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Dispositions communes à tous les types d'aide sociale

Détermination de la collectivité débitrice

Domicile de secours

Mots clés : Domicile de secours (DOS) – Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Conjoint – Incarcération – Pénal – Choix – Absence

Dossier no 160323

Mme X…

Séance du 7 mars 2018

Décision lue en séance publique le 7 mars 2018 à 12 h 30

Vu, enregistrée au greffe de la commission centrale d’aide sociale le 13 juin 2016, la requête présentée par le président du conseil départemental de la Somme tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale fixer dans le département de la Manche le domicile de secours de Mme X…, actuellement hébergée en foyer-logement dans la Manche, pour la prise en charge par l’aide sociale de ses frais d’hébergement ; il soutient que, avant son hébergement en foyer-logement, Mme X… a résidé du 15 décembre 2014 au 15 juin 2015 dans le département de la Manche, quand bien même elle disposait d’une adresse postale au sein de la commune d’A…, dans la Somme ; que les services du département de la Somme n’étaient pas informés de sa situation ; que c’est à tort que le président du conseil départemental de la Manche a considéré que le domicile de Mme X… était non acquisitif de domicile de secours dans la mesure où il lui aurait été imposé contre son gré ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré le 12 septembre 2016, le mémoire en défense présenté par le président du conseil départemental de la Manche tendant au rejet de la requête et à ce que soit fixé le domicile de secours de Mme X… dans le département de la Somme ; il soutient que l’intéressée a résidé contre son gré dans le département de la Manche ; qu’en vertu du dernier alinéa de l’article L. 122‑3 du code de l’action sociale et des familles, ce domicile intervenu dans des circonstances extérieures à la bénéficiaire de l’aide sociale n’est pas constitutif d’un domicile de secours ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 7 mars 2018 Mme Solène THOMAS, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant que, suite à la transmission pour instruction par le département de la Manche du dossier de demande d’aide sociale à l’hébergement de Mme X…, qui a résidé au centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) du 25 juin 2015 au 18 mai 2016, puis depuis lors en foyer-logement, à C…, le président du conseil départemental de la Somme a saisi la commission centrale d’aide sociale afin que le domicile de secours de Mme X… soit fixé dans le département de la Manche, pour la prise en charge de ses frais d’hébergement ;

Considérant qu’en vertu de l’article L. 111‑1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France et remplissant les conditions légales d’attribution bénéficie de l’aide sociale » ; qu’aux termes de l’article L. 122‑1 du même code : « Les dépenses d’aide sociale prévues à l’article L. 121‑2 sont à la charge du département dans lequel les bénéficiaires ont leur domicile de secours. / A défaut de domicile de secours, ces dépenses incombent au département où réside l’intéressé au moment de la demande d’admission à l’aide sociale » ; qu’il découle du premier alinéa de l’article L. 122‑2 dudit code que : « Le séjour dans un établissement sanitaire ou social ne peut avoir pour effet de mettre les dépenses à la charge du département dans lequel est situé l’établissement » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 122‑4 de ce code : « Lorsqu’il estime que le demandeur a son domicile de secours dans un autre département, le président du conseil départemental doit, dans le délai d’un mois après le dépôt de la demande, transmettre le dossier au président du conseil départemental du département concerné » ;

Considérant qu’en vertu de l’article L. 122‑3 de ce code : « Le domicile de secours se perd : 1o Par une absence ininterrompue de trois mois postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf si celle-ci est motivée par un séjour dans un établissement sanitaire ou social ou au domicile d’un particulier agréé ou dans un placement familial, organisé en application des articles L. 441‑1, L. 442‑1 et L. 442‑3 précités ; 2o Par l’acquisition d’un autre domicile de secours. / Si l’absence résulte de circonstances excluant toute liberté de choix du lieu de séjour ou d’un traitement dans un établissement de santé situé hors du département où réside habituellement le bénéficiaire de l’aide sociale, le délai de trois mois ne commence à courir que du jour où ces circonstances n’existent plus » ; que les circonstances mentionnées à ce dernier alinéa excluant toute liberté de choix du lieu de séjour renvoient aux circonstances extérieures à la personne même du bénéficiaire, qui ne résultent pas de sa seule situation de dépendance physique ou psychique ;

Considérant qu’avant son admission en CHRS puis en foyer-logement dans la Manche, et alors qu’elle était domiciliée dans le département de la Somme jusqu’en décembre 2014, Mme X… a ensuite résidé avec son concubin dans le département de la Manche ; qu’il ressort d’un avis à victime délivré par un juge d’instruction en date du 15 février 2016 que son concubin a été placé en examen et en détention provisoire, puis remis en liberté sous contrôle judiciaire, pour avoir abusé de la situation de vulnérabilité de Mme X… qui s’est portée partie civile et pour la commission de menaces, contrainte, violences et atteintes sexuelles avec violences ; qu’il ressort également des pièces du dossier que Mme X… a été accueillie en établissement à la suite de l’intervention des forces de l’ordre ; que, dès lors, quand bien même cette procédure pénale est encore en cours, le domicile de Mme X… dans la Manche est intervenu dans des conditions excluant toute liberté de choix de sa part au sens des dispositions précitées du dernier alinéa de l’article L. 122‑3 du code de l’action sociale et des familles ; que, par suite, ce domicile dans la Manche ne saurait être considéré comme domicile de secours ; que le président du conseil départemental de la Somme ne peut utilement se prévaloir de ce qu’il n’aurait pas eu connaissance de la situation de Mme X… avant signalement et intervention des forces de l’ordre ; qu’il résulte de ce qui précède que le domicile de secours de celle-ci doit être fixé dans le département de la Somme, auquel incombent les dépenses d’hébergement engagées en faveur de celle-ci,

Décide

Art. 1er Le domicile de secours de Mme X… est fixé dans le département de la Somme, compétent pour prendre en charge ses frais d’hébergement au foyer-logement « F… » dans la Manche.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée au président du conseil départemental de la Somme et au président du conseil départemental de la Manche. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 7 mars 2018, où siégeaient M. Denis RAPONE, président, Mme Marie-Christine APPERT, assesseure, Mme Solène THOMAS, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 7 mars 2018 à 12 h 30.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET