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Ariane Web: Conseil d'État 352402, lecture du 24 novembre 2014

Analyse n° 352402
24 novembre 2014
Conseil d'État

N° 352402
Publié au recueil Lebon

Lecture du lundi 24 novembre 2014



24-01-02-01-01-03 : Domaine- Domaine public- Régime- Occupation- Utilisations privatives du domaine- Droits à indemnisation de l'occupant-

Existence - 1) A raison de l'exploitation d'une activité dans le cadre d'un " bail commercial " ou sur le fondement d'assurances données par le gestionnaire du domaine quant au bénéfice des garanties liées à ce régime - Faute de la collectivité, un tel bail ne pouvant être conclu sur le domaine public - Existence - Consistance - Exploitant induit en erreur sur l'étendue de ses droits - Préjudices réparables - Dépenses exposées exclusivement dans la perspective d'une exploitation sous le régime des baux commerciaux et autres préjudices résultant directement de la faute - Limite - Fautes propres de l'exploitant - 2) A raison de la fin de l'exploitation pour cause de résiliation, sans faute de l'exploitant, du " bail commercial " illégalement conclu - Préjudices indemnisables (1) - a) Perte des bénéfices et dépenses exposées qui auraient dû être couvertes au terme de l'occupation, résultant d'une occupation conforme du domaine - Inclusion - b) Perte d'un fonds de commerce - i) Occupation du domaine en vertu de titres délivrés à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 - Inclusion - ii) Occupation en vertu de titres antérieurs à cette loi - Exclusion (2).




1) En raison du caractère précaire et personnel des titres d'occupation du domaine public et des droits qui sont garantis au titulaire d'un bail commercial, un tel bail ne saurait être conclu sur le domaine public. Lorsque l'autorité gestionnaire du domaine public conclut un " bail commercial " pour l'exploitation d'un bien sur le domaine public ou laisse croire à l'exploitant de ce bien qu'il bénéficie des garanties prévues par la législation sur les baux commerciaux, elle commet une faute de nature à engager sa responsabilité. Cet exploitant peut alors prétendre, sous réserve, le cas échéant, de ses propres fautes, à être indemnisé de l'ensemble des dépenses dont il justifie qu'elles n'ont été exposées que dans la perspective d'une exploitation dans le cadre d'un bail commercial ainsi que des préjudices commerciaux et, le cas échéant, financiers qui résultent directement de la faute qu'a commise l'autorité gestionnaire du domaine public en l'induisant en erreur sur l'étendue de ses droits. 2) a) Si, en outre, l'autorité gestionnaire du domaine met fin avant son terme au bail commercial illégalement conclu en l'absence de toute faute de l'exploitant, celui-ci doit être regardé, pour l'indemnisation des préjudices qu'il invoque, comme ayant été titulaire d'un contrat portant autorisation d'occupation du domaine public pour la durée du bail conclu. Il est par suite en droit, dès lors qu'aucune stipulation contractuelle n'y fait obstacle et sous réserve qu'il n'en résulte aucune double indemnisation, d'obtenir réparation du préjudice direct et certain résultant de la résiliation unilatérale d'une telle convention avant son terme, tel que la perte des bénéfices découlant d'une occupation conforme aux exigences de la protection du domaine public et les dépenses exposées pour l'occupation normale du domaine, qui auraient dû être couvertes au terme de cette occupation. b) En revanche, eu égard au caractère révocable et personnel, déjà rappelé, d'une autorisation d'occupation du domaine public, celle-ci ne peut donner lieu à la constitution d'un fonds de commerce dont l'occupant serait propriétaire. i) Si la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 a introduit dans le code général de la propriété des personnes publiques un article L. 2124-32-1 selon lequel un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l'existence d'une clientèle propre, ces dispositions ne sont, dès lors que la loi n'en a pas disposé autrement, applicables qu'aux fonds de commerce dont les exploitants occupent le domaine public en vertu de titres délivrés à compter de son entrée en vigueur. ii) Par suite, l'exploitant qui occupe le domaine public ou doit être regardé comme l'occupant en vertu d'un titre délivré avant cette date, qui n'a jamais été légalement propriétaire d'un fonds de commerce, ne peut prétendre à l'indemnisation de la perte d'un tel fonds.


(1) Cf. CE, 31 juillet 2009, Société Jonathan loisirs, n° 316534, T. p. 739. (2) Cf. CE, 28 avril 1965, Société X., p. 246 ; CE, Section, 21 décembre 1977, Ministre de l'économie et des finances c/ Société anonyme X, p. 522 ; CE, 6 décembre 1985, Mlle Boin-Favre, n° 44716, p. 353.

Voir aussi