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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Allocation personnalisée d'autonomie (APA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Allocation personnalisée d’autonomie (APA) – Révision de la décision d’admission à l’aide sociale – Date d’effet – Domicile de secours

Dossier no 160246

Mme X…

Séance du 25 septembre 2017

Décision lue en séance publique le 23 octobre 2017

Vu le recours formé le 11 avril 2016, présenté par Maître VERFAILLIE pour Mme C… et M. L…, agissant en leur qualité d’ayant droit de Mme X… ; ils demandent à la commission :

1o D’annuler la décision en date du 19 février 2016 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Somme a rejeté leur recours tendant à la reformation de la décision implicite par laquelle le président du conseil départemental de la Somme a rejeté leurs demandes en date du 21 août 2014 ;

2o Subsidiairement, d’évoquer le fond du dossier ;

3o D’enjoindre au conseil général de la Somme de faire droit à leurs demandes dans le délai d’un mois à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4o De mettre à la charge du département de la Somme la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761‑1 du code de justice administrative ;

Les requérants soutiennent :

 que Mme X… avait acquis son domicile de secours dans la Somme ;

 que ce sont les services de ce département qui ont, en dernier lieu, et conformément à leur propre règlement d’action sociale, évalué la situation de Mme X… pour la fixation de l’aide personnalisée à l’autonomie devant lui être versée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, présenté par le président du conseil départemental de la Somme et concluant au rejet de la requête ;

Il soutient que Mme X… a toujours conservé son domicile de secours dans le département de la Seine-Maritime et que c’est donc à bon droit que la commission départementale d’aide sociale de la Somme s’est déclarée incompétente au profit de son homologue de la Seine-Maritime ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu, à l’audience publique du 25 septembre 2017 M. MARTHINET, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant que Mme X…, jusqu’alors domiciliée en Seine-Maritime, a résidé, de 2013 jusqu’au jour de son décès, à Z…, dans le département de la Somme, dans le cadre d’un accueil familial ; qu’elle a, par jugement du 26 mai 2014, été placée sous tutelle de Mme C… et de M. L…, requérants dans le cadre de la présente instance ; que le bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) lui a été accordé par décision du président du conseil général de la Seine-Maritime à compter du 26 janvier 2011 ; que le montant de cette prestation a, par la suite, été révisé par décision de la même autorité en date du 13 août 2014, elle-même réformée par décision du 17 septembre 2014 ; que les requérants ont, par lettre du 21 août 2014, demandé au président du conseil général de la Somme de procéder à la mise en conformité du règlement d’aide sociale de ce département avec la réglementation nationale et de faire en sorte que l’ « APA fixée et versée au profit de Mme X… soit (…) modifiée, et ce rétroactivement » ; qu’une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l’administration sur cette demande ; qu’une première requête a été formée devant le tribunal administratif d’Amiens, tendant à l’annulation de cette décision implicite de rejet ; que cette requête a, par ordonnance, été renvoyée à la commission départementale d’aide sociale de la Somme, laquelle a, par décision du 19 février 2016, rejeté ladite requête comme ayant été présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que les requérants relèvent régulièrement appel de cette décision ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 311‑1 du code de justice administrative : « Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort, juges de droit commun du contentieux administratif, sous réserve des compétences que l’objet du litige ou l’intérêt d’une bonne administration de la justice conduisent à attribuer à une autre juridiction administrative » ; qu’aux termes de l’article L. 134‑1 du code de l’action sociale et des familles : « (…) les décisions du président du C… départemental et du représentant de l’Etat dans le département prévues à l’article L. 131‑2 sont susceptibles de recours devant les commissions départementales d’aide sociale mentionnées à l’article L. 134‑6 dans des conditions fixées par voie réglementaire » ; qu’aux termes de l’article L. 131‑2 du même code : « La décision d’admission à l’aide sociale est prise par le représentant de l’Etat dans le département pour les prestations qui sont à la charge de l’Etat (…) et par le président du C… départemental pour les autres prestations prévues au présent code » ;

Considérant que, par la décision implicite litigieuse, le président du conseil général de la Somme a, d’une part, refusé de faire droit à une demande tendant à ce que le règlement départemental d’aide sociale soit modifié et, d’autre part, refusé de réviser le montant de l’APA servie à Mme X… ;

Considérant que la première de ces deux décisions ne relève pas de la compétence des juridictions spécialisées de l’aide sociale telle que fixée à l’article L. 134‑1 précité du code de l’action sociale et des familles ; que c’est donc à bon droit que la commission départementale d’aide sociale de la Somme s’est déclarée incompétente pour connaître de la requête de Mme C… et de M. L…en tant qu’elle en demandait l’annulation ;

Considérant, toutefois, que cette juridiction était, en vertu du même article, compétente pour connaître de cette même requête en tant qu’elle demandait la réformation de la décision implicite par laquelle le président du conseil général de la Somme avait refusé de réviser le montant de l’APA servie à Mme X… ; que c’est donc à tort que la commission départementale d’aide sociale de la Somme s’est déclarée incompétente pour connaître de ce litige ; que sa décision du 19 février 2016 doit, par suite, et dans cette seule mesure, être annulée ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C… et M. L…devant la commission départementale d’aide sociale de la Somme ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 122‑1 du code de l’action sociale et des familles : « les dépenses d’aide sociale prévues à l’article L. 121‑1 sont à la charge du département dans lequel les bénéficiaires ont leur domicile de secours (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 122‑2 du même code : « (…) le domicile de secours s’acquiert par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux, ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou au titre de l’aide sociale au domicile d’un particulier agréé (…) qui conservent le domicile de secours qu’elles avaient acquis avant leur entrée dans l’établissement et avant le début de leur séjour chez un particulier. Le séjour dans ces établissements ou au domicile d’un particulier agréé ou dans un placement familial est sans effet sur le domicile de secours (…) » ;

Considérant qu’il est constant que Mme X… a résidé en Seine-Maritime, où elle avait acquis son domicile de secours, jusqu’en 2013, date à laquelle elle a été accueillie au domicile d’un particulier agréé dans le département de la Somme ; qu’il résulte des dispositions précitées du code de l’action sociale et des familles que ce séjour n’a pas eu pour effet de modifier son domicile de secours qui est, dès lors, et jusqu’à son décès, demeuré dans le département de la Seine-Maritime ; que le président du conseil général de la Somme ne pouvait, dès lors, que rejeter la demande des requérants tendant à ce qu’il révise le montant de l’APA servie à Mme X…, une telle révision relevant de la seule compétence du président du conseil général de la Seine-Maritime ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à demander la réformation de cette décision ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la présente requête aux fins d’injonction et tendant à l’application de l’article L. 761‑1 du code de justice administrative,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Somme en date du 19 février 2016 est annulée en tant qu’elle porte sur le refus du président du conseil départemental de la Somme de faire droit à la demande de révision du montant de l’aide personnalisée d’autonomie servie à Mme X….

Art. 2.  La demande présentée par Mme C… et M. L…devant la commission départementale d’aide sociale de la Somme et le surplus de ses conclusions devant la commission centrale sont rejetés.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à Maître Emmanuel VERFAILLIE, au président du conseil départemental de la Somme. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 25 septembre 2017 où siégeaient M. GIROT, président, Mme DURGEAT, assesseure, M. MARTHINET, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 23 octobre 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET