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Ariane Web: Conseil d'État 304300, lecture du 6 novembre 2009

Analyse n° 304300
6 novembre 2009
Conseil d'État

N° 304300
Publié au recueil Lebon

Lecture du vendredi 6 novembre 2009



26-055-01-08 : Droits civils et individuels- Convention européenne des droits de l'homme- Droits garantis par la convention- Droit au respect de la vie privée et familiale (art- )-

Locaux professionnels de personnes morales - 1) Applicabilité - Existence dans certaines circonstances (1) - 2) Conditions d'application - Cas des pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels institués au bénéfice des autorités publiques (2).




1) Le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités. 2) Ce droit doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles. Le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en oeuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs.





26-055-01-08-01 : Droits civils et individuels- Convention européenne des droits de l'homme- Droits garantis par la convention- Droit au respect de la vie privée et familiale (art- )- Champ d'application-

Personnes morales - Inclusion dans certaines circonstances (1).




Le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités.





26-055-01-08-02 : Droits civils et individuels- Convention européenne des droits de l'homme- Droits garantis par la convention- Droit au respect de la vie privée et familiale (art- )- Violation-

Existence - Procédure de visite des locaux professionnels instituée au profit des membres de la CNIL (art. 44 de la loi du 6 janvier 1978), dès lors qu'elle ne prévoit aucune information du responsable des locaux sur son droit de s'opposer à la visite (4).




Si le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités, il doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles. Le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en oeuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs. Il ressort des dispositions de l'article 44 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 et des articles 61 et 62 du décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour son application que les membres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et leurs agents habilités peuvent accéder à des locaux professionnels en dehors de leurs heures normales de fonctionnement et en l'absence du responsable du traitement de données à caractère personnel soumis au contrôle. Toute entrave à l'exercice de ce droit de visite peut, en application des dispositions de l'article 51 de la loi du 6 janvier 1978, faire l'objet de sanctions pénales, à l'exception de l'exercice du droit d'opposition prévu par les dispositions de son article 44. Cependant, aucune disposition ne prévoit que le responsable du traitement soit prévenu de cette visite et puisse se faire assister de la personne de son choix, alors que les membres de la commission peuvent accéder aux programmes informatiques et aux données ainsi qu'en demander la transcription. En raison tant de l'ampleur de ces pouvoirs de visite des locaux professionnels et d'accès aux documents de toute nature qui s'y trouvent que de l'imprécision des dispositions qui les encadrent, cette ingérence ne pourrait être regardée comme proportionnée aux buts en vue desquelles elle a été exercée qu'à la condition d'être préalablement autorisée par un juge. Toutefois, la faculté du responsable des locaux de s'opposer à la visite, laquelle ne peut alors avoir lieu qu'avec l'autorisation et sous le contrôle du juge judiciaire, offre une garantie équivalente à l'autorisation préalable du juge. Néanmoins, une telle garantie ne présente un caractère effectif que si le responsable des locaux ou le représentant qu'il a désigné à cette fin a été préalablement informé de son droit de s'opposer à la visite et mis à même de l'exercer.





52-045 : Pouvoirs publics et autorités administratives indépendantes- Autorités administratives indépendantes-

Commission nationale de l'informatique et des libertés - Procédure de visite des locaux professionnels (art. 44 de la loi du 6 janvier 1978) - Compatibilité avec la protection du droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 de la conv. EDH) - Absence, dès lors qu'elle ne prévoit aucune information du responsable des locaux sur son droit de s'opposer à la visite (4).




Si le droit au respect du domicile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités, il doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles. Le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en oeuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs. Il ressort des dispositions de l'article 44 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 et des articles 61 et 62 du décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour son application que les membres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et leurs agents habilités peuvent accéder à des locaux professionnels en dehors de leurs heures normales de fonctionnement et en l'absence du responsable du traitement de données à caractère personnel soumis au contrôle. Toute entrave à l'exercice de ce droit de visite peut, en application des dispositions de l'article 51 de la loi du 6 janvier 1978, faire l'objet de sanctions pénales, à l'exception de l'exercice du droit d'opposition prévu par les dispositions de son article 44. Cependant, aucune disposition ne prévoit que le responsable du traitement soit prévenu de cette visite et puisse se faire assister de la personne de son choix, alors que les membres de la commission peuvent accéder aux programmes informatiques et aux données ainsi qu'en demander la transcription. En raison tant de l'ampleur de ces pouvoirs de visite des locaux professionnels et d'accès aux documents de toute nature qui s'y trouvent que de l'imprécision des dispositions qui les encadrent, cette ingérence ne pourrait être regardée comme proportionnée aux buts en vue desquelles elle a été exercée qu'à la condition d'être préalablement autorisée par un juge. Toutefois, la faculté du responsable des locaux de s'opposer à la visite, laquelle ne peut alors avoir lieu qu'avec l'autorisation et sous le contrôle du juge judiciaire, offre une garantie équivalente à l'autorisation préalable du juge. Néanmoins, une telle garantie ne présente un caractère effectif que si le responsable des locaux ou le représentant qu'il a désigné à cette fin a été préalablement informé de son droit de s'opposer à la visite et mis à même de l'exercer.


(1) Cf. Cour EDH, 16 avril 2002, Société Colas Est et autres c/ France, n° 37971/97, Rec. 2002-III ; Cour EDH, 9 décembre 2004, Van Rossem c/ Belgique, n° 41872/98 ; Cour EDH, 16 octobre 2007, Wieser et Bicos Beteiligungen GmbH c/ Autriche, n° 74336/01 ; CJCE, 22 octobre 2002, SA Roquette Frères, aff. C-94/00, Rec. p. I-9001. Rappr. Cons. const., 29 décembre 1983, Loi de finances pour 1984, n° 83-164 DC, Rec. p. 67. (2) Cf. Cour EDH, 16 avril 2002, Société Colas Est et autres c/ France, n° 37971/97, Rec. 2002-III ; Cour EDH, 25 février 1993, Funke c/ France, n° 10588/83, A 256-A. (4) Rappr. Cour EDH, 16 avril 2002, Société Colas Est et autres c/ France, n° 37971/97, Rec. 2002-III ; Cour EDH, 25 février 1993, Funke c/ France, n° 10588/83, A 256-A ; Cons. const., 29 décembre 1983, Loi de finances pour 1984, n° 83-164 DC, Rec. p. 67 ; Cons. const., 27 décembre 1990, Loi sur la réglementation des télécommunications, n° 90-281 DC, Rec. p. 91 ; Cons. const., 19 janvier 1988, Loi sur les bourses de valeur, n° 87-240 DC, Rec. p. 28 ; Cons. const., 29 juillet 1998, Loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, n° 98-403 DC, p. 276. Cf. décision du même jour, Sté Pro Décor, n° 304301, inédite au Recueil.

Voir aussi