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Ariane Web: Conseil d'État 353782, lecture du 8 mars 2013

Analyse n° 353782
8 mars 2013
Conseil d'État

N° 353782
Publié au recueil Lebon

Lecture du vendredi 8 mars 2013



19-01-01-03 : Contributions et taxes- Généralités- Textes fiscaux- Opposabilité des interprétations administratives (art- L- A du livre des procédures fiscales)-

Portée - 1) Mécanisme donnant à l'administration fiscale un pouvoir réglementaire ou lui permettant de déroger à la loi - Absence - Mécanisme de garantie au profit du redevable - Existence - 2) a) Faculté d'un redevable, alors même que le juge de l'excès de pouvoir (1) a ultérieurement annulé l'acte par lequel cette interprétation était exprimée, d'opposer à l'administration une interprétation qui, dans les conditions prévues par l'article L. 80 A du LPF, était formellement admise par cette dernière - Existence - b) Faculté d'un redevable, s'agissant d'une imposition dont le fait générateur est postérieur à la date de l'annulation d'un acte renfermant une interprétation de la loi fiscale, de se prévaloir de cet acte - Absence - 3) Faculté du redevable d'invoquer une interprétation renfermée dans un acte qui, bien qu'illégal, n'a pas été annulé - Existence, aussi longtemps que l'administration n'a pas formellement abandonné cette interprétation - Conséquence - Faculté du redevable d'opposer à l'administration l'interprétation que celle-ci a formellement admise dans un tel acte, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation, aurait été annulé pour excès de pouvoir - Existence - 4) Interprétation de la loi fiscale dont peut se prévaloir le redevable sur le fondement de cet article - Interprétation dans son dernier état formellement accepté par l'administration (2) - Conséquence - Faculté du redevable de se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque, après qu'elle l'avait complétée ou modifiée par un deuxième acte, ce dernier a été annulé - Absence.




1) Les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF) n'ont ni pour objet ni pour effet de conférer à l'administration fiscale un pouvoir réglementaire ou de lui permettre de déroger à la loi, mais instituent un mécanisme de garantie au profit du redevable qui, s'il l'invoque, est fondé à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation de la loi formellement admise par l'administration, même lorsque cette interprétation ajoute à la loi ou la contredit. 2) a) Il en résulte, eu égard à l'objectif de sécurité juridique qu'elles poursuivent, qu'en dépit de l'effet rétroactif qui s'attache normalement à l'annulation pour excès de pouvoir, ces dispositions permettent à un redevable de se prévaloir à l'encontre de l'administration de l'interprétation qui, dans les conditions prévues par l'article L. 80 A, était formellement admise par cette dernière, alors même que serait ultérieurement intervenue l'annulation par le juge de l'acte, quel qu'il soit, par lequel cette interprétation avait été exprimée. b) En revanche, s'agissant d'une imposition dont le fait générateur est postérieur à la date de l'annulation d'un acte renfermant une interprétation de la loi fiscale, au sens et pour l'application de l'article L. 80 A du LPF, cette annulation a pour effet de priver le redevable de la possibilité de se prévaloir de cet acte au titre de la garantie que donne l'article L. 80 A. 3) Aussi longtemps que l'administration n'a pas formellement abandonné une interprétation, renfermée dans un acte qui, bien qu'illégal, n'a pas été annulé, celle-ci reste invocable, en tant que cet acte la renferme, sur le fondement de l'article L. 80 A. Il en résulte en particulier qu'un redevable peut opposer à l'administration l'interprétation que celle-ci a formellement admise dans un tel acte, quel qu'il soit, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation, aurait été annulé pour excès de pouvoir. 4) Les dispositions de l'article L. 80 A du LPF ne permettent de se prévaloir d'une interprétation de la loi fiscale que dans son dernier état formellement accepté par l'administration. Le redevable n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque, après qu'elle l'avait complétée ou modifiée par un deuxième acte, ce dernier a été annulé. En effet, les éléments de l'interprétation de la loi qui subsistent après l'annulation ne peuvent plus être regardés comme constituant l'interprétation de la loi formellement acceptée par l'administration, dès lors que celle-ci avait entendu compléter ou modifier cette interprétation par l'acte annulé. Il appartient à l'administration de faire connaître, le cas échéant, l'interprétation qu'elle entend donner à la loi après l'annulation opérée. Tant qu'une nouvelle interprétation n'a pas été exprimée, la loi seule régit la situation du contribuable.





54-06-07-005 : Procédure- Jugements- Exécution des jugements- Effets d'une annulation-

Conséquences de l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte renfermant une interprétation de la loi fiscale formellement admise par l'administration sur la mise en oeuvre du mécanisme de l'article L. 80 A du LPF (1) - 1) a) Faculté d'un redevable, alors même que le juge de l'excès de pouvoir a ultérieurement annulé l'acte par lequel cette interprétation était exprimée, d'opposer à l'administration une interprétation qui, dans les conditions prévues par l'article L. 80 A, était formellement admise par cette dernière - Existence - b) Faculté d'un redevable, s'agissant d'une imposition dont le fait générateur est postérieur à la date de l'annulation d'un acte renfermant une interprétation de la loi fiscale, de se prévaloir de cet acte - Absence - 2) Faculté du redevable d'invoquer une interprétation renfermée dans un acte qui, bien qu'illégal, n'a pas été annulé - Existence, aussi longtemps que l'administration n'a pas formellement abandonné cette interprétation - Conséquence - Faculté du redevable d'opposer à l'administration l'interprétation que celle-ci a formellement admise dans un tel acte, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation, aurait été annulé pour excès de pouvoir - Existence - 3) Interprétation de la loi fiscale dont peut se prévaloir le redevable sur le fondement de cet article - Interprétation dans son dernier état formellement accepté par l'administration (2) - Conséquence - Faculté du redevable de se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque, après qu'elle l'avait complétée ou modifiée par un deuxième acte, ce dernier a été annulé - Absence.




1) a) Eu égard à l'objectif de sécurité juridique qu'elles poursuivent, les dispositions de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales (LPF) permettent à un redevable, en dépit de l'effet rétroactif qui s'attache normalement à l'annulation pour excès de pouvoir, de se prévaloir à l'encontre de l'administration de l'interprétation qui, dans les conditions prévues par l'article L. 80 A, était formellement admise par cette dernière, alors même que serait ultérieurement intervenue l'annulation par le juge de l'acte, quel qu'il soit, par lequel cette interprétation avait été exprimée. b) En revanche, s'agissant d'une imposition dont le fait générateur est postérieur à la date de l'annulation d'un acte renfermant une interprétation de la loi fiscale, au sens et pour l'application de l'article L. 80 A du LPF, cette annulation a pour effet de priver le redevable de la possibilité de se prévaloir de cet acte au titre de la garantie que donne l'article L. 80 A. 2) Aussi longtemps que l'administration n'a pas formellement abandonné une interprétation, renfermée dans un acte qui, bien qu'illégal, n'a pas été annulé, celle-ci reste invocable, en tant que cet acte la renferme, sur le fondement de l'article L. 80 A. Il en résulte en particulier qu'un redevable peut opposer à l'administration l'interprétation que celle-ci a formellement admise dans un tel acte, quel qu'il soit, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation, aurait été annulé pour excès de pouvoir. 3) Les dispositions de l'article L. 80 A du LPF ne permettent de se prévaloir d'une interprétation de la loi fiscale que dans son dernier état formellement accepté par l'administration. Le redevable n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque, après qu'elle l'avait complétée ou modifiée par un deuxième acte, ce dernier a été annulé. En effet, les éléments de l'interprétation de la loi qui subsistent après l'annulation ne peuvent plus être regardés comme constituant l'interprétation de la loi formellement acceptée par l'administration, dès lors que celle-ci avait entendu compléter ou modifier cette interprétation par l'acte annulé. Il appartient à l'administration de faire connaître, le cas échéant, l'interprétation qu'elle entend donner à la loi après l'annulation opérée. Tant qu'une nouvelle interprétation n'a pas été exprimée, la loi seule régit la situation du contribuable.


(1) Cf., s'agissant de la recevabilité d'un recours pour excès de pouvoir contre une instruction administrative en matière fiscale, CE, Section, 4 mai 1990, Association freudienne et autres, n°s 55124 55137, p. 111 ; s'agissant de la recevabilité d'un tel recours contre une réponse ministérielle à une question écrite d'un parlementaire, lorsqu'elle comporte une interprétation par l'administration de la loi fiscale pouvant lui être opposée par un contribuable sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF, CE, 16 décembre 2005, Société Friadent France, n° 272618, p. 580. (2) Rappr., sur l'impossibilité pour un contribuable, dans le cas où l'administration revient sur une interprétation pour en limiter le champ d'application ou en subordonner le bénéfice à de nouvelles conditions, de se prévaloir d'une partie seulement d'une telle doctrine dont les éléments sont indissociables, CE, Section, avis, 20 octobre 2000, Mlle Bertoni, n° 222675, p. 448.

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