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Ariane Web: Conseil d'État 314796, lecture du 2 juin 2010

Analyse n° 314796
2 juin 2010
Conseil d'État

N° 314796
Publié au recueil Lebon

Lecture du mercredi 2 juin 2010



26-055-02-01 : Droits civils et individuels- Convention européenne des droits de l'homme- Droits garantis par les protocoles- Droit au respect de ses biens (art- er du premier protocole additionnel)-

Majoration de pension pour les titulaires ayant élevé au moins trois enfants (art. L. 18 du CPCMR) - 1) Notion de pension au regard de la conv. EDH - Pensions cristallisées et décristallisées - Inclusion - 2) Bien au sens de l'article 1er du protocole n° 1 à la conv. EDH - Inclusion.




En vertu de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR), les titulaires d'une pension ayant élevé au moins trois enfants ont droit à une majoration de cette pension. 1) Au regard des droits tirés des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) et de l'article 1er de son premier protocole additionnel, les sommes versées aux retraités ayant servi dans l'armée française, qu'elles aient été ou non cristallisées, ont le caractère de pensions. Par suite, les titulaires de pensions cristallisées peuvent prétendre à la majoration de pension pour enfants. 2) Le droit à majoration pour enfants n'est pas une prestation distincte de la pension de retraite mais un mode de calcul de celle-ci, destiné à en compléter le montant pour tenir compte des charges exposées par le pensionné qui a élevé au moins trois enfants. Ce droit constitue donc un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la conv. EDH. Les titulaires d'une pension revalorisée sur le fondement du II de l'article 68 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ne pourraient en être privés sans méconnaître ces stipulations, combinées avec celles de l'article 14 de la conv. EDH.





48-02-03-05 : Pensions- Pensions civiles et militaires de retraite- Pensions militaires- Avantages familiaux-

Majoration de pension pour les titulaires ayant élevé au moins trois enfants (art. L. 18 du CPCMR) - 1) a) Date à laquelle s'apprécie le droit à majoration - Date pouvant être différente de celle à laquelle naît le droit à pension (1) - b) Cas des combattants marocains (2) - 2) Notion de pension au regard de la conv. EDH - Pensions cristallisées - Inclusion - 3) Bien au sens de l'article 1er du protocole n° 1 à la conv. EDH - Inclusion (3) - Incompatibilité du seul critère de résidence avec ces stipulations, combinées avec l'article 14 de la conv. EDH (4) - Conséquence - Ouverture de ce droit aux titulaires d'une pension revalorisée sur le fondement de la loi de finances rectificative pour 2002.




En vertu de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR), les titulaires d'une pension ayant élevé au moins trois enfants ont droit à une majoration de cette pension. 1) a) Le droit à majoration pour enfants peut s'ouvrir à une date différente de celle à laquelle naît le droit à pension et ne se trouve pas définitivement fixé à cette dernière date. b) Si, selon le IV de l'article 68 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002, les conditions de réversion des pensions accordées aux ressortissants marocains sont déterminées en fonction de leur situation de famille au 1er janvier 1961, ces dispositions ne portent pas sur le droit à majoration pour enfants, qui n'a donc pas à être apprécié à cette date. 2) Au regard des droits tirés des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (conv. EDH) et de l'article 1er de son premier protocole additionnel, les sommes versées aux retraités ayant servi dans l'armée française, qu'elles soient ou non cristallisées, ont le caractère de pensions. Par suite, s'ils remplissent les conditions posées par l'article L. 18 du CPCMR, les titulaires de pensions cristallisées peuvent prétendre à la majoration de pension pour enfants au titre de la période au cours de laquelle ils les ont perçues, sous réserve des règles de prescription. 3) Le droit à majoration pour enfants n'est pas une prestation distincte de la pension de retraite mais un mode de calcul de celle-ci, destiné à en compléter le montant pour tenir compte des charges exposées par le pensionné qui a élevé au moins trois enfants. Ce droit constitue donc un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la conv. EDH. Ces stipulations, combinées avec celles de l'article 14 de la conv. EDH, font obstacle à ce que les titulaires d'une pension revalorisée sur le fondement du II de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 soient, à raison de leur seule nationalité, exclus de ce droit.


(1) Cf. 11 janvier 1985, Rodriguez, n° 56395, T. pp. 705-706. (2) Comp., pour le refus, fondé sur l'article 15 de la déclaration gouvernementale du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière, de majorer la pension d'un ressortissant algérien dès lors que ce dernier n'avait pas acquis le droit à majoration à la date à laquelle était né son droit à pension, 20 octobre 1972, Sieur Kenniche, n° 80519, p. 660. (3) Comp. excluant le droit de percevoir une pension de réversion des biens au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la conv. EDH, Section, 7 février 2008, Mme Baomar, n° 267744, p. 29 (dont la solution a été abandonnée par CE, Ass., 13 mai 2011, Mme M'Rida, n°316734, p. 211). (4) Rappr., sur l'incompatibilité avec ces stipulations du critère de résidence posé en matière de cristallisation, Assemblée, 30 novembre 2001, Ministre de la défense c/ Diop, n°s 212179 212211, p. 605.

Voir aussi