Conseil d'État
N° 497462
ECLI:FR:CECHR:2025:497462.20251113
Inédit au recueil Lebon
7ème - 2ème chambres réunies
Mme Marie Lehman, rapporteure
SARL THOUVENIN, COUDRAY, GREVY, avocats
Lecture du jeudi 13 novembre 2025
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 497462, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 3 septembre et 3 décembre 2024 et les 26 mai et 26 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel (SNUPFEN - Solidaires), le syndicat national CGT de l'Office national des forêts (CGT Forêt) et le syndicat Forêt Publique UNSA (FP-UNSA) demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° INS-24-T-112 du 3 juillet 2024 par laquelle la directrice générale de l'Office national des forêts a fixé la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts ;
2°) de mettre à la charge de l'Office national des forêts la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par trois mémoires en défense, enregistrés les 15 avril, 3 juin et 14 septembre 2025, l'Office national des forêts conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les syndicats ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, qui n'a pas produit d'observations.
2° Sous le n° 501872, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 février, 26 mai et 23 septembre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les mêmes syndicats demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° INS-24-T-112 du 23 décembre 2024 par laquelle la directrice générale de l'Office national des forêts a modifié l'instruction du 3 juillet précédent fixant la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts ;
2°) de mettre à la charge de l'Office national des forêts la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code forestier ;
- le code de procédure pénale ;
- le code du travail ;
- le décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Lehman, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel et autres ;
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel, le syndicat national CGT de l'Office national des forêts et le syndicat Forêt Publique UNSA demandent l'annulation pour excès de pouvoir des instructions du 3 juillet 2024 et du 23 décembre 2024 par lesquelles la directrice générale de l'Office national des forêts a fixé la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts. Ces requêtes présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur la légalité externe :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 2311-1 du code du travail : " Les dispositions du présent titre sont applicables (...) : / 1° Aux établissements publics à caractère industriel et commercial ; (...) ". Aux termes du II de l'article L. 2312-8 du même code, relatif aux attributions du comité social et économique, applicable au comité social et économique central de l'Office national des forêts : " Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur : / (...) 3° les conditions d'emploi, de travail (...) ; / 4° (...) tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 48 du décret du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d'administration dans les administrations et les établissements publics de l'Etat, applicable au comité social d'administration central de l'Office national des forêts : " Le comité social d'administration est consulté sur : / 1° Les projets de textes réglementaires relatifs au fonctionnement et à l'organisation des services (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'instruction définissant la stratégie et l'organisation de l'activité de police de l'Office national des forêts, devenu l'instruction du 3 juillet 2024, a été soumis au comité social et économique central de l'Office lors de sa séance des 12 et 13 juin 2024 et au comité social d'administration centrale lors de ses séances des 11 juin et 2 juillet 2024. D'une part, si les syndicats requérants soutiennent que ces comités n'auraient pas été mis à même de se prononcer sur l'ensemble des points faisant l'objet de l'instruction du 3 juillet 2024, ils n'assortissent pas ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'instruction du 23 décembre 2024 se borne à reprendre, en la précisant, la rédaction de l'instruction du 3 juillet 2024, sans soulever de question nouvelle qui aurait requis une nouvelle consultation du comité social et économique central et du comité social d'administration centrale. Dès lors, les syndicats requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces instructions ont été prises au terme d'une procédure irrégulière.
Sur la légalité interne :
4. D'une part, l'article 12 du code de procédure pénale prévoit que les missions de police judiciaire sont accomplies sous la direction du procureur de la République. Le deuxième alinéa de l'article 40 du même code impose à tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, d'en informer sans délai le procureur de la République et de lui transmettre tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 161-4 du code forestier : " I. Sont habilités à rechercher et constater les infractions forestières, outre les officiers et agents de police judiciaire : / 1° Les agents des services de l'Etat chargés des forêts, commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet ; / 2° Les agents publics en service à l'Office national des forêts (...) commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet ; / (...) / Les agents mentionnés aux 1° à 3° peuvent rechercher et constater d'autres infractions, dans les conditions prévues par les dispositions législatives les désignant à cet effet. Lorsqu'ils sont investis par le code de l'environnement de missions de recherche et de constatation d'infractions, ils interviennent dans les conditions définies aux articles L. 172-5 à L. 172-15 et à l'article L. 174-2 de ce code. / II. Sont habilités à constater, sans les rechercher, les infractions forestières, les agents contractuels de droit privé de l'Office national des forêts, commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet. / Ces agents peuvent constater d'autres infractions, dans les conditions prévues par les dispositions législatives les désignant à cet effet. Lorsqu'ils sont investis par le code de l'environnement de missions de constatation d'infractions, ils interviennent dans les conditions définies à l'article L. 172-7, au premier alinéa de l'article L. 172-8, au deuxième alinéa de l'article L. 172-10, aux articles L. 172-12 à L. 172-14 et à l'article L. 174-2 de ce code ". L'article L. 161-12 du même code prévoit que les agents habilités à constater les infractions forestières transmettent l'original du procès-verbal au procureur de la République lorsque l'infraction constatée est constitutive d'un délit, et au directeur régional de l'administration chargée des forêts lorsqu'elle est constitutive d'une contravention. Enfin, aux termes de l'article R. 161-2 de ce code : " I. Les fonctionnaires de l'Office national des forêts pouvant être désignés afin d'être commissionnés et assermentés pour rechercher et constater les infractions forestières sont : / 1° Les techniciens supérieurs forestiers ; / 2° Les cadres techniques de l'Office national des forêts. / II. Le commissionnement de ces fonctionnaires ainsi que celui des agents contractuels de droit privé mentionnés au II de l'article L. 161-4 est prononcé par le directeur général de l'Office national des forêts ".
6. En premier lieu les instructions attaquées fixent les orientations stratégiques nationales de l'Office national de forêts en matière d'activités de police, demandent aux agents concernés de cibler et de prioriser certaines infractions, prévoient l'élaboration d'orientations stratégiques locales de police et donnent aux directeurs des structures locales le pouvoir de fixer des priorités de verbalisation. Toutefois, dès lors qu'elles rappellent que l'exercice des activités de police se fait conformément à la politique pénale définie localement par le procureur de la République et que les orientations nationales données par l'Office s'appliquent sous réserve de consignes différentes données localement par le parquet, elles ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 12 du code de procédure pénale, aux termes duquel le procureur de la République assure la direction de la police judiciaire.
7. En deuxième lieu, les dispositions des instructions attaquées mentionnées au point précédent n'ont ni pour objet ni pour effet, contrairement à ce que soutiennent les syndicats requérants, de faire obstacle à ce que, dès lors qu'ils constatent une infraction, les agents de l'Office national des forêts habilités à cette fin en dressent le procès-verbal et transmettent l'original de celui-ci, selon les cas, au procureur de la République ou au directeur régional de l'administration chargée des forêts. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elles méconnaîtraient les dispositions des articles 40 du code de procédure pénale et L. 161-12 du code forestier ou seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés. Les syndicats requérants ne peuvent par ailleurs utilement soutenir qu'en ne précisant pas les conditions dans lesquelles les consignes du parquet doivent être recueillies, elles méconnaîtraient le principe de sécurité juridique.
8. En troisième lieu, les articles L. 161-4 et R. 161-2 du code forestier cités au point 6, qui définissent les catégories d'agents habilités à rechercher et constater les infractions forestières et pouvant être désignés pour être commissionnés et assermentés à cette fin, n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer que l'ensemble des agents relevant de ces catégories participent à de telles missions. Par suite, les points 2.1 et 3.1 des instructions en litige ne méconnaissent pas ces dispositions en ne confiant pas ces missions à l'ensemble des catégories d'agents qu'elles mentionnent.
9. En quatrième lieu, en prévoyant que des agents de l'Office sous contrat de droit privé peuvent, s'ils sont commissionnés et assermentés, participer à des opérations dites " opérations programmées de police administrative " mentionnées aux points 2.2.1 des deux instructions attaquées ou à des opérations dites " opérations programmées de police judiciaire à priorité de sensibilisation " mentionnées aux points 2.2.2.1 des mêmes instructions, celles-ci ne méconnaissent pas les dispositions du II de l'article L. 161-4 du code forestier citées au point 6 qui habilitent ces agents à constater, sans les rechercher, les infractions forestières, dès lors qu'elles définissent ces opérations comme n'ayant pas pour objet de rechercher des infractions, mais seulement, le cas échéant, d'en effectuer le constat.
10. En cinquième lieu, dès lors qu'il était loisible à la directrice générale de l'Office national des forêts de ne pas mentionner dans ces instructions l'ensemble des missions de police administrative susceptibles d'être réalisées par les agents de l'Office, les syndicats requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à soutenir qu'elles méconnaîtraient pour ce motif le principe de sécurité juridique ou seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
11. En dernier lieu, en rappelant la règle qui résulte des dispositions législatives citées au point 6 selon laquelle seuls des agents commissionnés et assermentés peuvent participer aux opérations de police, l'instruction du 23 décembre 2024 n'a ni pour objet ni pour effet d'imposer la réalisation de telles opérations. Les syndicats requérants ne peuvent, par suite, utilement soutenir qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, au motif que le nombre des agents commissionnés et assermentés serait insuffisant pour les conduire.
12. Il résulte de tout ce qui précède que les syndicats requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des instructions qu'ils attaquent. Leurs requêtes doivent, par suite, être rejetées, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les requêtes du syndicat SNUPFEN Solidaires et autres sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat SNUPFEN Solidaires, premier requérant nommé, et à l'Office national des forêts.
Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature.
N° 497462
ECLI:FR:CECHR:2025:497462.20251113
Inédit au recueil Lebon
7ème - 2ème chambres réunies
Mme Marie Lehman, rapporteure
SARL THOUVENIN, COUDRAY, GREVY, avocats
Lecture du jeudi 13 novembre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 497462, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 3 septembre et 3 décembre 2024 et les 26 mai et 26 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel (SNUPFEN - Solidaires), le syndicat national CGT de l'Office national des forêts (CGT Forêt) et le syndicat Forêt Publique UNSA (FP-UNSA) demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° INS-24-T-112 du 3 juillet 2024 par laquelle la directrice générale de l'Office national des forêts a fixé la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts ;
2°) de mettre à la charge de l'Office national des forêts la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par trois mémoires en défense, enregistrés les 15 avril, 3 juin et 14 septembre 2025, l'Office national des forêts conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les syndicats ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, qui n'a pas produit d'observations.
2° Sous le n° 501872, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 février, 26 mai et 23 septembre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les mêmes syndicats demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° INS-24-T-112 du 23 décembre 2024 par laquelle la directrice générale de l'Office national des forêts a modifié l'instruction du 3 juillet précédent fixant la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts ;
2°) de mettre à la charge de l'Office national des forêts la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code forestier ;
- le code de procédure pénale ;
- le code du travail ;
- le décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Lehman, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel et autres ;
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat national unifié des personnels des forêts et de l'espace naturel, le syndicat national CGT de l'Office national des forêts et le syndicat Forêt Publique UNSA demandent l'annulation pour excès de pouvoir des instructions du 3 juillet 2024 et du 23 décembre 2024 par lesquelles la directrice générale de l'Office national des forêts a fixé la stratégie et l'organisation de l'activité de police à l'Office national des forêts. Ces requêtes présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur la légalité externe :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 2311-1 du code du travail : " Les dispositions du présent titre sont applicables (...) : / 1° Aux établissements publics à caractère industriel et commercial ; (...) ". Aux termes du II de l'article L. 2312-8 du même code, relatif aux attributions du comité social et économique, applicable au comité social et économique central de l'Office national des forêts : " Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur : / (...) 3° les conditions d'emploi, de travail (...) ; / 4° (...) tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 48 du décret du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d'administration dans les administrations et les établissements publics de l'Etat, applicable au comité social d'administration central de l'Office national des forêts : " Le comité social d'administration est consulté sur : / 1° Les projets de textes réglementaires relatifs au fonctionnement et à l'organisation des services (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'instruction définissant la stratégie et l'organisation de l'activité de police de l'Office national des forêts, devenu l'instruction du 3 juillet 2024, a été soumis au comité social et économique central de l'Office lors de sa séance des 12 et 13 juin 2024 et au comité social d'administration centrale lors de ses séances des 11 juin et 2 juillet 2024. D'une part, si les syndicats requérants soutiennent que ces comités n'auraient pas été mis à même de se prononcer sur l'ensemble des points faisant l'objet de l'instruction du 3 juillet 2024, ils n'assortissent pas ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'instruction du 23 décembre 2024 se borne à reprendre, en la précisant, la rédaction de l'instruction du 3 juillet 2024, sans soulever de question nouvelle qui aurait requis une nouvelle consultation du comité social et économique central et du comité social d'administration centrale. Dès lors, les syndicats requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces instructions ont été prises au terme d'une procédure irrégulière.
Sur la légalité interne :
4. D'une part, l'article 12 du code de procédure pénale prévoit que les missions de police judiciaire sont accomplies sous la direction du procureur de la République. Le deuxième alinéa de l'article 40 du même code impose à tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, d'en informer sans délai le procureur de la République et de lui transmettre tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 161-4 du code forestier : " I. Sont habilités à rechercher et constater les infractions forestières, outre les officiers et agents de police judiciaire : / 1° Les agents des services de l'Etat chargés des forêts, commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet ; / 2° Les agents publics en service à l'Office national des forêts (...) commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet ; / (...) / Les agents mentionnés aux 1° à 3° peuvent rechercher et constater d'autres infractions, dans les conditions prévues par les dispositions législatives les désignant à cet effet. Lorsqu'ils sont investis par le code de l'environnement de missions de recherche et de constatation d'infractions, ils interviennent dans les conditions définies aux articles L. 172-5 à L. 172-15 et à l'article L. 174-2 de ce code. / II. Sont habilités à constater, sans les rechercher, les infractions forestières, les agents contractuels de droit privé de l'Office national des forêts, commissionnés à raison de leurs compétences en matière forestière et assermentés à cet effet. / Ces agents peuvent constater d'autres infractions, dans les conditions prévues par les dispositions législatives les désignant à cet effet. Lorsqu'ils sont investis par le code de l'environnement de missions de constatation d'infractions, ils interviennent dans les conditions définies à l'article L. 172-7, au premier alinéa de l'article L. 172-8, au deuxième alinéa de l'article L. 172-10, aux articles L. 172-12 à L. 172-14 et à l'article L. 174-2 de ce code ". L'article L. 161-12 du même code prévoit que les agents habilités à constater les infractions forestières transmettent l'original du procès-verbal au procureur de la République lorsque l'infraction constatée est constitutive d'un délit, et au directeur régional de l'administration chargée des forêts lorsqu'elle est constitutive d'une contravention. Enfin, aux termes de l'article R. 161-2 de ce code : " I. Les fonctionnaires de l'Office national des forêts pouvant être désignés afin d'être commissionnés et assermentés pour rechercher et constater les infractions forestières sont : / 1° Les techniciens supérieurs forestiers ; / 2° Les cadres techniques de l'Office national des forêts. / II. Le commissionnement de ces fonctionnaires ainsi que celui des agents contractuels de droit privé mentionnés au II de l'article L. 161-4 est prononcé par le directeur général de l'Office national des forêts ".
6. En premier lieu les instructions attaquées fixent les orientations stratégiques nationales de l'Office national de forêts en matière d'activités de police, demandent aux agents concernés de cibler et de prioriser certaines infractions, prévoient l'élaboration d'orientations stratégiques locales de police et donnent aux directeurs des structures locales le pouvoir de fixer des priorités de verbalisation. Toutefois, dès lors qu'elles rappellent que l'exercice des activités de police se fait conformément à la politique pénale définie localement par le procureur de la République et que les orientations nationales données par l'Office s'appliquent sous réserve de consignes différentes données localement par le parquet, elles ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 12 du code de procédure pénale, aux termes duquel le procureur de la République assure la direction de la police judiciaire.
7. En deuxième lieu, les dispositions des instructions attaquées mentionnées au point précédent n'ont ni pour objet ni pour effet, contrairement à ce que soutiennent les syndicats requérants, de faire obstacle à ce que, dès lors qu'ils constatent une infraction, les agents de l'Office national des forêts habilités à cette fin en dressent le procès-verbal et transmettent l'original de celui-ci, selon les cas, au procureur de la République ou au directeur régional de l'administration chargée des forêts. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elles méconnaîtraient les dispositions des articles 40 du code de procédure pénale et L. 161-12 du code forestier ou seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés. Les syndicats requérants ne peuvent par ailleurs utilement soutenir qu'en ne précisant pas les conditions dans lesquelles les consignes du parquet doivent être recueillies, elles méconnaîtraient le principe de sécurité juridique.
8. En troisième lieu, les articles L. 161-4 et R. 161-2 du code forestier cités au point 6, qui définissent les catégories d'agents habilités à rechercher et constater les infractions forestières et pouvant être désignés pour être commissionnés et assermentés à cette fin, n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer que l'ensemble des agents relevant de ces catégories participent à de telles missions. Par suite, les points 2.1 et 3.1 des instructions en litige ne méconnaissent pas ces dispositions en ne confiant pas ces missions à l'ensemble des catégories d'agents qu'elles mentionnent.
9. En quatrième lieu, en prévoyant que des agents de l'Office sous contrat de droit privé peuvent, s'ils sont commissionnés et assermentés, participer à des opérations dites " opérations programmées de police administrative " mentionnées aux points 2.2.1 des deux instructions attaquées ou à des opérations dites " opérations programmées de police judiciaire à priorité de sensibilisation " mentionnées aux points 2.2.2.1 des mêmes instructions, celles-ci ne méconnaissent pas les dispositions du II de l'article L. 161-4 du code forestier citées au point 6 qui habilitent ces agents à constater, sans les rechercher, les infractions forestières, dès lors qu'elles définissent ces opérations comme n'ayant pas pour objet de rechercher des infractions, mais seulement, le cas échéant, d'en effectuer le constat.
10. En cinquième lieu, dès lors qu'il était loisible à la directrice générale de l'Office national des forêts de ne pas mentionner dans ces instructions l'ensemble des missions de police administrative susceptibles d'être réalisées par les agents de l'Office, les syndicats requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à soutenir qu'elles méconnaîtraient pour ce motif le principe de sécurité juridique ou seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
11. En dernier lieu, en rappelant la règle qui résulte des dispositions législatives citées au point 6 selon laquelle seuls des agents commissionnés et assermentés peuvent participer aux opérations de police, l'instruction du 23 décembre 2024 n'a ni pour objet ni pour effet d'imposer la réalisation de telles opérations. Les syndicats requérants ne peuvent, par suite, utilement soutenir qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, au motif que le nombre des agents commissionnés et assermentés serait insuffisant pour les conduire.
12. Il résulte de tout ce qui précède que les syndicats requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des instructions qu'ils attaquent. Leurs requêtes doivent, par suite, être rejetées, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes du syndicat SNUPFEN Solidaires et autres sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat SNUPFEN Solidaires, premier requérant nommé, et à l'Office national des forêts.
Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature.