3410

Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH)

Allocation compensatrice tierce personne (ACTP)

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) – Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) – Résidence – Modalités de calcul – Recours – Procédure – Régularité

Dossier no 150334

M. X…

Séance du 8 novembre 2017

Décision lue en séance publique le 8 novembre 2017 à 14 heures

Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 2 avril 2015, la requête présentée pour Mme W…, agissant en qualité de tutrice de son fils M. X…, par Maître Philippe COET, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale : en premier lieu, annuler la décision en date du 20 novembre 2014 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne a rejeté son recours contre la décision du président du conseil général de Seine-et-Marne du 16 mai 2011 de ne pas payer les nuitées d’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) ; en second lieu, condamner le président du conseil départemental de Seine-et-Marne à verser à M. X… la somme de 3 571,07 euros au titre du solde de l’ACTP pour les années 2005 à 2014 ; Mme W… fait valoir que le mode de calcul du département est erroné dans la mesure où il prend en compte les journées de présence de M. X… au foyer « F… » (Bas-Rhin), alors qu’il devrait compter les nuits passées chez sa mère ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré le 17 février 2016, le nouveau mémoire présenté pour Mme W…, agissant en qualité de tutrice de son fils, M. X…, par Maître Ketty DALMAS, son nouveau conseil, présentant les mêmes conclusions aux fins d’annulation que la requête, mais tendant à ce que le président du conseil départemental de Seine-et-Marne soit condamné à verser à M. X… la somme de 7 920,32 euros au titre du temps passé au domicile familial entre le mois d’octobre 2006 et le mois de janvier 2016 ; elle reprend les mêmes moyens que la requête mais fait valoir, en outre, que la procédure devant la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne est irrégulière pour avoir méconnu le principe d’impartialité, dans la mesure où les experts désignés par la commission étaient, pour l’une, signataire de la décision attaquée, pour l’autre, agent du département ayant eu un rôle avant la procédure contentieuse ;

Vu, enregistré le 30 août 2017, le nouveau mémoire présenté pour Mme W…, agissant en qualité de tutrice de son fils M. X…, par Maître Nathalie DUPUY-LOUP, son nouveau et dernier conseil, tendant aux mêmes conclusions d’annulation que les deux mémoires précédents et à ce que le président du conseil départemental de Seine-et-Marne soit condamné à verser à M. X… la somme de 15 230,18 euros au titre de l’ACTP due au 31 décembre 2017 ; elle reprend les mêmes moyens que la requête et le mémoire précédent mais fait valoir, en outre, que la procédure est entachée d’irrégularité non seulement par méconnaissance du principe d’impartialité dans la désignation des experts mais aussi du fait de l’absence de caractère contradictoire de l’expertise ;

Vu, enregistré le 8 novembre 2017 à 8 h 45, le mémoire en défense présenté par le président du conseil départemental de Seine-et-Marne tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale rejeter la requête de Mme W… ; il fait valoir que l’application du tarif réduit pour l’ACTP de M. X… pour tous les jours où il se trouve hors du domicile de ses parents, y compris les jeudi et lundi, est conforme à la réglementation ; il demande également à ce que Mme W… soit condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 1382 du code civil estimant la procédure intentée par elle dilatoire ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 8 novembre 2017 M. Vianney CAVALIER, rapporteur, Mme W… et Maître Nathalie DUPUY-LOUP, en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant que la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne, lors de sa séance du 20 novembre 2014, a nommé Mme H…, chef du service des prestations aux personnes âgées et handicapées du conseil départemental de Seine-et-Marne, et Mme P…, chef de bureau au service de la gestion des personnes âgées et adultes handicapés du même conseil départemental, en qualité d’experts ; que Mme H… était signataire de la décision du 16 mai 2011 qui faisait l’objet du recours ; que Mme P… a eu à connaître du dossier en phase précontentieuse ; qu’il suit de là, que la procédure suivie devant la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne est entachée d’irrégularité ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler la décision en date du 20 novembre 2014 de la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne et d’évoquer la demande ;

Considérant que M. X…, né le 1er août 1970, est bénéficiaire de l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) versée par le département de Seine-et-Marne à taux réduit lorsqu’il est accueilli en foyer et à taux plein lorsqu’il est de retour au domicile de ses parents ; qu’il séjourne au foyer du lundi midi au jeudi 16 heures ; que le département ne verse l’ACTP à taux plein que pour les journées des vendredi, samedi et dimanche ; que Mme W…, tutrice de M. X…, a demandé au président du conseil général de Seine-et-Marne que lui soit versée l’ACTP à taux plein également pour les lundi et les jeudi en raison de la présence de son fils au domicile parental pendant une partie au moins de la journée, estimant que cette présence nécessite une aide qui n’est plus prise en charge si l’ACTP est versée à taux réduit ; que le président du conseil général de Seine-et-Marne a, par une décision en date du 16 mai 2011, rejeté sa demande ; qu’elle a saisi la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne d’un recours tendant à l’annulation de cette décision ; que la commission départementale d’aide sociale a rejeté son recours par une décision en date du 20 novembre 2014 ;

Considérant que l’article L. 245‑10 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction antérieure à la loi du 11 février 2005, prévoit que « les conditions dans lesquelles le droit à l’allocation compensatrice est ouvert aux handicapés hébergés dans un établissement médico-social ou hospitalisé dans un établissement de santé sont précisées par voie réglementaire. Ce règlement détermine également dans quelles conditions le paiement de ladite allocation peut être suspendu, totalement ou partiellement, en cas d’hospitalisation ou d’hébergement. » ; que l’article R. 245‑10 du même code, dans sa rédaction antérieure au décret no 2005‑1588 du 19 décembre 2005, prévoyait que « la réduction de l’allocation n’est opérée que pendant les périodes où la personne handicapée est effectivement accueillie dans l’établissement, à l’exclusion des périodes de congé ou de suspension de la prise en charge. » ;

Considérant que l’article 31‑6 du règlement départemental d’aide sociale de Seine-et-Marne précise que « pour tout retour à domicile et sur attestation de l’établissement d’accueil, elle est reversée au taux initial, au prorata du nombre de jours passés à domicile. Pour les personnes handicapées accueillies en journée seulement, sans hébergement de nuit, l’ACTP est versée sans réduction. » ;

Considérant qu’il se déduit de ces dispositions, que si l’ACTP peut être versée à un montant réduit lors d’un accueil en foyer d’hébergement, c’est à la condition que cet accueil soit effectif et que la prise en charge soit telle que le versement de l’allocation sans réduction ne soit plus justifié ; que le retour au domicile d’une personne handicapée en fin de journée justifie une prise en charge pour cette partie de la journée ; que si le règlement départemental d’aide sociale de Seine-et-Marne prévoit que lorsqu’il n’y a qu’un accueil de jour, l’ACTP est versée sans réduction au bénéficiaire, il y a lieu d’en conclure que les journées non complètes au foyer donnent lieu à un versement sans réduction de l’ACTP ;

Considérant que M. X… est accueilli du lundi midi au jeudi 16 heures au foyer d’hébergement « F… » (Bas-Rhin) ; qu’il n’y reste que deux demi-journées et deux jours complet ; qu’il rentre au domicile de sa mère du jeudi 16 heures au lundi midi, soit deux demi-journées et trois journées complètes ; que le président du conseil départemental de Seine-et-Marne n’accepte de verser l’ACTP à taux plein que pour les trois journées complètes de présence au domicile, à savoir les vendredi, samedi, dimanche ; qu’ainsi, la prise en charge de M. X… hors de l’établissement le jeudi après-midi et le lundi matin n’est pas assurée ;

Considérant que l’ACTP vise à compenser la charge de travail d’une personne qui peut être un aidant familial ; qu’en l’espèce, elle n’est pas versée alors qu’il ressort des pièces du dossier qu’existe une prise en charge de la personne handicapée par un aidant familial à partir de 16 heures le jeudi et jusqu’à 12 heures le lundi ; que, par suite, c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne a estimé que le président du conseil général de Seine-et-Marne n’avait pas à verser l’ACTP à taux plein pour les jours où M. X… était partiellement pris en charge au domicile de sa mère ; qu’en conséquence, il y a lieu d’accorder cette aide et d’en assurer le versement à taux plein à M. X… du jeudi 16 heures au lundi midi ;

Considérant que la commission centrale d’aide sociale n’est pas à même, au vu des pièces du dossier, de déterminer le montant exact de l’ACTP dû par le département de Seine-et-Marne à M. X… au titre des jours où il était partiellement pris en charge au domicile de sa mère et où l’allocation devait lui être servie à taux plein ; qu’il revient au président du conseil départemental de Seine-et-Marne de procéder, sur la base du calcul des sommes dues conformément à la présente décision, au versement de ces sommes pour la période courant de septembre 2010 au 31 mars 2017 ;

Considérant que Mme W… demande à la commission centrale d’aide sociale le paiement des frais irrépétibles sur le fondement de l’article L. 761‑1 du code de justice administrative ; que le code de justice administrative n’étant pas applicable aux juridictions de l’aide sociale, sa demande ne peut qu’être rejetée ;

Considérant enfin, que le président du conseil départemental de Seine-et-Marne demande à ce que Mme W… soit condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 1382 du code civil ; que Mme W…ne peut pas être regardée comme ayant conduit une procédure dilatoire ; que cette demande ne peut qu’être rejetée,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne en date du 20 novembre 2014 est annulée.

Art. 2.  La décision du président du conseil général de Seine-et-Marne en date du 16 mai 2011 est annulée.

Art. 3.  Le président du conseil départemental de Seine-et-Marne procédera au versement de l’allocation compensatrice pour tierce personne à taux plein à M. X… pour les jours où celui-ci était partiellement pris en charge au domicile de sa mère pour la période courant de septembre 2010 au 31 mars 2017.

Art. 4.  La présente décision sera notifiée à Mme W…, au président du conseil départemental de Seine-et-Marne et à Maître Nathalie DUPUY-LOUP. Copie en sera adressée au secrétariat de la commission départementale d’aide sociale de Seine-et-Marne et à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 8 novembre 2017 où siégeaient M. Denis RAPONE, président, Mme Pauline DESCHAMPS, assesseure, M. Vianney CAVALIER, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 8 novembre 2017 à 14 heures.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET