le centre des finances publiques du Nord a estimé qu’elle n’était pas tenue à l’obligation alimentaire ; que la commission départementale d’aide sociale aurait dû tenir compte de la décision du centre des finances publiques pour apprécier la légalité de la décision attaquée ; qu’en refusant de statuer sur la demande d’annulation de la décision du président du conseil général en date du 21 octobre 2013, la commission départementale a entaché sa décision d’irrégularité ; que, sur le fond, le président du conseil général a commis une erreur de droit en prenant en compte la participation de trois débiteurs d’aliments aux frais d’hébergement de Mme X… ; qu’en outre le président du conseil général n’a pas tenu compte des changements intervenus dans la situation des obligés alimentaires ;

Vu, enregistré le 18 mars 2015, le nouveau mémoire présenté par le président du conseil général tendant à ce qu’il soit jugé que le requérant n’établit pas que la décision du 18 mai 2011 lui ai porté préjudice ; que le mémoire d’observations produit au soutien des prétentions des requérantes lors de l’audience de la commission départementale d’aide sociale du 2 avril 2014 ne peut être qualifié de mémoire en intervention volontaire ; que l’obligation alimentaire ayant un caractère personnel, seul le bénéficiaire et l’organisme d’admission peuvent être à l’origine d’une demande de révision ; que la commission départementale d’aide sociale n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que Mme Y… était assujettie à l’obligation alimentaire ; que le courrier de la direction des finances publiques du Nord exonérant cette dernière de son obligation n’a pas le caractère d’une décision, ladite direction étant incompétente pour se prononcer en la matière ; que, dès lors, cette pièce ne saurait être prise en considération ; que l’EHPAD O… ne peut faire peser sur le département les conséquences du non-recouvrement des sommes dues au titre de l’obligation alimentaire ;

Vu, enregistré au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 26 mai 2015, le nouveau mémoire présenté pour l’EHPAD  O…  persistant en ses précédentes écritures et conclusions aux motifs qu’il a été démontré que le mémoire déposé par l’EHPAD le 2 avril 2014 devait recevoir la qualification de mémoire en intervention volontaire ; que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Nord a estimé que l’intervention de l’établissement à l’appui des prétentions des requérantes était irrecevable en ce qu’elle contestait la décision du 18 mai 2011 devenue définitive ; que l’établissement  O…  du Nord a effectivement subi un préjudice du fait de la décision du 18 mai 2011, dès lors que le département a commis une erreur en établissant la contribution globale des obligés alimentaires ; qu’eu égard à l’impossibilité des obligés alimentaires de s’acquitter de la somme mise à leur charge, le département a, par cette décision, préjudicié au droit de l’établissement de recouvrer sa créance ; que le fait de juger irrecevable le recours en contestation de la légalité de la décision fixant la contribution globale des obligés alimentaires reviendrait à leur imposer d’exécuter une décision illégale et constituerait une violation de leur droit d’ester en justice au sens de l’article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que la requête en observations présentée par l’établissement  O…  doit être partiellement requalifiée de requête par voie d’action dès lors qu’elle concluait notamment à la réformation de la décision du président du conseil général du 21 octobre 2013 ; qu’un enfant adopté ne doit des aliments qu’à son adoptant et non à ses ascendants issus de l’adoption ; que, dès lors, Mme Y…, ne saurait être assujettie à l’obligation alimentaire à l’égard de Mme X…, mère de son parent adoptif aujourd’hui décédé ; que le président du conseil général du Nord a entaché sa décision d’erreur de droit en méconnaissant les dispositions de l’article 206 du code civil ; qu’il a, par suite, commis une erreur de droit et une erreur manifeste d’appréciation dans la fixation de la contribution globale des obligés alimentaires ;

Vu, enregistré le 24 juillet 2015, le nouveau mémoire présenté par le président du conseil général et tendant à ce que soit constaté le bien-fondé de la décision de la commission départementale d’aide sociale en ce qu’elle fait peser l’obligation alimentaire sur Mme C…, Mme M… et Mme Y… ; que le conseil général n’était pas, en l’espèce, habilité à dispenser certains obligés alimentaires de leurs obligations ; qu’il appartenait à Mme Y… de saisir le juge judiciaire afin qu’il soit statué sur sa qualité d’obligé alimentaire ; que le requérant n’établit pas son intérêt pour agir comme intervenant volontaire en ce qu’il ne justifie ni d’un intérêt distinct de celui au côté duquel il se range ni d’un préjudice subi du fait de la décision attaquée ;

Vu, enregistré au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 2 décembre 2016, le nouveau mémoire présenté pour l’EHPAD  O…  tendant à ce que soit admis que la présente requête est recevable au motif que, les voies et délais de recours n’ayant pas été mentionnés dans la décision du président du conseil général en date du 21 octobre 2013, elles ne sauraient être opposées au requérant ; que le conseil général de la Meuse ne justifie aucunement de ne pas lui donner une suite favorable en ce qu’il est nécessairement établi que, par jugement du 19 juin 2012, le juge aux affaires familiales de Dunkerque aurait nécessairement dispensé les obligés alimentaires de leur part contributive ; que l’EHPAD  O…  détient une créance de 18 291,55 euros à l’égard de Mme X… qui ne pourra lui être remboursée si le conseil général de la Meuse refuse d’accorder une revalorisation de l’aide sociale au bénéfice de l’intéressée ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 26 avril 2017 Mme JOYEUX, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’il ressort du dossier que Mme X…, décédée le 15 octobre 2011, a été admise à l’aide sociale par arrêté du président du conseil général de la Meuse du 23 juin 2010 ; que cette décision évalue à 13,25 euros par jour la contribution globale de Mesdames C…, M… et Y… en leur qualité d’obligées alimentaires ; que, par courrier du 12 août 2010, Mme C… a contesté ladite décision arguant que sa contribution personnelle était de 205 euros et qu’elle sollicitait une réévaluation de la contribution globale des obligés alimentaires ; que, par courrier du 2 mai 2011 adressé au président du conseil général de la Meuse, Mme Y… conteste sa qualité d’obligé alimentaire au motif qu’aucun enfant ne subsiste de son union avec M. X…, fils prédécédé de Mme X… ; que, par décision du 4 mai 2011, la commission départementale d’aide sociale de la Meuse a rejeté le recours de Mme Y… aux motifs que le président du conseil général avait fait une exacte estimation de la contribution globale des obligés alimentaires et qu’il revenait aux parties concernées de saisir le juge aux affaires familiales en cas de mésentente sur la contribution individuelle de chacune des obligées alimentaires ; que, par décision du 18 mai 2011, le président du conseil général a renouvelé l’admission à l’aide sociale de Mme X… pour la période du 1er février 2011 au 31 janvier 2014 et fixé la participation des obligés alimentaires à 589,80 euros par mois ; que Mme M… a contesté cette décision par courrier du 18 juillet 2011 ; que, par courrier du 15 juillet 2013, la directrice de l’EHPAD  O…, établissement hébergeant Mme X… depuis le 14 janvier 2008, a sollicité la révision de l’aide sociale accordée à Mme X… et la prise en charge totale par le département de la Meuse des frais d’hébergement de la postulante du 14 janvier 2008 au 15 octobre 2011 ; que l’EHPAD  O… est intervenu au soutien des prétentions des requérantes par le biais d’un mémoire d’observations déposé le 2 avril 2014 ; qu’il sollicitait l’annulation de la décision du 18 mai 2011 et l’annulation de la décision du 21 octobre 2013 par laquelle le conseil général refusait d’examiner la demande de révision sus-évoquée ; que, par décision du 2 avril 2014, la commission départementale d’aide sociale de la Meuse a rejeté comme irrecevable la demande de l’EHPAD  O… ; que l’EHPAD  O… a interjeté appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale le 16 juin 2014 ;

Considérant que deux titres exécutoires ont été émis par l’EHPAD  O… à l’encontre de Mme M… et de Mme C… en date du 30 juillet 2007 ; que le requérant allègue avoir dû renoncer aux titres exécutoires précités dans le but d’éviter une condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre d’un litige pendant devant le juge aux affaires familiales ; que le non- recouvrement de sa créance procède donc d’une décision qui lui est propre et non pas de la décision de la commission départementale d’aide sociale du 2 avril 2014 ; que, par suite, l’EHPAD  O… n’est pas fondé à soutenir que la décision de la commission départementale d’aide sociale lui porte préjudice ; que la qualification du mémoire d’observations produit au soutien des prétentions des requérantes en mémoire d’intervention ne saurait être retenue ; qu’en conséquence le délai de recours de deux mois à compter de la notification de la décision lui est opposable ; que c’est donc à bon droit que la commission départementale d’aide sociale a estimé que, la décision du 18 mai 2011 n’ayant pas été contestée, elle était devenue définitive ; qu’il suit de là que les conclusions de la requête de l’EHPAD O… dirigées contre la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Meuse en date du 2 avril 2014 ne peuvent qu’être rejetées ;

Considérant que les conclusions de la requête dirigées contre la décision du département de la Meuse en date du 21 octobre 2013 rejetant la demande de révision formée par l’EHPAD  O… aux fins de prise en charge intégrale par le département de la Meuse des frais d’hébergement de Mme X… pour la période du 14 janvier 2008 au 15 octobre 2011 ne sauraient être regardées comme recevables, ces conclusions, dont la commission départementale d’aide sociale n’avait pas été saisie, étant nouvelles en appel ; qu’elles ne pourront donc qu’être rejetées ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des conclusions de la requête doivent être rejetées,

Décide

Art. 1er La requête de l’EHPAD  O… est rejetée.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Maître Henri ABECASSIS, au président du conseil départemental de la Meuse. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 26 avril 2017 où siégeaient M. RAPONE, président, M. MATH, assesseur, Mme JOYEUX, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 10 juillet 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET