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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) – Placement – Conditions d’octroi – Curateur – Commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) – Foyer – Etablissement médico-social – Allocation adulte handicapé (AAH) – Compétence juridictionnelle

Dossier no 150631

M. X…

Séance du 13 décembre 2017

Décision lue en séance publique le 13 décembre 2017 à 17 heures

Vu, enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 2 novembre 2015, la requête présentée par l’union départementale des associations familiales (UDAF) de la Côte-d’Or, agissant en tant que curateur renforcé de M. X…, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or en date du 27 novembre 2014, notifiée le 17 avril 2015, rejetant son recours formé à l’encontre de la décision du président du conseil général de la Côte-d’Or en date du 7 novembre 2013 refusant la prise en charge par l’aide sociale aux personnes handicapées des frais d’hébergement de M. X… aux motifs que l’intéressé n’est pas dans l’impossibilité de se procurer un emploi puisqu’il est reconnu travailleur handicapé et que la décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) du 28 novembre 2013 ne préconise plus d’orientation en foyer, ce qui induit qu’il n’y a plus de frais d’hébergement ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistrés le 12 octobre 2016 et le 12 janvier 2017, les mémoires présentés par l’UDAF de la Côte-d’Or, curateur renforcé de M. X…, représentée par Maître Gabrielle CESBRON qui conclut à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or, à ce que lui soit accordée l’aide sociale et, subsidiairement, à ce que soit ordonnée toute mesure d’investigation utile aux fins de recueillir tous les éléments nécessaires pour parfaire l’information sur la situation réelle, médicale et administrative, de M. X… ; l’UDAF de la Côte-d’Or soutient que :

M. X… bénéficiait d’une orientation en foyer depuis octobre 2011 et a intégré un foyer en octobre 2013 ; la décision de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du 1er août 2014 lui a accordé l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et le reconnaît en « restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi lié à son handicap » ;

la seconde décision de la CDAPH du 28 novembre 2013 ne peut avoir annulé la décision antérieure du 27 octobre 2011 décidant de son orientation en foyer d’hébergement pour la période du 27 octobre 2011 au 31 juillet 2016 ; il subissait une restriction substantielle et durable préexistante à son admission en foyer ; la première décision est incohérente car il lui a été refusé l’AAH ;

il s’est vu attribuer l’AAH à compter du 1er mars 2014, elle établit que la restriction existait au jour de son entrée en foyer ; il convient de prendre en considération la situation réelle qui l’empêche d’occuper un emploi lui permettant de faire face à ses frais d’hébergement en foyer et de lui octroyer l’aide sociale ;

le litige est bien de la compétence de la commission centrale d’aide sociale, les décisions évoquées de la CDAPH ne servent qu’à motiver l’incohérence existant entre la décision de la commission départementale d’aide sociale et la réalité du handicap de l’usager et ne sont pas contestées en l’espèce ;

subsidiairement, si la commission centrale d’aide sociale retenait la date d’attribution de l’AAH comme point de départ du droit à l’aide sociale, il faudrait retenir la date du 1er mars 2014 alors même que la date d’entrée en foyer a été le 30 septembre 2013 ;

Vu, enregistrés les 5 octobre 2015 et 12 décembre 2016, les mémoires en défense par lesquels le président du conseil départemental de la Côte-d’Or conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que :

la prise en charge des frais d’hébergement est soumise à deux critères, à savoir un taux de handicap d’au moins 80 % ou l’impossibilité d’avoir une activité professionnelle ; la décision de la CDAPH du 27 octobre 2011 mentionnait un taux d’invalidité inférieur à 50 % et aucune impossibilité d’accès au travail, d’où le rejet de la demande ; une deuxième décision de la CDAPH du 28 novembre 2013 fait état de la reconnaissance de travailleur handicapé permettant de se procurer un poste de travail adapté ; cette dernière décision n’indique plus d’orientation en foyer d’hébergement mais en établissement d’aide par le travail, ce qui rend automatiquement caduque la demande d’aide sociale ; une nouvelle décision de la CDAPH du 21 août 2014 fait apparaître le même taux de handicap et une « restriction substantielle et durable à l’emploi » ;

la contestation par la requérante des décisions de la CDAPH relève du tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) ; que si une date de prise en charge devait être retenue, cela devrait être celle d’ouverture du droit à l’AAH ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 13 décembre 2017 Mme Marie-Laure MESSE, rapporteure, Mme Corinne GAILLARD pour le département de la Côte-d’Or, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant que M. X… a bénéficié le 27 octobre 2011 d’une décision de la CDAPH de la Côte-d’Or décidant de son orientation vers un foyer d’hébergement du 1er août 2011 au 31 juillet 2016 ; qu’il est entré en foyer le 1er octobre 2013 et a déposé une demande d’aide sociale auprès du conseil départemental de la Côte-d’Or qui a été rejetée le 7 novembre 2013 aux motifs qu’il ne remplissait pas la condition de 80 % de handicap ou de l’impossibilité d’avoir une activité professionnelle ; qu’il résulte de l’instruction que l’intéressé a été reconnu travailleur handicapé par décision de la CDAPH du 28 novembre 2013 et orienté vers un établissement et service d’aide par le travail (ESAT) ; que le 21 août 2014, ladite commission lui a attribué l’allocation aux adultes handicapés (AAH) après avoir reconnu qu’il présentait une « restriction substantielle et durable de l’emploi » ; que la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or a confirmé le 27 novembre 2014 la décision de rejet du président du conseil général en date du 7 novembre 2013 ; que l’UDAF de la Côte-d’Or, curateur renforcé de M. X…, demande l’annulation de cette décision de confirmation ;

Considérant que, contrairement à ce que fait valoir le département de la Côte-d’Or, le recours formé par la requérante est dirigé contre la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or en date du 27 novembre 2014 relative à la prise en charge au titre de l’aide sociale aux personnes handicapées des frais d’hébergement de M. X… ; que, par suite, la commission centrale d’aide sociale est compétente pour en connaître ;

Considérant que M. X… a été placé sous curatelle renforcée par jugement du tribunal d’instance de Beaune du 13 décembre 2011 ; que l’UDAF de la Côte-d’Or, désignée en qualité de curateur, est recevable à le représenter dans le litige en cause ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 241‑1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne handicapée dont l’incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l’article L. 821‑1 du code de la sécurité sociale ou qui est, compte tenu de son handicap, dans l’impossibilité de se procurer un emploi, peut bénéficier des prestations prévues au chapitre Ier du titre III du présent livre, à l’exception de l’allocation simple à domicile. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 812‑2 du code de la sécurité sociale : « Toute personne résidant sur le territoire métropolitain (…) ayant dépassé l’âge d’ouverture du droit à l’allocation prévue à l’article L. 541‑1 et dont l’incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au présent titre, une allocation aux adultes handicapés. » ; qu’aux termes de l’article D. 821‑1 du même code : « Pour l’application de l’article L. 821‑1, le taux d’incapacité permanente exigé pour l’attribution de l’allocation aux adultes handicapés est d’au moins 80 %. / Pour l’application de l’article L. 821‑2 ce taux est de 50 %. / Le pourcentage d’incapacité est apprécié d’après le guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant à l’annexe 2‑4 du code de l’action sociale et des familles. » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la première décision de la CDAPH en date du 27 octobre 2011 a décidé du placement de M. X… en foyer d’hébergement pour la période du 1er août 2011 au 31 juillet 2016 ; que la seconde décision en date du 28 novembre 2013 ne revient pas sur la première décision et ne traite que de la situation de M. X… au regard du travail en le reconnaissant travailleur handicapé et en l’orientant vers le milieu protégé en ESAT ; qu’ainsi, la décision de placement en foyer d’hébergement n’a pas été rapportée à cette date ; que, toutefois, les conditions définies par les dispositions de l’article L. 241‑1 du code de l’action sociale et des familles n’ont été satisfaites que suite à la décision de la CDAPH du 21 août 2014 par laquelle M. X… a été reconnu comme étant dans une situation de « restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi lié au handicap » ; que cette décision a pris effet au 1er mars 2014 ; que l’orientation par la CDAPH de M. X… en ESAT dès le 28 novembre 2013 exclut l’intéressé d’un emploi puisqu’elle le place sous le statut d’usager d’un établissement médico-social ; que cette décision implique nécessairement que M. X… soit, dès lors, regardé comme étant dans l’impossibilité de se procurer un emploi au sens des dispositions précitées de l’article L. 241‑1 du code de l’action sociale et des familles ; que, par suite, il y a lieu de fixer la prise en charge, au titre de l’aide sociale, de l’hébergement en foyer de M. X… à compter du 28 novembre 2013 ; que, dans cette mesure, la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or doit être annulée ; qu’en revanche, l’hébergement en foyer de M. X… pour la période du 30 septembre 2013 au 27 novembre 2013 ne saurait être pris en charge au titre de l’aide sociale ; que, dans cette mesure, la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or ne peut qu’être confirmée,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or en date du 27 novembre 2014 est annulée, en tant qu’elle rejette la demande de prise en charge au titre de l’aide sociale aux personnes handicapées des frais d’hébergement de M. X… pour la période postérieure au 28 novembre 2013.

Art. 2.  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à l’union départementale des associations familiales de la Côte-d’Or, au président du conseil départemental de la Côte-d’Or et à Maître Gabrielle CESBRON. Copie en sera adressée au secrétariat de la commission départementale d’aide sociale de la Côte-d’Or et à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 13 décembre 2017 où siégeaient M. Denis RAPONE, président, Mme Pauline DESCHAMPS, assesseure, Mme Marie-Laure MESSE, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 13 décembre 2017 à 17 heures.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET