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Dispositions communes à tous les types d'aide sociale

Recours en récupération

Récupération sur succession

Mots clés : Recours en récupération – Récupération sur succession – Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Actif successoral – Précarité

Dossier no 160019

Mme X…

Séance du 19 février 2018

Décision lue en séance publique le 19 mars 2018

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 8 janvier 2018, Mme X… demande à la commission centrale d’aide sociale :

1o D’annuler la décision du 29 septembre 2015 de la commission départementale d’aide sociale du Nord rejetant sa demande tendant à l’annulation de la décision du 7 février 2014 par laquelle le président du conseil départemental du Nord a décidé la récupération de sa créance d’aide sociale de 37 761,24 euros au titre de l’hébergement de Mme X… à l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes « résidence E… » dans le Nord du 1er janvier 2009 au 23 octobre 2012 sur l’actif successoral de celle-ci ;

2o De lui accorder la remise gracieuse de la somme qui lui est réclamée par la décision du président du conseil départemental du Nord du 7 février 2014 ;

Elle soutient qu’elle n’a pas les ressources lui permettant de payer la créance dont la récupération est entreprise par le département du Nord ; elle doit faire face à des dépenses de santé lourdes nécessitées par son état de santé qui se dégrade ;

Par un mémoire en défense daté du 5 juillet 2016, le département du Nord conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

la décision de récupération est conforme aux dispositions de l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles ;

l’actif successoral net revenant à la requérante à la suite du décès de sa mère s’élève à 6 253,85 euros ;

la somme réclamée à la requérante est proportionnelle à sa part successorale et n’entame pas son propre patrimoine ;

elle peut solliciter auprès du Trésor public un échelonnement du remboursement de sa créance ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ont été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ont été informées de la date et de l’heure de l’audience.

A l’audience publique du 19 février 2018, a été entendu le rapport de M. HUMBERT, rapporteur.

Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique :

1. Mme X… a été admise par le département du Nord au bénéfice de l’aide sociale au titre de son hébergement à l’EHPAD « résidence E… » du Nord à compter du 9 octobre 2007. A la suite de son décès le 23 octobre 2012, le département du Nord a décidé le 7 février 2014 de récupérer sur sa succession sa créance d’aide sociale correspondant à la période du 1er janvier 2009 jusqu’à la date du décès de Mme X… en exerçant un recours sur la succession dont a été bénéficiaire Mme X…, sa fille unique. Cette dernière relève appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord qui a rejeté sa demande d’annulation de la décision du 7 février 2014 ;

2. L’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles, dans sa version alors applicable, dispose : « Des recours sont exercés (…) par (…) le département : 1o (…) contre la succession du bénéficiaire ; (…) ». L’article R. 132‑11 du même code prévoit que : « Le président du conseil départemental (…) fixe le montant des sommes à récupérer. Il peut décider de reporter la récupération en tout ou partie » ;

3. Pour l’application de ces dispositions, il appartient aux juridictions de l’aide sociale, statuant en qualité de juges de plein contentieux, de se prononcer sur le bien-fondé de l’action engagée par la collectivité publique d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une et l’autre parties à la date de leur propre décision. Elles ont la faculté, en fonction des circonstances particulières de chaque espèce, d’aménager les modalités de cette récupération et, le cas échéant, d’en réduire le montant ou d’en reporter les effets dans le temps ;

4. Il résulte de l’instruction que le département du Nord a décidé de récupérer le montant de sa créance d’aide sociale, qui s’élève à 37 761,24 euros, au titre de l’hébergement de Mme X… en EHPAD, dans la limite de l’actif net successoral de celle-ci revenant à sa fille et qui se monte à 6 253,85 euros ;

5. Mme X… fait état d’importants problèmes de santé depuis plusieurs années, qu’elle établit par les pièces produites et indique qu’elle a consacré l’intégralité de la somme reçue de la succession de sa mère au règlement de dépenses de santé. Elle expose être dans une situation financière difficile puisque si elle perçoit une pension d’invalidité de 1 700 euros par mois environ, garantie jusqu’à son départ à la retraite, elle doit en assumer un loyer de près de 850 euros par mois ainsi que le remboursement d’un emprunt contracté pour payer des frais médicaux et que, une fois réglées toutes les charges impliquées par son état de santé, ne dispose que de 200 euros par mois pour vivre. Au vu de l’ensemble de ces circonstances, et compte tenu en particulier de l’incidence de l’état de santé de la requérante sur ses ressources, il y a lieu de prononcer la remise totale de la créance d’aide sociale que le département souhaite récupérer sur la succession de Mme X… ;

5. Il résulte de ce qui précède que Mme X… est fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté son recours,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord du 29 septembre 2015 et la décision du président du conseil départemental du Nord du 7 février 2014 sont annulées.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 19 février 2018 où siégeaient Mme VESTUR, présidente, M. CULAUD, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 19 mars 2018.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET