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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Foyer – Ressources – Déclaration – Prescription – Procédure – Compétence juridictionnelle – Précarité

Dossier no 160318

Mme X…

Séance du 24 novembre 2017

Décision lue en séance publique le 13 décembre 2017

Vu le recours en date du 7 juin 2016 formé par Mme X…, qui demande l’annulation de la décision en date du 10 mars 2016 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision en date du 28 janvier 2011 du président du conseil général qui a refusé toute remise gracieuse sur un indu de 3 056,76 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion détecté pour la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008 ;

La requérante ne conteste pas le fondement de l’indu mais en demande sa décharge ; elle fait valoir que l’action du département est prescrite depuis 2013 car la circulaire interministérielle No DSS/2010/260 du 12 juillet 2010 relative aux règles de prescription applicable en matière de sécurité sociale énonce que : « les créances nées avant le 19 juin 2008 se trouveront donc toutes prescrites le 19 juin 2013 à minuit » ; que sa créance, née le 20 avril 2008, est antérieure à cette date et qu’elle bénéficie donc de la prescription visée par le texte ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée à la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 24 novembre 2017 Mme GUEDJ, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article L. 262 40 du code de l’action sociale et des familles énonce : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ; Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir, ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X… a été admise au bénéfice du revenu minimum d’insertion au titre d’une personne mariée, vivant avec un enfant à charge à son domicile ; que, comme suite à une demande renseignement en date du 30 avril 2008, la requérante a déclaré que sa fille C… avait quitté le domicile depuis trois ans ; qu’il s’ensuit que la caisse d’allocations familiales a recalculé ses droits faisant ressortir un trop-perçu de 3 056,76 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008 ; que cet indu, qui résulte de la déclaration tardive du départ de sa fille C… du foyer, et donc du versement à tort de la quotité de revenu minimum d’insertion correspondante, est fondé en droit ;

Considérant que Mme X… a formulé une demande de remise gracieuse que le président du conseil général, par décision en date du 28 janvier 2011, a rejetée ; que, saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, par décision en date du 10 mars 2016, l’a rejeté au motif que la requérante bénéficiait déjà de la réduction de prélèvement demandée et qu’elle ne justifiait pas d’une situation de précarité ;

Considérant, d’une part, qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑40 et L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux organismes payeurs d’intenter une action en recouvrement des sommes indûment payées dans un délai de deux ans ; qu’il ressort des pièces versées au dossier que la caisse d’allocations familiales des Bouches-du-Rhône a notifié à Mme X… un premier refus de remise de l’indu litigieux en date du 4 novembre 2008 ; que la demande de remise de dette et la réponse la refusant, ainsi que l’ensemble des demandes suivantes constituent des actes suspensifs de prescription ; que, dès lors, l’action en recouvrement du département des Bouches-du-Rhône a débuté bien avant l’expiration du délai de deux ans courant à compter du constat de l’existence de l’indu ; qu’au surplus, la circulaire no DSS/2010/260 du 12 juillet 2010 relative aux règles de prescription en matière de sécurité sociale dont Mme X… se prévaut n’a ni valeur réglementaire, ni pertinence au regard du revenu minimum d’insertion ;

Considérant, d’autre part, qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑39 et L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que toute erreur ou omission déclarative imputable à un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion ne peut être regardée comme une fausse déclaration faite dans le but délibéré de percevoir à tort ladite allocation ; qu’en l’espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme X… a déclaré tardivement le départ de sa fille C… de son domicile, sans que cela constitue une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration ; qu’ainsi, les dispositions précitées de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles susvisées ne font pas obstacle à ce qu’il soit accordé une remise gracieuse ; que, dès lors, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, qui n’a pas examiné le moyen de précarité soulevé par Mme X… devant elle, a méconnu sa compétence, et que sa décision en date du 10 mars 2016 encourt, par suite, l’annulation ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;

Considérant que Mme X… se trouve encore actuellement en situation de précarité avérée ; qu’il suit de là que le remboursement de la totalité de l’indu ferait obstacle à la satisfaction de ses besoins élémentaires ; qu’il sera fait une juste appréciation de sa situation en lui accordant une remise de 50 % de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 3 056,76 euros qui lui a été assigné ; qu’il appartiendra à Mme X…, si elle s’y estime fondée, de solliciter un échéancier de paiement auprès du payeur départemental et éventuellement de saisir celui-ci si, dans le cours de son exécution, sa situation venait à s’aggraver,

Décide

Art. 1er La décision en date du 10 mars 2016 de la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, ensemble la décision du 28 janvier 2011 du président du conseil général, sont annulées.

Art. 2.  Il est accordé à Mme X… une remise de 50 % de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 3 056,76 euros qui lui a été assigné, ramenant ainsi le reliquat dont elle est finalement redevable à 1 528,38 euros.

Art. 3.  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 4.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, à la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 24 novembre 2017 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. DEL FONDO, assesseur, Mme GUEDJ, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 13 décembre 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET