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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Allocation personnalisée d'autonomie (APA)

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Allocation personnalisée d’autonomie (APA) – Grille AGGIR – Expertise médicale – Evaluation

Dossier no 150266

M. X…

Séance du 9 octobre 2017

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2017

Vu la procédure suivante :

Par une requête datée du 20 février 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 24 juin 2015, M. X… demande à la commission centrale d’aide sociale :

1o D’annuler la décision du 9 décembre 2014 de la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin rejetant sa demande tendant à l’annulation de la décision du président du conseil général du Haut-Rhin du 25 mai 2014 refusant sa demande de classement en groupe iso-ressources 3 de la grille nationale d’évaluation ;

2o D’annuler la décision du président du conseil général du Haut-Rhin du 25 mai 2014.

M. X… soutient que :

le premier juge n’a pas tenu compte de son état physique réel du point de vue médical (hypertension et obésité morbide ; gonarthrose bilatérale évoluée avec ostéoporose, tendinite persistante du tendon d’Achille, essoufflement et apnée du sommeil) et de ses nombreux problèmes de santé depuis le début de l’année 2014 (une hospitalisation du 17 au 30 janvier pour érysipèle et une autre du 25 février au 10 mars pour pyélonéphrite obstructive aiguë) ;

le médecin chargé de l’évaluation ne lui a jamais demandé aucun justificatif et ne l’a pas pris au sérieux ; il doit passer devant une véritable commission médicale d’examen ;

son handicap physique a été sous-estimé en l’absence de prise en compte de ses incapacités notoires en matière de motricité, ses problèmes d’hygiène corporelle et ses difficultés croissantes à préparer ses repas du fait de tremblements de plus en plus prononcés ;

son état physique s’est dégradé depuis la mi-2015, avec la nécessité de recourir à des cannes anglaises pour se déplacer et la prescription médicale d’aide à la toilette, à l’habillage et à la pose de bandes de contention le matin et l’inverse le soir ;

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juin 2015, le département du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

lors de l’évaluation faite le 22 mai 2014 par un médecin gériatre, le niveau de dépendance de M. X… a été évalué en groupe iso-ressources 4 sur la base de l’évaluation selon la grille AGGIR des capacités fonctionnelles de l’intéressé, qui réalise encore au moins partiellement les actes de la vie courante ;

le fait d’avoir des difficultés motrices ou des pathologies médicales n’aboutit pas à un groupe iso-ressources 3 ; le classement se fait en fonction des incapacités découlant des pathologies.

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 9 octobre 2017 M. HUMBERT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique :

1. M. X…, né en 1946, bénéficie de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile depuis le 4 mai 2009, avec un niveau de dépendance déterminé en groupe iso-ressources 4. Sa demande de modification de son plan d’aide avec classement en groupe iso-ressources 3 a été rejetée par le département du Haut-Rhin par décision du 1er juin 2014 confirmant son classement en groupe iso- ressources 4. En demandant à la commission centrale d’aide sociale un classement en groupe iso- ressources 3, M. X… doit être regardé comme relevant appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin qui a rejeté le 9 décembre 2014 le recours qu’il a formé contre la décision du département du Haut-Rhin maintenant son classement en groupe iso-ressources 4, ainsi que demandant l’annulation de cette décision ;

2. D’une part, l’article L. 232‑1 du code de l’action sociale et des familles prévoit : « toute personne âgée résidant en France qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liées à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins. / Cette allocation, définie dans des conditions identiques sur l’ensemble du territoire national, est destinée aux personnes qui, nonobstant les soins qu’elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d’une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l’état nécessite une surveillance régulière ». L’article L. 232‑1 du même code précise que : « L’allocation personnalisée d’autonomie, qui a le caractère d’une prestation en nature, est accordée, sur sa demande, dans les limites de tarifs fixés par voie réglementaire, à toute personne attestant d’une résidence stable et régulière et remplissant les conditions d’âge et de perte d’autonomie, évaluée à l’aide d’une grille nationale, également définies par voie réglementaire. », et les deux premiers alinéas du I de l’article R. 232‑7 que : « La demande d’allocation personnalisée d’autonomie est instruite par une équipe médico-sociale qui comprend au moins un médecin et un travailleur social. / Au cours de son instruction, l’équipe médico-sociale consulte le médecin désigné, le cas échéant, par le demandeur. Si l’intéressé le souhaite, ce médecin assiste à la visite à domicile effectuée par l’un au moins des membres de l’équipe médico-sociale. L’équipe médico-sociale procède à la même consultation à l’occasion de la révision de l’allocation personnalisée d’autonomie. » ;

3. D’autre part, l’article L. 232‑20 du code de l’action sociale et des familles dispose : « Les recours contre les décisions relatives à l’allocation personnalisée d’autonomie sont formés devant les commissions départementales mentionnées à l’article L. 134‑6, dans des conditions et selon les modalités prévues aux articles L. 134‑1 à L. 134‑10. Lorsque le recours est relatif à l’appréciation du degré de perte d’autonomie, la commission départementale mentionnée à l’article L. 134‑6 recueille l’avis d’un médecin titulaire d’un diplôme universitaire de gériatrie ou d’une capacité en gérontologie et gériatrie, choisi par son président sur une liste établie par le conseil départemental de l’ordre des médecins » ;

4. Il résulte de l’instruction que M. X… a fait l’objet le 27 mars 2014 par le docteur G…, médecin généraliste qui est son médecin traitant, d’une évaluation à l’appui d’une demande de modification de son plan d’aide au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile, transmise à l’équipe médicale pluridisciplinaire chargée d’instruire sa demande. A la suite de cette transmission, une évaluation a été faite le 22 mai 2015 par le docteur P…, médecin gériatre, au domicile de M. X… Or, il ressort de l’examen de ces deux évaluations qu’elles sont sensiblement divergentes, en particulier sur l’item « toilette bas », « habillage », « alimentation », « élimination urinaire », « transferts » et « déplacements intérieurs » ; en outre, le gériatre n’a pas renseigné l’item « déplacements extérieurs ». De plus, M. X… fait valoir que son état général s’est dégradé à la suite de ses deux hospitalisations au début de l’année 2014, qu’il a une motricité limitée, des difficultés à réaliser sa toilette, en particulier pour le bas du corps, et à préparer ses repas en raison de tremblements de plus en plus prononcés. Il verse également une attestation du médecin urologue établie à la suite de son hospitalisation en mars 2014 faisant état de la nécessité d’une aide à la toilette quotidienne ;

5. Si M. X… fait valoir que l’évaluation par le docteur P… n’a pas donné lieu à un examen médical, l’évaluation des besoins à prendre en charge pour l’attribution de l’allocation personnalisée d’autonomie est réalisée par une analyse du degré de dépendance en fonction d’une grille permettant un classement dans l’un des six groupes iso-ressources (GIR), et non par un examen médical. Les critiques du requérant sur la conduite de son évaluation par le docteur P… doivent donc être écartées ;

6. En revanche, en raison des divergences d’appréciation entre les médecins mentionnées au point 4, des affirmations de M. X… relatives à l’évolution de son état général et compte tenu de ce qu’il ne résulte pas de l’instruction, et en particulier des mentions portées sur sa décision, que la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin ait recueilli l’avis requis par les dispositions de l’article L. 232‑20 du code de l’action sociale et des familles lorsque, comme en l’espèce, le recours est relatif à l’appréciation du degré de perte d’autonomie, il y a lieu d’ordonner une expertise à domicile pour déterminer le classement de M. X… dans l’un des groupes iso-ressources de la grille nationale AGGIR en vue de statuer sur sa demande d’allocation personnalisée d’autonomie,

Décide

Art. 1er Avant dire droit, il est demandé à la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin de désigner un médecin remplissant les conditions de l’article L. 232‑20 du code de l’action sociale et des familles pour effectuer une évaluation médico-sociale au domicile de M. X… afin de déterminer le classement de degré de perte d’autonomie dans l’un des groupes iso-ressources de la grille nationale AGGIR.

Art. 2.  Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n’est pas expressément statué par la présente décision, sont réservés jusqu’en fin d’instance.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à M. X…, au président du conseil départemental du Haut-Rhin. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 9 octobre 2017 où siégeaient Mme VESTUR, présidente, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2017.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET