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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Allocation personnalisée d'autonomie (APA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Allocation personnalisée d’autonomie (APA) – Indu – Remise – Erreur – Prescription – Décision – Légalité

Dossier no 160113

Mme X…

Séance du 18 décembre 2017

Décision lue en séance publique le 18 décembre 2017

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 8 mars 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 30 juin 2016, Mme X… demande à la commission centrale d’aide sociale :

1o D’annuler la décision du 29 septembre 2015 de la commission départementale d’aide sociale du Nord réformant la décision du 22 avril 2011 par laquelle le président du conseil départemental du Nord n’a donné que partiellement satisfaction à sa demande de remise gracieuse de remboursement d’une somme de 3 766,37 euros d’allocation personnalisée d’autonomie, en ramenant à 1 884 euros la somme à rembourser ;

2o De prononcer la remise gracieuse intégrale de la somme qui lui est réclamée ;

Elle soutient que :

les sommes réclamées lui ont été versées à tort par le département du Nord qui a commis une erreur avec une homonyme ;

elle avait prévenu sa banque et une assistante sociale de l’erreur commise par le département ;

elle est âgée de 82 ans, perçoit de petits revenus et vit seule ; elle ne peut rembourser la somme, même avec une faible part à charge ; elle justifie de ses charges et de ses faibles ressources ;

elle est de bonne foi ;

Par un mémoire enregistré le 7 juin 2016, le département du Nord conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

alors que la demande de versement de l’allocation personnalisée d’autonomie de Mme X… avait été rejetée le 24 décembre 2002 et le 6 mars 2008, elle a perçu à tort cette allocation en raison d’une erreur dans le traitement de son dossier ; les services ont confondu le relevé d’identité bancaire de Mme X… née P… et celui de Mme X… née B… ; néanmoins, le bien-fondé de l’action en récupération est établi ;

elle ne remplit pas les conditions de la délibération 2007/384 du 2 avril 2007 du département pour l’obtention d’une remise gracieuse de sa dette dès lors que sa moyenne économique journalière est supérieure à 6 euros ;

le juge de l’aide sociale n’a pas le pouvoir de remettre gracieusement une dette d’allocation personnalisée d’autonomie ;

la requérante a bénéficié de la prescription biennale pour une partie des sommes indûment versées ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 18 décembre 2017 M. HUMBERT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique :

1. Mme X…, née P…, a bénéficié de versement d’allocation personnalisée d’autonomie pour une somme de 5 122,40 euros pour la période du 16 août 2007 au 30 novembre 2009, alors qu’elle n’y avait pas droit, compte tenu de son classement en GIR 5‑6. Le département du Nord a alors décidé le 22 mars 2010 de récupérer les sommes versées. Compte tenu de la prescription d’une partie de la dette invoquée par Mme X…, le département du Nord a ramené le montant de sa créance à la somme de 3 766,73 euros et a rejeté par décision du 22 avril 2011 la demande de remise gracieuse de la somme en cause. Mme X… a alors saisi la commission départementale d’aide sociale du Nord qui a ramené le montant de sa dette à 1 884 euros. Mme X… relève appel de cette décision en tant qu’elle n’a pas prononcé la remise totale de sa dette ;

2. L’article L. 232‑1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que toute personne âgée résidant en France qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins. L’article L. 232‑7 du même code : « (…) A la demande du président du conseil départemental, le bénéficiaire de l’allocation personnalisée d’autonomie est tenu de produire tous les justificatifs de dépenses correspondant au montant de l’allocation personnalisée d’autonomie qu’il a perçu et de sa participation financière. / Le versement de l’allocation personnalisée d’autonomie peut être suspendu (…) si le bénéficiaire ne produit pas dans un délai d’un mois les justificatifs mentionnés à l’alinéa précédent (…) ». L’article D. 232‑31 du même code dispose : « (…) Tout paiement indu est récupéré par retenues sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire n’est plus éligible à l’allocation personnalisée d’autonomie, par remboursement du trop-perçu en un ou plusieurs versements. Les retenues ne peuvent excéder, par versement, 20 % du montant de l’allocation versée. Toutefois, les indus ne sont pas recouvrés lorsque leur montant total est inférieur ou égal au montant mentionné au premier alinéa ». Toute somme perçue au titre de cette allocation peut faire l’objet d’une récupération à hauteur du montant indûment versé ;

3. Pour l’application de ces dispositions, il appartient au juge de l’aide sociale, eu égard tant à la finalité de son intervention qu’à sa qualité de juge de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité de la décision ordonnant la récupération d’un indu mais de se prononcer lui-même sur la décision rejetant explicitement ou implicitement la demande du bénéficiaire de la prestation tendant à la remise ou à la modération, à titre gracieux, de la somme ainsi mise à sa charge, en recherchant si, au regard de l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une et l’autre partie à la date de sa propre décision, la situation de précarité de l’intéressé et sa bonne foi justifient une telle mesure ;

4. Le département du Nord indique que, par délibération DSPAPH/2007/384 du 2 avril 2007, il a adopté une procédure de gestion et les critères de remise gracieuse d’une créance d’aide sociale aux personnes âgées et aux personnes handicapées, applicable notamment à l’allocation personnalisée d’autonomie. Il en ressort que, si la moyenne économique journalière, calculée comme dans le cadre du dispositif « allocation mensuelle d’aide sociale à l’enfance » et correspondant au montant disponible journellement après déduction des charges du revenu mensuel, est inférieure à 6 euros, la remise d’un indu réclamé est systématiquement accordée ; si la moyenne économique journalière est supérieure au seuil de 6 euros, la demande de remise gracieuse est soumise pour approbation à l’assemblée délibérante s’il est envisagé une remise totale ou partielle de la créance indue. La légalité de cette délibération est douteuse en tant qu’elle exclut, dans une large partie des cas, un examen individuel des situations en débat ;

5. Il résulte de l’instruction et il n’est d’ailleurs pas contesté que le département s’est lui-même mépris dans la gestion du dossier de Mme X… en lui versant l’allocation personnalisée d’autonomie, alors que celle-ci n’y avait pas droit, en confondant deux relevés d’identité bancaire ; les versements indus ont perduré pendant 30 mois. Par ailleurs, Mme X… indique avoir de faibles ressources, ses revenus mensuels en 2010 s’élevant à 910,24 euros pour des charges mensuelles de 627,50 euros. Au vu des justificatifs produits, le différentiel ne s’est pas substantiellement modifié depuis, si ce n’est qu’elle doit en outre assumer une partie des frais liés à l’auxiliaire de vie aux services de laquelle elle recours avec l’aide de l’allocation personnalisée d’autonomie, à hauteur de 41,19 euros. Au vu de l’ensemble de ces circonstances, et compte tenu de ce que la délibération du 2 avril 2007 du conseil général du Nord est en contradiction avec le principe d’examen individuel des situations précédemment mentionné, il y a lieu de ramener le montant de l’indu à rembourser au département à la somme de 500 euros,

Décide

Art. 1er Le montant de la créance d’allocation personnalisée d’autonomie réclamée par le département du Nord à Mme X… est ramené à 500 euros.

Art. 2.  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord du 29 septembre 2015 est réformée conformément à l’article 1er.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 18 décembre 2017 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 18 décembre 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET