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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Revenu de solidarité active (RSA) – Ressources – Déclaration – Compétence juridictionnelle – Prescription – Fraude

Dossier no 160199

Mme X…

Séance du 5 décembre 2017

Décision lue en séance publique le 23 janvier 2018

Vu la requête en date du 6 avril 2016 formée par Mme X…, qui demande l’annulation de la décision du 18 décembre 2015 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté son recours dirigé contre deux notifications de la direction régionale des finances publiques lui réclamant le remboursement d’un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge pour un montant de 1 200,21 euros au titre de la période allant du 1er mars au 31 mai 2009, et d’un indu d’allocations de revenu de solidarité active mis à sa charge pour un montant 5 229,77euros au titre de la période allant du 1er juin 2009 au 30 juin 2010 ;

La requérante expose qu’elle est artiste auteur interprète, vit avec ses parents et souhaite travailler dans la musique ; que l’argument de la commission départementale d’aide sociale selon lequel des salaires perçus n’ont pas été déclarés à la caisse d’allocations familiales et que sa situation n’était pas contrôlable, est erroné ;

Vu le mémoire complémentaire, présenté le 11 septembre 2017 par Maître Aude BAISECOURT, conseil de Mme X…, qui demande :

l’annulation de la décision du 18 décembre 2015 de la commission départementale d’aide sociale de Paris en tant seulement qu’elle a rejeté son recours tendant à la remise d’un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge pour un montant de 1 200,21 euros au titre de la période allant du 1er mars au 31 mai 2009 ;

le versement de la somme de 1 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle, dans la mesure où son avocat s’engage à renoncer à la part contributive de l’Etat ;

Elle soutient que :

le premier acte émis par le département de Paris concernant la mise en place de la procédure de recouvrement de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion est daté du 9 décembre 2011 ; qu’à cette date, l’action en recouvrement ne pouvait couvrir les sommes prétendument indues qu’à compter de décembre 2009 ; or, depuis juin 2009, Mme X… ne percevait plus le revenu minimum d’insertion, mais le revenu de solidarité active, pour lequel la commission départementale d’aide sociale de Paris et la commission centrale d’aide sociale sont incompétentes ; que la prescription biennale est donc bien acquise s’agissant de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion ;

une erreur manifeste d’appréciation a été commise quant à sa situation ; qu’en effet, ses frais de voyages en Israël ont été pris en charge par sa mère ;

l’indu qui lui est réclamé pour un montant de 1 200,21 euros excède largement ses capacités contributives ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les pièces du dossier desquelles il ressort que la requête a été communiquée à la présidente du conseil de Paris, qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informée de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 5 décembre 2017 Mme TANDONNET-TUROT, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à l’occasion des investigations menées par un agent assermenté de la caisse d’allocations familiales de Paris, il a été constaté, le 6 mai 2010, que Mme X… avait effectué des voyages en Israël du 14 au 21 septembre 2008, du 30 avril au 7 mai 2009, et en République dominicaine du 27 janvier au 3 février 2010, et omis de mentionner ses revenus d’activité salariée sur ses déclarations trimestrielles de ressources ; que, par suite, le remboursement de la somme de 1 200,21 euros au titre d’un indu d’allocations de revenu minimum d’insertion pour la période allant du 1er mars au 31 mai 2009 et de la somme de 5 229,77 euros au titre d’un indu d’allocations de revenu de solidarité active pour la période allant du 1er juin 2009 au 30 juin 2010 lui a été notifié le 9 décembre 2011 ;

Considérant que, saisi d’une demande gracieuse, le président du conseil de Paris l’a rejetée par décision du 9 janvier 2012 ; que, saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale de Paris l’a rejeté par décision du 18 décembre 2015 ;

Sur les conclusions dirigées contre l’indu d’allocations de revenu de solidarité active :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑47 du code de l’action sociale et des familles modifié : « Toute réclamation dirigée contre une décision relative au revenu de solidarité active fait l’objet, préalablement à l’exercice d’un recours contentieux, d’un recours administratif auprès du président du conseil départemental » ; qu’en vertu de l’article L. 134‑1 de ce même code, les décisions du président du conseil départemental prises concernant le revenu de solidarité active ne sont pas susceptibles de recours devant les commissions départementales d’aide sociale mentionnées à l’article L. 134‑6 de ce code, leur contestation ne pouvant être portée que devant le tribunal administratif ; qu’il s’ensuit que c’est à bon droit que la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté les conclusions de Mme X… relatives à l’indu d’allocations de revenu de solidarité active mis à sa charge, au motif qu’elle n’était pas compétente pour en connaître ;

Sur les conclusions dirigées contre l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑40 du même code : « L’action de l’allocataire pour le paiement de l’allocation (…) se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;

Considérant qu’à l’occasion de l’enquête effectuée le 6 mai 2010, la caisse d’allocations familiales a constaté que Mme X…, qui exerçait l’activité de chanteuse, n’avait déclaré sur ses déclarations trimestrielles aucune ressource, alors qu’elle avait perçu en 2009, ainsi qu’il ressort des pièces du dossier, des sommes correspondant à la remise de chèques sur son compte bancaire, au paiement en espèces de voyages à l’étranger, ainsi qu’à un montant de salaires de 987 euros figurant sur son avis de non-imposition relatif à cette année ; que Mme X… ne conteste pas cette omission, mais se borne à faire valoir que, le premier acte du département de Paris concernant la mise en place de la procédure de recouvrement d’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion étant daté du 9 décembre 2011, l’action en recouvrement est prescrite pour les sommes antérieures à décembre 2009 ; que, cependant, en mentionnant dans ses déclarations trimestrielles de ressources qu’elle ne percevait aucun revenu, Mme X… doit être regardée comme ayant délibérément omis de faire connaître à la caisse d’allocations familiales ses revenus d’activité salariée et comme s’étant volontairement soustraite à l’obligation de faire connaître, conformément aux dispositions précitées de l’article R. 262‑44 du code de l’action sociale et des familles, toutes les informations relatives à ses ressources ; que la réalité de ces fausses déclarations peut ainsi être tenue pour établie pour la période allant du 1er mars au 31 mai 2009 ; qu’eu égard aux dispositions susvisées de l’article L. 262‑40 du code de l’action sociale et des familles, dès lors que la fausse déclaration est retenue, la prescription biennale peut être levée ; qu’ainsi, le moyen de Mme X… tiré de la prescription de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion en litige est infondé ;

Considérant, par ailleurs, que si Mme X…, qui avait allégué auparavant que ses voyages étaient financés par ses économies, soutient désormais devant la commission centrale d’aide sociale qu’ils ont été réglés par sa mère, elle ne l’établit en tout état de cause pas par une simple attestation de la société MCS Conseil Voyages ;

Considérant, enfin, que Mme X… se borne à faire valoir qu’elle est dans l’incapacité de rembourser l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à sa charge pour un montant de 1 200,21 euros, qui « excède largement ses capacités contributives » ; qu’eu égard au caractère volontaire de ses fausses déclarations, sa situation de précarité, à la supposer d’ailleurs établie, ne pourrait être prise en compte ; qu’il lui appartiendra, si elle s’y croit fondée, de solliciter auprès du payeur départemental un échelonnement du remboursement de sa dette ;

Sur les conclusions présentées au remboursement des frais de justice :

Considérant que Mme X… succombe dans la présente instance ; que ses conclusions tendant au versement d’une somme de 1 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que Mme X… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté son recours,

Décide

Art. 1er Le recours de Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, à Maître Aude BAISECOURT, à la présidente du conseil de Paris. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 5 décembre 2017 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme TANDONNET-TUROT, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 23 janvier 2018.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET